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Partie centrale.

1er étage. Salle des EtatsGénéraux. No 129.

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toujours ouvert, s'en aperçut. « Si commencea à dire à l'es-
« cuyer Basco, son compaignon: «monseigneur l'escuyer,
<< mon amy, allez vistement querir de noz gens pour garder
« ce pont, ou nous sommes tous perduz; ce pendant je
<< mettray peine de les amuser jusques à vostre venue: mais
<< hastez-vous; » ce qu'il fist. Et le bon chevalier, la lance au
«poing, s'en va au bout dudit pont, où de l'autre costé es-
"toient desjà les Espaignolz prestz passer; mais comme
<«<lyon furieux va mettre sa lance en arrest, et donna en la
« troppe, qui desjà étoit sur ledit pont. De sorte que trois
« ou quatre se vont esbranler, desquelz en cheut deux en
<< l'eaue, qui oncques puis n'en releverent, car la rivière
<< estoit grosse et profonde. Cela fait, on luy tailla beaucoup
« d'affaires; car si durement fut assailly, que sans trop
«grande chevalerie n'eust sceu résister: mais comme ung
« tigre eschauffé s'acula à la barrière du pont, à ce qu'ilz
« ne gaignassent le derrière, et à coup d'espée se deffendit
«si très bien que les Espaignolz ne sçavoient que dire, et
«ne cuydoient point que ce feust ung homme, mais ung en-
«nemy (un diable). Brief, tant bien et si longuement se
<< maintint; que l'escuyer le Basco, son compaignon, luy
<< amena assez noble secours, comme de cent hommes d'ar-
«mes; lesquelz arrivez firent ausdits Espaignolz haban-
<< donner du tout le pont, et les chasserent un grand mille
« de là (1). »

137. LES ÉTATS-GÉNÉRAUX DE TOURS (14 mai 1506).
(LOUIS XII.)

Par M. BEZARD en 1836, d'après un plafond
du Louvre peint par M. Drolling.

Louis XII avait convoqué les états généraux à Tours, pour le 10 mai 1506. Le 14 du même mois, dit M. de Sismondi, «< il reçut les députés des États dans la grande salle

du château de Plessis-lès-Tours. Il avoit à sa droite les «< cardinaux d'Amboise et de Narbonne, le chancelier et a beaucoup de prélats; à sa gauche, François, comte d'An« goulême, à qui il avoit donné le titre de duc de Valois, les << princes du sang, les plus grands seigneurs du royaume, « le président du parlement de Paris et quelques-uns de ses « conseillers. Thomas Bricot, chanoine de Notre-Dame et « premier député de Paris, porta la parole: il remercia le << roi d'avoir réprimé la licence des gens de guerre, en « sorte qu'il n'y en avoit plus de sihardi que de rien prendre « sans payer; d'avoir abandonné à son peuple le quart des (1) Histoire du bon chevalier sans paour et sans reprouche, ch. XXIV.

<< tailles; d'avoir enfin réformé la justice dans son royaume « et appointé partout de bons juges, tant à la cour du paralement de Paris que dans les tribunaux inférieurs. « Pour a toutes ces causes, dit-il, il devoit être appelé le roi « Louis douzième, père du peuple. » Ce surnom, qui ré« pondait aux sentiments de toute l'assemblée, fut recu avec acclamation; le roi lui-même fut si touché qu'on le a vit répandre des larmes. >>

Bricot, interprète du vou national, s'agenouilla ensuite devant le roi, avec tous les députés, pour le supplier de donner en mariage sa fille, Claude de France, au duc de Valois, qui régna après lui sous le nom de François Ier. 138. ENTRÉE DE LOUIS XII A GÊNES (29 avril 1507).

Par M. Ary SCHEFFER en .... Aile du Nord.

