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taines maisons de Cahus, mais ces visites domiciliaires ne firent découvrir aucun insermenté (1).

Le 26 mars 1793, le procureur-syndic du district de Cahors annonça au procureur général du département les résultats des enquêtes faites par la gendarmerie dans les communes de l'arrondissement.

D'après les procès-verbaux des tournées qui avaient été organisées par les gendarmes pour la recherche des prêtres insermentés, il n'y avait pas de prêtres réfractaires dans les localités du district, sauf à Larroque-des-Arcs et à Cours.

A Larroque, il se trouvait un nommé Miquel, ci-devant chapelain du chapitre de Cahors et Cambres, ancien missionnaire insermenté ; à Cours, il y avait l'ancien curé, Jean Toury.

Le procureur du district écrivit à la municipalité de Larroque pour l'engager à lui faire connaître sans délai « si quelqu'un de ces individus exerçait des fonctions ecclésiastiques ».

Il était parvenu à la connaissance du procureur du district qu'à Cours l'ancien curé Toury continait d'exercer, dans la commune, des fonctions qui lui étaient interdites par la loi.

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Ce prêtre fut dénoncé aussitôt « au citoyen qui suppléait le procureur général et promesse fut faite d'une action énergique conduite contre lui. Mais, dans la même lettre du 26 mars, le procureur-syndic du district disait au procureur général à son sujet :

« J'ignore s'il a été pris des mesures pour l'empêcher de nuire à << la chose publique ; veuillez me dire si je dois faire quelque chose « pour le faire mettre en droit d'arrestation (2). » L'ancien chapelain Miquel avait déguerpi » de Larroque avant le 5 avril (3). A Cours, Jean Toury fut remplacé par Antoine Grépon, le 7 avril.

(1) Arch, du Lot, L 273, no 84.

(2) Ibid., L 128, no 5 et L 114, n°1, 441.

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(3) Ibid., L. 114, no 2, page 94. Voici quelques pièces concernant les réfractaires résidant à Larroque-des-Arts, en mars et avril 1793. Le 4 avril, Anne Marconnié, Guichard, Rigal notable, Jouglas, secrétaire-greffier de la commune, attestent à qui il appartiendra que Jean Cambres, prêtre de la cidevant congrégation de la mission est hors d'état de se rendre à Cahors, chef-lieu du district et du département, à cheval ni à pieds, à cause de son âge et de son infirmité... » (L 273, no 113). Le 5 avril, le maire Vincens, Pontiez, officier municipal, Fournie, dit le Sarralier, dont un descendant est mort à Bégoux, le 7 décembre 1906, et d'autres, répondirent en ces termes à la lettre du procureur syndic, du 26 mars : « Nous avons reçu votre lettre du 26 mars dans laquelle vous nous informez que, par les procès-verbaux de la gendarmerie, il censte qu'il y a, dans notre commune, deux prêtres insermentés, un nommé Miquel, ex-chapelain du Chapitre de Cahors, et Cambres, mission

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Les enquêtes faites par la gendarmerie ne renseignèrent pas les districts et le département sur la présence dans les communes de nombreux prêtres insermentés ou rétractés.

Elles n'aboutirent guère qu'à mentionner l'existence de prêtres constitutionnels ou de prêtres non-fonctionnaires publics, disant simplement la messe, et qui ne pouvaient être tracassés puisqu'ils n'étaient pas considérés comme prêtres réfractaires.

On a l'impression que les municipalités, dans leurs déclarations faites aux gendarmes ou envoyées directement au directoire du district, ne veulent pas faire connaître les noms des réfractaires se trouvant cachés dans beaucoup de villages.

D. L'enquête faite à Peyrilles. A Peyrilles, l'enquête des gendarmes (de Frayssinet) donna lieu à des troubles graves.

Le 10 janvier, le procureur de la commune renseignait le procureur-syndic de Gourdon sur ce qui s'était passé la veille (1), à l'occasion de la tournée de la gendarmerie :

