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CHAPITRE XVI.

ENFANTS DU PREMIER AGE ET NOURRISSONS.

Loi du 23 décembre 1874.

1170. Observations préliminaires.

1171. Loi du 23 décembre 1874.

SOMMAIRE.

1172. Article 1er. Enfants de deux ans, en sevrage, en garde.

1173. Article 2. 1174. Article 3. 1175. Article 4. 1176. Article 5. 1177. Article 6. 1178. Article 7.

1179. Article 8.

1180. Article 9. 1181. Article 10. 1182. Article 11.

1183. Article 12.

1184. Article 13.

1185. Article 14.

Comité de surveillance.
Comité supérieur.
Statistique.
Inspection médicale.

Refus de recevoir le médecin.
Déclaration à la mairie.
Certificats.

Formalités imposées aux nourrices,
Registre tenu aux mairies.
Bureaux de nourrices.

Règlement d'administration publique.
Récidive. Circonstances atténuantes.
Privilége des nourrices.

1186. Article 15. Répartition des dépenses.
1187. Résumé.

1170.-La loi du 23 décembre 1874, relative à la protection des enfants du premier âge et, en particulier, des nourrissons, est due à l'initiative de M. Théophile Roussel, membre de l'Assemblée nationale.

M. Roussel, frappé de l'excessive mortalité qui atteint les enfants mis en nourrice, a pensé que le législateur devait rechercher les moyens d'arrêter un fléau qui contribue, pour une large part, à la dépopulation de la France. Dans les départements où Paris et d'autres grandes villes envoient les enfants nouveau-nés, la mortalité pendant la première année de leur existence s'élève parfois jusqu'à 90 pour 100, tandis que la mortalité moyenne des enfants du même âge dans la France entière ne dépasse pas 10 pour 100.

Dans l'exposé qui précède sa proposition, M. Roussel énumère toutes les causes de cette effroyable calamité : le défaut de surveillance des établissements connus sous le nom de bu

reaux de nourrices, l'absence de toute inspection administrative et médicale des enfants qu'ils placent à la campagne, le mode défectueux de transport de ces enfants à une époque de la vie où la moindre négligence peut être mortelle, l'indifférence des mères et surtout la cupidité des nourrices qui, loin de suppléer par leur sollicitude aux soins maternels dont sont privés les petits êtres qui leur sont confiés, n'y voient qu'une occasion de lucre dont elles cherchent avant tout à tirer parti. A des abus monstrueux, que malheureusement aujourd'hui les mœurs et la conscience publique sont impuissants à prévenir, la loi doit apporter des remèdes efficaces. Voir Bulletin annoté des lois et décrets, 1875, p. 254. 1171.- La loi du 23 décembre 1874 se compose de quinze articles.

Elle prend sous sa protection les enfants âgés de moins de deux ans, elle institue des comités de surveillance et des inspections médicales; elle soumet à certaines obligations toute personne ayant, moyennant salaire, des nourrissons, tous les bureaux de placement, tous les intermédiaires; elle édicte des peines contre ceux qui méconnaissent ses prescriptions, peines appliquées, selon les cas, par les tribunaux correctionnels ou par les tribunaux de simple police.

Cette loi, dont les dispositions sont fort claires, ne nécessite aucun commentaire. Nous transcrivons ses divers articles, nous arrêtant seulement là où quelque intérêt se présente pour le juge de police.

1172. «Tout enfant âgé de moins de deux ans, qui est placé, moyennant salaire, en nourrice, en sevrage ou en garde hors du domicile de ses parents, devient, par ce fait, l'objet d'une surveillance de l'autorité publique, ayant pour but de protéger sa vie et sa santé. » (Art. 1er).

Cet article fixe l'âge de deux ans comme limite légale de la protection spéciale instituée en faveur du premier âge. Dans le langage habituel des médecins, le premier âge correspond à la durée de l'allaitement, qui est le plus généralement d'environ douze mois. Mais l'étude des faits a démontré qu'en enfermant la loi dans cette limite, on laisserait sans protection un grand nombre d'enfants qui en ont le plus pressant besoin. D'abord, dans certaines provinces du Midi, l'allaitement se poursuit très-avant dans la deuxième année; en outre, dans tous les grands centres, les enfants dont les mères travaillent ne sont reçus à la salle d'asile qu'après la deuxième année révolue.

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L'article 1 adjoint à la catégorie des enfants en nourrice, une catégorie appelée : enfants en sevrage ou en garde. Un nombre considérable de maisons de sevrage échappaient à la surveillance de la police.

Notons, une fois pour toutes, qu'il ne s'agit dans la loi que des nourrissons ou des enfants reçus par des nourrices ou des gardeuses, moyennant salaire.

1173.« La surveillance instituée par la présente loi est confiée, dans le département de la Seine, au préfet de police, et, dans les autres départements, aux préfets.

« Ces fonctionnaires sont assistés d'un comité ayant pour mission d'étudier et de proposer les mesures à prendre, et composé comme il suit :

<< Deux membres du conseil général, désignés par ce conseil;

«Dans le département de la Seine, le directeur de l'assistance publique, et, dans les autres départements, l'inspecteur du service des enfants assistés;

« Six autres membres, nommés par le préfet, dont un pris parmi les médecins membres du conseil départemental d'hygiène publique, et trois parmi les administrateurs des sociétés légalement reconnues qui s'occupent de l'enfance, notamment des sociétés protectrices de l'enfance, des sociétés de charité maternelle, des crèches ou des sociétés des crèches, ou, à leur défaut, parmi les membres des commissions administratives des hospices et des bureaux de bienfaisance.

