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taient l'Italie; que Zuentibold se défendait en Moravie; ce fut lui qui appela les Bulgares. En 893 il y avait deux rois de plus ; Charles-le-Simple à Laon, et un certain Louis à Arles..

En 898, Eudes laissa la couronne à Charles-le-Simple. Cependant son fils, nommé Arnoul, fut proclamé en Aquitaine. Louis régnait toujours en Provence, Raoul dans la Bourgogne transjurane, l'Empereur Arnoul en Germanie. Zuentibold était établi en Lorraine et Lambert en Italie.

En 900, Charles-le-Simple régnait en Neustrie; Louis, fils d'Arnoul, en Germanie; Raoul en Bourgogne, Louis en Provence; Lambert et Bérenger se disputaient l'Italie et le titre d'Empereur.

En 911, Charles-le-Simple était encore en France et Louis à Arles. Mais, dans la Bourgogne transjurane, c'était Raoul II, en Italie Bérenger, et en Allemagne Conrad, qui ne tenait à la race de Pepin que par sa femme. En 919, son beau-frère Henry-l'Oiseleur, duc de Saxe, lui succéda.

En 922, Charles-le-Simple avait un rival en France : c'était Robert, Comte de Paris, de la descendance d'Eudes. Il venait d'être sacré à Reims.

En 923, Robert ayant été tué sur un champ de bataille, Raoul, son frère, et déjà Duc de Bourgogne, fut élu en sa place. Charles-le-Simple vivait encore. Henry-l'Oiseleur régnait en Allemagne, Raoul II dans la Bourgogne transjurane, Louis en Provence; Béranger avait pris le titre d'Empereur. En 926, Raoul de Transjurane avait chassé ce Béranger, d'Italie, et venait d'être chassé lui-même par Hugues d'Arles, qui prit le titre de Roi d'Italie.

En 956, Charles-le-Simple et son compétiteur Raoul étaient morts. Hugues-le-Blanc, successeur de Robert dans les Comtés de Paris et d'Orléans, prend le titre de Duc de France, et fait monter sur le trône Louis-d'Outremer, de la race de Pepin. Othonle-Grand régnait en Germanie, Hugues et Lothaire son fils en Italie, Raoul II dans la Transjurane.

En 954, Louis-d'Outremer étant mort, Hugues fit sacrer Lothaire son fils en sa place. Othon-le-Grand régnait en Germanie.

et en Lorraine; Conrad à Arles et dans la Transjurane; Béranger en Italie.

En 986, Hugues Capet avait succédé à Hugues-le-Blanc, et il fit monter Louis-le-Fainéant sur le trône que la mort de son père laissait vacant. En ce moment, Othon III régnait en Germanie; Conrad à Arles et en Transjurane.

Louis V fut le dernier descendant de la race de Pepin. Hugues Capet lui succéda, et commença la troisième race, en 987.

Nous avons abrégé beaucoup cette énumération des noms qui furent revêtus de l'éclat de la couronne. Nous avions hâte de terminer une nomenclature aussi aride. Nous avons donc négligé ceux qui ne firent que passer. Mais, que l'on pense que chaque succession, à peu près, donna lieu à une guerre; que nulle part la possession du pouvoir ne fut tranquille, soit qu'il fallut combattre pour commander l'obéissance aux grands vassaux, soit qu'il fallût combattre pour la conserver, soit enfin qu'il fallût courir après quelques bandes de pirates de terre ou de mer, de Normands, de Hongrois ou de Sarrasins, et l'on comprendra combien la société dut être profondément troublée. En effet, elle sortit de cette anarchie, entièrement changée, et comme douée d'une destinée nouvelle.

Il est certain d'ailleurs que les modifications profondes que nous allons trouver sous le règne de la troisième race, n'occupaient encore que la surface de la société à la fin du neuvième siècle. Il paraît qu'elles ne pénétrèrent dans les masses que pendant la durée du dixième. Nous possédons plusieurs actes législatifs, datés de 880 à 900, où l'on trouve cités tous les noms indicatifs des diverses positions sociales que nous avons énumérées au commencement de ce chapitre (1).

Les dernières années du dixième siècle furent moins agitées que les premières, parce que les nouveaux centres de force et de commandement commençaient à se former. En outre,

(1) Voyez tome XI de la Collection des Bénédictins de St-Maur, pages 309 à 312, passim.

T. I.

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la plus grande partie des pirates Normands fut acquise, en 912, par l'Église, et convertie en vassaux du royaume de France par le don de la province qu'on appela, de leur nom, Normandie. Il ne sera pas inutile de nous occuper un instant de ce fait. Il donne une idée de la manière de procéder de l'Église dans ses conquêtes, et, en même temps, de la manière dont les faibles Rois de ce temps achetaient des fidèles.

S'il y avait eu unité et force dans l'Empire, on eût été éteindre le foyer de la piraterie sur son sol même; on eût exterminé ou soumis les payens du nord. Mais lorsque chaque contrée eut été abandonnée à elle-même, on ne pensa plus qu'à leur fermer l'entrée des fleuves, et à couper le cours des rivières; car c'était là leurs voies militaires, les seules d'ailleurs par lesquelles ces bandes pouvaient se guider dans un pays inconnu, et emporter leurs charges de butin, unique et grossier motif de ces expéditions barbares. On essaya de les arrêter par des fortifications; on construisit aussi plusieurs ponts de pierre. Mais, Paris seul sut résister par le courage de ses prélats, de ses citoyens et de ses comtes. Les autres points fortifiés furent enlevés par la force, rendus par la crainte, livrés par la trahison, ou laissèrent le passage. Ainsi, Rouen fut pris; Nantes, livrée par un comte français; Borles Juifs, etc. On recourut donc à un autre moyen deaux, par de défense. On livra aux chefs de pirates, des territoires à l'entrée des fleuves, afin qu'ils les défendissent eux-mêmes. Une seule condition leur était imposée, la seule sans laquelle, dans ce temps de foi, il n'y avait pas de traité possible; c'était d'accep ter le Christianisme. Ainsi, on leur donna des terres en Frise, en Bretagne, etc. L'établissement des Normands sur les bords de la Seine fut sans doute un effet du même calcul.

