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conquêtes. Le roi de Pologne renonça, par ce traité, à toute prétention à la couronne de Russie pour lui et ses successeurs.

Les Polonais, engagés dans les affaires de la Russie, avaient pendant quelques années tourné toute leur attention vers cet empire, et, pendant ce temps au moins, l'intérieur de la république avait été tranquille. Aussitôt que la guerre fut terminée, les nobles, dont l'ambition n'était plus occupée au dehors, revinrent dans leur patrie, et peu s'en fallut que leur esprit factieux ne la livrât à tous les maux que la Russie avait éprouvés.

En 1620, les Tures et les Tatars firent une invasion en Pologne, et s'emparèrent de plusieurs places. On leva à la hâte un corps de huit mille hommes, dont on confia le commandement au général Zolkiewski, et que l'on envoya secourir le palatin de Moldavie, que les Asiatiques avaient cerné; Zolkiewski fut entouré lui-même. L'intrépide Polonais tenta de se faire jour avec ses huit mille hommes au milieu de cent mille ennemis, il y parvint: poursuivi dans sa retraite, il fit environ quatre-vingts lieues, harcelé par les Ottomans. Artivé sur les bords du Niester et serré de trop près pour tenter le passage du fleuve, il se disposait à faire face à l'ennemi, lorsque sa çavalerie, épuisée par les fatigues d'une longue marche, se jeta à la nage pour échapper au combat et passa le Niester, abandonnant sur la rive le général et son infanterie. Le héros polonais avait un de ses fils à côté de lui qui le suppliait en vain de penser à son salut : « Non, ré> pond Zolkiewski, la république m'a confié >> l'armée entière, je dois la sauver ou périr » avec les braves qui restent sous mes ordres ». Tout périt, son fils expira à ses côtés, et luimême, percé de coups, tomba au pouvoir des Turės, qui lui tranchèrent la tête (*) et l'envoyèrent à Constantinople, pour rassurer le grandseigneur et le divan.

Le sultan. Osman, espérant profiter de la défaite des Polonais et de la désunion qui régnait alors parmi les grands, s'avança en Moldavie avec une armée composée de trois cent mille Turcs et de cent mille Tatars. Les Polonais n'avaient à opposer à ces forces immenses, qu'environ soixante-cinq mille hommes : ils se retranchèrent près

(*) Cette tête fut rachetée, et le même tombeau renferma le père et l'enfant. Peu de temps après, le second fils de Zolkiewski, ayant rassemblé quelques troupes pour venger son père et son frère, attaqua les Tatars; mais il périt bientôt accablé par le nombre. Ses cendres furent déposées dans le tombeau qui renfermait celles de son père et de son aîné. On mit sur ce tombeau l'inscription suivante:

Exoriare aliquís, nostris e xossibus, ultor.

de Choczim: en vain le sultan chercha à forcer le camp; il perdit près de cent mille des siens, sans avoir obtenu aucun avantage, et consentit à faire la paix. Par ce traité, Osman promit de contenir les Tatars; Sigismond s'engagea de son côté à contenir les Cosaques. Une clause donnait au grand-ture le droit de nommer le waiwode de Moldavie, à condition cependant que ce ne pourrait être qu'un prince chrétien ami des Polonais. Ainsi finit cette guerre qui avait fait trembler l'Europe.

Aussitôt que la paix fut signée, de nouvelles factions se formèrent, et toutes se plaignirent du roi; la diète lui adressa une série de griefs, dont les principaux étaient: 1.o de ce qu'il avait nommé à l'évêché de Warmie son fils Albert, âgé seulement de neuf ans; 2.o de ce qu'il envoyait encore des Cosaques au secours de l'empereur contre les Turcs, malgré la paix qui venait d'être conclue; 3.o de ce que la reine avait acheté le territoire de Zyviec, contre la constitution qui défendait au roi et à la reins d'acquérir des biens fonds sur le territoire de la république.

Sigismond parvint encore à appaiser les mécontens; il promit que son fils Albert, aussitôt qu'il aurait atteint un âge mûr, prêterait le serment de fidélité à la république. La diète décida, plusieurs années après, que la république, ou

quelque noble, pourrait racheter le territoire de Zyviec.

Le roi de Suède, Charles, oncle de Sigismond, n'était plus; Gustave-Adolphe, son fils, lui avait succédé. Ce prince, qui fit depuis trembler l'Europe, commençait alors sa brillante carrière. La guerre s'étant déclarée entre la Suède et la Pologne, Gustave - Adolphe enleva à la république Elbing, Marienbourg et quelques autres places dans la Prusse polonaise.

Sigismond mourut dans ces entrefaites, le 29 avril 1632. On croit que le chagrin qu'il éprouva des succès du monarque suédois, abrégea ses jours; il était âge de soixante six ans.

La vie de Sigismond suffirait pour prouver combien le manque de fermeté dans un souverain est funeste pour lui et pour ses sujets. Sigismond était né avec des vertus privées : élu au trône de Pologne et vainqueur de la maison d'Autriche, il perdit un trône hereditaire en acquérant une couronne elective: maître de la Russie, l'intention qu'il manifesta de renverser les popes et d'établir la religion catholique, lui fit perdre tous les avantages de sa position. Sigismond fut peu regretté des Polonais.

CHAPITRE HUITIÈME.

LADISLAS VI.

LADISLAS, fils aîné de Sigismond, fut élu roi de Pologne quelques mois après la mort de son père. Il était à craindre que Gustave-Adolphe, qui s'était couvert de gloire en Allemagne, ne se mît au nombre des candidats; les protestans, qui étaient nombreux dans le royaume, le désiraient ardemment; mais le lion du nord, entièrement occupé de ses conquêtes, négligea les suffrages des Polonais qui professaient sa religion.

La reine, seconde femme de Sigismond, avait déjà tenté, du vivant de ce prince, de faire déclarer son fils Casimir héritier du trône, au préjudice de Ladislas, qu'il avait eu de son premier mariage. A la mort du roi elle renouvela ses tentatives: les seigneurs dévoués à la reine répandirent adroitement le bruit que Ladislas avait du penchant pour les nouvelles opinions religieuses, afin d'engager le clergé à s'opposer à son élection.

Jean-Casimir, doué d'une grandeur d'ame presque sans exemple, et enviant peu la couronne

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