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naît pas, parce que la politique de son gouvernement a toujours Intercepté la vérité; il vous hait, parce que depuis plusieurs siècles la politique du ministre a été d'armer les Anglais contre les Français, et que la guerre a toujours été un moyen pour se soutenir contre le parti de l'opposition.

» Il ne suit pas de là que le peuple anglais ne fera pas une · révolution; il la fera, parce qu'il est opprimé, parce qu'il est ruiné. Ce seront vos vaisseaux qui feront cette révolution : elle aura lieu, parce que le ministre est corrompu; Pitt sera renversé, parce qu'il est un imbécille, quoi qu'en dise une réputation qui a été beaucoup trop enflée.

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› Ceci pourrait être un blasphème aux oreilles de quelques Anglais, mais c'est une vérité aux oreilles des personnes raison

nables.

Pour le prouver, je n'ai besoin que de nos armées, de nos flottes, de notre situation sublime et grande, et des cris élevés contre Pitt dans toute l'Angleterre. Le ministre d'un roi fou est un imbécille, parce qu'à moins d'être un imbécille on ne peut pas préférer l'emploi de ministre d'un roi fou à l'honorable titre de citoyen vertueux.

› Un homme qui, placé à la tête des affaires d'un peuple, chez qui la liberté poussa autrefois des racines, veut faire rétrograder une nation qui a conquis ses droits vers le despotisme et l'ignorance, est à coup sûr un imbécille. Un homme qui, abusant de l'influence qu'il a acquise dans une île jetée par hasard dans l'Océan, veut lutter contre le peuple français ; celui qui ne devine pas l'explosion que la liberté doit faire dans son pays; celui qui prétend servir long-temps la ligue des rois aussi lâches et aussi bêtes que lui; celui qui croit qu'avec des vaisseaux il va bientôt affamer la France, qu'il va dicter la loi aux alliés de la France; celui-là, dis-je, ne peut avoir conçu un plan aussi absurde que dans la retraite des Petites-Maisons, et il est étonnant qu'il se trouve au dix-huitième siècle un homme assez dépourvu de bon sens pour penser à de pareilles folies.

Robespierre termina en se plaignant de ce qu'on avait fait en

trer les évêques dans la discussion; il déclara que c'était un moyen sûr de manquer son but: il demanda que la société n'or. donnât désormais l'impression d'un discours, qu'après un mûr examen fait par une commission nommée à cet effet. (Applaudi et arrêté.)

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Les hébertistes, n'ayant pu déterminer les Jacobins à faire une démarche en faveur de leurs amis, la firent eux-mêmes le lendemain. Le 29 janvier (10 pluviose), une députation des Cordeliers se présenta à la barre de la Convention pour réclamer la liberté de Vincent et celle de Ronsin. Leur pétition fut renvoyée au comité de sûreté générale, qui fit son rapport le 2 février (14 pluviose). Ce rapport se borna à ce peu de mots :

Voulland. Vous vous rappelez, citoyens, que sur la motion de Fabre-d'Églantine, Ronsin et Vincent furent mis en état d'arrestation. Comme il n'est parvenu au comité de sûreté générale aucune dénonciation, ni pièce à la charge de ces deux citoyens, votre comité vous propose de décréter leur mise en liberté. »

Une discussion très-animée s'engagea. Bourdon (de l'Oise) prit le premier la parole. Il rappela tous les griefs à la charge des prévenus, et demanda que le comité de salut public administrat la preuve de leur innocence avant de proposer leur mise en liberté. Philippeaux, Legendre, Dornier-Loiseau, Clausel, Charlier, Lecointre (de Versailles), parlèrent dans le même but. Le principal grief allégué par Bourdon contre Vincent, c'était « qu'il existait au comité des Marchés une pièce d'où il résultait que l'adjoint au ministre de la guerre avait gagné 40,000 livres sur un marché contraire aux intérêts de la République. I! s'ensuivit une explication qui rendit douteuse l'existence d'une telle pièce. Comme néanmoins l'opposition persistait, Danton monta à la tribune et conseilla l'oubli des offenses. Son discours aplanit les difficultés élevées par son parti, et l'assemblée rapporta son décret d'arrestation contre Vincent et Ronsin.

Telle est à peu de chose près l'histoire des deux factions ri

vales jusqu'au moment où Robespierre prononça, dans la tribune de la Convention, son discours sur les principes de morale. Nous devons y ajouter un seul fait du nombre de ceux qui sont reprochés aux indulgens dans le projet de rapport sur la faction Fabre-d'Églantine. Le 1er février (13 pluviôse), Briez fit décréter qu'il serait accordé des secours à la veuve de Gorsas. Nos lecteurs se souviennent que la même mesure avait été prise envers les filles de Duperret, envers la veuve de Lasource et celle de Biroteau.

