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Fouquier-Tinville « de conspiration formée contre le gouvernement révolutionnaire » (1).

Dans l'acte d'accusation établi contre tous ces prévenus, il est dit que le Tribunal a connu leurs tentatives, toujours infructeuses et toujours renaissantes dans les maisons d'arrêt de la commune de Paris et qu'ils viennent de renouveler dans la maison d'arrêt du Luxembourg, ce foyer de la conspiration des Dillon, des Rousin, Vincent, Chaumet, Hébert, Momoro et autres... ».

Parmi ces prévenus, on voit des prêtres « dont les crimes ont inondé le territoire français du plus pur sang des citoyens ».

Les moyens employés étaient les suivants : assassinat des concierges et du gardien de la maison d'arrêt, assassinat des membres des Comités de salut public et de sûreté générale, des patriotes. « Le despotisme, le fanatisme, l'athéisme, le fédéralisme, disait FouquierTinville, se sont réunis pour ces forfaits. >>

Le jugement prononcé contre le chanoine Laroche-Lambert et ses codétenus est du 18 messidor (6 juillet 1794) (2).

CHAPITRE VII

Causes diverses soumises aux Tribunaux

La prétention des hommes de la Révolution fut d'abolir la royauté et l'ancienne Eglise de France. Aussi tout citoyen qui se réclamait de la Monarchie ou de l'Eglise était-il un coupable justiciable des tribunaux. Une accusation était portée contre lui, celle de « complot liberticide », d'entreprise contre la liberté.

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1° Alexandre-Louis Vilhien, vicaire de Larnagol. Louis-Alexandre Vilhien, originaire d'Elbes, près de Villefranche d'Aveyron, vicaire de Larnagol, avait prêté les deux serments prescrits, celui exigé par la loi du 26 décembre 1790 et le serment de liberté-égalité.

(1) Au nombre des prévenus du Luxembourg, il y avait un ex-noble, GillesFrançois-Anne Durfort, âgé de 35 ans, né à Toulouse, ex-garde de Capet, demeurant à Besançon et à Paris, rue des Fossés-du-Temple. Il y avait eu un arrêté du Comité de Salut public, du 17 Messidor, comprenant ce prévenu dans la conspiration du Luxembourg. Cette personne était de la 3 fournée. FouquierTinville l'accusa de « conjuration formée contre le gouvernement révolutionnaire ». Il prétendit que les chefs de la conjuration qui étaient tombés sous le glaive de la loi, avaient laissé des complices qui avaient fait des tentatives dans les maisons d'arrêt de Paris. Le prévenu fut condamné à mort le 22 Messidor (10 juillet 1794). (Arch, nat., W. 399, N° 925).

(2) Arch. nat., W. 409, N° 941.

Il avait prêté le premier serment, le 4 février 1791, mais avec des réserves qui rendaient son serment nul.

Pour le serment exigé par le décret du 14 août 1792, il avait fait procéder la formule du serment d'un préambule que la loi n'admettait pas.

Il avait encore prêté le serment exigé par le décret du 21 avril 1793, mais en introduisant des réserves dans la formule qu'il employa.

Il avait rétracté seulement, le 20 octobre 1792, la réserve qu'il avait insérée dans son serment de liberté-égalité.

Le prêtre Vilhien, ayant prêté, en 1791, un serment nul parce qu'il renfermait des réserves, devait être tôt ou tard considéré comme un prêtre réfractaire.

Le 6 août 1793, il fut arrêté, comme prêtre réfractaire, à Elbes, près Villefranche-de-Rouergue, son pays natal, où il s'était retiré. Une fois pris, il fut conduit à la maison commune de Villefranche.

Le 16 du même mois, il comparaissait devant le directoire du district et y était interrogé le même jour. A cette date, le directoire de Villefranche le faisait transférer de la maison commune « chez la citoyenne Labrunie et le citoyen Périé, son gendre ».

L'ecclésiastique demeura consigné dans cette maison depuis le 16 août 1793 jusqu'au 29 messidor an II (17 juillet 1794).

Le 24 messidor (12 juillet 1794), Vilhien était de nouveau interrogé par l'administration du district de Villefranche. Les réponses que fit le prévenu ne furent pas de nature à satisfaire le directoire du district, en faveur de son innocence, et le district ordonna qu'il fût conduit dans la maison d'arrêt.

