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tionale du véritable état des choses, et qu'il rétablit les faits dans une lettre qu'il écrivit à Mirabeau et dont ce député donna communication à l'assemblée. (1).

22, 23, 24 et 25 Mars. Ces séances furent principalement consacrées à la discussion du projet de loi sur la régence.

Ce projet donna lieu à plusieurs questions. Nous nous bornerons à rapporter celles qui ont présenté le plus de difficultés, et sur lesquelles Mirabeau a énoncé son opinion.

Première question. La régence sera-t-elle héréditaire ou élective?

Secondement, dans le cas où le roi mineur n'auroit pas de parens réunissant les conditions requises, l'élection se fera-t-elle au moyen d'un corps électoral, où si le régent sera nommé par la législature?

Troisièmement, à quelle époque fixer a-ton l'entrée du roi mineur au conseil ?

MM. Mirabeau, Cazalès et l'abbé Maury furent d'avis de l'ajournement.

dit

« Si je demande l'ajournement Mirabeau, ce n'est pas que je pense comme

(1) Le lendemain 23.

M. Cazalès , que la question de la régence n'en présente une foule d'autres à éclaircir. Il est vrai que n'ayant pu rêver à ce plan, puisque j'étois extrêmement malade, ( il s'élève des murmures) je n'ai pas un avis prononcé moi-même. (Les murmures recommencent). Puisque vous le voulez, je vous dirai que vous aussi vous n'en avez pas. J'ai pensé qu'un projet de loi de plusieurs pages que vous n'avez pu comparer avec ses bases, pouvoit paroître, à une assemblée aussi sage que la vôtre, susceptible de n'être pas décidé dans ce moment. Je ne m'oppose à ce que l'on aille aux voix, si je me trompe sur cette question, que vous avez pu connoître en un instant un projet de huit pages (nouveaux murmures) je ne m'oppose pas à ce qu'on m'empêche de faire une observation sur le premier article. Je suis en dissentiment avec M. Cazalès. Il a tort de croire que l'on peut déclarer que le régent ne peut, en aucun : sens être chargé de la garde du roi, le régent étant l'instrument de la royauté, a lasurveillance universelle. Le projet du comité est plus conforme aux principes. La tournure qu'y vouloit donner M. Caza

lès me paroît moins raisonnable et mal exprimée. Quant aux divers articles du pro jet, il s'y trouve de grandes lacunes qu'il faudra remplir. Mais mes premiers apperçus ne m'ont paru jamais bien précieux pour moi-même, jugez de ce qu'ils sont pour les autres. »

L'assemblée décida que la discussion se roit ouverte dès le jour même, alors s'engagea le combat.

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M. Barnave pensoit comme le comité, que la régence étant subsidiaire à laroyauté ou même une royauté intermédiaire, on devoit, pour l'établir, se déterminer d'après les mêmes principes, la régence devant avoir la même unité que la royauté.

L'opinion de M. l'abbé Maury, tendante à rendre la régence élective, dut surpendre le côté gauche.

Mirabeau s'attacha dans ce moment plutôt à fixer l'état de la question qu'à présenter une opinion.

« Il me paroît, disoit-il, que du choe des opinions, il naît une question que, préliminairement à tout débat ultérieur, il faut éclaircir, M. Barnave veut que la ré gence soit héréditaire comme la royauté.

M. l'abbé Maury la demande élective. J'avoue que j'ai été surpris de voir transporter sans examen à l'hérédité de la régence les motifs qui ont déterminé l'hérédité de la monarchie. Pourquoi a-t-on rendu la monarchie héréditaire, malgré les incommensurables inconvéniens de l'hérédité ? C'est que les inconvéniens des élections étoient plus grands encore peut-être, et plus funestes à la tranquillité publique et à la paix sociale. Mais si ces inconvéniens ne se retrouvent pas dans l'élection très-circonscrite du régent, pourquoi chercher à les éviter en nous donnant ceux de l'hérédité ? Pourquoi prendre un régent des mains du hasard? Cette grande question de savoir si la régence sera héréditaire ou élective, doit donc être préliminairement décidée. Je voudrois que la discussion fût réduite à ce point. ( On applaudit ). Je demanderois alors la parole pour examiner si la régence doit être élective, et s'il y a de bonnes raisons pour prendre un régent des mains du hasard ».

M. Barnave combattit avec succès l'opinion que Mirabeau avoit indiquée plutôt qu'énoncée. Il vouloit que dans le cas exY

trêmement rare de l'élection, faute d'un régent par droit de naissance, l'élection fût déférée aux législateurs et non à um corps électoral, ainsi que le proposoit le comité. M. Barnave étoit frappé du danger d'appeler et de placer à côté du corps législatif 800 électeurs.

Mirabeau étoit trop intéresé à ne pas laisser le champ de bataille libre, il reprit donc ainsi.

«Puisqu'on ne s'oppose pas à ce que les questions préliminaires à toute discussion soient posées, je n'anticiperai pas sur la solution, car je n'ai pas d'avis fait ; et ce' n'est pas après m'être plaint de ce qu'on vouloit discuter à la hâte une semblable matière, ce n'est pas après avoir invoqué les lumières de la discussion qu'il me conviendroit d'en avoir un ( il s'élève beaucoup de murmures). Je répondrai en homme que les battemens de mains n'étonnent pas plus que les murmures, que je respecte les objections fortes, et que j'estime même les objections spécieuses parce qu'elles forcent à se replier sur soi-même, et à penser; mais je ferai quelques observations sur ce que le préopinant a hasardé pour faire

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