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Depuis un mois entier, c'est le silence même.... Oh! je saurai pourquoi nous changeons de systême. Il ne sera pas dit que nous nous ennuîrons

Sans que de notre ennui nous sachions les raisons...
(Faisant quelques pas pour entrer chez Sidney, et puis
revenant.)

Allons.... J'allois me faire une belle querelle !
Il m'a bien défendu d'entrer sans qu'il appelle.
Il n'a point amené seulement un laquais.
Il faut qu'en ce désert je sois tout, désormais,
Et qu'un valet-de-chambre ait la peine de faire
Le service des gens, outre son ministere!

A la chienne de vie !... Encor si dans ces bois,
Pour se désennuyer, on voyoit un minois,
Certain air quelque chose, enfin, dont, au passage,
On pût, avec honneur, meubler son hermitage,
On prendroit patience, on auroit un maintien ;
Mais rien n'existe ici.... ce qui s'appelle rien !
C'est pour un galant homme un pays de famine....
J'ai pourtant entrevu certaine Mathurine,

Fille du jardinier, gentille; mais cela

M'a l'air si sot, si neuf.... Ah! parbleu! la voilà....

SCENE I I.

MATHURINE, DUM O N T.

BONJOUR

DUMON T.

(Mathurine fait beaucoup de révérences. Y ON JOUR, ma belle enfant !... Point de cérémonie, Approchez.... Avez-vous honte d'être jolie? Pourquoi cette fougeur et cet air d'embarras ?

Monsieur....

MATHURINE.

DUMON T.

Ne craignez rien. Où portiez-vous vos pas?

MATHURINE.

Monsieur; je vous cherchois.

DUMONT, à part.

Ceci change de note!

Me chercher !.... Mais, vraiment, elle n'est pas si

sotte!

MATHURINE.

Vous êtes notre maître ?

DUMONT.

A-peu-près... Mais voyons.

Comme au meilleur ami, contez-moi vos raisons?

MATHURINE.

Pour une autre que moi, Monsieur, je suis venue.

DUMON T.

Oh je vous vois pour vous.

MATHURINE.

Une Dame inconnue,

Depuis quatre ans entiers, toujours dans le chagrin, Demeure en ce pays, dans un château voisin.

DUMONT.

Achevez; dites-moi, que veut cette inconnue?
MATHURINE.

Vous voudrez l'obliger, dès que vous l'aurez vue.
Je ne sais quel service elle espere de vous;
Mais si-tôt qu'elle a su que vous étiez chez nous,
J'étois près d'elle alors, j'ai remarqué sa joie,
Et si je viens ici, c'est elle qui m'envoie

Vous demander, Monsieur, un moment d'entretien.
Elle vous croit trop bon pour lui refuser rien.
DUMONT, à part.

Des avances !... Oh! oh! le monde se renverse!.... On a raison, l'aisance est l'ame du commerce....

(A Mathurine.)

Oui, qu'elle se présente.... Au reste, elle a bien fait
De vous donner en chef le soin de son projet....
Quel mérite enfoui dans une terre obscure!
J'admire les talens que donne la nature !

Déja dans l'ambassade! Auroit on mieux le ton
Et l'air mystérieux de la profession

Quand on auroit servi vingt petites-maîtresses,
Et de l'art du message épuisé les finesses?

Mais ce rôle pour vous, ma fille, est un peu vieux,
Votre âge en demande un que vous rempliriez mieux
Et, sans négocier pour le compte des autres,
Vous devriez n'avoir de secrets que les vôtres.

MATHURINE.

Je ne vous entends point.

(A part.)

DUMONT.

Je vous entends bien, moi !...

Ma foi je la prendrois, si j'étois sans emploi....
(A Mathurine.)

Tenez; je ne veux point tromper votre franchise,
Monsieur est là-dedans : vous vous êtes méprise.
Je ne suis qu'en second; mais cela ne fait rien,
Je parlerai pour vous, et l'affaire ira bien.
C'est un consolateur de Beautés malheureuses,
Qui fait, quand il le veut, des cures merveilleuses
MATHURINE.

A tout autre qu'à lui ne dites rien, sur-tout !....
On vient.... Chut! c'est mon pere,

DUMONT,

à part.

Oh! des peres par-tout.

SCENE III.

HENRI, DUMONT, MATHURINE..

HENRI, apportant un paquet de lettres, et appercevant: Mathurine

AH!

H! ah! c'est trop d'honneur, Monsieur, pour notre fillc....

DUMONT.

Vraiment, Maître Honri, je la trouve gentille A

HENRI.

Ça ne dit pas grand'chose.

DUMON T.

Oh! que cela viendra,

Le tems et ton esprit.... Mais que portes-tu là ?

HENRI, lui donnant les lettres.

Un paquet, qu'un courier m'a reinis à la porte.

Et qu'est-il devenu?

DUMON T.

HENRI.

Bon le diable l'emporte,

Et ne le renverra que dans trois jours d'ici.

DUMONT.

(A Henri et à Mathurine.)

J'entends, je crois, mon maître... Oui; sortez, le

voici.

(Henri et Mathurine sortent.)

SCENE I V.

SIDNEY, entrant en lisant bas quelques papiers;

DUMON T.

DUMON T.

SEROIS-JE, Monsieur, ( cela sans conséquence, Et sans prétendre après gêner votre silence) Vous présenter deux mots d'interrogation? Comme j'aurois à prendre une précaution,

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