« J'ai l'honneur de vous instruire, disait le procureur, d'un fait << un peu extraordinaire qui s'est passé hier à Peyrilles, qui ne vous « fera peut-être pas plaisir, mais ma fermeté et ma constance ont << trouvé des moyens pour apaiser tout le train. »

naire. Nous vous certifions que le nommé Miquel n'est point dans notre commune et que le nommé Cambres, ex-missionnaire, n'a jamais troublé l'ordre dans notre commune et qu'il est hors d'état de le faire vu son âge, qui est de plus de 80 ans et ses infirmités qui exigent, à chaque pas qu'il fait, une personne pour le soutenir et qu'il n'a fait d'autre fonction que de dire la messe. Citoyen, nous nous faisons un devoir, dans toutes les occasions, de prêcher Pobéissance aux lois et de vous donner des preuves de notre civisme. » (L 273, n° 112). Le même jour, le procureur-syndic du district de Cahors, Dulac, communiqua au directoire du département la lettre ci-dessus : « Je viens de recevoir, disait le procureur-syndic, la réponse à la lettre que j'écrivis à la municipalité de La Roque le 26, de mars dernier, dans laquelle je lui demandais si les Miquel, ex-prébendé, et Cambres, ex-missionnaire, sont sur son territoire et s'ils y exercent quelques fonctions sacerdotales. Il résulte de cette réponse que le citoyen Miquel n'habite plus dans cette commune, et que le citoyen Cambres est âgé de 80 ans, que ses infirmités sont telles qu'il ne peut faire un pas sans être soutenu par quelqu'un et qu'il n'a fait d'autres fonetions que celle de dire la messe. Je ne sais si je dois requérir la gendarmerie de traduire ce dernier à Cahors. Pour vous mettre à même d'en juger vousmême, je vous envoie la lettre originale que j'ai reçue de cette municipalité. Si vous pensez que ce prêtre soit dans le cas de réclusion, je vous prie de m'en donner avis de suite pour que je puisse prendre les mesures convenables (L 273, no 111). Le prêtre Cambres, dont il est question dans ces pièces, fit bâtir, à Larroque, la maison Sol-Célarié; il était propriétaire du domaine de Pontiès, où il fit bâtir une chapelle encore existante, appartenant à la famille Barry; la maison de Pontiès, brûlée il y a une vingtaine d'années, appartenait à ce prêtre.

(1) Des pièces parlent du 9 janvier comme journée de révolution à Peyrilles (voir L reg. 7, fos 35 à 40),

La municipalité n'avait pas eu connaissance de l'arrêté du 19 décembre. La gendarmerie arriva à Peyrilles sans avoir prévenu les officiers municipaux.

Le peuple qui, dans cette commune, était « entièrement dévoué à ses ministres », crut, en voyant les gendarmes, qu'ils venaient enlever leurs prêtres, le curé Jean-Louis Caminel et le vicaire Pierre Tesseyre.

Les deux ecclésiastiques avaient prêté le premier serment, mais ils étaient soupçonnés par le département de l'avoir rétracté.

Le procureur de la commune fait, dans sa lettre, le récit suivant de la journée du 9 janvier :

« On a de suite sonné le tocsin et, dans un quart d'heure, il y a «eu sur la place une populace immense qui se disposait à sacrifier et ces pauvres gendarmes et leurs chevaux. Les officiers muni« cipaux qui sont précisément dispersés d'un côté et d'autre dans << la campagne et qui n'avaient pas été prévenus de cet événement « n'avaient pas pu s'y trouver pour mettre le bon ordre. Heureu« sement on vint m'avertir le premier. Je courus à pas précipité « pour éviter un malheur prochain. A mon arrivée, je fis finir le << tocsin. Je manifestai au peuple le contenu de l'arrêté et je << tâchai de mon mieux d'apaiser l'orage en leur disant que « ces gens-là ne faisaient, qu'exécuter la loi, et qu'on ne devait pas << les blamer: J'offris (aux gendarmes) de leur faire voir tous les « registres de la municipalité et de leur donner tous les renseignements qu'ils pouvaient exiger de nous; mais ces pauvres << gens avaient été tellement intimidés du danger qu'ils avaient « couru, qu'ils ne voulaient ni voir les registres de la municipalité, « ni établir le procès-verbal qu'ils ne pouvaient dresser. Sur quoi, << m'ayant requis de leur donner une garde de six hommes pour les « mettre en sûreté, je les leur procurai et les suivis moi-même jusqu'à ce que je les vis hors de danger. J'ai été extrêmement <affligé de cet événement fàcheux, mais je ne crois pas qu'on puisse nous en faire le moindre tort, attendu que c'est arrivé << soudainement (1). »

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La brigade de gendarmerie de Fayssinet adressa aussitôt au directoire de Gourdon le procès-verbal des événements qui s'étaient produits à Peyrilles et, de leur côté, les administrateurs de Gour

(1) Arch. du Lot, L 78, no 22. Procès-verbal dressé par le procureur de la commune de Peyrilles, 1793, 11 janvier, Récit des faits à Peyrilles (L 78, n° 23).

don en envoyèrent également un extrait au directoire du département.

