Page images
PDF
EPUB

On ne le gêne pas là-dessus en province; mais à Londres on use de l'exactitude la plus solennelle, tant pour l'ordre que pour le jour de l'exécution. Le greffier en chef, après avoir fait au roi en personne son rapport de toutes les sentences des prisonniers, si la réponse du roi est qu'il faut suivre le cours de la justice, donne ordre aux shériffs pour le lieu et le jour de l'exécution. Dans la cour du banc du roi, si le prisonnier a été jugé à la barre, on y déterminé le temps et le lieu de l'exécution; et pour tout le royaume, le statut 25 de George II, ch. 37, a ordonné au juge de fixer, dans la sentence, l'exécution au lendemain. Il n'est pas au pouvoir du shériff de faire aucun changement aux termes de la sentence: en substituant un genre de mort à celui qui est prononcé, il se rendrait coupable de félonic. Sur ce point Édouard Coke et Mathieu Hale soutiennent que le roi lui-même n'a pas le droit de changer la peine de la loi, celle de la potence, par exemple, ou celle du feu, en décapitation; cependant si la décapitation fait partie de la sentence il peut faire grâce du reste. Lorsque le lord Stafford fut exécuté pour une conjuration tramée par les papistes, sous le règne de Charles II, les shériffs de Londres ayant reçu l'ordre du roi pour lui faire trancher la tête, ils demandèrent à la chambre des pairs un nouvel ordre pour exécuter celui du roi; la raison qu'ils en donnèrent, était que le coupable ayant été accusé et poursuivi au parlement, ils ne croyaient pas que le roi pût remettre une partie de la sentence; et il faut remarquer que le lord Russel était de cet avis. Les pairs

[ocr errors]

traitèrent la demande de scrupule frivole, et déclarèrent qu'il fallait obéir à l'ordre du roi. Les shériffs ne pouvant allumer le feu de la dissension dans cette chambre, s'adressèrent à la chambre des communes, qui, après deux jours de débats, fit la même déclaration que la chambre des pairs. Mais, quelque temps après, le lord Russel fut jugé et condamné pour haute trahison; le roi, en lui remettant ce qu'il y avait de plus ignominieux dans l'exécution, dit : «Que peut-être il ne voudrait pas » profiter de cette grâce, puisque dans l'affaire de » lord Stafford il avait contesté ce pouvoir à la pré» rogative royale. » Le zèle indécent et sanguinaire des sujets fut encore moins blâmable que le froid et cruel sarcasme du souverain.-Aujourd'hui on n'exécute que cinq ou six condamnés sur cent : ce sont les coupables de grands crimes, avec des circonstances très-graves, tels que l'empoisonnement, le parricide, les assassinats multipliés; quant aux autres, leur peine est commuée en celle de la déportation. Si un criminel condamné à être pendu jusqu'à ce que mort s'ensuive (1), échappe à la mort par la maladresse de l'exécuteur, ou quelqu'autre hasard, le shériff est tenu de renouveler l'exécution, parce que la sentence n'a pas été entièrement exécutée. Autrefois, en France, le juge

[ocr errors]

(1) Le juge, en ce cas, prononce la sentence en ces termes : John Grey (en l'appelant par son nom), you are sentenced to be hanged by your neck, till you be dead, dead, dead. John Grey, vous êtes condamné à être pendu par votre cou, jusqu'à ce que vous soyez mort, mort,

mort.

