• 1. Lesnobles étaient divisés en deux classes: les membres du sénat et l'ordre équestre. Quand nous parlerons du gouvernement qui était établi dans ce royaume, nous traiterons du pouvoir particulier dont jouissaient ces deux classes de noblesse. Le terme noble, toutefois, ne se prenait pas, en Pologne, absolument dans la même acception qu'on lui donnait chez la plupart des peuples de l'Europe. Dans le langage polonais, un noble était un individu qui possédait un fief, ou qui pouvait prouver que ses ancêtres en avaient possédé; qui ne se livrait à aucun trafic, et qui avait la liberté de choisir le lieu de sa résidence; ainsi toute personne, qui, sans être ecclésiastique, n'était ni bourgeois ni paysan, était noble. Les membres du corps de la noblesse étaient appelés collectivement l'ordre équestre, et individuellement nobles, gentilshommes, hommes libres ou possédant fiefs: toutes ces différentes dénominations étaient équivalentes. Tous les nobles étaient égaux par la naissance, les titres et les honneurs étaient supposés ne rien pouvoir ajouter à la dignité d'un gentilhomme (*). (*) La prééminence qui était attachée à quelques grands emplois, est appelée dans le Pacta Conventa d'Auguste III, jus æqualitatis inter cives regni. Par leur députation à la diète, ils exerçaient, au moins représentativement, une partie du pouvoir législatif, et dans plusieurs cas, comme, par exemple, lors de l'élection d'un roi, ils s'assemblaient en masse. Tout noble pouvait être elu nonce, remplir une place de sénateur, et se présenter même comme candidat lors de la vacance du trône. Aucun noble ne pouvait être arrêté sans avoir été préalablement convaincu du crime dont on l'accusait, excepté dans le cas de haute trahison, de meurtre, de vol sur les grands chemins; et alors il fallait que le coupable eût été pris sur le fait. La dénomination de noble s'appliquant ainsi non-seulement aux Polonais propriétaires de fief, mais à ceux dont les ancêtres en avaient possédé, on peut présumer combien le corps de la noblesse était considérable. Un grand nombre de ces nobles étant dans l'indigence, et ne voulant pas encourir la dégradation que prononçaient les lois contre tout gentilhomme qui exerçait une profession manuelle, étaient dans la nécessité de se mettre au service des riches qui, comme les barons du gouvernement féodal, employaient à leur suite un aussi grand nombre de ces serviteurs que leur fortune le leur permettait. Comme tout noble jouissait du droit de voter aussi bien pour l'élection du roi que pour celle d'un nonce, la multitude des votans pauvres et vendus eut souvent les inconvéniens les plus funestes. Le dernier roi proposa d'introduire dans le nouveau code une loi semblable à celle de la constitution anglaise, relative aux élections qui avaient lieu dans les comtés de cette nation. D'après les dispositions de cette loi, personne n'aurait pu être admis à voter, même pour l'élection desnonces, sans être propriétaire d'un bien fond. Cette proposition fut reçue de manière à ôter tout espoir de la voir adopter. 2.o Leclergé. Miesceslaw, le premier roi de Pologne qui ait embrassé le christianisme, se fit baptiser en 966. Il dota plusieurs églises et accorda de grands priviléges au clergé. Ses successeurs et les grands du royaume imitèrent son exemple, et les richesses du clergé s'accrurent ainsi d'une multitude de domaines, provenant des biens de la couronne et de ceux des particuliers, jusqu'à ce que la diète, craignant que la suite des temps ne vît passer la majeure partie des propriétésterritoriales dans les mains du clergé, défendit par différentes lois et notamment par celle rendue en 1669, toute aliénation de biens à l'église, sous peine de confiscation. Pendant le règne du dernier roi, cette loi fut plusieurs fois mise à exécution. Depuis l'établissement de la religion catholique en Pologne, par le cardinal Egidius, nonce du Pape Jean XII, les évêques ont été admis au senat, comme conseillers du roi. Ils étaient autrefois nommés par lui et confirmés par le pape; mais, depuis la création du conseil permanent, ils furent nommés par le roi, chacun sur une liste de trois candidats présentés par le conseil. Du moment qu'un évêque était nommé membre du conseil permanent, il jouissait de tous les priviléges attachés à la place de sénateur. L'archevêque de Gnesne était primat du royaume, et, comme nous l'avons déjà dit, il était le premier sénateur et vice-roi durant les interrègnes. Les ecclésiastiques étaient tous hommes libres; ils avaient des cours de justice, dans lesquelles certaines affaires se jugeaient selon le droit canon : ces tribunaux se divisaient en trois classes: 1°. le consistorial, sous la juridiction de chaque évêque dans son diocèse; 2°. le métropolitain, sous la juridiction du primat; c'est à ce tribunal qu'on portait les appels des tribunaux des évêques; 3°. celui du nonce du pape, qui avait la suprême juridiction ecclésiastique dans tout le royaume, et les appels des tribunaux des évêques et du primat. En cas de divorces, de dispenses pour mariage, et dans quelques autres circonstances, les parties, comme dans toutes les contrées catholiques, pouvaient porter leur cause à la cour de Rome, ce qui procurait au pape des sommes considérables. Dans les causes civiles, le clergé était soumis aux cours de justice ordinaires; dans les causes criminelles, l'ecclésiastique accusé était d'abord arrêté par le pouvoir civil, puis jugé par le consistoire : si le consistoire reconnaissait la culpabilité de l'accusé, il était remis entre les mains des tribunaux séculiers, qui lui infligeaient la peine attachée au crime dont il était convaincu. Quand le pape adressait une bulle au clergé polonais, le clergé la publiait et la mettait à exécution sans la confirmation du roi ou de son conseil. Cet abus très-préjudiciable du pouvoir ecclésiastique, qui avait cessé chez presque toutes les nations catholiques de l'Europe, a subsisté en Pologne jusqu'à son démembrement. Autrefois, environ deux mille ecclésiastiques remplissaient des fonctions civiles dans ce royaume; mais peu de temps avant la chute du trône, les prêtres avaient été déclarés inhabiles à occuper des places, autres que celles de l'église. Ils furent long-temps exempts de toute taxe; ce n'est que dans le dernier siècle que cette exemption cessa. Le clergé de la république fut appelé, comme les laïcs, à subvenir aux besoins de la pa : |