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«te mettre au-dessus des événements, à détacher ton «< cœur sans qu'ils le déchirent, à être courageux dans « l'adversité afin de n'être jamais misérable, à être fer« me dans ton devoir afin de n'être jamais criminel. « Alors tu seras heureux malgré la fortune, et sage << malgré les passions. Alors tu trouveras dans la pos« session même des biens fragiles une volupté que rien « ne pourra troubler; tu les posséderas sans qu'ils te possèdent, et tu sentiras que l'homme, à qui tout « échappe, ne jouit que de ce qu'il sait perdre. Tu n'au« ras point, il est vrai, l'illusion des plaisirs imaginai« res; tu n'auras point aussi les douleurs qui en sont « le fruit. Tu gagneras beaucoup à cet échange, car <«< ces douleurs sont fréquentes et réelles, et ces plaisirs << sont rares et vains. Vainqueur de tant d'opinions trompeuses, tu le seras encore de celle qui donne « un si grand prix à la vie. Tu passeras la tienne sans << trouble et la termineras sans effroi ; tu t'en détache<< ras, comme de toutes choses. Que d'autres, saisis << d'horreur, pensent en la quittant cesser d'être; in« struit de son néant, tu croiras commencer. La mort « est la fin de la vie du méchant, et le commencement « de celle du juste.

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Émile m'écoute avec une attention mêlée d'inquiétude. Il craint à ce préambule quelque conclusion sinistre. Il pressent qu'en lui montrant la nécessité d'exercer la force de l'ame, je veux le soumettre à ce dur exercice; et, comme un blessé qui frémit en voyant approcher le chirurgien, il croit déjà sentir sur sa plaie la main douloureuse, mais salutaire, qui l'empêche de tomber en corruption.

ÉMILE. 2.

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Incertain, troublé, pressé de savoir où j'en veux venir, au lieu de répondre, il m'interroge, mais avec crainte. Que faut-il faire? me dit-il presque en tremblant et sans oser lever les yeux. Ce qu'il faut faire, réponds-je d'un ton ferme, il faut quitter Sophie. Que dites-vous? s'écrie-t-il avec emportement : quitter Sophie! la quitter, la tromper, être un traître, un fourbe, un parjure!.... Quoi! reprends-je en l'interrompant, c'est de moi qu'Émile craint d'apprendre à mériter de pareils noms? Non, continue-t-il avec la même impétuosité, ni de vous ni d'un autre ; je saurai, malgré vous, conserver votre ouvrage; je saurai ne les pas mériter.

Je me suis attendu à cette première furie : je la laisse passer sans m'émouvoir. Si je n'avois pas la modération que je lui prêche, j'aurois bonne grace à la lui prêcher! Émile me connoît trop pour me croire capable d'exiger de lui rien qui soit mal, et il sait bien qu'il feroit mal de quitter Sophie, dans le sens qu'il donne à ce mot. Il attend donc enfin que je m'explique. Alors je reprends mon discours.

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« Croyez-vous, cher Émile, qu'un homme, en quel«< que situation qu'il se trouve, puisse être plus heu<< reux que vous l'êtes depuis trois mois? Si vous le « croyez, détrompez-vous. Avant de goûter les plaisirs << de la vie, vous en avez épuisé le bonheur. Il n'y a << rien au-delà de ce que vous avez senti. La félicité des << sens est passagère; l'état habituel du cœur y perd toujours. Vous avez plus joui par l'espérance que « vous ne jouirez jamais en réalité. L'imagination qui « pare ce qu'on desire l'abandonne dans la possession. « Hors le seul être existant par lui-même il n'y a rien

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<< de beau que ce qui n'est pas. Si cet état eût pu durer toujours, vous auriez trouvé le bonheur suprême.

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« Mais tout ce qui tient à l'homme se sent de sa cadu

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cité; tout est fini, tout est passager dans la vie hu

<< maine; et quand l'état qui nous rend heureux dure« roit sans cesse, l'habitude d'en jouir nous en ôteroit « le goût. Si rien ne change au-dehors, le cœur change; « le bonheur nous quitte, ou nous le quittons.

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« Le temps que vous ne mesuriez pas s'écouloit du«rant votre délire. L'été finit, l'hiver s'approche. Quand nous pourrions continuer nos courses dans « une saison si rude, on ne le souffriroit jamais. Il << faut bien, malgré nous, changer de manière de vi« vre; celle-ci ne peut plus durer. Je vois dans vos << yeux impatients que cette difficulté ne vous embar«< rasse guère : l'aveu de Sophie et vos propres desirs « vous suggèrent un moyen facile d'éviter la neige et « de n'avoir plus de voyage à faire pour l'aller voir. L'expédient est commode sans doute, mais le prin« temps venu, la neige fond et le mariage reste; il y " faut penser pour toutes les saisons.

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« Vous voulez épouser Sophie, et il n'y a pas cinq " mois que vous la connoissez ! Vous voulez l'épouser, « non parcequ'elle vous convient, mais parcequ'elle « vous plaît; comme si l'amour ne se trompoit jamais << sur les convenances, et que ceux qui commencent « par s'aimer ne finissent jamais par se haïr! Elle est « vertueuse, je le sais; mais en est-ce assez? suffit-il « d'être honnêtes gens pour se convenir? ce n'est pas «< sa vertu que je mets en doute, c'est son caractère. « Celui d'une femme se montre-t-il en un jour? Savez

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zes attaruri sus; plus de

Tout ne fut que passe sur la ter« des allons nous échni,pera tête tour Deus comme s'il devoir duoréten á Actroi sur le seul soupron de la por e ta doueco, pro que vivroita mjes rsobne a son age? Lile doit haar. tit peut-ête avant ti. Qui sait s

résent même? 1 a nature no t

› D4C senie Lort; tu t'asservis à ane ș te valle del cas de moui deux fois vf soħous à tes passions deréglées, que es sind e! Conjours des privations, foajó es tonjours des alarmes: tu ne jouizas po 1!1 te ser lassé. La craime de tor r de rien posséder; pour n'avos (*«tes parsios, jamais tu nie ?» fare. In cherche a teajours le goas de vant tới, su seras misérable; f ay mechant. Et comment pourrois-it; e naant de loi que tes desirs effi dies?

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r des privations involontai mastu valortanciuti come to siccitier de penchant an deyðir, sur écouter la puson? Toiq. so e lui qui t'apprendra la mo comment verroi-tu celui qui vou sante, colu. qui “oseroit d

<< est morte pour toi, la vertu te sépare d'elle? S'il faut « vivre avec elle quoi qu'il arrive, que Sophie soit « mariée ou non, que tu sois libre ou ne le sois pas,

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peine la-t-elle embrass, que le père, enchante, firppa des mains, en criant bis, bis.

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