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l'Assemblée nationale; instruit ou du moins pouvant présumer que cette armée nous attaquera dans un mois, disposait avec lenteur les préparatifs de répulsion; si l'on avait une juste inquiétude sur les progrès que les ennemis pourraient faire dans l'in térieur de la France, et qu'un camp de réserve fût évidemment nécessaire pour prévenir ou arrêter ces

qui la désolent. Je prie que l'on m'écoute avec calme, qu'on ne se hâte pas de me deviner pour approuver ou condamner d'avance ce que je n'ai pas l'intention de dire. Fidèle à mon serment de maintenir la constitution, de respecter les pouvoirs constitués, c'est la constitution seule que je vais invoquer. De plus, j'aurai parlé dans les intérêts bien entendus du roi, si, à l'aide de quelques ré-progrès; s'il existait un décret qui rendit infaillible flexions d'une évidence frappante, je déchire le bandeau que l'intrigue et l'adulation ont mis sur ses yeux, et si je lui montre le terme où ses perfides amis s'efforcent de le conduire.

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et prompte la formation de ce camp; si le roi rejetait ce décret et lui substituait un plan dont le succès fùt incertain, et demandât pour son exécution un temps si considérable, que les ennemis auraient celui de la rendre impossible; si le corps législatif rendait des décrets de sûreté générale, que l'urgence du péril ne permît aucun délai, que cependant la sanction fût refusée ou différée pendant deux mois; si le roi laissait le commandement d'une armée à un gé. néral intrigant, devenu suspect à la nation par les fautes les plus graves, les attentats les plus caractérisés à la constitution; si un autre général, nourri loin de la corruption des cours, et familier avec la victoire, demandait pour la gloire de nos armes un renfort qu'il serait facile de lui accorder; si, par un refus, le roi lui disait clairement: Je te défends de vaincre; si, mettant à profit cette funeste temporisation, tant d'incohérence dans notre marche politique, ou plutôt une si constante persévérance dans la perfidie, la ligue des tyrans portait des atteintes mortelles à la liberté, pourrait-on dire que le roi a fait la résistance constitutionnelle, qu'il a rempli pour la défense de l'Etat le von de la constitution, qu'il a fait l'acte formel qu'elle lui prescrit?

C'est au nom du roi que les princes français ont tenté de soulever contre la nation toutes les cours de l'Europe; c'est pour venger la dignité du roi que s'est conclu le traité de Pilnitz, et formée l'alliance monstrueuse entre les cours de Vienne et de Berlin; c'est pour défendre le roi qu'on a vu accourir en Allemagne, sous les drapeaux de la rebellion, les anciennes compagnies des gardes du corps; c'est pour venir au secours du roi que les émigrés sollicitent et obtiennent de l'emploi dans les armées autrichiennes, et s'apprêtent à déchirer le sein de leur patrie; c'est pour joindre ces preux chevaliers de la prérogative royale, que d'autres preux pleins d'honneur et de délicatesse abandonnent leur poste en présence de l'ennemi, trahissent leurs serments, volent les caisses, travaillent à corrompre leurs soldats, et placent ainsi leur gloire dans la lâcheté, le parjure, la subornation, le vol et les assassinats; c'est contre la nation ou l'Assemblée nationale seule, et pour le maintien de la splendeur du trône, que le roi de Bohème et de Hongrie nous fait la guerre, Souffrez que je raisonne encore dans cette sup-. et que le roi de Prusse marche vers nos frontières ; c'est au nom du roi que la liberté est attaquée, et position douloureuse. J'ai exagéré plusieurs faits, que, si l'on parvenait à la renverser, on démembre- j'en énoncerai même tout-à-l'heure, qui, je l'esrait bientôt l'empire pour en indemniser de leurs père, n'existeront jamais, pour ôter tout prétexte frais les puissances coalisées; ear on connaît la gé-à des applications qui sont purement hypothétinérosité des rois, on sait avec quel désintéressement ils envoient leurs armées pour désoler une terre étrangère, et jusqu'à quel point on peut croire qu'ils épuiseraient leurs trésors pour soutenir une guerre qui ne devrait pas leur être profitable. Enfin tous les maux qu'on s'efforce d'accumuler sur nos têtes, tous ceux que nous avons à redouter, c'est le nom seul du roi qui en est le prétexte ou la cause.