Gênes, incapable de garder son orageuse liberté, s'était mise sous la protection des ducs de Milan; et, comme tout T'héritage des Sforza, elle était passée depuis huit ans aux mains de Louis XII. Mais, sous la loi même d'un maître étranger, les vieilles haines du peuple et de la noblesse, qui jadis avaient mis en feu la république, fermentaient encore, et les lieutenants du roi de France, fidèles à leur titre de gentilshommes, n'étaient pas juges impartiaux de la querelle. Il en arriva que le peuple, animé d'une égale fureur contre les nobles et les Français, les chassa en même temps de Gènes, choisit un doge dans ses rangs, et s'efforça de placer son indépendance reconquise sous la sauvegarde du pape Jules II (1) et de l'empereur Maximilien. Mais P'un et l'autre ne prêtèrent aux Génois que le secours d'une impuissante médiation, et Louis XII avançait avec une armée. Paul de Novi, digne du titre de doge par ses talents et par son courage, mit tout en œuvre pour défendre sa patrie; mais le cœur faillit aux Génois, et ils n'osèrent point affronter jusqu'au bout la colère du roi de France. La ville fut rendue à discrétion. Le 29 avril 1507 Louis XII fit son entrée dans Gênes, à cheval, armé de toutes pièces et l'épée nue à la main. Les magistrats, qui étaient sortis à sa rencontre, se jetèrent à ses genoux, le conju→ rant de pardonner à leur ville une rébellion qui n'était point dirigée contre lui. A leurs prières se joignirent celles d'une foule immense de femmes et d'enfants qui tendaient au Roi, en suppliants, des branches d'olivier. Louis XII (1) Julien de La Rovère.

Pavillon du Roi, 1er étage.

Alle du Nord. R de-chaussée. Salle 7.

voulait effrayer Gênes et non la ruiner; il écouta donc les nobles inspirations de la pitié, et pardonnaà la ville rebelle. Toutefois les chefs de la révolte furent exceptés de ce pardon, le peuple perdit les anciens priviléges de sa constitution républicaine, et une forteresse inexpugnable, qui prit le nom de bride de Génes; s'eleva en haut de la Lanterne, pour comprimer à l'avenir la turbulence de l'esprit démocratique.

139. BATAILLE D'AGNADEL (14 mai 1509).

Par M. JOLLIVET en 1837.

Louis XII irrité contre Venise, son ancienne alliée, s'était uni à l'empereur Maximilien, au roi d'Angleterre et au roi d'Espagne, pour humilier cette orgueilleuse république. Le pape Jules II, quoique jaloux avant tout de chasser d'Italie les barbares, avait accédé à cette alliance pour faire plier sous son ascendant la puissance vénitienne, et la tourner ensuite, avec le reste des forces de l'Italie, contre les Français et les Allemands. La ligue de Cambrai avait été conclue (1509), et unebulle d'excommunication lancée contre le Doge et la république était venue en aide aux armes françaises.

1 Louis XII en effet était entré le premier en campagne : il avait passé l'Adda à Cassano sans rencontrer d'obstacle, et menaçait de séparer les Vénitiens de leurs magasins de Crême et de Crémone. L'Alviane et Pitigliano se mettent alors en mouvement pour chercher auprès de Crême une plus sûre position. Mais dans leur marche simultanée les detrx armées se rencontrent fortuitement, et le combat s'engage. L'Alviane veut rappeler à lui son collègue, qui l'a devance, mais celui-ci se refuse à courir les risques d'une bataille que le sénat a ordonné d'éviter, et le laisse seul contre toute l'armée française. Ce fut la vaillante infanterie des Brisighella, naguère formée en Romagne, et que distinguaient ses casaques à moitié rouges et blanches, qui soutint seule tout l'effort de la bataille. Ces braves gens, encouragés par l'intrépidité de leur chef, se firent tuer presque jusqu'au dernier on en compta six mille couchés par terre. Vingt canons tombèrent aux mains des Français, et Alviane, blessé au visage, fut amené prisonnier devant Louis XII. La bataille d'Agnadel porta un coup terrible à la puissance de Venise, mais sans assurer au roi de France les conquêtes qu'il était venu chercher : d'autres mains que les siennes devaient recueillir les fruits de sa victoire.

140. PRISE DE BOLOGNE (21 mai 1511).

Par MM. LARIVIÈRE et NAIGEON en 1837.

A peine Jules II eut-il obtenu de Venise ce qu'il réclamait d'elle, qu'il s'empressa de la réconcilier avec l'Église et de s'allier avec elle contre les Français. Ferdinand le Catholique, Henri VIII et l'empereur Maximilien entrèrent dans cette nouvelle alliance; et Louis XII, naguère le chef de la ligue de Cambrai, la vit alors, sous le nom de sainte ligue, tournée contre lui tout entière.

