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plutôt il est encore malheureux; mais il ne le sera pas longtemps; nous en faisons le serment.

» Nous avons détruit le pouvoir exécutif.... Non; dites le pouvoir ministériel; et c'est lui qui détruisait, qui souvent dégradait le pouvoir exécutif : le pouvoir exécutif nous l'avons éclairé en lui montrant ses véritables droits, et surtout nous l'avons ennobli en le faisant remonter à la véritable source de sa puissance, la puissance du peuple.

» Il est maintenant sans force.... Contre la constitution et la loi, cela est vrai; mais en leur faveur il sera plus puissant qu'il ne le fut jamais.

» Le peuple s'est armé.... Oui, pour sa défense; il en avait besoin. Mais dans plusieurs endroits il en est résulté des malheurs.... Peut-on les reprocher à l'Assemblée nationale? Peut-on lui imputer des désastres dont elle gémit qu'elle a voulu prévenir, arrêter par toute la force de ses décrets, et que va faire cesser sans doute l'union désormais indissoluble entre les deux pouvoirs, et l'action irrésistible de toutes les forces nationales?

» Nous avons passé nos pouvoirs... La réponse est simple : nous étions incontestablement envoyés pour faire une constitution; c'était le vou, c'était le besoin de la France entière: or, était-il possible de la créer cette constitution, de former un ensemble même imparfait de décrets constitutionnels, sans la plénitude des pouvoirs que nous avons exercés? Disons plus; sans l'Assemblée nationale la France était perdue; sans le principe qui soumet tout à la pluralité des suffrages libres, et qui fait tous nos décrets, il est impossible de concevoir une Assemblée nationale; il est impossible de concevoir, nous ne disons pas une constitution, mais même l'espoir de détruire irrévocablement le moindre des abus. Ce principe est d'éternelle vérité; il a été reconnu dans toute la France; il s'est reproduit de mille manières dans ces nombreuses adresses d'adhésion qui rencontraient sur toutes les routes cette foule de libelles où l'on nous reproche d'avoir excédé nos pouvoirs. Ces adresses, ces félicitations, ces hommages, ces sermens patriotiques; quelle confirmation des pouvoirs que l'on voulait nous contester!

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Tels sont, Français, les reproches qu'on fait à vos représentans dans cette foule d'écrits coupables où l'on affecte le ton d'une douleur citoyenne. Ah! vainement on s'y flatte de nous décourager; notre courage redouble; vous ne tarderez pas à en sentir les effets.

» L'Assemblée va vous donner une constitution militaire qui, composant l'armée de soldats citoyens, réunira la valeur qui défend la patrie, et les vertus civiques qui la protégent sans l'effrayer.

» Bientôt elle vous présentera un système d'impositions qui ménagera l'agriculture et l'industrie, qui respectera enfin la liberté du commerce; un système qui, simple, clair, aisément conçu de tous ceux qui paient, déterminera la part qu'ils doivent, rendra facile la connaissance si nécessaire de l'emploi des revenus publics, et mettra sous les yeux de tous les Français le véritable état des finances, jusqu'à présent labyrinthe obscur où l'œil n'a pu suivre la trace des trésors de l'Etat.

>> Bientôt un clergé citoyen, soustrait à la pauvreté comme à la richesse, modèle à la fois du riche et du pauvre, pardonnant les expressions injurieuses d'un délire passager, inspirera une confiance vraie, pure, universelle, que n'altérera ni l'envie qui outrage, ni cette sorte de pitié qui humilie; il fera chérir encore davantage la religion; il en accroîtra l'heureuse influence par des rapports plus doux et plus intimes entre les peuples et les pasteurs, et il n'offrira plus le spectacle, que le patriotisme du clergé luimême a plus d'une fois dénoncé dans cette Assemblée, de l'oisiveté opulente et de l'activité sans récompense.

» Bientôt un système de lois criminelles et pénales, dictées par la raison, la justice, l'humanité, montrerá jusque dans la personne des victimes de la loi le respect dû à la qualité d'homme, respect sans lequel on n'a pas le droit de parler de morale.

» Un code de lois civiles, confié à des juges désignés par votre suffrage, et rendant gratuitement la justice, fera disparaître toutes ces lois obscures, compliquées, contradictoires, dont l'incohérence et la multitude semblaient laisser même à un juge intègre le droit d'appeler justice sa volonté,

son erreur, quelquefois quelquefois son ignorance. Mais jusqu'à ce moment vous obéirez religieusement à ces mêmes lois, parce que vous savez que le respect pour toute loi non encore révoquée est la marque distinctive du vrai citoyen.

» Enfin, nous terminerons nos travaux par un code d'instruction et d'éducation nationale qui mettra la constitution sous la sauvegarde des générations naissantes; et, faisant passer l'instruction civique par tous les degrés de la représentation, nous transmettrons dans toutes les classes de la société les connaissances nécessaires au bonheur de chacune de ces classes, en même temps qu'à celui de la société

entière.