Or, je lis dans la constitution, chap. II, section Ire, art. VI: « Si le roi se met à la tête d'une armée et en dirige les forces contre la nation, ou s'il ne s'oppose pas, par un acte formel, à une telle entreprise qui s'exécuterait en son nom, il sera censé avoir abdiqué la royauté. »

Maintenant je vous demande ce qu'il faut entendre par un acte formel d'opposition; la raison me dit que c'est l'acte d'une résistance proportionnée, autant qu'il est possible, au danger, et faite dans un temps utile pour pouvoir l'éviter.

Par exemple, si, dans la guerre actuelle, cent mille autrichiens dirigeaient leur marche vers la Flandres, ou cent mille prussiens vers l'Alsace, et que le roi, qui est le chef suprême de la force publique, n'opposât à chacune de ces deux redoutables armées qu'un détachement de dix ou vingt mille hommes, pourrait-on dire qu'il a employé des moyens de résistance convenables, qu'il a rempli le vœu de la constitution et fait l'acte formel qu'elle exige de lui?

Si le roi, chargé de veiller à la sûreté extérieure de l'Etat, de notifier au corps législatif les hostilités imminentes, instruit des mouvements de l'armée prussienne, et n'en donnant aucune connaissance à

ques: mais j'ai besoin d'un développement complet, pour montrer la vérité sans nuages.

Si tel était le résultat de la conduite dont je viens de tracer le tableau, que la France nageât dans le sang, que l'étranger y dominât, que la constitution fût ébranlée, que la contre-révolution fùt là, et que le roi vous dit pour sa justification :

Il est vrai que les ennemis qui déchirent la France prétendent 'agir que pour relever ma puissance, qu'ils supposent anéantie; venger ma dignité, qu'ils supposent flétrie; me rendre mes droits royaux. qu'ils supposent compromis ou perdus ; mais j'ai prouvé que je n'étais pas leur complice: j'ai obéi à la constitution, qui m'ordonne de m'opposer par un acte formel à leurs entreprises, puisque j'ai mis des armées en campagne. Il est vrai que ces armées étaient trop faibles, mais la constitution ne désigne pas le degré de force que je devais leur donner; il est vrai que je les ai rassemblées trop tard, mais la constitution ne désigne pas le temps auquel je devais les rassembler; il est vrai que des camps de réserve auraient pu les soutenir, mais la constitution ne m'oblige pas à former des camps de réserve.

Il est vrai que, lorsque les généraux s'avançaient en vainqueurs sur le territoire ennemi, je leur ai ordonné de s'arrêter; mais la constitution ne me prescrit pas de remporter des victoires; elle me défend même les conquêtes. Il est vrai qu'on a tenté de désorganiser les armées par des démissions combinées d'officiers, et que je n'ai fait aucun effort pour arrêter le cours de ces démissions; mais

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en votre nom sur la liberté; mais vous ne recueillerez point le fruit de ces indignes triomphes: vous n'êtes plus rien pour cette constitution que vous avez si indignement violée, pour ce peuple que vous avez si lâchement trahi. (Les applaudissements recommencent avec plus de force dans la très-grande majorité de l'Assemblée. )

(La suile à demain.]

la constitution n'a pas prévu ce que j'aurais'à faire en pareil délit. Il est vrai que mes ministres ont continuellement trompé l'Assemblée nationale sur le nombre, la disposition des troupes et leurs approvisionnements; que j'ai gardé le plus long-tenips que j'ai pu ceux qui entravaient la marche du gouvernement constitutionnel, le moins possible ceux | qui s'efforçaient de lui donner du ressort; mais la constitution ne fait dépendre leur nomination que de N. B. M. Dumas a réfuté successivement toutes les proma volonté, et nulle part elle n'ordonne que je donne ma confiance aux patriotes et que je chasse les positions de M. Vergniaud, à l'exception de celle du message au roi. Il s'est attaché ensuite à justifier le système de contre-révolutionnaires; il est vrai que l'Assemblée campagne et les différentes mesures de défense prises par le nationale a rendu des décrets utiles ou même néces- gouvernement. -Ayant parlé de l'injustice des soupçons saires et que j'ai refusé de les sanctionner; mais j'en répandus contre le général de l'armée du Nord, au sujet avais le droit il est sacré; car je le tiens de la de sa retraite, l'Assemblée entière s'est levée pour déconstitution. Il est vrai, enfin, que la contre-ré-nier et repousser ces inculpations, et, par un décret unanime, a déclaré que M. le maréchal Luckner n'a pas cessé de jouir volution se fait, que le despotisme va remettre de la confiance nationale. entre mes mains son sceptre de fer, que je vous en écraserai, que vous allez ramper, que je vous punirai d'avoir eu l'insolence de vouloir être libres; mais j'ai fait tout ce que la constitution me prescrit; il n'est émané de moi aucun acte que la constitution condamne; il n'est donc pas permis de douter de ma fidélité pour elle, de mon zèle pour sa défense. (On applaudit à plusieurs reprises.)