<< Nous vous observons, écrivaient les administrateurs, qu'il est << instant de réprimer ces émeutes surtout dans ce canton qui << depuis la Révolution a presque toujours été dans l'insurrection << et où celle que notre district éprouva en 1790 prit naissance. >>

Mais, le 17, les mêmes administrateurs écrivirent de nouveau au sujet de la rébellion de Peyrilles, au directoire du Lot, pour l'informer que les habitants n'avaient agi ainsi à l'égard de la gendarmerie que dans la crainte de voir capturer par les gendarmes le curé et le vicaire, quoique assermentés (1).

Le 29 janvier, le conseil du département nomma un commissaire pour établir un projet d'arrêté concernant l'affaire. L'administrateur désigné fut Bladviel. Le 31, celui-ci présenta son projet.

La proposition consistait à envoyer à Peyrilles deux brigades de gendarmerie, sous le commandement d'un capitaine, avec 500 gardes nationaux, « partie à pied, partie à cheval ».

De plus, deux commissaires pris parmi les administrateurs du département devaient aller y constater la situation du curé et du vicaire par rapport aux serments prescrits, rechercher par exemple si les deux prêtres n'avaient pas rétracté le serment prescrit par la loi du 26 décembre 1790.

La proposition fut adoptée et les commissaires nommés furent Lagasque et Cayla, de Caylus (2).

Le 2 février, le directoire du district revenait sur l'affaire de Peyrilles, dans une lettre adressée au directoire du Lot. Il avait pris un arrêté, le 12 janvier, relativement à la révolte qui s'était produite dans cette commune, et il avait invité la municipalité à répondre aux accusations qui pesaient sur elle (3).

Au directoire du département, le 3 février, un administrateur déclara, au nom d'un officier municipal de Peyrilles, « que, si la force armée se rendait dans cette commune, elle y serait mal reçue, et que pas un de ceux de l'expédition ne reviendrait» (4).

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(4) Ibid., L reg. 2, 92-94 et L reg. 7, f 35. Le maire de Peyrilles, Lasfargues, avait déclaré à deux volontaires, Pierre Jauvion et Pierre Estord. de la compagnie commandée par Baptiste Blanc-Calvet « Le bataillon que le département veut envoyer sur la commune de Peyrilles, à raison des troubles qui s'y sont passés, ne fera pas bien d'y venir. » Le propos fut rapporté à Jean Souilhé, administrateur du département.

Un autre administrateur proposa au conseil de demander à la municipalité de cette commune de faire arrêter et conduire à Cahors le curé et le vicaire assermentés de Peyrilles et de lui promettre que, si elle acceptait semblable proposition, il serait sursis à l'exécution de l'arrêté du 31 janvier aucune force armée ne serait envoyée dans cette commune.

A la même séance du 3, il fut fait lecture d'une adresse de trois compagnies de chasseurs nationaux résidant pour le moment à Cahors, qui offraient « de marcher » pour l'exécution des mesures prises par le département contre Peyrilles; ils manifestaient « le zèle le plus ardent et le patriotisme le plus intrépide ».

L'adresse fut applaudie de tous les membres qui exigèrent qu'une mention spéciale en fût faite au procès-verbal de la

séance.

Le 4 février, l'administrateur Jean Souilhé, commissaire nommé pour recevoir les dépositions de quelques personnes de Cahors et de Peyrilles au sujet des événements du commencement de janvier, entendit tout d'abord le maire Jacques Lasfargues.

Celui-ci était à Peyrilles au moment où la brigade de Frayssinet y arriva, mais étant allé visiter des malades au village de St-Denis, il se trouva trop éloigné de l'église pour entendre sonner le tocsin. Il ne connut même « l'insurrection » des habitants que le lendemain.

Il ignore pour quel motif des gens sonnèrent le tocsin et maltraitèrent les gendarmes. Il n'a pas entendu de la bouche même du curé qu'il ait remercié, le dimanche suivant, aux offices, la population de Peyrilles d'être venue au secours de son pasteur et de son vicaire. Mais, ce dimanche-là, en allant à la maison commune, il entendit beaucoup de femmes qu'il ne saurait désigner par leur nom, dire que le curé les avait tous bien remerciés.

Le maire ne portait pas la cocarde tricolore et le commissaire qui l'interrogeait lui en fit la remarque.

Il répondit qu'il connaissait parfaitement la loi qui, déclarant la patrie en danger, fait une obligation de porter cette cocarde. S'il ne la porte pas, c'est qu'il l'a perdue.

Après le maire comparut le premier officier municipal de Peyrilles, Guillaume David. Le jour de cette révolte populaire, il était à Cahors et arriva fort tard à Peyrilles.

Tout était tranquille à son retour. Lorsqu'il arriva, des personnes lui dirent que des cavaliers avaient entouré le presbytère et que les

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