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rieuses; car les brochures de cette espèce brûlent, et ne donnent point dé lumière. On comptoit sur la réunion de beaucoup de gens de marque, puissans par leur nom, leur crédit, leur opulence, sur les Volontaires, et sur la force des principes. Environ 40. Membres de ce Parti, réuni sous le titre de Société Patriotique, avoient présenté aux Etats de Brabant une Adresse, avec un Plan d'organisation pour une nouvelle Assemblée Nationale.

Ce Projet étoit celui de M. Vonck; Avocat, dont nous avons présenté l'esquisse et la critique. Bientôt l'on excità le Peuple contre cette Requête et contre les Signataires : pour perdre ces derniers, on se servit du moyen des scélérats, des Catilina, des Triumvirs, savõir, des listes de proscriptions: la multitude eût ainsi des points de mire, afin de diriger sa férocité à coup sûr.

Le 15, on commença à insulter quelques Proscrits ou adherens à leur cause; on prétend, ce que nous n'affirmons pas, mais que d'autres exemples notoires rendent vraisemblable, qu'on aiguisa la cupidité du Peuple autant que sa rage, en lui distribuant de l'argent. Le 16, on commença à casser les vitres de plusieurs maisons menacées; on finit par les dévaster et les piller. On rapporte que quelques-unes furent traitées à l'Angloise, c'est-à-dire, qu'on les démeubla, en jetant ensuite les effets dans le feu sans y toucher. Divers Propriétaires connus pa

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leur adhésion à la Requéte, furent en danger, maltraités, blessés, ou ne durent leur salut qu'à la fuite parmi ces derniers fut l'Avocat Vonck. Les Volontaires sur lesquels on avoit compté refusèrent le service: la seule Compagnie de M. Edouard IValkiers tint ferme et tira; mais sans succès : le Peuple demanda la suppression de cette Compagnie et la démission de son Chef; il obtint l'un et l'autre. Le 17, les désordres continuoient. M. Van der Noot parut, harangua le Peuple, lui fit, dit-on, distribuer 3000 florins. Les séditieux se dispersèrent, non sans assouvir leur rage sur quelques Volontaires qu'ils trouvèrent isolés. On demanda la tête de M. Valkiers; il se rendit aux Etats pour y donner sa démission; il en sortit sous l'escorte de M. Van der Noot, aux huées de la multitude, remercia sa Compagnie par une Lettre circulaire, et partit la même nuit avec son frère et sa sœur. Presque toutes ces violences ont été l'ouvrage des gens de rivière, surnommés les Capons, auxquels cependant s'étoient réunis nombre de petits Bourgeois. La défection des Volontaires prouve à quel point les Chefs du Parti d'Aremberg s'étoient fait illusion sur leurs ressources. On a accusé M. Van der Noot et d'autres Membres des Etats d'avoir conduit ces excès, qu'encourageoit, dit on encore, la Maîtresse même de ce Chef de la Révolution. On a vu ailleurs, et récemment, des femmes donner la preuve d'une ferocité non moins énergique, et danser sur des cadavres égorgés; mais ces imputations ne reposent encore que sur l'autorité de quelques Gazettes. Le calme n'a été rétabli que le 19, lorsque le Parti triomphant a vu ses Adversaires fugi

tifs et dispersés, et qu'il a cru, pour son intérêt et son honneur, devoir mettre fin à ee brigandage.

Les Déclamateurs, qui avoient promis tout succès aux Martyrs actuels de l'insanité populaire, dans la persua sion que la multitude leur étoit dévouée; ces Déclamateurs qui en même temps nous répétoient chaque jour que plus le Peuple commet de violences, plus il faut le chérir; que l'incendie, le pillage et l'assassinat sont l'exercice néces saire de sa liberté; enfin, qu'il n'y a point de milieu, ou à l'investir de tous les pouvoirs, ou à le rendre es clave, ne sont pas peu embarrassés maintenant d'expliquer le quiproquo déplorable de cette Ville. Il est aisé néanmoins d'en donner la solution, Voulezvous perdre l'Etat, la liberté et le Peuple, donnez une part active à celui-ci dans les contestations politiques: mêlez-le à un mouvement qui sera bientôt plus fort que lui et que vous comme dans sa fougue il n'est jamais que l'instrument des Chefs de factions, tôt ou tard illeur sacrifie et l'intérêt public et le sien propre, à moins que le long usage de la liberténeluiait appris à la respecter dans autrui, à vénérer religieusement les Lois, et à se former une vertu publique, qui disparoît même bientôt dans les Ré

publiques, lorsqu'une fois elles ont perdu

leurs mœurs.

Pour obvier au retour de ces affreux excès, pour se laver du reproche d'y avoir concouru, et pour dissiper les alarmes, les Etats ont rendu, le 19, l'Ordonnance suivante. Elle est d'une sévérité telle, qu'elle met le Brabant entier sous une Loi Martiale, à la discrétion de chaque Offensé.

Les trois Etats représentant le Peuple du Duché de Brabant, à tous ceux qui ces présentes verront, ou lire ouïront; Salut: faisons savoir. Comme la conservation du repos public doit être une des vues principales d'un pays bien policé, et que cependant ce repos se trouve en ce moment troublé extrêmement

par

des pillages de maisons, meubles et effets, et par d'autres violences et excès, si est-il que voulant y pourvoir le plus efficacement, Nous avons, de l'avis et à la délibération du Conseil Souverain de ce Duché ordonné et statué, comme Nous ordonnons et statuons par les présentes : »

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Art. I. Que tous ceux qui auront pillé quelque maison, de qui que ce puisse être, ou qui auront attenté de la piller par force ou menaces, seront punis de mort comme voleurs publics et perturbateurs du pays, quand même ils n'auroient point commis d'effraction de la maison ou demeure, ou qu'ils n'en auroient rien emporté."

II. Permettons à tous ceux qui seront ainsi insultés, ou dont on aura pris, ότι voulu prendre, par force ou par menaces, quelqu'argent, meubles ou effets, de se dé

fendres, et repousser la force par la force, même de tuer les aggresseurs, sans que pour ce ils seront responsables, ni actionnables, en quelque maniere que ce soit.

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III. Que tous les Bourgeois et inhabi tans, de quelqu'état ou condition qu'ils puissent être, nuls exceptés, ni réservés, aussitôt qu'ils s'apercevront de quelqu'attroupement ou insulte, fait ou commencé dans leur rue, quartier ou voisinage, devront s'armer et venir au secours de ceux qui seront atta qués ou menacés dans leurs maisons, demeures, ou Personnes, et empêcher, autant qu'il leur sera possible, tous les excès et désordres, saisir les malfaiteurs, les garder et délivrerà la Garde la plus voisine, laquelle les délivrera ensuite aux Officiers de Justice."

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IV. Que ceux qui resteront en faute de venir ainsi au secours, encourront l'amende de cent florins.

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V. Qu'en cas de résistance à ceux qui viendront au secours des maisons ou Personnes attaquées, ils pourront de même repousser la force par la force, et les tuer * sans pour ce méfaire, ni être recherché en manière quelconque. »

" VI. Que Personne ne pourra se présenter ou attrouper près des maisons ou endroits où ces dé ordres et exces se commettent, que pour les empêcher, à peine d'encourir pareille amende de cent florins.

« VII. Que les parens seront responsables pour leurs enfans, les maîtres et inaîtresses pour leurs domèstiques, au regard desdites amendes pécuniaires; et que ceux qui ne seront pas en état de les payer, seront punis

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