pape emprunte de la loi même le droit de dispenser de son exécution. XLIII. Quelles règles de chancellerie sont reçues en France. Les reigles de chancellerie apostolique, durant mesme le pontificat du pape qui les a faictes ou authorisées, ne lient l'Eglise gallicane, sinon en tant que volontairement elle en reçoit la practique, comme elle a faict des trois qu'on appelle, de publicandis resignationibus in partibus, de verisimili notitia obitûs, et de infirmis resignantibus, authorisées par les edits du roy, et arrests de son parlement, ausquelles le pape ny son legat ne peuvent deroger, fors à celle de infirmis resignantibus, de laquelle on reçoit leur dispense, mesme au prejudice des graduez nommez en leur mois. Comme elle a fait des trois.] « Ces trois règles de chancellerie reçues en France sont observées comme les lois faites par nos rois, et non pas comme règles de la chancellerie de Rome, et sont tenues comme lois perpétuelles et fixes, sans que, par la mort du pape, elles puissent être révoquées ou autrement altérées. » Dupuy. De publicandis resignationibus.] Cette règle porte que la résignation d'un bénéfice est sans effet, si le résignataire ne l'a publiée, et n'a pris possession dans les six mois, s'il est pourvu en cour de Rome, De verisimili notitia.] Suivant cette règle, les provisions sur vacance par mort sont nulles, si, du jour de la date, il n'y a assez de temps pour faire que du lieu où la personne est décédée, la vacance ait pu vraisemblablement venir à la connaissance du pape. Quoique l'on ait satisfait à cette règle, les provisions seront nulles, s'il est prouvé que l'on ait fait partir le courrier avant la vacance, ce qui s'appelle course ambitieuse. De infirmis resignantibus.] Si un malade a résigné, et est décédé dans les vingt jours, la provision sur cette résignation est nulle, et le bénéfice réputé vacant par mort. C'est ainsi que d'après l'art. 14975 du Code civil, « tout contrat de rente viagère est nul lorsqu'il a été créé sur la tête d'une personne atteinte de la maladie dont elle est décédée dans les vingt jours de la date du contrat. >>> Cette troisième règle de chancellerie n'est plus d'usage en France, dit l'abbé Fleury. D'Héricourt, Lois ecclésiastiques, lettre F, XIV, no 29, indique les cas d'exception où elle conserve sa force, et où il n'est pas permis d'y déroger. XLIV. Bulles du pape ne s'exécutent en France sans pareatis de l'autorité temporette. Bulles ou lettres apostoliques de citation executoriales, fulminatoires ou autres, ne s'executent en France sans pareatis du roy ou de ses officiers; et l'execution qui s'en peut faire par le lay après la permission, se faict par le juge royal ordinaire, de l'authorité du roy, et non authoritate apostolica, pour éviter distraction et meslange de jurisdiction; mesme celui qui a impetré bulles, rescrits, ou lettres portans telle clause, est tenu declarer qu'il entend que les deleguez ou executeurs, soit cleres ou laïcs, en cognoissent jure ordinario: autrement y auroit abus. Ne s'exécutent en France. Cet article de nos libertés se retrouve dans l'art. Jer de la loi du 48 germinal an X, portant que « aucune bulle, bref, rescrit, décret, mandat, provision, nı autres expéditions de la cour de Rome, même ne concernant que les particuliers, ne pourront être reçues, publiées imprimées, ni autrement mises à exécution, sans l'autorisation du gouvernement. >> Voyez ci-après art. LXXVII. Depuis la promulgation de cette loi jusqu'à présent, les bulles qui ont été reçues l'ont été avec la clause suivante : « La bulle donnée à Rome le... contenant... sera publiée, sans approbation des clauses, formules ou expressions qu'elle renferme, et qui sont ou pourraient être contraires aux lois de l'État, aux libertés, franchises et maximes de l'Église gallicane. » Voyez au Bulletin des lois, passim. Le recueil des Preuves des Libertés est rempli d'arrêts qui ont supprimé des productions apostoliques dont l'introduction en France n'avait pas été légalement autorisée. Voyez notamment tout le chap. X. Je me contenterai de citer un exemple plus récent du soin avec lequel le gouvernement tient à l'observation de cette règle. M. l'évêque de Poitiers ayant ordonné dans son diocèse la lecture d'un bref dont la publication n'avait pas probablement été autorisée par le gouvernement, le Roi a rendu, le 23 décembre 1820, une ordonnance ainsi conçue: « Louis, etc. Vu un mandement de l'évêque de Poitiers, en date du 26 octobre 1820, par lequel il ordonne de lire, dans toutes les églises paroissiales de son diocèse, la lettre par lui écrite au saint-siége, le 8 août de la même année, au sujet des prêtres et des fidèles dissidents, et le bref de sa sainteté donné en réponse à Sainte-Marie-Majeure, le 27 septembre suivant; » Vu la déclaration du 8 mars 14772, et les articles Mers de la loi du 8 avril 4802 (18 germinal an X), et du décret du 28 février 4840; >> Vu la lettre écrite à notre garde des sceaux par l'évêque de Poitiers, le 5 décembre présent mois, de laquelle il résulte qu'il a publié ledit bref non vérifié par pure inadvertance et sans aucune intention