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<< drent tant au roi qu'au duc de Milan; et ainsi fut cette ara mée de mer reboutée, qui depuis ne s'apparut și près ('). »

130. ISABELLE D'ARAGON IMPLORE CHARLES VIII EN FAVEUR DE SA FAMILLE (14 octobre 1494).

Par M. Théophile FRAGONARD en 1837, Aile du Nord. d'après le tableau d'Allori.

A l'approche de Charles VIII la Lombardie avait onvert toutes ses villes : c'était Louis Sforza, oncle et tuteur du jeune duc Jean Galeas, qui conduisait luimême, comme par la main, le roi de France. Arrivé dans le château de Pavie, Charles VIII voulut voir son malheureux cousin, qui s'éteignait dans les langueurs d'une cruelle maladie. La présence de Louis le More, dont l'œil surveillait sa victime, empêcha les deux jeunes princes de se parler en liberté. « Charles VIII, dit Guia chardin, ne fui tint que des discours généraux, lui tės « moignant la douleur qu'il avoit de le voir en cet état, et « l'exhortant d'avoir bonne espérance et de travailler au ré« tablissement de sa santé; mais dans le fond de l'âme le « Roi fut sensiblement touché de sa situation, aussi bien « que tous ceux qui l'accompagnoient; car personne ne << doutoit que ce malheureux Prince ne dût être bientôt la « victime de l'ambition de son oncle. Cette compassion a augmenta encore à la vue d'Isabelle sa femme tremblante pour la vie de son mari, et pour celle d'un fils qu'elle «avoit, d'ailleurs, affligée du péril de son père et de sa fa« mille, elle se jetta aux pieds du Roi en présence de tout a le monde, le suppliant avec beaucoup de larmes d'éparagner son père et sa maison. Le Roi touché de la jeunesse « et de la beauté de cette Princesse, laissa voir qu'elle l'a«voit attendri; mais comme une si grande affaire ne pou« voit être arrêtée par un obstacle si léger, il lui répondit « qu'il s'étoit trop avancé pour reculer, et qu'il étoit con«traint de poursuivre son entreprise (3). »

131. ENTRÉE DE CHARLES VIII DANS ACQUAPENDENTE (7 décembre 1494).

Par M. HOSTEIN en 1837, d'après le tableau de Chauvin.

Charles VIII poursuivit sa marche sans que rien l'arrêtät, et franchit les frontières de la Toscane, Là, Pise attendait en lui son libérateur, et, malgré les ombrages du

(1) Mémoires de Philippe de Comines, liv. VII, chap. VI. (2) Histoire des Guerres de l'Italie, par F. Guichardin, tom. Ier,

R.-de-chaussée.
Salle n° 7,

Aile du Nord. R.-de-chaussée. Salle n° 7.

Aile du Midi. 1er étage. Galerie

des Batailles.

No 137.

patriotisme florentin, Savonarole, qui l'appelait comme le fléau de Dieu, fit tomber devant lui les portes de sa patrie. Mais les villes de la campagne romaine ne semblaient pas lui promettre le même accueil. Le pape Alexandre VI (1), Espagnol de naissance, était uni d'intérêt avec la maison d'Aragon, et avait interdit au roi de France, sous peine d'excommunication, l'entrée des États de l'Église. Cependant, le 7 décembre 1494, Charles VIII était sous les murs d'Acquapendente, la première ville des états pontificaux, à la frontière de Toscane. Il n'y trouva point de garnison ennemie ; mais bien le clergé tout entier qui sortit à sa rencontre en grand appareil, avec la croix, les reliques et le Saint-Sacrement. I put s'assurer alors que, malgré les menaces d'Alexandre VI, il traverserait la campagne romaine, comme le reste de l'Italie, dans toute la tranquillité d'une marche triomphale.

132. ENTRÉE DE CHARLES VIII A NAPLES (12 mai 1495).

Par M. FERON en 1836.

Après plus d'un mois perdu à Rome dans de trompeuses négociations, Charles VIII met enfin son armée en mouvement vers Naples. Au seul bruit de son approche, une révolution venait de s'y accomplir: le roi Alphonse II, accablé sous le poids de l'exécration publique, avait renoncé à défendre son royaume et s'était réfugié dans un Couvent de la Sicile. Le jeune et héroïque Ferdinand, son fils, ne lui succéda que pour se voir làchement abandonné à San-Germano, où il attendait l'ennemi: à peine, au milieu des trahisons qui l'entouraient, put-il, en toute hâte, se sauver dans l'ile d'Ischia.