Si, dis-je, il était possible que, dans les calamités d'une guerre funeste, dans un bouleversement contre-révolutionnaire, le roi des Français leur tint ce langage dérisoire; s'il était possible qu'il leur parlat jamais de son amour pour la constitution avec une ironie aussi insultante, ne seraient-ils pas en droit de lui repondre:

O roi qui sans doute avez cru, avec le tyran Lysandre, que la vérité ne valait pas mieux que le mensonge, et qu'il fallait amuser les hommes par des serments, ainsi qu'on amuse les enfants avec des osselets; qui n'avez feint d'aimer les lois que pour parvenir à la puissance qui vous servirait à les braver; la constitution que pour qu'elle ne vous précipitat pas du trône, où vous aviez besoin de rester pour la détruire; la nation que pour assurer le succès de vos perfidies en lui inspirant de la confiance; pensez-vous nous abuser aujourd'hui avec d'hypocrites protestations, nous donner le change sur la cause de nos malheurs, par l'artifice de vos excuses et l'audace de vos sophismes?

Etait-ce nous défendre que d'opposer aux soldats étrangers des forces dont l'infériorité ne laissait pas même d'incertitude sur leur défaite? Etait-ce nous défendre que d'écarter les projets tendant à fortifier l'intérieur du royaume, ou de faire des préparatifs de résistance pour l'époque où nous scrions déjà devenus la proie des tyrans? Etait-ce nous défendre que de choisir des généraux qui attaquaient eux-mêmes la constitution, ou d'enchaîner le courage de ceux qui la servaient? Etait-ce nous défendre que de paralyser sans cesse le gouvernement par la desorganisation continuelle du ministère. La constitution vous laissa-t-elle le choix des ministres pour notre bonheur ou notre ruine? Vous fit-elle chef de l'armée pour notre gloire ou notre honte? Vous donna-t-elle enfin le droit de sanction, une liste civile et tant de grandes prérogatives pour perdre constitutionnellement la constitution et l'empire? Non, non, homme que la générosité des Français n'a pu émouvoir, homme que le seul amour du despotisme a pu rendre sensible, vous n'avez pas rempli le vœu de la constitution: elle est peut-être renversée; mais vous ne recueillerez point le fruit de votre parjure: vous ne vous êtes point opposé par un acte formel aux victoires qui se remportaient

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Le ministre de la guerre a fait passer la copie d'une lettre qu'il vient de recevoir de M. le maréehal Luckner. En voici l'extrait :

« J'ai à vous rendre compte d'un événement fâcheux. Nos avant-postes de Courtray ayant été vivement attaqués, se sont replies. L'ennemi s'est emparé des maisons, et de là il

tirait sur nos retranchements.

Après en avoir été chassés, on a tiré, d'une des maisons, un coup de fusil sur M. Jary. On dit même qu'elle renfermait de la poudre. Pour empêcher que l'ennemi n'en profitât, M. Jary a donné ordre d'y mettre le feu. Je ne voyais dans cette extrémité qu'une manœuvre de guerre ; mais une députation du magistrat m'a appris que M. Jary continuait à faire brûler les maisons, je me suis empressé d'y aller, et j'ai demandé par quel ordre. M. Jary m'a répondu que, la défense de Courtray lui étant confiée, il avait eru cette opération indispensable. M. Carles a mis trop de faiblesse à laisser agir M. Jary, qui n'est qu'en sous ordre: je l'ai hautement blame; mais je n'ai pu le punir, à raison des opérations militaires qu'il allègue. Je dois lui laisser à prouver celte nécessité. Sans doute la perte des incendiés est affligeante; mais c'est le fait en lui-même qui me peine à un point que je ne saurais exprimer. Je vous prie de faire part de ces faits à l'Assemblée nationale, et de réclamer de sa justice une indemnité en faveur des incendiés.