« Des commissions locales sont instituées par un arrêté du préfet, après avis du comité départemental, dans les parties du département où l'utilité en sera reconnue, pour concourir à l'application des mesures de protection des enfants et de surveillance des nourrices et gardeuses d'enfants.

« Deux mères de famille font partie de chaque commission locale.

«Les fonctions instituées par le présent article sont gratuites. (Art. 2).

1174.« Il est institué, près le ministère de l'intérieur, un comité supérieur de protection des enfants du premier âge, qui a pour mission de réunir et coordonner les documents transmis par les documents départementaux, d'adresser chaque année au ministre un rapport sur les travaux de ces comités, sur la mortalité des enfants et sur les mesures les plus propres à assurer et étendre les bienfaits de la loi, et de proposer, s'il y a lieu, d'accorder des récompenses honori

fiques aux personnes qui se sont distinguées par leur dévouement et leurs services.

« Un membre de l'académie de médecine, désigné par cette académie, les présidents de la société protectrice de l'enfance de Paris, de la société de charité maternelle et de la société des crèches, font partie de ce comité.

« Les autres membres, au nombre de sept, sont nommés par décret du Président de la République.

<< Les fonctions de membre du comité supérieur sont gratuites.» (Art. 3).

1175.« Il est publié, chaque année, par les soins du ministre de l'intérieur, une statistique détaillée de la mortalité des enfants du premier âge, et spécialement des enfants placés en nourrice, en sevrage ou en garde.

«Le ministre adresse, en outre, chaque année, au Président de la République, un rapport officiel sur l'exécution de la présente loi. » (Art. 4).

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1176. Dans les départements où l'utilité d'établir une inspection médicale des enfants en nourrice, en sevrage ou garde est reconnue par le ministre de l'intérieur, le comité supérieur consulté, un ou plusieurs médecins sont chargés de cette inspection.

« La nomination de ces inspecteurs appartient aux préfets.» (Art. 5).

1177.« Sont soumis à la surveillance instituée par la présente loi toute personne ayant un nourrisson ou un ou plusieurs enfants en sevrage ou en garde, placés chez elle, moyennant salaire; les bureaux de placement et tous les intermédiaires qui s'emploient au placement des enfants en nourrice, en sevrage ou en garde.

« Le refus de recevoir la visite du médecin inspecteur, du maire de la commune ou de toutes autres personnes déléguées ou autorisées en vertu de la présente loi, est puni d'une amende de cinq à quinze francs.

« Un emprisonnement de un à cinq jours peut être prononcé si le refus dont il s'agit est accompagné d'injures ou de violences.» (Art. 6).

Cet article concerne les nourrices, les personnes ayant des nourrissons, les bureaux de placement et les intermédiaires.

La contravention qu'il prévoit et qui consiste à refuser de recevoir la visite du médecin, etc., est, d'après la nature de la condamnation, déférée au tribunal de police, qui la réprime d'une amende de cinq à quinze francs.

A l'amende, peut être ajouté un emprisonnement de un à cinq jours, si le refus a été accompagné d'injures ou de violences.

1178.« Toute personne qui place un enfant en nourrice, en sevrage ou en garde, moyennant salaire, est tenue, sous les peines portées par l'article 346 du Codé pénal, d'en faire la déclaration à la mairie de la commune où a été faite la déclaration de naissance de l'enfant, ou à la mairie de la résidence actuelle du déclarant, en indiquant, dans ce cas, le lieu de la naissance de l'enfant, et de remettre à la nourrice ou à la gardeuse un bulletin contenant un extrait de l'acte de naissance de l'enfant qui lui est confié. » (Art. 7).

Cet article concerne les parents et toutes personnes qui placent un enfant en nourrice, en sevrage ou en garde.

Le délit qu'il prévoit et qui consiste à ne pas faire telle déclaration ou à ne pas remettre tel bulletin à la gardeuse, est déféré au tribunal correctionnel; il est puni, en vertu de l'article 346, C. pén., d'un emprisonnement de six jours à six mois, et d'une amende de seize francs à trois cents francs.

1179. << Toute personne qui veut se procurer un nourrisson, ou un ou plusieurs enfants en sevrage ou en garde, est tenue de se munir préalablement des certificats exigés par les règlements, pour indiquer son état civil et justifier de son aptitude à nourrir ou à recevoir des enfants en sevrage ou en garde.

«Toute personne qui veut se placer comme nourrice sur lieu et tenue de se munir d'un certificat du maire de sa résidence, indiquant si son dernier enfant est vivant, et constatant qu'il est âgé de sept mois révolus, ou, s'il n'a pas atteint cet âge, qu'il est allaité par une autre femme remplissant les conditions qui seront déterminées par le règlement d'administration publique prescrit par l'article 12 de la présente loi.

« Toute déclaration ou énonciation reconnue fausse dans lesdits certificats, entraîne l'application au certificateur des peines portées au § 1er de l'article 155 du Code pénal. »> (Art. 8).

L'article 8 renferme deux dispositions distinctes: l'une impose des obligations aux nourrices, l'autre punit les tiers qui délivrent des certificats mensongers.

La personne qui veut prendre un nourrisson, ou des enfants soit en sevrage, soit en garde, doit, au moyen de certificats, indiquer son état civil, et justifier qu'elle est capable

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