tion étant arrivé, les deux ordres se réunissaient de nouveau, et la noblesse formant différens corps entourait l'enceinte, ses bannières déployées. Le primat, après avoir prononcé les noms des candidats, se prosternait et chantait une hymne; il faisait ensuite le tour de la plaine, s'adressant à chaque corps de la noblesse, suivant l'ordre des palatinats. Ayant ainsi recueilli les suffrages, il ne lui restait plus qu'à proclamer le candidat élu. Plusieurs jours n'auraient pu suffire au recueillement des voix, si chaque noble eût donné séparément la sienne; mais chaque palatinat faisait connaître au primat, pendant sa tournée, le candidat qu'il avait choisi. La cérémonie ainsi terminée, on se séparait le jour même. Le lendemain, le sénat et les nonces retournaient à la plaine, le candidat élu était proclamé de nouveau, et on lui envoyait une députation pour l'informer de son élection, car aucun candidat ne pouvait être présent à l'assemblée: la proclamation faite, la noblesse se retirait, et la diète était dissoute, après en avoir ordonné une autre pour la cérémonie du couronnement. Nous nous abstiendrons de toute réflexion sur le gouvernement de la Pologne; l'histoire de cette nation fera connaître combien cette forme de gouvernement était vicieuse, et quels malheurs en sont résultés. CHAPITRE SECOND. INTRODUCTION A L'HISTOIRE. Ce serait en vain qu'on tenterait de percer l'obs curité qui environne le berceau de la nation polonaise. La relation de quelques faits probables mais incertains et sans intérêt, un petit nombre de fables ingénieuses, un plus grand nombre de fictions ridicules, telles sont les matières de presque tous les livres qu'on a écrits sur l'origine des Sarmates: nous nous abstiendrons de rapporter ces faibles notions, parce que le devoir d'un historien est de n'offrir à ses lecteurs que des faits prouvés par des autorités respectables, et qu'il ne doit lui être permis de s'écarter de ce devoir que dans le cas où, au défaut de l'évidence, il peut offrir un degré de probabilité qui en approche, ou encore lorsque ces fictions peuvent servir à peindre le génie de leurs inventeurs. Nous pensons donc que nos lecteurs ne regretteront nullement que nous n'ayons pas rapporté ici les conjectures de quelques auteurs sur des faits hors de toute probabilité, et qui, fussent-ils certains, n'auraient aucune importance. Qu'importe aujourd'hui que, vers le milieu du sixième siècle, Leck, premier duc des Sarmates, ait équipé une flotte, et qu'avec l'armée qu'elle portait, il ait fait quelques conquêtes sur les Danois? que Wissimir, son fils et son successeur, se soit emparé de la Jutlande et de la Scanie, qu'il ait fait esclaves les deux filles du roi Siward, et qu'il ait fait batir des villes pour loger ses captifs? Qu'importent mille autres détails de ce temps et de cette espèce? Ce qui dans l'histoire de Pologne doit fixer l'attention des philosophes, ce qui est digne de servir de texte aux méditations des hommes d'état, des citoyens de tous les peuples, ce sont les causes de l'antique grandeur des Sarmates; celles de la décadence et de l'asservissement de la nation polonaise. Nous regarderons donc comme le but principal de notre entreprise l'exposition des faits qui peuvent mettre ces causes au jour. On considère les souverains qui ont gouverné la Pologne comme divisés en quatre classes : 1.o Ceux qui ont régné depuis Leck, premier duc des Polonais, jusqu'à l'élection de Piast; 2.o Ceux qui ont régné depuis l'élection de Piast jusqu'à celle de Jagellon; 3.° Ceux qui ont régné depuis l'élection de Jagellon jusqu'à celle de Henri de Valois; : 4.o Ceux enfin qui ont régné depuis l'élection de Henri de Valois jusqu'au partage de la Pologne. DEPUIS L'ELECTION DE LECK JUSQU'A CELLE DE PIAST. Les Vandales furent les premiers habitans de la Pologne, et cette contrée était la Sarmatie européenne des Romains. Avant le sixième siècle, tandis que les Polonais portaient encore le nom de Sarmates, ils n'avaient pas de chef, et vivaient sans gouvernement dans les montagnes et les forêts, n'ayant d'autres habitations que des chariots, et méditant sans cesse des invasions nouvelles que leur cavalerie, qui déjà était excellente, rendait redoutables à leurs voisins (*). On peut s'étonner qu'un peuple barbare, sans guide et sans (*) « Ces hommes barbares, dit Tacite, libres de crainte » et d'espérance, aiment mieux vivre de la sorte, que de >> labourer les champs, que de prendre soin du ménage, que >> de s'occuper de leur fortune, et de celle de leurs parens et >>de leurs voisins. Ils ne craignent point les autres hom> mes; ils ne craignent pas même les dieux; et, ce qui est >> bien difficile à des créatures comme nous, ils n'ont pas > besoin de faire des vœux, parce qu'ils n'ont coutume de >> désirer que ce qu'ils peuvent se procurer eux-mêmes. >> (De Morib. Germ., cap. XIV.) loi, ait pu étendre son empire du Tanaïs à la Vistule, et du Pont-Euxin à la Mer Baltique. Ces frontières, si prodigieusement éloignées entr'elles, furent encore reculées depuis par l'acquisition de la Bohème, de la Moravie, de la Silésie, de la Lusace, de la Misnie, du Mecklembourg, de la Pomeranie et de la marche de Brandebourg. Les Romains, qui mirent une si grande partie du monde sous leur domination, ne pénétrèrent jamais dans la Sarmatie. Les nations civilisées regardaient les Sarmates comme des brigands: elles oubliaient sans doute qu'elles avaient ainsi commencé. Vers l'année 550, Leck (ou Lecht) forma le dessein de civiliser les peuples parmi lesquels il était né: il abattit des arbres (*) et construisit une habitation; d'autres cabanes s'élevèrent bientôt antour de la sienne. Les Sarmates, qui, jusqu'à cette époque, avaient toujours été errans, com (*) En abattant ces arbres, on trouva une aire d'aigles. Les Sarmates, livrés alors à toute la superstition du paganisme, regardèrent la découverte qu'ils avaient faite comme un augure favorable à la ville qu'ils construisaient, et lui donnèrent le nom de Gnesne, imitation du mot sclavon Gniazdo, qui signifie nid. On croit généralement que c'est en mémoire de cet événement que la nation polonaise porta toujours depuis une aigle dans ses armes. こ |