L'Assemblée a unanimement décrété que cette indemnité serait accordée.

(C'est par erreur que nous avons rapporté dans le numéro d'hier que cette disposition avait été adoptée. L'Assemblee

attendait des éclaircissements officiels.)

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N° 186. Supplément à la Gazette Nationale du Mercredi 4 JUILLET

VARIETĖS.

Reflexions d'une société de patriotes sur le rapport fait à l'Assemblée nationale, concernant le paiement des rentes et pensions.

Les rentes et pensions forment une masse de plus de 200 millions de la dette publique.

Celle delle est sous la sauvegarde de la loyauté française.

Il n'est pas indifférent d'adopter tel ou tel mode de paiement.

Que les payeurs et contrôleurs des rentes répondent à ce qui leur est personnel, c'est leur affaire. A eux permis de réclamer l'opinion publique, qui a parlé si hautement en leur faveur en 1789, 1790 et 1791. Laissons de côté les personnes.

Des citoyens, libres d'énoncer leur opinion, même sur ce qui émane de l'Assemblée nationale, peuvent, avec tous les égards convenables, présenter, sur un travail avoué par le comité ordinaire des finances, des réflexions modérées, sans craindre d'ètre désapprouvés par des législateurs qui représentent une grande nation, et qui travaillent à son bon

heur.

Ce serait le comble du délire de vouloir qu'à la porte de chaque rentier il y eût un payeur, chargé de lui payer sa rente à l'échéance.

L'idée plus raisonnable de placer dans chaque district un payeur, pour acquitter les rentes et pensions, a été justement combattue par M. le rapporteur, qui a senti les difficultés, les embarras, la confusion, la complication, les entraves d'une pareille mesure. Le nouveau mode par lui proposé à l'Assemblée nationale n'est pas non plus sans inconvénients.

ments.

1792.

5° La comptabilité, concentrée aujourd'hui entre quarante payeurs, tous instruits, tous exercés à ce genre de travail, et qui se voient, se communiquent, s'éclairent mutuellement, se conduisent par les mêmes règles, les mêmes principes, entraîne moins de détails, moins de soins, moins d'abus, moins d'erreurs, qu'une comptabilité étendue à quatre-vingt-trois payeurs, tous isolés dans leurs départements, saus communication entre eux, et qui n'auront ni l'expérience, ni les connaissances, ni cet ensemble, ni cette marche égale, uniforme qu'exige impérieusement la libération de cette partie de la dette publique.

6 Le changement volontaire ou forcé de domicile peut, abstraction faite des fraudes, occasionner des doubles emplois et des surcharges qui se perdraient dans l'obscurité d'une comptabilité éparse et trop divisée, et qui retomberaient sur le trésor public. 7° Les reconstitutions s'opèrent à Paris sans confusion, sans embarras, avec célérité, parce qu'il faut, pour les reconstitutions comme pour les emprunts, un centre unique où se fassent les enregistrements. Comment se feront les reconstitutions dans quatre-vingt-deux départements qui ne correspondront point les uns avec les autres, et qui n'ont point de commissaires nommés pour les recevoir? Que d'abus, que d'erreurs à craindre!

8° M. le rapporteur propose le mode de paiement par émargement l'Etat y perdrait des millions que produisent le timbre et l'enregistrement des ventes, adjudications, transports, délégations, quittances, procurations, pouvoirs et autres actes relatifs au paiement des rentes.

9, M. le rapporteur assure que son projet procurera à l'Etat l'avantage d'une économie de 600,000 liv., dont Ce mode consiste à supprimer les payeurs et conle trésor public se trouve chargé pour le traitement des trôleurs des rentes, et à faire payer les rentes et pen-payeurs et des contrôleurs des rentes établis dans la sions par les payeurs généraux, établis, par le décret capitale. Cela est évident, si les quatre-vingt-trois du 24 septembre 1791, dans chacun des 83 départe- payeurs généraux font ce service gratuitement; mais, comme cela n'arrivera pas, il est évident aussi que ce n'est pas en multipliant le nombre des agents que l'on diminue les frais. Et ne prit-on pour base, dans l'évaluation des dépenses de ce nouveau service, que les décrets de l'Assemblée nationale des 12 et aux basards d'une forme administrative ambulatoire? 14 novembre 1790, pour les receveurs de districts, Mais supposons les payeurs généraux des départe- il ne serait peut-être pas difficile de démontrer que, ments maintenus par un décret irrévocable. Avant tous calculs faits, pour obliger sept à huit mille rende leur confier le paiement d'une dette sacrée (parce tiers au plus, résidant dans les chefs-lieux de quatreque la nation l'a reconnue telle), il y a deux inté-vingt-deux départements, et après avoir doublé les rêts à examiner : celui de la nation, celui des ren

D'abord il paraît (pag. 7 du rapport) que ces payeurs généraux n'ont encore qu'une existence précaire et incertaine. Faut-il exposer le paiement des intérêts de la dette publique à l'inconstance, à la versatilité,

tiers.