Charles VIII ne marche plus dès lors comme un guerrier, dans le menaçant appareil de la conquête; c'est un roi longtemps attendu par ses peuples et rendu enfin à leur amour. Naples l'appelle, et s'est pour ainsi dire précipitée tout entière à sa rencontre. Il y entre avec l'éclatant cortège de son armée, au milieu des acclamations d'une foule enivrée par la nouveauté des événements et par la magnificence du spectacle. Les seigneurs du parti angevin, jetés dans les cachots par l'ombrageuse tyrannie d'Alphonse, en sont tirés, et viennent, avec l'enthousiasme de la joie et de la reconnaissance, baiser les mains et les pieds du jeune monarque. C'est ensuite le clergé qui, à la porte de la cathédrale, lui offre la couronne du royaume portée par deux enfants ailés, figurant deux anges. Charles, (1) Roderic Borgia.

en la recevant, jure de défendre la religion envers et contre tous; puis il se rend au palais, où les grands du royaume lui remettent le sceptre et prêtent entre ses mains leur serment de foi et hommage.

Charles VIII et sa jeune noblesse ne surent pas recueillir les fruits de cette belle journée : ils jouirent de leur conquête avec une folle insouciance, au lieu de s'y affermir, et Naples fut perdue presque aussi vite qu'elle avait été gagnée.

133. BATAILLE DE SÉMINARA (24 juin 1495).

Par M. JOLLIVET en 1837. Aile du Nord.
R.-de-chaussée.

Pendant que Charles VIII s'endormait à Naples au mi- Salle no 7. lieu des fêtes, un orage menaçant se formait derrière lui. Le pape (1), le roi d'Espagne (2) et le roi des Romains (3), le duc de Milan (*) et la république de Venise se liguaient pour chasser les Français de l'Italie. Longtemps Charles accueillit avec incrédulité les avertissements répétés du sage Comines; il fallut se rendre enfin à l'évidence, et abandonner le séjour enchanté de Naples, en même temps que les beaux rêves de la conquête de l'Orient. Une moitié de l'armée française, sous les ordres du duc de Montpensier (5), reste à Naples pour garder le royaume; l'autre, commandée par le roi, reprend le chemin de la France. Mais à peine Charles VIII avait-il tourné le dos à sa conquête que déjà le jeune roi détrôné, Ferdinand II, s'apprêtait à rentrer dans ses états les armes à la main. Débarqué à Reggio avec Gonzalve de Cordoue, il pénétra sans coup férir au cœur de la Calabre, et s'avança vers Seminara, où il surprit et fit prisonnier un petit corps de troupes françaises. Mais le sire d'Aubigny qui commandait dans cette province, marcha rapidement à la rencontre de l'ennemi pour arrêter ses progrès, et lui présenta la bataille. Le prudent Gonzalve ne voulait point l'accepter, mais Ferdinand fut contraint de céder à l'ardeur impétueuse de ses barons, qui comptaient sur le nombre comme une garantie assurée de la victoire. Leur illusion fut courte : dès le commencement de l'action, la cavalerie espagnole, chargée par les gendarmes français, fit une évolution en arrière pour revenir ensuite à la charge, selon l'usage des Maures, avec qui elle était accoutumée à combattre. L'infanterie napolitaine

(1) Alexandre VI. (2) Ferdinand II. (3) Maximilien Ier, fils de l'empereur Frédéric III. (4) Ludovic-Marie Sforce. (5) Louis de Bourbon, Ier du nom, prince de La Roche sur Yon.

Alle du Nord. R.-de-chaussée. Salle no 7.

prit cette mesure pour le signal de la fuite, et se débanda. Ferdinand essaya en vain de la rallier: il faillit tomber aux mains de l'ennemi, et ne dut son salut qu'à l'héroïque dévouement de Jean d'Altavilla, l'un de ses gentilshommes. Cette victoire laissa pour quelques mois de plus le royaume de Naples aux mains des Français.

134. BATAILLE DE FORNOUE (6 juillet 1495).

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Par M. FERON en 1837.