Le 25, le directoire de Villefranche demanda des renseignements à celui de Figeac « sur l'ex-prêtre Vilhien » qu'il venait de faire mettre en prison.

Le directoire du district de Figeac répondit au sujet de cet ancien vicaire, le 26 messidor, aux administrateurs de Villefranche :

« Nous ne connaissons qu'imparfaitement ses principes politi<ques. Sa conduite versatile n'annonçait pas dans le temps un << homme fortement prononcé ; il n'est cependant pas venu à notre <connaissance qu'il eût été porté des plaintes contre lui. Son frère << s'est présenté aujourd'hui à l'administration pour faire viser les diverses prestations de serment de l'ex-prêtre. »

Le 29, le directoire de Villefranche prit un arrêté pour faire

conduire à Cahors sous bonne et sûre garde l'ancien vicaire de Larnagol.

Le prêtre devait être remis à la disposition des administrateurs du directoire du Lot.

Les membres du directoire du département le dénoncèrent à l'accusateur public près le tribunal criminel, le 2 thermidor (20 juillet 1794).

Des informations sur ce prêtre furent sollicitées, le 6, par l'accusateur public au directoire du district de Figeac. Cette administration consulta la municipalité de Larnagol, le 11 thermidor, pour pouvoir donner les renseignements les plus exacts. Le 21 seulement, les membres du directoire de Figeac écrivaient à l'accusateur public:

« On nous a assuré que le premier serment qu'avait prêté Vilhien << avait été présenté au corps électoral qui n'aurait pas jugé à pro<pos de le rejeter; il fut mis dans la classe des prêtres assermen<<tés; son traitement lui fut continué. » Ils ajoutèrent, quant au second serment, celui de liberté-égalité, que l'ecclésiastique l'avait prêté avec restrictions illégales, mais qu'il l'avait rétracté, croyait-on; ils n'avaient cependant rien pu découvrir sur ce dernier point. Ils avaient interrogé certaines personnes qui l'avaient connu et, d'après leur témoignage, ils le signalaient comme n'ayant pas « la réputation de patriote ».

Sa conduite fut donnée comme « versatile et injurieuse ». Le tribunal criminel du département condamna à la déportation et à la confiscation de ses biens l'ancien vicaire Vilhien, âgé de 38 ans, par jugement du 15 thermidor (2 août 1794).

Le président du tribunal, Antoine Judicis, l'avait interrogé encore une fois avant que le tribunal prononçât la sentence (1).

Parmi les juges qui le condamnèrent à la déportation, il y avait un ancien curé constitutionnel, Eutrope Demeaux, juge du tribunal du district de Cahors, qui siégeait à côté d'Antoine Lagarrigue, Antoine Fournié et Judicis.

Vilhien aurait dû être condamné à mort, du fait qu'il n'avait pas prêté de serment valable et qu'il était resté caché sur le territoire. La loi des 29 et 30 vendémiaire (article 10) le vouait à la mort.

Mais il ne devait être condamné qu'à la déportation, parce que, à

(1) Arch. du Lot, Tribunal criminel, vol. XVIII, folios 54 à 56; L. 353, pp. 97, 106; J. Gary, Notice, p. 327 (prétend à tort que Vilhiers fut condamné à mort).

l'époque où parut cette loi, il se trouvait sous la main et à la disposition de l'administration du district de Villefranche et qu'il ne pouvait remplir l'objet de la loi nouvelle.

Celle-ci prescrivait, en effet, aux ecclésiastiques déclarés sujets à la déportation, de se rendre auprès des administrateurs de leur département dans la décade de la publication de cette loi (article 10). 2° Affaire Pierre-Jean Mafré. Le 17 pluviôse an II, l'agent national Lagasquie fit comparaître devant lui, à Cahors, Jean-Pierre Moulhérat, Joseph Couderc, l'un agent national et l'autre officier municipal de Laramière, qui avaient arrêté un prêtre insermenté, Pierre-Jean Mafré.

Le prêtre avait pu être saisi au cours de visites domiciliaires faites le 15 pluviôse pour rechercher des prêtres insermentés qui, disait-on, vivaient sur le territoire de la commune de Laramière.

