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main, vertueux et chéri, une nation toute entière a été soulevée par la seule force de l'opinion. La plus ancienne et la plus paissante monarchie de l'Europe a succombé sous un système philosophique, dont les principes, applicables à tous les peuples, menacent tous les gouvernemens. Car, il n'est plus possible de se le dissimuler: le plan de la Révolution française embrasse l'Univers: toutes les nations sont appelées à jouir de ses bienfaits, ou à partager ses désas

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Jusqu'à présent, ce système n'a pas en sa faveur, le suffrage de l'expérience. Quel a été le prix de ces fleuves de sang qui ont coulé sur les échafauds et dans les combats? qu'ont produit neuf ans de pillage, de sacriléges, de proscriptions, de guerres civiles et étrangères? Il est vrai que la France a reculé ses frontières, et que la terreur de ses armes a forcé plusieurs nations à subir le joug de la liberté révolutionnaire. Mais tandis qu'elle triomphe au dehors, et qu'elle donne la loi à l'Europe étonnée, au dedans elle gémit sous la plus dure et la plus abjecte servitude. Les révolutions ont enfanté les révolutions; avec les législatures, les cons

titutions se sont succédé; et après tant d'essais, la nation française attend encoré ce bonheur tant promis, et si chèrement acheté.

Et quand on pourroit se persuader, comme sont réduits à le dire les apologistes de la Révolution, que la postérité recueillera le fruit des crimes et des malheurs de la géné-' ration présente, ce succès tardif absondroitil les Novateurs des maux effroyables auxquels ils nous ont condamnés ?

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Mais vainementils en appellent à l'avenir La Révolution ne promet à nos descendans que ce qu'elle nous a donné. L'état actuel de la France est l'effet naturel et néces saire de son esprit et de ses principes. Tant que subsisteront ces principes et cet esprit, . les lois demeureront sans force, les passions sans frein, les propriétés sans garantie. Partout où ils s'établiront, ils porteront avec eux l'anarchie, le brigandage et l'immoralité.

Pour se convaincre de cette vérité, à laquelle chaque jour fournit une nouvelle preuve, il ne faudroit, ce semble, qu'ouvrir les yeux, et considérer ce qui se passe, nonseulement en France, mais dans les provinces

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belgiques, dans la Hollande, en Italie, sur les bords du Rhin, dans les Cantons. helvétiques, par-tout enfin où ont pénétré les armées, et la doctrine encore plus redoutable des Français,cg no Enang 1 sió setcipol

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Pari quelle fatalité, ou plutôt, par quel terrible jugement du Ciel sur l'Europe, les leçons que tant de peuples ont données l'un après l'autre, ont-elles été perdues pour leurs voisins? comment se trouve-t-il encore desi esprits assez prévenus pour ne pas voir que la Révolution française attaque à-la-fois tous les cultes, tous les gouvernemens, toutes les propriétés? Que l'éclat de tant de victoires ait imposé à l'opinion publique, qu'aux yeux du vulgaire la gloire des conquérans ait couvert l'infamie des législateurs, et que de grands crimes ayent été annoblis par de grands succès, je n'en suis pas étonné: mais cer qu'il y a d'étrange et de déplorable, c'est de rencontrer dans toute l'Europe des hommes éclairés d'ailleurs, qui détestant les crimes de notre Révolution, se persuadent encore que les principes spéculatifs qui en sont la base n'ont rien que de conforme au droit naturel, et à la saine politique; qu'ils ne sont devenus

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funestes à la France, que par l'abus qu'en a fait une nation vive et inconsidérée; et qu'il sera facile aux autres peuples de profiter de nos lumières et de nos fautes, pour s'arrêter au point où la liberté dégénère en licence.

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Laissons donc les faits de côté, et n'envisageons la Révolution française que dans ses principes spéculatifs. La Déclaration des droits de l'homme et du citoyen publiée par la première assemblée nationale, en est le code fondamental. Or, c'est dans cette fameuse déclaration que le peuple a puisé les notions immorales et séditieuses qui l'ont porté aux plus coupables excès: c'est au nom, et en exécution de ces droits prétendus, qu'ont été violés sans pudeur tous les droits de la religion, de la justice et de l'humanité: ce n'est point le caractère national qui a dirigé vers le crime les principes de la Révolution; ce sont les principes de la Révolution qui ont perverti, et totalement oblitéré le caractère national. Dans toute autre contrée, ce ferment empoisonné eût causé autant, et peut-être plus de ravages; car là licence et l'anarchie ne sont pas de simples abus, ce sont les moyens

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nécessaires, et les conséquences inévitables du système révolutionaire. Que les peuples ne se flattent donc pas de pouvoir composer avec la Révolution française: il faut, ou la recevoir avec tous les forfaits qui ont ensanglanté et déshonoré la France, ou repousser au loin les dogmes meurtriers à la faveur desquels elle s'y est établie.

Voilà ce que je me propose de prouver dans cet ouvrage que j'intitule: Défense de l'ordre social, parce que la réfutation des principes de la Révolution mettra dans tout leur jour les vérités antiques et solennelles sur lesquelles repose toute l'économie politique.

Après quelques réflexions générales sur la société civile, et sur les gouvernemens, je discuterai les principes fondamentaux de la Révolution, la liberté, l'égalité, la souveraineté du peuple, le droit d'insurrection. J'examinerai ensuite quels sont les titres véritables, les droits et les limites de la puissance souveraine. Je parlerai de la Religion considérée dans ses rapports avec l'ordre social. Et pour suivre la Révolution à ses différentes époques, je remonterai à la Constitution décrétée en 1791, et je fi

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