Il est probable que Rollon lui-même, en entrant dans la Seine, avait l'intention de former un établissement fixe. Les chroniques racontent que Francon, Archevêque de Rouen, voyant que la ville était hors d'état de se défendre, au lieu de quitter son siége, prit le parti d'attendre les pirates, et que Rollon reçut la ville à compo

sition. Dès ce moment on voit Francon jouer le rôle d'intermédiaire entre le chef Barbare d'une part, Charles-le-Chauve et Robert comte de Paris de l'autre. Néanmoins, les Normands entrèrent dans le sein de la France, en suivant selon leur coutume le cours de la rivière. Mais ils eurent de faibles succès, et éprouvèrent de nombreux revers. Leurs incursions, fâcheuses pour le pays, furent stériles pour eux, car, pas une fois ils ne se retirèrent avec leur butin. Francon profita de ces événemens, auprès de Rollon, et sut s'emparer de son esprit. Il était autorisé, d'ailleurs, à offrir au chef Danois tout ce qui pouvait flatter sa vanité barbare; pour femme, Gisla, la fille de Charles-le-Chauve, et pour parrain, Robert, le redoutable Comte de Paris. En 912, sept ans après sa descente, Rollon fut baptisé par Francon, et reçut le nom de Robert ; une grande partie de son armée suivit l'exemple de son duc. Après avoir prêté le serment de vassalité, il s'occupa tout de suite de convertir sa nation à des mœurs meilleures, en leur donnant un nouveau code de lois, imité des coutumes françaises.

La foi, en effet, n'avait pas encore perdu toute sa vigueur dans le neuvième siècle; elle s'était affaiblie seulement; elle avait pris le caractère du temps: elle s'était faite égoïste. On oubliait les devoirs sociaux, pour ne penser qu'à son salut personnel, et l'on croyait le gagner par des actes d'une dévotion minutieuse. Aussi on voit encore de très-fréquentes donations aux Églises, et de nombreux actes de cette piété étroite, superstitieuse, individuelle, que nous rencontrons si souvent aujourd'hui. On croyait ainsi pouvoir racheter des crimes, ou se sauver soi-même au milieu du naufrage général. Il nous reste presque un demi-volume de diplômes dressés en faveur des Églises. Cependant, grâce à ces faibles restes de croyance, le clergé conserva encore une assez grande autorité. Ainsi, nous avons les actes d'un Concile tenu à Arles en 879, qui décerne la couronne de Roi à Boson; et ceux d'un autre de 890 qui la transmet à Louis, son fils, pour le salut commun des provinces méridionales, lesquelles avaient été, peu de temps auparavant, saccagées par les Sarrasins. L'Église seule, en effet, comprenait encore les devoirs sociaux imposés par le Christia

nisme, et travaillait au salut de tous. Pour confirmer cette assertion, il suffirait de rappeler la conduite du Clergé dans les divers siéges que Paris eut à soutenir contre les Normands; celle de Francon à Rouen. Mais nous possédons des actes qui parlent plus haut, et prouvent plus que ces dévoùmens particuliers. Dans un Synode tenu aux environs de Reims en 881, les Évêques adressent au Roi une supplique qui mériterait d'être traduite pour l'enseignement de ceux de nos jours. Ils l'invitent à s'entourer d'un conseil composé d'ecclésiastiques et de militaires, afin de pourvoir aux besoins de tous. Que ce pauvre peuple, disentils, qui, depuis tant d'années, souffre des pillages de toutes sortes, et supporte les exactions des Normands, soit enfin soulagé. › Enfin, Charles-le-Gros, dans un capitulaire, s'adresse aux Évêques pour veiller au salut public. En effet, il nous reste des traces positives qui prouvent que le clergé, dans ses synodes, chercha à faire tout ce que les Rois négligeaient dans l'intérêt général. Ce n'est pas à dire qu'il n'y eût des prêtres indignes; mais il est remarquable qu'ils furent en nombre très-petit, moindre même que dans des temps plus heureux. L'Église d'ailleurs savait et pouvait punir; c'était son peuple, et, d'après les lois, elle avait droit absolu de justice dans son sein. Nous avons quelques textes de jugemens rendus contre des membres du Clergé. Nous ne comptons point comme une faute reprochable, surtout dans notre siècle, le fait de porter les armes. Il y eut des Évêques, des Abbés et des moines qui se distinguèrent dans cette guerre de tous les jours contre les payens normands, hongrois ou sarrasins; car bien souvent les villes, abandonnées ou trahies par leurs Comtes, furent défendues par leur Clergé : au moins il savait périr avec elles.

Ainsi, les derniers mots, les derniers actes publics qui nous sont restés du neuvième siècle, sont encore des preuves de l'activité de l'Église pour le salut de la France. Dans les derniers faits nous la retrouvons encore, ainsi qu'au cinquième, construisant les provinces, agglomérant les peuplades, qui furent appelées de ce nom. De même nous retrouvons, dans les derniers actes de la

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