PARAGRAPHE PREMIER.
Intérêt de la nation.

1° Multiplier les ressorts d'une grande machine, c'est multiplier les frottements, Pourquoi quatrevingt-trois payeurs, lorsque quarante suffisent?

risques pour la libération de l'Etat, les frais de traitement des payeurs et contrôleurs de départements excèderont de beaucoup les frais actuels, qui ne montent pas à un denier pour livre (1).

L'intérêt de la chose publique doit fixer les premiers regards des législateurs; mais les protecteurs du peuple ne dédaigneront pas de jeter un œil favo

S II.

Intérêt des rentiers.

Des dix-huit cent mille rentiers et pensionnai-rable sur l'intérêt des rentiers. res, six cent mille résident dans le département de Paris ou en pays étranger. C'est donc établir quatrevingt-deux payeurs pour ne favoriser que le quart des rentiers. Il y a mieux: cinquante de ces payeurs n'auront pas 200 parties de rentes et pensions à acquitter. Quelques-uns n'en auront pas vingt.

3 Voudrait-on qu'une caisse unique à Paris acquittât plus de 160 millions? Ce serait vouloir plonger la comptabilité dans le désordre, dont n'a pas été exemple la caisse de M. Darras, qui n'avait que vingt millions à payer.

4 II importe surtout à l'État que le versement et l'emploi des fonds destinés au paiement des rentes se fassent, pour ainsi dire, sous les yeux et sous la main de l'administration, parce que les fonds non employés aujourd'hui servent pour le lendemain; et parce que les fonds non employés du paiement des rentes tournent à la libération d'autres dettes. Ces fonds vacants resteraient entre les mains des quatrevingt-deux payeurs généraux, sans utilité pour le service public; et l'administration, qui ne pourrait s'en aider au moment où elle en aurait besoin, se trouverait privée d'une ressource qui lui est journellement avantageuse.

1° Si les rentiers demeuraient tous dans les chefslieux des départements, ils trouveraient quelqu'avantage dans le mode proposé par M. le rapporteur; mais le plus grand nombre a sa résidence à Paris ou en pays étranger; le surplus est répandu sur la surface du royaume.

2o Les rentiers dispersés, qui n'habitent pas les chefs-lieux des départements, ne trouveront pas une grande faveur dans le nouveau mode: qu'il y ait cent lieues, qu'il y en ait six, les frais, les embarras, les risques sont pour eux, à peu de chose près, les mêmes. On ne leur apportera pas leur argent; il faut ou qu'ils se déplacent ou qu'ils chargent quelqu'un de recevoir leurs revenus. Eh, combien d'endroits dont les communications avec le chef-lieu sont moins faciles, moins praticables que les routes qui conduisent à la capitale.

3° Quelle foule de difficultés, de précautions, de

(1) Pour une somme de 200 millions le denier pour livre est de 833,333 liv. 6 s. 8 d.

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4 Il peut y avoir dans Paris quelques personnes infidèles, qui s'immiscent dans la perception des renles; mais on peut dire, en général, qu'il y a dans la capitale une classe de receveurs honnêtes, pleins de probité et qui méritent toute confiance.

5° Il n'y a donc, dans la masse totale des rentiers, qu'un petit nombre qui ait sa résidence dans les chefs-lieux des départements; et, dans ce nombre, peut-être y en a-t-il encore qui, pour des raisons de commerce et autres, préfèreraient être payés à Paris, afin d'y trouver des fonds tout portés pour leurs affaires. Et, de bonne foi, l'on demande si, pour la seule commodité de quelques individus, il faut bouleverser un ordre établi, salarier exprès pour eux quatre-vingt-deux payeurs et autant de contrôleurs, et enlever à une grande administration ses ressources et une surveillance utilement rapprochée

d'elle.