Pendant ce temps Charles VIII traversait toute l'Italie pour retourner dans son royaume. Cette retraite fut pleine de fatigues et de périls: l'histoire a conservé le souvenir de la patiente énergie avec laquelle les Suisses trainèrent à bras, à travers l'Apennin, cette pesante artillerie, naguère la terreur des Italiens. Mais après un si prodigieux effort, tout ce qu'on avait gagné c'était de se trouver aux portes de la Lombardie, en face d'un ennemi de beaucoup supérieur. Charles demande le passage; on le lui refuse, et alors s'engage, sur la rive droite du Taro, dans le bassin de Fornovo, une bataille à jamais glorieuse pour les armes françaises.

L'armée des confédérés, au nombre de quarante mille hommes, était réunie sous les ordres de François de Gonzague, marquis de Mantoue, l'un des Condottieri les plus renommés de l'Italie. Neuf mille Français, excédés de fatigue, n'hésitèrent pas à chercher un passage à travers cette masse épaisse d'hommes et de chevaux. La tactique italienne, appuyée du nombre, eut beau déployer toutes ses ressources, la furie française, à laquelle rien ne pouvait résister, l'emporta. En vain Gonzague, par une manoeuvre habile, s'était flatté de couper l'arrière-garde ; Charles VIII déconcerte à coups d'épée ses calculs et a bientôt dégagé les siens par une charge victorieuse. Les Stradiotes, milice albanaise à la solde de Venise, qui devaient appuyer le mouvement du marquis de Mantoue, oublient le combat pour se jeter en pillards sur les bagages; et le comte de Caiazzo, au lieu d'attaquer de front la gendarmerie française, dès qu'il est en face d'elle, tourne bride sans rompre une lance. Le massacre des Italiens fut épouvantable; jamais ils n'avaient connu une pareille guerre. Les Français eux-mêmes restèrent un moment comme étonnés de leur victoire, et hésitèrent à poursuivre leur marche, tant il leur semblait incroyable qu'une si puissante armée se fut à si peu de frais dissipée devant eux.

Bayard alors àgé de dix-huit ans, servait dans la compagnie

des hommes d'armes du comte de Ligny (1). « Il fit à la « bataille de Fornoue des prodiges de valeur, eut deux «chevaux tués sous lui et prit une enseigne qu'il présenta « au Roi (*). »

135. CLÉMENCE DE LOUIS XII (avril 1498).

Par Jean GASSIES en 1824. Aile du Nord.
R.-de-chaussée.

Le duc d'Orléans, à la tête du parti des princes, avait Salle no 7. troublé de ses prétentions ambitieuses la minorité de Charles VIII. Vaincu à la bataille de Saint-Aubin du Cormier par le sire de La Trémoille, il était tombé prisonnier entre ses mains, et avait expié ses rêves de domination par une captivité de trois années.

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Lorsque la couronne passa sur la tête de ce prince en 1498, tous ceux qui avaient servi contre lui le roi son prédécesseur occupaient les plus hauts emplois à la cour; La Trémoille, entre autres, avait l'office de premier chambellan. « Le roi le manda de son propre mouvement, le ◄ confirma en tous ses états, offices, pensions et bienfaits, « le priant de lui être aussi loyal qu'à son prédécesseur,

avec promesse de meilleure récompense (3). » A ce noble traitement Louis XII ajouta cette parole si belle et si connue : « Le roi de France ne venge pas les injures du a duc d'Orléans. » Il traita avec la même générosité les autres courtisans, à qui leur dévouement pour Charles VIII faisait redouter son inimitié; il leur annonça qu'aucun d'eux ne serait privé de ses emplois et de ses honneurs. 136. BAYARD SUR LE PONT DE GARIGLIANO (déc. 1503).

Par M. PHILIPPOTEAUX en 1840.

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Les Français faisaient un dernier effort pour reconquérir le royaume de Naples, enlevé à Louis XII par la perfidie de Ferdinand le Catholique et l'habileté guerrière de Gonzalve de Cordoue. Les armées, en face l'une de l'autre, couvraient les deux rives de Garigliano, dans l'attente d'une action décisive; c'étaient chaque jour de nouvelles escarmouches entre les chevaliers des deux nations. Ce fut dans l'une de ces rencontres que Bayard se signala par un fait d'armes si merveilleux que l'on se refuserait d'y croire s'il n'était attesté par le naif témoignage de son écuyer, historien fidèle de sa vie.

Un parti de cavalerie espagnole s'avançait à la dérobée pour surprendre le camp français. Bayard, dont l'œil était (1) Louis de Luxembourg. (2) Biographie universelle. (3) Mémoires de La Tremoille, ch. vii, p. 158.

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