L'âme de cette guerre, c'était le Pape avec ses passions ardentes et irréconciliables. Il était venu s'établir à Bologne, reconquise sur la famille de Bentivoglio, et de là il poussait impétueusement toutes les forces de l'Italie contre le duc de Ferrare, allié de la France. C'est alors qu'on le vit entrer par la brèche dans les murs de la Mirandole, qu'au cœur de l'hiver il avait emportée d'assaut. Mais, après quelques pieuses hésitations de conscience, Louis XII s'était décidé à traiter en ennemi le chef de l'Église; et le maréchal de Trivulce, libre d'agir, s'avança par une manoeuvre hardie sur Bologne. Jules II, à son approche, fuit en toute hâte vers Ravenne, pour y trouver un plus sûr asile, et laisse son neveu, le duc d'Urbin, en face des Français. Le courage manqua à ce capitaine et à ses soldats, comme il avait manqué au Pontife. Ils furent en un instant dispersés par l'armée française, et tel fut l'entraînement de la déroute qu'il ne resta aux mains du vainqueur que l'artillerie et les bagages. Cette victoire, dont le principal trophée fut des bêtes de somme, reçut des Français le nom derisoire de journée des âniers. Elle rendit Bologne aux Bentivoglio. La haine populaire s'exerça contre la statue en bronze de Jules II, œuvre colossale de MichelAnge. On la jeta 'à bas, et elle servit à fondre deux canons quí, au bout de six jours, étaient tournés par le peuple contre la citadelle.

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141. PRISE DE BRESCIA PAR GASTON DE FOIX (19 février 1512).

Aile du Nord. R.-de-chaussée.

Salle no 8.

Par M. LARIVIÈRE en 1837. Aile du Nord.
R.-de-chaussée.

La prise de Bologne fut suivie de quelques succès qui ne Salle no 7. coûtèrent guère plus aux armes françaises. Mais Raymond de Cardonne ne tarda pas à amener au Pape les secours de

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l'Espagne, et la lutte devint pour Louis XII bien autrement redoutable. C'est alors qu'il envoya en Italie son jeune neveu, Gaston de Foix, le plus impétueux capitaine qui eût paru jusqu'alors au delà des monts. Gaston commença par gagner ou intimider les Suisses, que Jules II avait appelés à son aide, et il les fit rentrer dans leurs montagnes. Le 7 février, il sauve Bologne assiégée, en y entrant à la faveur de la neige et de l'ouragan. Le 18, il était devant Brescia, où le comte Avogaro venait de relever l'étendard de Venise; le 19, il avait forcé cette ville, et la livrait aux impitoyables vengeances de son armée.

Dans le terrible assaut qui emporta cette place, Gaston de Foix paya de sa personne comme le plus simple chevalier, et on le vit « oster ses souliers et se mettre en eschapin de << chausses pour escalader la muraille.» Mais ce fut à Bayard qu'appartint la palme du courage pendant le combat, comme celle de la générosité après la victoire.

« Les François, raconte son écuyer qui a écrit son his<< toire, cryoient: France! France! ceulx de la compaiagnie du bon chevalier cryoient: Bayart! Bayart! Les << ennemys cryoient: Marco! Marco!.... Mais s'ils avoyent << grant cœur de deffendre, les François l'avoyent cent « fois plus grant pour entrer dedans; et vont livrer ung << assault merveilleux, par lequel ilz repoussèrent ung peu ales Véniciens. Quoy voyant le bon chevalier, commen« cea à dire : Dedans! dedans, compaignons! ilz sont nos<< tres; marchez, tout est deffaict. Luy-mesme entra le pre«mier et passa le rampart, et après luy plus de mille; de << sorte qu'ilz gaignèrent le premier fort, et y en demoura de << tous les costéz, mais peu des François. Le bon chevalier « eut un coup dedans le hault de la cuysse, et entra si

avant que le bout rompit, et demoura le fer et ung bout « du fust dedans. Bien cuyda estre frappé à mort de la «< douleur qu'il sentit; si commencea à dire au seigneur de « Molart: Compaignon, faites marcher voz gens; la ville « est gaignée; de moý je ne saurais tirer oultre, car je suis a mort.-Le sang lui sortoit en habondance; si luy fut << force, ou là de mourir sans confession, ou se retirer « hors de la foulle avecques deux de ses archiers, lesquelz «<lui estanchèrent au mieulx qu'ils peurent sa playe << avecques leurs chemises, qu'ils descirérent et rompirent « pour ce faire (1). »

A) Histoire du bon chevalier sans paour et sans reprouche.

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