de contrevenir aux lois du royaume; >> Considérant que l'évêque de Poitiers avait usé de ses droits et de sa juridiction lorsqu'il a interdit les prêtres dissidents, et averti ses diocésains qu'ils étaient sans pouvoirs pour administrer les sacrements; >> Que, s'il jugeait à propos de consulter le pape sur cet acte d'administration de son diocèse, il ne pouvait publier le bref reçu de sa sainteté qu'avec notre PRÉALABLE autorisation; >> Que c'est une des règles les plus anciennes et les plus importantes de notre royaume, que, sous aucun prétexte que ce soit, les bulles, brefs, rescrits, constitutions, décrets et autres expéditions de cour de Rome, à l'exception de ceux concernant le for intérieur seulement, et les dispenses de mariage, ne puissent être reçus ni publiés sans avoir été vus et vérifiés par le gouvernement; >> Que s'il résulte de la lettre de l'évêque de Poitiers cidessus visée, qu'il n'a agi que par inadvertance et sans intention de contrevenir aux lois du royaume, il est toutefois d'une nécessité indispensable de maintenir l'observance desdites lois; » Sur le rapport de notre ministre secrétaire d'état au département de l'intérieur; >> Notre conseil d'état entendu, >> Nous avons ordonné et ordonnons ce qui suit: » Art. Ier. Il y a abus dans le mandement de l'évêque de Poitiers sus-mentionné, en ce qu'il a ordonné la lecture et la publication d'un bref de sa sainteté sans notre autorisation, et ledit mandement est et demeure supprimé. >> II. Notre garde des sceaux, ministre secrétaire d'état de la justice, et notre ministre secrétaire d'état de l'intérieur, sont chargés de l'exécution de ia présente ordonnance, qui sera insérée au Bulletin des lois. » Voyez encore décret du 23 janvier 1844, Bulletin n° 6474. Jure ordinario. Non autoritate apostolica. (Arrêt du 14 février 1563.) XLV. Le pape ni son légat n'ont juridiction en France sur les sujets du roi. Le pape ou son legat à latere ne peuvent cognoistre des causes ecclesiastiques en premiere instance, ny exercer jurisdiction sur les sujets du roy et demourans en son royaume, païs, terres et seigneuries de son obeyssance, soit par citation, delegation ou autrement, posé ores qu'il y eust consentement du sujet; ny entre ceux mesmes qui se dient exempts des autres juridictions ecclesiastiques, et immédiatement sujets quant à ce au sainct siege apostolique, ou dont les causes y sont legitimement devolues; pour le regard desquels, en ce qui est de sa juridiction, il peut seulement bailler juges deleguez in partibus, qui est à dire és parties desdits royaume, terres et seigneuries où lesdites causes se doivent traicter de droit commun, et au dedans des mesmes dioceses: desquels juges deleguez les appellations (si aucunes s'interjettent) y doivent aussi estre traictées jusques à la finale décision d'icelles, et par juges du royaume à ce deleguez. Et s'il se faict au contraire, le roy peut décerner ses lettres inhibitoires à sa cour de parlement, ou autre juge, où se peut la partie y ayant interest pourvoir par appel comme d'abus. Jurisdiction sur les sujets du roi. Tout cet article repose sur deux maximes que j'ai déjà citées plusieurs fois: 1o qu'en France, toute justice émane du roi; donc elle ne peut émaner ni du pape ni de ses délégués, etiam à latere; 2o que nul ne peut être distrait de ses juges naturels; d'où il suit qu'aucun sujet du roi ne peut être tenu d'aller à Rome; et si l'on essayait de l'y contraindre, il peut appeler comme d'abus. Posé ores. Quand même. Consentement du sujet.] Le consentement des particuliers ne fait point préjudice aux principes dans les questions de droit public. (Loi 45, § 1, ff. de regulis juris.) On peut voir, dans le Recueil des preuves, tout le chapitre IX, ayant pour sommaire : « Citations des sujets du roi en cour de Rome sont abusives: Arrêts contre aucuns qui, ayant décliné la justice royale, se sont pourvus en cour de Rome ou autre justice ecclésiastique. >> Veut-on avoir la raison de cette jurisprudence? on la trouve dans ce passage des remontrances du parlement du 3 mars 1555 : << Ce n'est pas sans tres grande raison que les rois de France n'ont jusques icy voulu ne esté conseillez permettre l'extraction et transport d'aucun de leurs sujets en cour de Rome, autre royaume ou potentat, pour quelque cas que ce ayt esté: car les sujets originaires de France estans dedans le royaume ne sont justiciables que de leur roy, lequel Dieu leur a donné prince naturel et souverain : et tout ainsi que ses sujets lui doivent obeïssance, subjection et service, il leur doit protection et justice; et est l'obligation si réciproque, que leur roy, sans leur faire tort, ne les peut délaisser ne abandonner à pape, empereur, roy ne autre prince; et, s'il le fait, il rend sa justice suspecte, et ceux qui poursuivent l'extraction taisiblement arguent le roy d'injustice, déclinans la sienne et en demandans une autre contre ses sujets. C'est bien au rebours du temps que les estrangers soumettoient leurs querelles et différends à celle de France!... Ce n'est pas fuir la justice que d'avoir crainte d'une justice estrangère. » |