ment de condamnation devait être exécuté le jour même qu'il avait été prononcé. Papon cite un arrêt du parlement de Paris du 15 février 1515, qui juge qu'une fille publique pouvait sauver la vie à un criminel condamné à mort, en offrant de l'épouser. Boerius dit à ce sujet qu'il a vu plusieurs fois observer cette règle à l'égard des filles ravies, lorsqu'elles consentaient à épouser leurs ravisseurs ; mais qu'il n'a jamais vu qu'on la pratiquât envers les autres criminels condamnés à mort: en effet, si cela avait pu avoir lieu, les jugemens de condamnation à mort n'auraient été que très-rarement exécutés. L'arrêt cité par Papon ne peut pas être considéré comme une règle.-Expilly rapporte un arrêt du 6 avril 1606, par lequel le parlement de Grenoble débouta deux filles des offres qu'elles avaient faites d'épouser deux hommes condamnés à mort. Si le criminel arrivé au lieu du supplice, ou même immédiatement après la prononciation, faisait des déclarations qui donnassent lieu à des procédures avec d'autres accusés, l'exécution pouvait être différée jusqu'au lendemain, et même plus long-temps; mais aussitôt que la nouvelle instruction était terminée, on procédait sans délai à l'exécution du jugement, quand même elle serait tombée un jour de fête solennelle. Si une femme condamnée à mort déclarait être enceinte, et si la déclaration se trouvait vraie, l'exécution était différée jusqu'après l'accouchement.-Lorsque le criminel vient à mourir après la condamnation prononcée contre lui, elle ne doit point être exécutée. Les exécutions devaient se faire en public et jamais dans les pri

sons ni dans d'autres endroits particuliers, à moins que le roi ne l'eût permis ou ordonné, comme cela se fit à l'égard du maréchal de Biron, qui avait été condamné, par arrêt du 29 juillet 1602, à avoir la tête tranchée en place de Grève. Ses parens présentèrent une requête au roi pour obtenir que l'exécution ne se fît point en public, et cette grâce leur fut accordée. Le roi fit expédier des lettres portant qu'en leur faveur l'exécution serait faite à la Bastille.-Dans quelques circonstances on a vu faire l'exécution aux flambeaux.-Anciennement le lieutenant-criminel assistait aux exécutions à cheval; plus tard il y assista en carrosse; il en fut de même des greffiers. Quand le coupable était sur l'échafaud, comme on ne pouvait l'en faire descendre, il fallait que le juge s'approchât pour recevoir ses déclarations et en dresser les actes nécessaires. A l'égard des cours, elles étaient dans l'usage de faire recevoir ces déclarations par leur greffier, lorsque le patient était au lieu du supplice, et qu'il ne pouvait être conduit dans un lieu voisin. Avant la révolution on exposait les cadavres des criminels sur les grands chemins, à moins que le juge ne permît, pour de justes considérations, qu'on les enterrât, ce qui s'observait toujours à l'égard des femmes. Les jugemens qui condamnaient un criminel devaient être exécutés jusqu'à ce que mort s'en suive; c'est pourquoi si la corde venait à rompre lorsqu'on pendait le coupable, il fallait le pendre de nouveau. Aujourd'hui le Code d'instruction criminelle et le Code pénal prescrivent les formalités relatives à l'exécution des juge

[ocr errors]

mens criminels. La condamnation doit être exécutée, aux termes du premier de ces Codes, dans les vingt-quatre heures qui suivent les délais accordés pour se pourvoir en cassation; et en cas de recours, dans les vingt-quatre heures de la réception de l'arrêt de la cour de cassation qui aura rejeté le pourvoi. Le procureur-général a le droit de requérir pour cet effet l'assistance de la force publique. -Si le condamné veut faire une déclaration, elle est reçue par un des juges du lieu de l'exécution, assisté du greffier.-Le procès-verbal d'exécution doit être, sous peine de 100 fr. d'amende, dressé par le greffier et transcrit par lui, dans les vingtquatre heures, au pied de la minute de l'arrêt. La transcription est signée par lui, et il doit faire mention du tout, sous la même peine, en marge du procès-verbal. Cette mention est également signée, et la transcription fait preuve contre le procès-verbal (1). Aucune condamnation ne peut être 'exécutée les jours de fêtes nationales ou religieuses, ni les dimanches (2). L'exécution se fait sur l'une des places publiques du lieu qui est indiqué par l'ar

(1) Code d'instruction criminelle, articles 375, 376 et

suivans.

(2) Une loi du 22 germinal an 4 a prévu le cas où les ouvriers refuseraient de faire les travaux nécessaires pour l'exécution des jugemens criminels; voici comment elle est conçue : « Les commissaires du Directoire exécutif près des tribunaux requerront les ouvriers, chacun à leur tour, de faire les travaux nécessaires pour l'exécution des jugemens, à la charge de leur en faire compter le prix ordinaire, (art. 1.) Tout ouvrier qui refuserait de déférer

« PreviousContinue »