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interné, mais le docteur en médecine, J.-Pierre Vargues (?), commissaire de santé nommé par la commune de Gourdon, le déclara inapte à la vie de réclusion.

La maladie chronique dont souffrait ce prêtre le forçait à un régime rigoureux et lui rendait la vie à charge. Le certificat médical du docteur gourdonnais, du 29 mars 1793, fut reconnu conforme à la vérité par le maire Roques et les officiers municipaux Cabanès, Vilars, Maury; il fut déclaré également exact par le directoire du district qui l'envoya, le jour même du 29, au conseil du département (1).

Claude Boytié, prêtre non-fonctionnaire public ni pensionnaire, était, en avril 1793,« perclus de tous ses membres » et cela depuis plusieurs années, passant « les trois-quarts de l'année dans son lit ».

Il était dans l'impossibilité « de se suffire dans ses besoins sans un secours étranger », au témoignage de l'officier de santé qui l'examina le 5 avril.

Le certificat médical était envoyé, de Gourdon, le 5, aux administrateurs du Lot par les membres du directoire du district dans le but de le faire exempter de la réclusion au chef-lieu du département (2).

De Montauban, le 6 avril 1793, partait pour Cahors une lettre recommandant à la bienveillance du directoire du département un prêtre infirme, Gaston, à qui on venait de faire la sommation de se conformer au décret ordonnant la réclusion des prêtres insermentés, âgés ou infirmes.

Cet ecclésiastique demandait à être exempt de la réclusion au chef-lieu du département. La justice et l'humanité exigeaient cette faveur, puisque ce prêtre était sujet à des « infirmités perpétuelles» qui étaient encore à ce moment-là plus graves que précédemment.

La réponse devait être faite rapidement, car le directoire du district n'avait accordé qu'un délai de trois jours pour l'exécution de son arrêté prescrivant la réclusion à Cahors (3).

Le 9 avril, la municipalité de Martel écrivait au directoire du Lot pour faire connaître le mauvais état de santé du prêtre Cam

(1) Arch. du Lot, L. 273, n° 115.

(2) Ibid., L. 252, no 8, 9.

(3) Ibid., L. 273, no 95. L'auteur de cette recommandation demandait la réclusion du prêtre Gaston dans sa famille. L'ecclésiastique porta lui-même la lettre à Cahors (n° 97).

pastié qui le mettait hors d'état de voyager ». Un certificat médi« cal disait cet ecclésiastique atteint de « phtysie pulmonaire ». Elle signalait, au contraire, les prêtres Tombelle et Cayx comme aptes à faire le voyage de Cahors (1).

Les administrateurs du district de Lauzerte prévinrent, le 9, le directoire du département de l'arrestation d'un prêtre réfractaire malade, Jean Godailh, ancien curé d'Olmières (St-Jean-d'Olmières), sur une dénonciation faite au procureur syndic.

L'écclésiastique fut examiné par un médecin qui était membre du directoire du district, Marchand. Il fut jugé apte à supporter le transport d'Olmières à Lauzerte : il y fut porté sur une charrette.

Le prêtre était atteint « d'un asthme fort incommode » et il souffrait de deux hernies. Il avait 88 ans. On ne pouvait songer à le faire transporter dans une maison de réclusion de Cahors.

La lettre du directoire du district rappelait que cet ecclésiastique avait prêté le serment exigé par la loi du 26 décembre 1790, mais qu'il l'avait rétracté (2).

A Duravel se trouvait un prêtre réfractaire, Pierre Blanchez, ancien curé insermenté de Gignac.

L'ecclésiastique avait été autorisé à vivre dans sa famille, par le directoire du département, en raison de son âge de 68 ans et de ses multiples infirmités.

En avril 1793, l'état du malade ne s'était nullement amélioré et cependant les administrateurs du département l'obligèrent à se rendre à Cahors, dans une maison de réclusion.

Le 9, le maire de Duravel annonçait au procureur général-syndic que l'ecclésiastique se soumettait aux ordres du département. Dans sa lettre, il faisait du prêtre cet éloge:

<< Il est venu me dire qu'il se rendrait devers vous et, de là, dans << le lieu destiné à sa réclusion dans le chef-lieu du dép'. Nous << croyons devoir rendre ce témoignage audit Blanchez que depuis << sa retraite dans sa famille, il s'est d'ailleurs montré obéissant « aux lois, et de toute retenue et circonspection. >

Le 4, la municipalité de St-Martin-de-Gignac, alors du canton de Sarrazac, avait attesté que Pierre Blanchez avait pris possession

(1) Arch. du Lot, L. 252, nos 10, 11, 12. Dans sa lettre du 9 avril, la municipalité de Martel annonçait qu'elle avait fait disparaître toutes les traces de féodalité qui existaient dans le lieu de ses séances, à l'exception des tapisseries parsemées de fleurs de lys; elle demandait au département ce qu'elle devait en faire.

(2) Arch. du Lot, L. 252, no 13.

de la cure du lieu en 1763, qu'il avait toujours été « un exemple de vertu, de piété et de religion pour son troupeau, soit pour le spirituel, soit pour le temporel », qu'il avait rempli les fonctions pastorales avec la plus grande exactitude.

La lettre municipale disait de ce prêtre qu'il était doué des talents. « les plus rares et les plus sublimes », qu'il avait observé et fait observer autant qu'il avait été en son pouvoir les décrets de l'Assemblée nationale (1).

De Montalzac, 1er avril 1793, Aboulène demanda à Sartre que son frère prêtre jouît de la tranquillité qu'un âge de 79 ans, des infirmités bien avérées et une conduite notoirement paisible le mettent dans le cas d'obtenir ».

