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>> même enlevé, par de lâches trahisons, des terres >> que vous n'osiez, ni ne pouviez nous arracher >>> à force ouverte. Nous connaissons l'insatiable >> avidité qui vous domine, et jusqu'aux ressorts >> qu'elle emploie pour nous asservir. Sous l'hum>> ble déhors d'un respect affecté, vous cachez le >> joug que votre orgueil nous prépare, et en nous >> forçant à nous mettre nous-mêmes sous votre >> empire, vous voudriez encore paraître étonnés >> de nous y voir assujettis. C'était donc là tout ce >> que nous devions attendre de vos promesses, >> de vos sermens, de vos traités? Plus barbares >> que les peuples que nous vous avons laissé sub>> juguer, ne deviez-vous payer nos bienfaits >> que par des outrages ?>>>

Les chevaliers furent soutenus par le marquis de Brandebourg; ils furent vaincus plusieurs fois, ainsi que leurs alliés, par les Polonais, sans cependant qu'aucune de ces défaites fùt assez complète pour les empêcher d'inquiéter de nouveau la république.

Pendant le règne de Ladislas, sa nation fut souvent victorieuse; mais une affreuse disette ayant livré la Pologne à toutes les horreurs de la famine, Ladislas ne put se venger des chevaliers teutoniques qui continuèrent à dévaster le royaume, et à y commettre tous les excès de la cruauté et du brigandage.

Dans les instructions que Ladislas laissa à son fils, il lui dit : « Si vous aimez votre gloire, gar>> dez-vous de rien céder aux chevaliers teutons; >> prenez plutôt le parti de vous ensevelir sous >> les ruines de votre trône, que de leur abandon>> ner ces portions de votre héritage qu'ils possè>> dent, et que vous devez à vos peuples et à vos >> enfans. Ne laissez point à vos successeurs un >> exemple de lâcheté capable de ternir vos ver>> tus et tout l'éclat de votre règne. Punissez les >> perfides; et, plus heureux que votre père, chas>> sez-les, s'il se peut, d'un royaume, asile res>> pectable que la pitié leur avait ouvert, et qu'ils >> n'ont pas craint de profaner par la plus noire >> ingratitude ».

Casimir III, surnommé le Grand, fils de Ladislas, monta sur le trône de Pologne après la mort de son père. Les historiens polonais s'arrêtent avec complaisance au règne de ce prince, et tous s'accordent à le regarder comme une époque glorieuse pour leur nation.

Le premier soin de Casimir fut de prolonger la trève qui avait été conclue avec les chevaliers de l'ordre teutonique, et bientôt il signa avec eux une paix, par laquelle ils s'engageaient à restituer à la Pologne le palatinat de Cujavie et le district de Dobrzyn, et en outre à payer dix mille florins. De son côté, Casimir, oubliant les sages conseils de son père, 'renonçait pour lui et ses successeurs à tous ses droits sur la Poméranie.

Cette paix fut bientôt rompue : les chevaliers refusèrent d'évacuer le palatinat de Cujavie et le district de Dobrzyn, et déclarèrent qu'ils ne restitueraient ces provinces que lorsque le traité qu'ils avaient signé avec la Pologne serait ratifié par tous les ordres du royaume. La diète générale fut convoquée, et Casimir éprouva les reproches les plus vifs de la part des députés. Un monarque, disaient-ils, ne pouvait pas légitimement renoncer à perpétuité à des droits qui, lorsque la nation pourrait les faire valoir, lui procureraient les moyens de réparer ses malheurs; le traité fut en conséquence rejeté, et la guerre continua avec les chevaliers teutoniques.

Casimir, malgré les intrigues de ses ennemis et les guerres continuelles qu'ils lui suscitèrent, fut le législateur de sa nation. Il sut profiter de ses succès et fut toujours plus grand que ses revers. C'est sous son règne que la Russie Rouge et le duché de Masovie furent ajoutés aux domaines de la Pologne. Quoique la guerre lui ait été presque toujours avantageuse, il ne la fit jamais que lorsqu'il y fut forcé, et il préféra toujours les intérêts de ses sujets à sa propre gloire. Après avoir, par des victoires et par des traités sages et avantageux, mis son royaume à l'abri de toute invasion étrangère, il fixa sa sollicitude sur l'administration intérieure. Il bâtit plusieurs villes, en agrandit et en embellit quelques autres. L'historien Duglossius, qui écrivit dans le siècle suivant, applique à Casimir ce qu'un auteur ancien a dit de l'empereur Auguste : « Qu'il avait trouvé la >> Pologne de bois, et qu'il l'avait laissée de mar>>> bre ».

Il protégea les lettres; il fonda l'académie de Cracovie; encouragea l'industrie et le commerce. Élégant dans ses manières, et magnifique dans sa cour, il fut économe sans parcimonie, et libéral sans prodigalité.

Casimir avait trouvé son pays sans lois écrites. Il fit publier un code dans lequel il conserva tout ce que les coutumes et les usages du royaume pouvaient avoir d'utile, et ajouta à ces coutumes et à ces usages une foule de dispositions, qui prouvent que ce prince avait un génie bien audessus de son siècle. Il simplifia les formes de la justice, et fut d'un accès facile pour le dernier de ses sujets comme pour les grands de son royaume; ceux-ci l'appelaient par dérision rex rusticorum (le roi des paysans); et ce prince eut l'âme assez généreuse, assez grande pour sentir tout le prix d'un tel éloge.

Il protégea les Juifs. Quelques historiens ont prétendu que son amour pour la belle Esther, fut la cause de la protection qu'il leur accorda; nous oserons n'être pas' de cet avis, et nous croyons que la politique plus que l'amour a dicté les lois que Casimir fit relativement aux Juifs : en effet, toutes les dispositions qui leur étaient favorables, l'étaient aussi à l'industrie commerciale, puisque ce peuple faisait alors seul le commerce en Pologne.

Malgré tous les éloges que l'on doit à Casimir à tant de titres, on ne peut dissimuler qu'il se livra souvent à des excès de table et de débauche, et que cet exemple funeste fut trop imité par les Polonais. Ces vices cependant n'influèrent jamais sur les soins que le monarque donnait au gouvernement.

Casimir mourut, sans postérité mâle, dans la soixantième année de son âge, et la quarantecinquième de son règne. Avec lui finit la ligne mâle des princes de la maison de Piast.

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