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fuppofer ce qui eft en queftion, & conféquemment raisonner d'après une pétition de principe.

Cet axiome, pris dans le premier sens, n'a rien que de jufte; il empêche, comme dit le Brun, que l'on ne faffe remonter la Repréfentation au deffus du défunt, lorfqu'il laiffe des collatéraux inférieurs, ou, pour mieux dire, tout fon effet fe réduit à ôter aux enfans le droit de prendre part à une fucceffion dont leur père eût été exclus.. Mais dans le cas dont nous parlons, il ne s'agit pas de faire rétrograder la Représentation, ni de donner à un fils plus de droits que n'en auroit eus fon père; il eft feulement question de favoir fi les héritiers de deux lignes différentes peuvent chacun remonter à l'origine de la leur, & prendre dans la fucceffion tout ce qu'y auroient pris leurs auteurs refpectifs.

La feconde raifon de Guyné n'eft pas plus fo lide que la première. Le privilége du double lien n'a lieu, même dans les coutumes de Répréfentation infinie, qu'entre les représentans des frères & fours du défunt. C'eft ce qu'établissent Valin fur la coutume de la Rochelle, Mignot en fon traité du double lien, & M. Garran de Coulon dans le répertoire, à l'article DOUBLE LIEN. Or, on verra ciaprès, que les coutumes muertes fur le partage en deux lignes, ne peuvent le recevoir qu'au défaut des frères, des fœurs & de leurs defcendans. Ainfi point d'incompatibilité entre le privilége du double lien & l'effet que nous voulons donner ici à la Re présentation infinie.

Il y a d'ailleurs des raifons particulières pour ad mettre cet effet dans l'une des coutumes dont Guyne prétend l'exclure; c'eft celle de Tours. 1°. Elle a le même efprit & fouvent les mêmes difpofitions que celle de Lodunois; il faut donc les expliquer Fune par l'autre ; & puifque la fente des meubles

& acquêts en deux lignes eft textuellement prescrite dans la feconde, on doit auffi la reconnoître dans la première. 2°. La coutume de Tours elle-même, quoiqu'elle n'établiffe pas le principe général de cette fente, l'admet dans une efpèce très-rigoureuse, & par conféquent fuppofe qu'elle a lieu dans les autres cas. Après avoir, par l'article 310, donné aux père & mère nobles ou roturiers, les meubles & acquêts de leurs enfans, elle dit, article 312, que s'il n'y a ni père ni mère, les aïeuls des deux côtés partagent chacun la moitié des mêmes biens, & ajoute, que s'il n'y avoit aïeul ou aïeule que d'un côté, ledit aïeul ou aïeule ne prendra que la ❤ moitié desdits meubles & acquêts, & les héritiers collatéraux de l'autre côté & ligne auront » l'autre moitié, & payeront les dettes comme deffus". Qui ne fent, dit l'additionnaire de le Brun, l'argument fans réplique qui réfulte de ces termes? Si des collatéraux d'une ligne ont droit de partager les meubles & acquêts avec l'aïeul ou l'aïeule qui fera dans l'autre ligne, à plus forte raison auront-ils droit de les partager, s'il n'y a dans l'autre ligne que des collatéraux.

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Ç'eft la conféquence qu'en tire Pallu dans fon commentaire fur la coutume de Tours, & il l'appuye d'un arrêt du 10 juin 1606, par lequel il a été jugé, fuivant M. le Prêtre, » qu'en ladite coutume les meubles & acquêts d'un défunt fe partagent entre fes héritiers collatéraux par moitié, & s'en baille une moitié aux héritiers paternels & l'autre moitié aux héritiers maternels bien les uns foient plus éloignés en degré que les autres, & de même qu'ès autres coutumes les propres fe » baillent paterna paternis, materna maternis. Cat » au fait dudit arrêt, les uns étoient éloignés du dé » funt de la fucceffion duquel il s'agiffoit, jufqu'au cinquième degré, les autres jufqu'au feptième «

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que

On voit dans Peleus, queft. 136 & 139, que la même chofe a été jugée précédemment par deux fentences du bailli de Tourraine, des 10 septembre 1534 & 3 décembre 1588, & par un arrêt du 24 février 1600.

