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Cette harmonie existe, ou du moins elle est aussi évidente pour moi que la lumière du soleil. Puisse-t-elle se révéler à vous! C'est alors qu'appliquant votre talent éminemment propagateur à combattre le Communisme dans sa manifestation la plus dangereuse, vous lui porteriez un coup mortel.

Voyez ce qui se passe en Angleterre. Il semble que si le Communisme avait dû trouver quelque part une terre qui lui fût favorable, ce devait être le sol britannique. Là, les institutions féodales plaçant partout, en face l'une de l'autre, l'extrême misère et l'extrême opulence, avaient dû préparer les esprits à l'infection des fausses doctrines. Et pourtant, que voyons-nous? Pendant qu'elles bouleversent le continent, elles n'ont pas seulement troublé la surface de la société anglaise. Le Chartisme n'a pas pu y prendre racine. Savez-vous pourquoi ? Parce que l'association qui, pendant dix ans, a discuté le régime protecteur, n'en a triomphé qu'en jetant de vives lumières sur le principe de la Propriété et sur les fonctions rationnelles de l'État1.

Sans doute, si démasquer le Prohibitionisme c'est atteindre le Communisme, par la même raison, et à cause de leur étroite connexité, on peut aussi les frapper tous deux en suivant, comme vous avez fait, la marche inverse. La restriction ne saurait résister longtemps devant une bonne définition du Droit de Propriété. Aussi, si quelque chose m'a surpris et réjoui, c'est de voir l'association pour la défense des monopoles consacrer ses ressources à propager votre livre. C'est un spectacle des plus piquants, et il me console de l'inutilité de mes efforts passés. Cette résolution du comité Mimerel vous obligera sans doute à multiplier les éditions de votre ouvrage. En 1 Voy. au tome II, l'introduction.

(Note de l'éditeur.)

ce cas, permettez-moi de vous faire observer que, tel qu'il est, il présente une grave lacune. Au nom de la science, au nom de la vérité, au nom du bien public, je vous adjure de la combler, et vous mets en demeure de répondre à ces deux questions:

1° Y a-t-il incompatibilité, en principe, entre le régime protecteur et le droit de propriété ?

2° La fonction du gouvernement est-elle de garantir à chacun le libre exercice de ses facultés et la libre disposition du fruit de son travail, c'est-à-dire la Propriété, ou bien de prendre aux uns pour donner aux autres, de manière à pondérer les profits, les chances et le bienêtre ?

Ah! Monsieur, si vous arriviez aux mêmes conclusions que moi; si, grâce à votre talent, à votre renommée, à votre influence, vous faisiez prévaloir ces conclusions dans l'opinion publique, qui peut calculer l'étendue du service que vous rendriez à la société française ? On verrait l'État se renfermer dans sa mission, qui est de garantir à chacun 'exercice de ses facultés et la libre disposition de ses biens. On le verrait se décharger à la fois de ses colossales attributions illégitimes et de l'effrayante responsabilité qui s'y attache. Il se bornerait à réprimer les abus de la liberté, ce qui est réaliser la liberté même. Il assurerait la justice à tous, et ne promettrait plus la fortune à personne. Les citoyens apprendraient à distinguer ce qu'il est raisonnable et ce qu'il est puéril de lui demander. Ils ne l'accableraient plus de prétentions et d'exigences; ils ne l'accuseraient plus de leurs maux; ils ne fonderaient plus sur lui des espérances chimériques; et, dans cette ardente poursuite d'un bien dont il n'est pas le dispensateur, on ne les verrait pas, à chaque déception, accuser le législateur et la loi, changer les hommes et les formes du gouvernement, entasser institutions sur institutions et

débris sur débris. On verrait s'éteindre cette universelle fièvre de spoliation réciproque par l'intervention si coûteuse et si périlleuse de l'État. Le gouvernement, limité dans son but et sa responsabilité, simple dans son action, peu dispendieux, ne faisant plus peser sur les gouvernés les frais de leurs propres chaînes, soutenu par le bon sens public, aurait une solidité qui, dans notre pays, n'a jamais été son partage, et nous aurions enfin résolu ce grand problème: Fermer à jamais l'abîme des révolutions.

FIN DU QUATRIÈME VOLUME.

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