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Avant de transcrire le discours dans lequel Robespierre posait, au milieu de ces désordres, la base morale de toutes les questions révolutionnaires, nous dirons quelques mots sur les rapports importans faits devant la Convention depuis le 1er janvier (12 nivôse) 1794, et nous insérerons les principaux décrets. Ce jour-là même Barrère présenta le tableau des victoires obtenues par les armées de la République des bords du Var aux bords du Rhin. Nous les avons racontées nous-mêmes. — Le 2(13), Voullant fit un rapport d'après lequel la Convention décréta une somme de 22,000 livres pour payer le montant des journées employées par les citoyens qui, sous les ordres de Maillard, en exécution de l'arrêté du comité de sûreté générale, avaient été placés comme observateurs à Paris et aux environs, à l'effet d'y découvrir et déjouer les manoeuvres des personnes suspectes et étrangères. Le 3 (14), Barrère fit adopter un projet sur les moyens d'améliorer la marine de la République dans les ports de la Méditerranée.

› —

Le 6 janvier (17 nivôse) la rédaction du décret sur l'instruction primaire, votée le 25 décembre (5 nivôse), fut présentée et adoptée. Voici ce décret :

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Rédaction des décrets sur l'instruction publique, adopté dans la séance du 5 nivôse.

• La Convention nationale, après avoir entendu son comité

T. XXXI.

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d'instruction, sur l'organisation de l'instruction publique, décrete ce qui suit :

> SECTION I. - De l'enseignement en général.

» Art. Ie. L'enseignement est libre.

> II. Il sera fait publiquement.

>> III. Les citoyens et citoyennes qui voudront user de la liberté d'enseigner seront tenus :

» 1° De déclarer à la municipalité ou section de la Commune, qu'ils sont dans l'intention d'ouvrir une école;

2o De désigner l'espèce de science ou art qu'ils se proposent d'enseigner ;

3° De produire un certificat de civisme et de bonnes mœurs, signé de la moitié des membres du conseil général de la commune ou de la section du lieu de leur résidence, et par deux membres au moins du comité de surveillance de la section ou du lieu de leur domicile, ou du lieu qui en est le plus voisin.

» IV. Les citoyens et citoyennes qui se vouent à l'instruction, ou à l'enseignement de quelque art ou science que ce soit, seront désignés sous le nom d'instituteurs et d'institutrices.

› SECTION II. De la surveillance de l'enseignement.

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› Art. Ier. Les instituteurs et institutrices sont sous la surveillance immédiate de la municipalité ou section, des pères, mères, tuteurs ou curateurs, et sous la surveillance de tous les citoyens,

II. Tout instituteur ou institutrice qui enseignerait dans son école des préceptes ou maximes contraires aux lois et à la morale républicaine sera dénoncé par la surveillance, et puni selon la gravité du délit.

› III. Tout instituteur ou institutrice qui outrage les mœurs publiques est dénoncé par la surveillance, et traduit devant la police correctionnelle, ou tout autre tribunal compétent, pour y être jugé suivant la loi.

SECTION III. Du premier degré d'instruction.

>Art. 1er. La Convention nationale charge son comité d'instruction de lui présenter les livres élémentaires des connaissances absolument nécessaires pour former les citoyens, et déclare que les premiers de ces livres sont les droits de l'homme, la constitution, le tableau des actions héroïques ou vertueuses.

» II. Les citoyens et citoyennes qui se borneront à enseigner à lire, à écrire, et les premières règles de l'arithmétique, seront tenus de se conformer, dans leurs enseignemens, aux livres élémentaires adoptés et publiés à cet effet par la représentation nationale.

› III. Ils seront salariés par la République, à raison du nombre des élèves qui fréquenteront leurs écoles, et conformément au tarif compris dans l'article suivant.

» IV. Les instituteurs et institutrices qui ouvriront des écoles dans les communes de la République, quelle que soit leur population, recevront annuellement, pour chaque enfant ou élève, savoir :

L'instituteur, 20 livres ;
L'institutrice, 15 livres.

Les communes éloignées de plus d'une demi-lieue du domicile de l'instituteur le plus voisin, et dans lesquelles, par défaut de population, il ne s'en établirait pas, pourront, d'après l'avis des directoires de district, en choisir un. La République lui accordera un traitement annuel de 500 livres.

› V. Il sera ouvert dans chaque municipalité ou section un registre pour l'inscription des noms des instituteurs et institutrices du premier degré d'instruction, et des enfans ou pupilles qui leur seront confiés par les pères, mères, tuteurs ou curateurs.

» VI. Les pères, mères, tuteurs ou curateurs, seront tenus d'envoyer leurs enfans ou pupilles aux écoles de premier degré d'instruction, en observant ce qui suit :

. VII. Ils déclareront à leur municipalité ou section:

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