>>

Voyez, Français, la perspective de bonheur et de gloire qui s'ouvre devant vous! Il reste encore quelques pas à faire, et c'est où vous attendent les détracteurs de la révolution. Défiez-vous d'une impétueuse vivacité; redoutez surtout les violences, car tout désordre peut devenir funeste à la liberté. Vous chérissez cette liberté vous la possédez maintenant; montrez-vous dignes de la conserver. Soycz fidèles à l'esprit, à la lettre des décrets de vos représcutans, acceptés ou sanctionnés par le roi : distinguez soigneusement les droits abolis sans rachat, et les droits rachetables, mais encore existans; que les premiers ne soient plus exigés, mais que les seconds ne soient point refusés. Songez aux trois mots sacrés qui garantissent ces décrets; la nation, la loi, le roi la nation, c'est vous; la loi, c'est encore vous, c'est votre volonté; le roi, c'est le gardien de la loi. Quels que soient les mensonges qu'on prodigue, comptez sur cette union. C'est le roi qu'on trompait; c'est vous qu'on trompe maintenant, et la bonté du roi s'en afflige; il veut préserver son peuple des flatteurs qu'il a éloignés du trône; il en défendra le berceau de son fils, car, au milieu de vos représentans, il a déclaré qu'il faisait de l'héritier de la couronne le gardien de la constitution.

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Qu'on ne vous parle plus de deux partis; il n'en est qu'un; nous l'avons tous juré; c'est celui de la liberté. Sa victoire est sûre, attestée par les conquêtes qui se multiplient tous les jours. Laissez d'obscurs blasphémateurs pro

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diguer contre nous les injures, les calomnies; pensez seulement que s'ils nous louaient la France serait perdue. Gardezvous surtout de réveiller leurs espérances par des fantes, par des désordres, par l'oubli de la loi! Voyez comme ils triomphent de quelques délais dans la perception de l'impôt ! Ah! ne leur préparez pas une joie cruelle! Songez que cette dette.... Non, ce n'est plus une dette; c'est un tribut sacré, et c'est la patrie maintenant qui le reçoit pour vous, pour vos enfans; elle ne le laissera plus prodiguer aux déprédateurs qui voudraient voir tarir pour l'Etat le trésor public, maintenant tari pour eux; ils aspiraient à des mallicurs qu'a prévenus, qu'a rendus impossibles la bonté magnanime du roi. Français, secondez votre roi par un saint et immuable respect pour la loi ! Défendez contre eux son bonheur, ses vertus, sa véritable gloire! Montrez qu'il n'eut jamais d'autres ennemis que ceux de la liberté! Montrez que pour elle et pour lui votre constance égalera votre courage; que pour la liberté, dont il est le garant, on ne se lasse point, on est infatigable! Votre lassitude était le dernier espoir des ennemis de la révolution : ils le perdent; pardonnez-leur d'en gémir, et déplorez, sans les haïr, ce reste de faiblesse, toutes ces misères de l'humanité! Cherchons, disons même ce qui les excuse. Voyez quel concours de causes a dû prolonger, entretenir, presque éterniser leur illusion: eh! ne faut-il pas quelque temps pour chasser de sa mémoire les fantômes d'un long rêve, les rêves d'une longue vie? Qui peut triompher en un moment des habitudes de l'esprit, des opinions inculquées dans l'enfance, entretenues par les formes extérieures de la société, longtemps favorisées par la servitude publique, qu'on croyait éternelle, chères à un genre d'orgueil qu'on imposait comme un devoir, enfin mises sous la protection de l'intérêt personnel, qu'elles flattaient de tant de manières! Perdre à la fois ses illusions, ses espérances, ses idées les plus chéries, une partie de sa fortune, est-il donné à beaucoup d'hommes de le pouvoir sans quelques regrets, sans des efforts, sans des résistances d'abord naturelles, qu'ensuite un faux point d'honneur s'impose quelquefois à lui-même? Eh! si dans cette classe, naguère si

favorisée, il s'en trouve quelques-uns qui ne peuvent se faire à tant de pertes à la fois, soyez généreux; songez que dans cette même classe il s'est trouvé des hommes qui ont osé s'élever à la dignité de citoyens, intrépides défenseurs de vos droits, et dans le sein même de leur famille opposant à leurs sentimens les plus tendres le noble enthousiasme de la liberté.

» Plaignez, Français, les victimes aveugles de tant de déplorables préjugés; mais sous l'empire des lois que le mot vengeance ne soit plus prononcé. Courage, persévérance, générosité, les vertus de la liberté, nous vous les demandons au nom de cette liberté sacrée, seule conquête digne de l'homme, digne de vous, par les efforts, par les sacrifices que vous avez faits pour elle, par les vertus qui se sont mêlées aux malheurs inséparables d'une grande révolution ne tardez point; ne déshonorez point le plus bel ouvrage dont les annales du monde nous aient transmis la mémoire. Qu'avez-vous à craindre? Rien; non, rien, qu'une funeste impatience : encore quelques momens... C'est pour la liberté! Vous avez donné tant de siècles au despotisme!!! Amis, citoyens, une patience généreuse au lieu d'une patience servile au nom de la patrie; vous en avez une maintenant au nom de votre roi; vous avez un roi; il est à vous; non plus le roi de quelques milliers d'hommes, mais le roi des Français, de tous les Français! Qu'il doit maintenant mépriser le despotisme! Qu'il doit le hair! Roi d'un peuple libre, comme il doit reconnaître l'erreur de ces illusions mensongères qu'entretenait sa cour, qui se disait son peuple; prestiges répandus autour de son berceau, enfermés comme à dessein dans l'éducation royale, et dont on a cherché dans tous les temps à composer l'entendement des rois, pour faire des erreurs de leurs pensées le patrimoine des cours! Il est à vous: qu'il nous est cher! Ah! depuis que son peuple est devenu sa cour, lui refuserezvous la tranquillité, le bonheur qu'il mérite? Désormais qu'il n'apprenne plus aucune de ces scènes violentes qui ont tant affligé son cœur ; qu'il apprenne au contraire que l'ordre renaît; que partout les propriétés sont respectées, défendues; que vous recevez, que vous placez sous l'égide des

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