Moulhérat et Couderc s'étaient mis à rechercher les prêtres réfractaires le 15 au soir, vers les 8 ou 9 heures, accompagnés du maire de leur commune et d'un piquet de la garde nationale.

Ils se rendirent au village de Labrie, chez les trois femmes Thouron, et y rencontrèrent le prêtre Mafré, ancien vicaire de Lagarde, faisant fonctions « de missionnaire », qui était dans le cas d'être arrêté pour avoir désobéi à la loi sur le serment de fidélité à la Constitution.

Ils firent saisir le prêtre par les gardes nationaux qu'ils avaient fait suivre et le conduisirent ensuite à Cahors. Ils n'avaient signé aucun procès-verbal de l'arrestation, dans l'ignorance où ils étaient des formalités à remplir.

Lagasquie leur demanda si ce prêtre avait prêché, dans leur commune ou ailleurs, la désobéissance aux lois et s'il y avait propagé « le fanatisme». Ils répondirent avoir ouï dire que Mafré, << coalisé avec d'autres prêtres insermentés qui se tenaient cachés, avait détourné par tous les moyens les prêtres des paroisses de toute prestation du serment condamné par Pie VI.

Ils avaient également entendu dire que cet ecclésiastique engageait fortement « les citoyens » à ne pas assister aux offices des constitutionnels.

Ils avaient aussi appris de la bouche même d'une des sœurs Thouron que Mafré était chez ces femmes depuis onze ou douze jours, qu'il y était arrivé malade « et mangé par les poux » et qu'il y avait été soigné. Les femmes Thouron n'avaient pas cru devoir le renvoyer dans l'état pitoyable où il se trouvait (1).

(1) Archives du Lot, L. 307, pp. 5, 6.

Le même jour, Lagasquie interrogea le prêtre insermenté Mafré, âgé de 68 ans et originaire de Seconzac, district de Saint-Géniès (Aveyron).

Depuis la Révolution, ce prêtre n'avait exercé aucun ministère pastoral. Il avait simplement rendu service à des curés en disant la messe à leur intention, en administrant les sacrements et en donnant des missions, sur leur demande. Il avait cessé ce ministère depuis un an.

Il n'avait pas eu à prêter le serment exigé par la loi du 27 novembre-26 décembre 1790, puisqu'il n'exerçait pas de fonctions publiques.

Il était venu, déclara-t-il, dans le Lot, il y avait deux mois ; il s'y était tenu caché et n'avait communiqué qu'avec ses « affidés » de Laramière ; il n'avait guère vu que les femmes Thouron.

Lagasquie lui fit cependant avouer qu'il avait conféré, à Laramière ou dans d'autres communes, avec Joseph Bouysset, de Vailhourles; Marguerite Mathieu, de Martel; Peyret, de Grimals, paroisse d'Elbes; Antoine Théron, de Labarthe, paroisse de Fontaynous.

Le prêtre réfractaire ne reconnut avoir donné ses secours spirituels qu'à Marguerite Mathieu.

En ce qui concerne des discours touchant la Révolution, il avait dit tout ce qu'il croyait utile à la sanctification des âmes » (1). 3° François Lacourt, ancien chanoine prébendé du Chapitre de Montauban. François Lacourt, ancien chanoine prébendé du Chapitre de Montauban, était né, à Toulouse, de Jean-François Lacourt, marchand chandelier, et de Marguerite Lapeune, le 4 août 1722.

Il avait été baptisé le 9 août de la même année, à l'église de la Daurade, d'après un extrait de baptême de 1744, légalisé le 25 juin (2).

Dans une pièce officielle, provenant de la municipalité de Montauban, on le dit d'une taille de 5 pieds un pouce, avec des cheveux et sourcils châtains, un front grand, une barbe grise, un visage rond. Au mois de février 1793, il demeurait à Montauban, rue de Mous

(1) Archives du Lot, L. 307, pp. 6, 7, 8.

(2) Arch. du Lot, Tribunal criminel, vol. XVI, folios 36, 37, et an II, D, No 9. Le parrain fut François Lapeune, marchand facturier de soie, et la marraine Anne de Lacourt: l'acte de baptême est signé du vicaire de la Daurade, de Castellan. Copie conforme en fut délivrée le 31 mars 1744, par Dégage, curé de la paroisse, sous l'épiscopat de Charles Loménie de Brienne, avec légalisation par le vicaire général De Faye.

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