6". Mais un intérêt bien plus pressant et plus direct pour les rentiers repousse l'introduction du nouveau mode: c'est celui de la vente et du transport des rentes. Quand le paiement en sera établi dans le chef-lieu du département, un rentier ne trouvera pour acquéreurs que les habitants du chef-lieu. A Paris, il a pour acquéreurs les capitalistes de quatre-vingt-trois départements.

7. Autre intérêt pour les rentiers: supposez qu'un des payeurs-généraux fasse une infidélité, qu'il emporte le fonds de sa caisse ou qu'il devienne insolvable, faudra-t-il que les rentiers attendent la discussion de ses immeubles? Qui couvrira le déficit? A Paris, nul retard, nulle inquiétude de cette espèce; un payeur des rentes n'a de fonds que la veille du paiement et que ce qu'il doit distribuer le lendeinain; et, s'il y avait jamais un payeur infidèle, les rentiers n'auraient pas le temps de s'en apercevoir: dans un clin-d'œil le déficit serait comblé.

rembourser, et ne perdez pas de vue cette vérité, cette grande vérité: Il n'y a que l'argent qui puisse cautionner l'argent.

RÉSUMÉ.

Nous pourrions assurer avec confiance que, des 200 millions de rentes et pensions, il n'y aura pas 20 millions payables dans quatre-vingt-deux départements; mais nous portons le défi, à quiconque voudra l'accepter, qu'il puisse être distrait plus de 23 millions du département de Paris. Si la pureté des intentions de M. Baignoux n'était pas connue, si son rapport n'était pas avoué par le comité des finances, on serait tenté de croire que le paiement des rentes et pensions, dans les départements, n'est qu'un prétexte, et que l'intention a été de faire revivre et de ramener, sous une forme déguisée, l'ancien projet de substituer aux payeurs et contròleurs des rentes une caisse unique, à Paris, qui se jouerait de 175 millions: projet fortement combattu sous la précédente législature, et dont les inconséquences ont été démontrées, jusqu'à la dernière évidence, par le tableau qui a entraîné la conviction de l'Assemblée constituante.

On peut voir ce tableau, imprimé à la fin d'un mémoire sur l'acquittement des intérêts de la dette publique.

MÉLANGES.

Au Rédacteur.

Paris, ce 29 juin 1792, l'an 4 de la liberté. Vous avez oublié, Monsieur, d'annoncer, dans votre numéro du 23 de ce mois, que les cinq juges du tribunal du district de Semur, département de la Côte-d'Or, ont offert à l'Assemblée nationale, à sa séance du 22, par l'organe de M. Béguin, député, chacun 200 liv. sur leur traitement annuel, pendant la dûrée de la guerre; et que le greffier du même tribunal à offert 100 liv. sur le sien, pendant le même temps. Ce tribunal applaudira toujours aux lois les plus propres à couper les têtes de l'hydre de la chicane; mais, lorsque la plupart des tribunaux sont accusés d'incivisme, il désire, il doit vouloir la publicité des preuves qu'il donne de son attachement à la constitution.

Vous avez encore oublié d'insérer, dans votre nu

8°. Le mode de quittance par émargement serait aussi désavantageux aux rentiers que la conversion des contrats en coupons et annuités. L'un est un système de 83 banques; l'autre est une manière d'anéantir les immeubles fictifs. Ce sont de ces spécu-méro du 24, que j'ai offert, à la séance du 23, au lations erronées, dont le funeste effet serait d'enlever aux rentiers leurs titres de propriété, aux créanciers leur hypothèque, aux femmes leurs dots, aux veuves leurs douaires, aux mineurs leur patrimoine. Ce serait ouvrir la porte aux abus de confiance, aux séductions, aux escroqueries, aux surprises, aux fraudes, aux infidélités de toute espèce. D'ailleurs, les principes qui ont porté l'Assemblée nationale, en supprimant les prérogatives du droit d'ainesse, à maintenir les partages antérieurs à son décret, annoncent assez qu'elle ne toucherait à la propriété des familles, à l'égard des rentes, que par un remboursement effectif d'une dette dont l'essence et les conditions ne pourraient être altérées, changées, dénaturées sans compromettre la loyauté française, et sans violer des lois enregistrées et maintenues par la constitution.

Si les formes introduites pour le paiement et la recette des rentes n'existaient pas, il faudrait les créer. Elles existent, conservons-les.