La coutume de Poitou ne contient point de difpofition dont on puiffe inférer qu'elle adopte le partage en deux lignes, fi ce n'eft peut-être l'article 358, par lequel le droit de retraire les acquêts eft accordé aux parens paternels & maternels, chacun pour moitié; & cependant on a jugé dans cette coutume, par un arrêt folennel du 2 juin 1657, rapporté au journal des audiences, que ce partage devoit y avoir lieu.

la

Cette jurifprudence a été pareillement étendue à la coutume du Grand-Perche. Il y en a un arrêt du 24 février 1682, rapporté au journal des audiences fous la date du 2 février.

Enfin, on a jugé de même pour la coutume de Bourgogne, & cela par deux arrêts très - précis. Voici l'efpèce du premier, tiré des notes de M. Bégat fur l'article 19 du chapitre 7 de cette coutume.

N. RANVIARD.

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La fucceffion d'Anne Ranviard étoit demandée par Pierre Billard, fon oncle maternel. Il étoit en effet fon plus proche héritier; mais, d'un côté, les enfans de Marie fa fœur, & de l'autre, Jean & Pernot

Ranviard, coufins paternels de la défunte, prétendoient s'égaler à l'oncle maternel, comme repréfentant leurs père & mère. Les Ranviard fou tenoient même que le partage de la fucceffion fe devoit faire par moitié entre la ligne paternelle & la ligne maternelle, & le parlement de Dijon le jugea de la forte par arrêt du 20 décembre 1555.

Le fecond arrêt eft plus récent. Il a été rendu en la grand'chambre du parlement de Paris le 20 juin 1727, au rapport de M. Vienne. Voici l'effentiel de la généalogie des parties.

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Il s'agiffoit de favoir à qui devoit appartenir la terre de Longepierre, qui étoit un acquêt dans la perfonne de Marie - Elifabeth Raince. ClaudeJofeph Raince & conforts, fes cousins paternels la prétendoient en entier, fur deux moyens; 1°. parce qu'ils étoient, eux & la défunte, enfans de frères germains, & conféquemment en vertu da privilége de la double ligne, reçu en Bourgogne par l'article 20 du chapitre 7 de la coutume: 20 parce qu'en tout cas ils étoient les plus proches héritiers de la dame de Longepierre, dont ils étoient parens au quatrième degré, au lieu que les coufins maternels n'étoient qu'au cinquième. Ces derniers foutenoient au contraire, 1°. que le privilége de la double ligne ne pouvoir leur être opposé, parce

de la

que la défunte & eux étoient pareillement defcendus de frères germains : 2°. qu'à l'égard de la proximité elle étoit égale de leur côté, parco qu'ils repréfentoient Helene Huot leur mère, laquelle auroit été au même degré que les paternels,

elle avoit furvécu. Sur ces raifons, arrêt par lequel les acquêrs fitués en Bourgogne font adjugés pas moitié, tant aux parens paternels qu'aux maternels. Nous ne rapportons ces deux dernières décifions, que pour faire voir combien on eft perfuadé. que le partage des meubles & acquêts en deux lignes eft conforme à l'efprit de toutes les coutumes de Représentation infinie; car, du refte, elles font fauffes par rapport à la coutume de Bourgogne, qui a là-deffus des principes particuliers. M. Bouhier le démontre parfaitement,

On le rappelle que cette loi municipale n'ac corde le bénéfice de la Repréfentation infinie qu'à ceux dont l'auteur eût été en pareil degré aves celui de la ligne & branche avec qui ils veulent fuccéder. Il réfulte évidemment de ces termes, que l'héritier le plus proche ne peut jamais avoir dans une autre ligne que la fienne de concurrent qui ne foit au même degré que lui; ou, ce qui eft la même chofe, que la Repréfentation ne peut jamais avoir lieu pour rapprocher un parent maternel du degré d'un parent paternel plus proche & vice versa. Voilà, cómme on le voit, le fyfteme de Guyné adopté dans toute fon étendue.

Il eft vrai que l'auteur du traké des partages par fouches, interprète tout autrement la coutume de Bourgogne. Il nie que dans le texte cité, être de la ligne & branche, fignifie être de la même ligne & de la même branche. Il prétend que fi la coutume avoit exigé l'identité de la branche comme celle du degré, elle ne l'auroit pas marqué aves

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