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sir serait que vous voulussiez bien vous charger de la correspondance. Il est absolument intéressant qu'il s'établisse une correspondance très active entre les différens chefs de division, et entre les chefs de division et les chefs de canton. C'est de l'ensemble et de l'accord parfait dans nos opérations que nous devons espérer des succès. M. de Frotté père, chargé des pouvoirs de MONSIEUR, frère du roi, m'avait chargé d'établir ici un point de correspondance. J'ai eu le bonheur de réussir, et j'ai la satisfaction de vous annoncer que je suis parvenu à engager plusieurs royalistes, recommandables par leurs talens et leur prudence, à se réunir de temps en temps, pour se concerter et opérer le plus de bien qu'ils pourront, et faire parvenir tant aux conseils, qu'aux chefs de division et chefs de canton, tous les renseignemens qui pourraient leur être de quelque utilité. Comme il m'est absolument impossible de me rendre auprès de M. du Rosel et auprès de vous, vu que des affaires de la dernière importance exigent ma présence ici pendant quelque temps, je desirerais bien qu'il vous fût possible de venir me trouver, afin d'aviser aux meilleurs moyens d'établir nos communications.

M. Faincere, chef de canton dans la division de M. du Rosel, dans l'arrondissement de Coutances, mérité à tous égards l'emploi dont il est chargé. Sa conduite lui fait autant d'honneur, que sa douceur et son humanité lui font de partisans dans un

pays où il est adoré... J'ai eu le plaisir de le voir; j'en ai été parfaitement content. Il m'a fait l'honneur de m'écrire, et maintenant notre correspondance est établie. Je lui ai fait passer près de deux cents livres de poudre, quelques fusils. J'espère lui en procurer une quantité assez considérable. J'ai fait marché avec un armurier pour m'en faire une certaine quantité à assez bon compte; et si j'avais des fonds, je pourrais procurer à M. du Rosel, par le moyen de Faincere, une partie de ce dont il pourrait avoir besoin,

Défiez-vous d'un nommé Gobert, mari d'une des demoiselles Vesvales, qui sont en prison à Coutances c'est un jeune homme de vingt-huit à trente ans, taille de cinq pieds deux ou trois pouces, les cheveux d'un blond hasardé; se disant Chouan rentré par l'amnistie et chargé de mission. C'est un espion du gouvernement: il est capable de tout; et peut nous faire beaucoup de mal.

Veuillez, Monsieur et cher ami, faire part de ma lettre à monsieur du Rosel je vous prie de l'assurer de mon respectueux attachement, et de lui témoigner combien je suis désolé de ne pouvoir me rendre auprès de lui.

J'espère avoir le plaisir de vous voir sous peu : faites tout votre possible pour venir ici. Vous ne devez pas douter de la satisfaction que me causera votre bonne visite; vous rendrez service au parti pour lequel vous travaillez avec tant d'ardeur, et vous me mettrez à même de vous témoigner les

sentimens de l'estime la plus profonde et de l'attachement le plus sincère, monsieur et cher ami, DUHAMEL, dit UTILE.

Votre, etc.,

P. S. Je vous prie de m'honorer d'une réponse, et de me dire quel est votre nom de guerre. Mon adresse est à M. Utile.

FIN DE LA CORRESPONDANCE GÉNÉRALE.

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NOTE

SUR LES GRACES A ACCORDER A L'ARMÉE CATHOLIQUE

ET ROYALE DU BAS-ANJOU ET HAUT-POITOU,

TROUVEE DANS UN DES QUARTIERS - GÉNÉRAUX, EN 1796.

J'AVAIS toujours pensé qu'il eût été à souhaiter qu'on n'eût accordé des récompenses militaires aux chefs des armées royalistes, que lorsque le roi eût été rétabli sur son trône: elles eussent pu être regardées plutôt comme le prix de la vertu, que comme un véhicule. Pour en obtenir des résultats, il m'a paru que les héros d'immortelle mémoire qui ont formé la Vendée l'ont presque miraculeusement ressuscitée après sa destruction; il m'a paru, dis-je, qu'ils avaient toujours partagé mon opinion à cet égard; mais M. de Puisaye ayant, en vertu des pouvoirs qui lui étaient confiés, accordé dans son armée, et des grades et des décorations militaires, il me paraît essentiel au bien de la cause, que toutes les armées soient traitées de la même manière. Cependant, parmi les récompenses militaires, celles qui sont les plus saillantes, celles qui demeurent à jamais l'enseigne de la vertu et du courage, ne doivent pas être prodiguées. Si on donnait, dans ce moment, des cordons et des plaques, il ne resterait plus au roi de moyens pour payer les grandes choses qui nous restent à faire. En vain objecterait-on que M. de Charette, ayant reçu du roi le cordon rouge, il sera fâcheux que ses collègues n'en soient pas décorés. Je réponds que M. Stofflet pourrait seul réclamer contre cette préférence; mais M. Stofflet n'est pas gentilhomme; mais si le cordon rouge est la plus flatteuse décoration que puisse desirer un gentilhomme, M. Stofflet a mérité de naître dans notre classe. Les rois de France ont mille moyens de faire des nobles; ils n'en ont qu'un de faire un gentilhomme. Louis XV en fit usage en faveur du maréchal de Balincourt; et si Stofflet continue de servir son roi comme il l'a fait jusqu'à ce jour, sans doute il aura autant mérité cette faveur que le doyen du tribunal. MONSIEUR ne peut rien faire, dans ce moment, pour un

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