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J'ai réfléchi.... D'ailleurs, l'inquiétude....

Et puis de certains bruits sur votre solitude....

SIDNEY.

Quoi! que t'a-t-on dit? qui?

DUMONT.

Je ne cite jamais.

Il suffit qu'à vous voir triste dans cet excès,
Et changé, tout à coup, de goût et de génie,
On vous croiroit brouillé, Monsieur, avec la vie.
Vous ne venez, dit-on, ici vous enfoncer

Que pour vous y laisser lentement trépasser

SIDNEY.

Où prends-tu cette idée ?

DUMONT.

Il est vrai qu'elle est folles

Mais la précaution n'est pas un soin frivole.

La vie est un effet, dont je fais très-grand cas,
Et j'y veille pour vous, si vous n'y veillez pas ?
SIDNE Y.

Dumont, à ce propos, s'aime donc bien au monde ?

DUMON T.

Moi! Monsieur? Mon projet, si le Ciel le seconde,

Est de vivre content jusqu'à mon dernier jour.
On ne vit qu'une fois; et, puisque j'ai mon tour,
Tant que je le pourrai, je tiendrai la partie.
J'aurois été Héros, sans l'amour de la vie ;
Mais dans notre famille on se plaît ici-bas.
Vous savez que des goûts on ne dispute pas ?
Mon pere et mes ayeux, dès avant le déluge,
Etoient dans mon systême, autant que je le juge,
Et mes futurs enfans tant gredins que Seigneurs,
Seront du même goût, ou descendront d'ailleurs.
Les Grands ont le brillant d'une mort qu'on publie;
Nous autres bonnes gens, nous n'avons que la vie;
Nous avons de la peine, il est vrai; mais, enfin,
Aujourd'hui l'on est mal, on sera mieux demain:
En quelque état qu'on foit, il n'est rien tel que d'être !
SIDNEY.

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Laisse-là ton sermon, et va porter ma lettre.

DUMONT.

J'en suis fâché, Monsieur, cela ne se peut pas

SIDNEY.

De vos petits propos, à la fin, je suis las.

J'aime assez, quand je parle, à voir qu'on obéisse;
Et quand un valet fat montre quelque caprice
Je sais congédier.

DUMONT, à part.

Ayez des sentimens ;

Voilà tout ce qu'on gagne à trop aimer les gens ! Est-ce pour mon plaisir (j'enrage, quand j'y pense !) Que je demeure ici? La belle jouissance!

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SIDNEY, à Dumont.

FAQUIN ! quel est le maître ?

DUMONT.

Monsieur, je sais fort bien que c'est à vous à l'être;
Mais enfin dans la vie il est de certains cas....

Battez-moi, tuez-moi; je ne partirai pas.

Je ne puis vous quitter dans l'état où vous êtes,
Et, plus vous me pressez, plus mes craintes secretes...
SIDNEY, à Henri.

Henri, partez pour Londre, et portez, dans l'instant,
A Milord Hamilton ce paquet important....

(A Dumont.)

Vous, sortez de chez moi. Faites votre mémoire
Après quoi partez.

(Il sort. )

SCENE X I.

DUMONT, seul.

BON! me voilà dans ma gloire !

Vous me chassez? Tant mieux; je m'appartiens : ainsi
Je m'ordonne séjour, moi, dans ce pays-ci....
Il n'aura pas le cœur de me quitter ! il m'aime;
Et je veux le sauver de ce caprice extrême...
Les maîtres, cependant, sont des gens bien heureux
Que souvent nous ayions le sens commun pour eux !

Fin du premier Acte.

ACTE II.

SCENE PREMIER E.

HAMILTON, DUMON T.

DUMONT.

Vous me tirez, Monsieur, d'une très-grande peine,

Et je bénis cent fois l'instant qui vous amene!
Voyez mon pauvre maître, et traitez son cerveau.
Peut-être saurez-vous par quel travers nouveau
Lui-même il se condamne à cette solitude,

Et s'il veut, malgré moi, s'en faire une habitude. 11 vient de vous écrire, et, sans doute, ici près, Vous aurez, en chemin, rencontré son exprès.

HAMILTON.

Non; mais j'ai remarqué, traversant l'avenue,
Deux femmes, dont je crois que l'une m'est connue.
Mais ma chaise a passé; je n'ai pu les bien voir.
T'a-t-on dit ce que c'est ? Pourroit-on le savoir?
DUMONT.

Je devine, à-peu-près. Au pays où nous sommes
Il faut, Monsieur, qu'il soit grande disette d'hommes!
Dès qu'on a su mon maître établi dans ces lieux,
Ambassade aussi-tôt, sans prélude ennuyeux.

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