Mais, dit-on, les payeurs ne sont pas constitutionnels. Il est vrai la constitution a aboli la vénalité des offices. Il faut porter la faulx salutaire sur ceux des payeurs et des contrôleurs de rentes; qu'il s'évanouisse ce reste de fantôme de l'ancien regime. Mais, en frappant les abus, l'arme de la liberté ne doit pas porter aveuglément ses coups sur ce qui est d'ordre public. Transformez les offices de payeurs et contrôleurs de rentes en commissions, leurs finances en cautionnement, et vous aurez des fonctionnaires publics, quelque dénomination que vous leur donniez, tout aussi constitutionnels que vos 83 payeurs généraux ; mais surtout gardez-vous de les

nom des amis de la constitution de la même ville, qui complent parmi eux trois juges et le greffier du tribunal, un don patriotique de 454 liv. 4 sous, en argent et partie en assignats, et une bague de diamants. Il n'est cependant pas inutile qu'on sache que les amis de la constitution, qui ont l'audace de déjouer les projets de ces honnêtes gens dont une partie veut nous remettre sous la verge du despotisme et l'autre rétablir l'aristocratie par la création d'une chambre des pairs, d'autres enfin élever un dictateur, un protecteur, sur les débris de la liberté, que les amis de la constitution, dis-je, sacrifient, dans tous les points du royaume, leurs biens et leurs vies pour le maintien de nos lois constitutionnelles.

FIOREATS-GUIOT, juge du tribunal de district de Semur, et membre de la société des amis de la constitution de la même ville.

MÉDECINE.

SUR LES CANCERS AU SEIN. Moyen de guérir, sans instrument tranchant ni caustique, les petites duretés du sein, et d'empêcher le cancer; moyen inventé par M. DOREZ, ancien chirurgien de l'hôpital militaire du Cap-Français, île de Saint-Domingue, maître en chirurgie, reçu à S. Côme, à Paris, maître en chirurgie de la communauté de Villenauxe, et maître apothicaire, reçu au college de pharmacie, à Paris.

FAITS.

L'épouse de M. Charles de Juigné, qui avait une

petite dureté dans un sein et trois autres pareilles sous le bras, du même côté, avec douleur et élancements, duretés causées par le lait décomposé (Voyez le supplément du Moniteur, du 11 décembre 1791, pour plus amples détails.), guérie depuis le mois de janvier 1791.

L'épouse de M. Vaublanc, député à l'Assemblée nationale et ex-président de ladite Assemblée, duretés dans le sein seulement, semblables pour le tout à celles de madame de Juigné, guérie depuis près

d'un an.

Une servante des fermes de M. Château-Thierry, à Tours, une dureté plus volumineuse que celles cidessus, provenant d'un coup, guérie depuis le mois de septembre dernier (1).

Dans quelques mois j'aurai occasion de citer plusieurs autres guérisons semblables, qui confirmeront de plus en plus l'efficacité de ces moyens.

Ils consistent, pour les duretés douloureuses (cancéreuses ) :

1. En une mixture, pour cataplasme;

2. En un épithème, pour appliquer ensuite sur lesdites duretés;

3. En une conserve, qui se prend intérieurement. (2) Le prix est de 37 liv. 10 s.

Pour les duretés sans douleurs (squirrheuses.)

Il ne faut, pour ces duretés, que la conserve et l'épithème, ce qui ne coûtera que 25 liv.

Avantages de ce traitement.

Les malades peuvent se traiter chez elles; ce qui doit convenir surtout à celles qui, trop éloignées de Paris, n'ont pas assez de fortune pour en faire le

voyage.

Elles peuvent aussi s'administrer elles-mêmes les médicaments, sans médecin ni chirurgien, au moyen d'un imprimé qui indique la manière de les employer.

Le plus précieux de ces avantages, c'est qu'en guérissant ces petites duretés, elles se préserveront du cancer décidé, qui moissonne tant de victimes.

Le traitement peut durer deux mois au plus. Les médicaments que je propose aujourd'hui sont ceux que j'ai annoncés, comme préservatifs, dans le supplément au Journal de Paris, du 9 juin 1701, et du Moniteur, 1er août suivant, en disant positivement que je ne voulais pas les envoyer dans les départements.