Il rappelait

par occasion » un certificat de civisme qu'il avait envoyé en sa faveur (2).

CHAPITRE VI

Décrets de la Convention contre les réfractaires

Dès les premiers temps de la Convention, la Révolution aiguilla vers la Terreur. En touchant à la conscience religieuse, elle ne put nullement imposer ses volontés. La paix intérieure fut foncièrement troublée. Le clergé et le peuple chrétien n'acceptèrent pas les lois ou décrets qui touchaient aux affaires religieuses de la nation : ils opposèrent une résistance qui ne put être domptée. L'ère des martyrs allait s'ouvrir comme au temps des Césars.

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Tous les prêtres réfractaires furent atteints par ces deux décrets. M. Pierre de la Gorce dit de ces décrets successifs : « Ils étaient brefs, d'une simplicité terrible, et tranchants comme la hache du bourreau ».

Tout prêtre sujet à la déportation, trouvé sur le territoire de la République, devait être conduit aussitôt en prison.

(1) Arch. du Lot, L. 129, nos 37, 38.

(2) Ibid., L. 114, no 2, 509.

Un jury militaire le jugeait immédiatement et le punissait de mort dans les vingt-quatre heures.

Tout prêtre déporté rentré devait être puni également de mort dans les vingt-quatre heures.

Tout citoyen qui avait connaissance de la retraite d'un réfractaire était tenu de la révéler aux autorités constituées.

Ces dénonciations étaient légalement requises pour empêcher tout prêtre insermenté ou rétracté d'échapper au châtiment de la loi. Tous les ecclésiastiques sans exception aucune ayant exercé des fonctions publiques, étaient ainsi mis inexorablement hors la loi (1). Pour ceux qui n'avaient jamais été fonctionnaires publics, ils étaient, eux aussi, très rudement frappés. S'ils n'avaient pas prêté le serment prescrit par la loi du 27 novembre-26 décembre 1790, ils devaient être embarqués et transférés de suite à la Guyane française. Les sexagénaires, les malades et les infirmes devaient être emprisonnés.

Ces mesures atteignaient non seulement les prêtres, séculiers ou réguliers, mais encore les frères convers, les frères lais des ordres monastiques.

Quant à ceux qui avaient prêté le serment requis en 1790 et 1791, ils devaient être épargnés.

Cependant, s'ils étaient dénoncés pour incivisme par six citoyens quelconques du canton, ils devaient être transportés à la Guyane malgré leur prestation du serment de fidélité à la Constitution.

S'ils échappaient ou reparaissaient dans le pays, ils étaient aussitôt mis à mort.

Avec de telles lois, l'Eglise de France semblait bien frappée à

mort.

Dispositions prises dans le Lot touchant l'arrestation et la mise en réclusion des prêtres réfractaires

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1° Avant le 11 avril. Le 18 mars 1793, la municipalité de Cahors faisait appel aux dénonciateurs pour que les « perfides >

(1) La loi du 19-20 mars 1793 concernant les punitions de ceux qui étaient prévenus d'avoir pris part à des révoltes ou émeutes contre-révolutionnaires à l'époque du recrutement, punissait de mort les prêtres, les ci-devant » nobles et seigneurs, les émigrés, les agents et domestiques de toutes ces personnes, les étrangers, etc... (art. 6).

ennemis de la République, «ces êtres vils et pervers », fussent connus et livrés au glaive de la loi.

Le ministre de l'Intérieur Garat approuva, le 25 mars 1793, toutes mesures qui avaient pu être prises avant cette date dans le département du Lot touchant la déportation des prêtres (1).

Le 25 mars, le procureur général disait, dans une circulaire. envoyée aux administrateurs des six districts, au sujet des émigrés rentrés dans les communes et des prêtres réfractaires :

<< Faites arrêter les malintentionnés; ne perdez jamais de vue << les proches parents des émigrés, et que la loi qui les consigne « dans leurs communes respectives soit exécutée à la rigueur; « faites arrêter tous ceux desdits émigrés qui seraient rentrés, << que les prêtres insermentés n'échappent point à votre surveil<< lance. En un mot, n'épargnez personne. Souvenez-vous que de << votre conduite va dépendre votre bonheur ou votre malheur. « J'ai résolu de poursuivre sans relâche tout fonctionnaire qui ne << fera pas son devoir, tout comme aussi j'ai promis de proclamer << ses belles actions (2). »

De Montauban, le 25 mars encore, les membres de la Convention nationale nommés commissaires dans le Lot et la Dordogne, Jeanbon St-André et Elie Lacoste, exigèrent du directoire du Lot les ordres les plus sévères pour faire arrêter les émigrés, les prêtres perturbateurs et les auteurs de troubles.

Ils avaient appris que des mouvements contre-révolutionnaires se produisaient de nouveau dans le département et ils demandaient que des mesures sévères fussent prises par les administrateurs du Lot.

Le directoire du département fit ce que lui demandèrent les deux représentants de la Convention et, le 27, il prit un arrêté pour assurer l'exécution des lois contre les prêtres insermentés et les suspects, pour obtenir en particulier l'application de la loi du 19-20 mars 1793.

Le directoire du département ordonna aux municipalités de publier et afficher son arrêté du 27.

A Cahors, cet ordre fut ponctuellement exécuté.

Le 2 avril, l'arrêté fut publié et affiché dans la ville par le conseil municipal, suivi du substitut du procureur de la commune, du juge de paix Ramel et de la garde nationale « tant à pied qu'à

(1) Arch. du Lot, L. 114, n° 2, 664.

(2) Ibid., L. 112, n° 2.

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