Mais, comme je l'ai marqué plus haut, beaucoup ne peuvent faire les dépenses nécessaires pour venir à Paris. Je me rétracte donc avec plaisir, puisque je sais que je pourrai rendre à la vie bien des femmes chères à leurs maris, des mères à plusieurs enfants,

enfin des êtres intéressants à la société.

Celles qui sont fortunées, qui n'auraient pas de confiance dans le traitement que j'annonce, pourraient venir à Paris, pour y être guéries par mon caustique, que je ne rends pas encore public.

S'il s'y trouve des médicaments qui rivalisent les miens, je l'apprendrai avec la joie la plus grande; parce qu'on n'est jamais trop quand il faut soulager T'humanité souffrante, surtout d'un mal aussi affreux Mais j'avertis qu'on n'y parviendra pas avec l'ex

que le cancer.

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trait de ciguë, ni avec le savon, ni avec l'eau de carotte, extérieurement avec l'emplâtre de ciguë, ou avec la ciguë en feuille pilée, ou la carotte rapée, enfin avec tant d'autres médicaments qui ont été et qui sont encore aussi inutiles les uns que les autres. Combien d'exemples ne fournirais-je pas ? Mais je m'en tiens à un seul :

Mde Soudé, de Nouan, district de Loches, dépar tement d'Indre-et-Loire, qui est ici depuis quinze jours, a déjà pris quatre livres d'extrait de ciguë depuis dix-huit mois; la dose était de 84 grains par jour. Malgré cela, elle a un cancer au sein, ulcéré, du volume d'un gros melon, adhérant aux côtes, avec des dûretés qui se propagent jusques derrière le dos, et avec un champignon gros comme un moyen abricot. Ce cancer étant inattaquable par mon caustique, cette victime de la persévérance est réduite à vivre tant qu'elle pourra avec un mal incurable, et que je ne puis que rendre moins douloureux avec mes palliatifs. Que diront maintenant les apôtres de la ciguë?

Précautions pour les malades qui m'écriront.

1° Cest de marquer si les petites duretés sont accompagnées de douleurs dans l'intervalle des époques; 2° Si lesdites duretés sont sans douleur, excepté à l'approche de l'époque;

3 D'affranchir les lettres et l'argent, savoir: 37 liv. 10 s. pour les malades qui éprouvent de la douleur, et 25 liv. pour celles qui n'en ressentent pas

encore.

Je préviens que le prix ne sera que de moitié pour les pauvres. J'ose espérer qu'il sera fourni par les municipalités, et sur leurs attestations.

ches.

On me trouve tous les jours, depuis une heure après-midi jusqu'à trois, excepté les fêtes et dimanMa demeure est toujours rue et ile Saint-Louis, n° 105, après le Pont-Rouge. DOREZ.

P. S. On vient de m'assurer qu'une dame, qui avait la volonté de se faire guérir par ma méthode, en a été détournée par un malveillant, qui lui a assuré positivement que je n'étais plus chez moi, parce que j'avais eu une affaire désagréable.

Cela est si faux, que je défie cet ennemi, et tous autres semblables, de prouver que, depuis près de sept ans que je suis ici, j'aie été un jour hors de chez moi, et par conséquent que j'aie pu manquer aux soins de mes malades.

C'est donc une calomnie inventée pour s'emparer de celles qui veulent se faire guérir par moi. Eh bien ! je leur pardonne, à condition qu'ils diront tout bonnement, à celles qui s'adresseront à eux avec une petite dureté au sein, soit sans douleur, soit avec dou

leur, que cette petite dureté est le germe du cancer, qui, plus ou moins promptement, fait des progrès, et finit par faire mourir après avoir fait souffrir des douleurs insupportables; qu'ils ne connaissent pas le remède propre à détruire cette dureté, excepté l'instrument tranchant; ils prouveront ainsi qu'ils ne veulent pas les amuser par des promesses illusoires, en leur faisant employer des médicaments qui n'ont d'autre vertu que d'adoucir, sans empêcher les progrès. Soulager n'est pas guérir. Les palliatifs ne sont un bienfait que lorsque la guérison est devenue impossible; mais, lorsqu'il y a espoir et même certitude de guérison, les tentatives des ignorants sont un malheur déplorable.

ANNONCES.

Cours de langue latine, à l'aide duquel on peut apprendre cette langue chez soi, sans maître, en trois mois de lecture, par M. Luneau de Boisjermain; 13 cahiers in-8°, 24 liv. 12 sous.

Ce cours doit être recherché, dans les circonstan

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