Page images
PDF
EPUB

DES CONSEILS MUNICIPAUX

409

incomplète de coordination de l'article 61. Ces attributions particulières des conseils municipaux sont relatives, les unes à la répartition de l'impôt (art. 61 §§ 3 et 5), d'autres à la comptabilité publique communale. D'autres, déjà signalées, ont un caractère électif, telles que l'élection, par le conseil, du maire, des adjoints, des délégués sénatoriaux, et la nomination des deux membres de la commission de révision de la liste électorale. Dans cette catégorie d'attributions spéciales peuvent être placés aussi les droits de recours ouverts au conseil municipal, comme dans le cas de l'article 67 de la loi de 1884 [no 351].

Les attributions du conseil municipal en matière de comptabilité communale résultent: 1o de l'article 71, qui distinguejudicieusement les comptes d'administration du maire soumis au conseil municipal, des comptes de gestion des receveurs qu'il débat, sauf règlement définitif, c'est-à-dire jugement par le juge des comptes de deniers; et 9° de l'article 156 relatif à la création des recettes municipales et à la nomination des receveurs municipaux. Ces deux articles sont l'objet de changements importants proposés par les articles 2 et 8 du projet de loi du 27 octobre 1896 modifiant la loi du 5 avril 1884. L'article 2 propose d'ajouter à l'article 71 un troisième paragraphe conférant individuellement à tout conseiller municipal en exercice, le droit de requérir la communication à titre obligatoire des pièces justificatives, sur place et en présence du receveur (Décret du 2 juillet 1893 sur la comptabilité départementale, art. 220). Ce nouveau paragraphe proposé de l'article 71 ne saurait être trop approuvé. Il est en effet de nature à donner au contrôle des comptes de la commune de sérieuses garanties. L'article 8 du projet est d'une autre nature. Il propose de modifier le § 1er de l'article 156 en donnant force législative aux dispositions d'un décret du 24 mars 1896 sur les perceptions de ville, que nous approuvons hautement, et le § 2 3 en ne

2

1 « Tout membre du conseil municipal a le droit de réclamer la communication des pièces justificatives et l'ajournement, jusqu'à cette communication, des votes à intervenir tant sur le compte du maire que sur celui du receveur municipal. Toutefois, ce comptable ne pourra être tenu de se dessaisir de ces pièces, qui devront être consultées en sa présence ».

1-3 « L'article 156 de la loi municipale du 5 avril 1884 est modifié ainsi

410

ATTRIBUTIONS DE COMPTABILITÉ

permettant plus aux communes d'avoir un receveur municipal spécial que lorsqu'elles possèdent un revenu de 60,000 fr. L'exposé des motifs indique ce changement comme une conséquence des propositions relatives à l'extension des pouvoirs du conseil municipal et aux modifications des règles de compétence en ce qui concerne les impositions annuelles pour insuffisance de revenus (art. 133), pour dépenses extraordinaires et emprunts (art. 141 et 143), et quant au vote du budget (art. 145).

Il (le conseil municipal) réclame, s'il y a lieu, contre le contingent assigné à la commune dans l'établissement des impôts de répartition..... Il dresse chaque année une liste contenant un nombre double de celui des répartiteurs et des répartiteurs suppléants à nommer; et sur cette liste, le sous-préfet nomme les cinq répartiteurs visés dans l'article 9 de la loi du 3 frimaire an VII et les cinq répartiteurs suppléants (L. 4 avril 1884, art. 61 §§ 3 et 5), -Le conseil municipal délibère sur les comptes d'administration qui lui sont annuellement présentés par le maire, conformément à l'article 151 de la présente loi. Il entend, débat et arrête les comptes de deniers des receveurs, sauf règlement définitif conformément à l'article 157 de la présente loi (art. 71). Les comptes du maire, pour l'exercice clos, sont présentés au conseil municipal avant la délibération du budget. Ils sont définitivement approuvés par le préfet (art. 151). Le percepteur remplit les fonctions de receveur municipal. Néanmoins, dans les communes dont les revenus ordinaires excèdent 30,000 francs, ces fonctions peuvent être confiées, sur la demande du conseil municipal, à un receveur municipal spécial Ce receveur spécial est nommé sur une liste de trois noms présentée par le conseil municipal. Il est nommé par le préfet dans les communes dont le revenu ne dépasse pas 300,000 francs, et par le président de la République, sur la proposition du ministre des finances, dans les communes dont le revenu est supérieur. En cas de refus, le conseil municipal doit faire de nouvelles présentations (art. 156).

qu'il suit : Art. 156. Le percepteur, ou à son défaut, dans les chefs-lieux d'arrondissement, un percepteur en résidence désigné à cet effet par le ministre des Finances, remplit les fonctions de receveur municipal. Néanmoins, dans les communes dont les revenus ordinaires excèdent 60,000 francs, ces fonctions peuvent être confiées, sur la demande du conseil municipal, à un receveur municipal spécial. »

« La plus large initiative et la part d'indépendance ainsi conférées aux municipalités pour la gestion de leurs finances nous ont paru comporter une contre-partie, destinée à sauvegarder dans une certaine mesure les intérêts supérieurs du Trésor public. Aujourd'hui, les communes ont le droit de confier le maniement de leurs deniers à un receveur municipal spécial lorsqu'elles possèdent un revenu de 30,000 francs. A ce chiffre, nous proposons de substituer celui de 60,000 francs ».

SANCTIONS DES RÈGLES PRÉCÉDENTES

411

C. Sanctions des règles précédentes.

348. Sanctions des règles relatives à l'organisation et aux attributions des conseils municipaux.

349. Délibérations nulles de droit.

350. Délibérations annulables.

351. Voie de recours contentieuse ouverte au conseil municipal et aux parties intéressées contre l'arrêté préfectoral.

352. Droit très restreint de suspension des conseils municipaux.

353. Droit de dissolution.

354. Limitation de durée, de nombre et de pouvoirs de la délégation spéciale nommée à défaut de conseil municipal.

355. Sanctions résultant de l'application du droit commun.

348. Indépendamment des règles constitutives du régime légal de chacune des catégories de délibérations des conseils municipaux, telles que l'autorisation nécessaire à quelques-unes et le droit de décision, d'inscription et d'imposition d'office s'imposant à d'autres, il existe un ensemble de règles générales applicable à toutes les délibérations des conseils municipaux. Elles forment, avec le droit de révocation et de suspension des maires et adjoints, et le droit de suspension et de dissolution des conseils municipaux, le droit sanctionnateur des prescriptions relatives à l'organisation et aux attributions des conseils municipaux. Nous avons constaté l'existence d'un droit de même nature en ce qui concerne les conseils généraux. Il est encore plus nécessaire pour nos 36,170 assemblées communales. La loi de 1884, en maintenant la règle, écrite dans les lois antérieures, qu'expédition de toute délibération du conseil municipal doit être adressée par le maire au sous-préfet, a distingué les causes de nullité de droit et celles d'annulabilité.

Expédition de toute délibération est adressée, dans la huitaine, par le maire, au sous-préfet, qui en constate la réception sur un registre et en délivre immédiatement récépissé (L. 5 avril 1884, art. 62).

349. Les causes de nuilité de droit, limitativement énumérées par l'article 63, sont au nombre de quatre, dont les deux dernières seules constituent une innovation : 1° l'objet de la délibération étranger aux attributions du conseil; 20 la réunion illégale

412

DÉLIBÉRATIONS NULLES DE DROIT

du conseil dans laquelle la délibération aurait été prise; 3° la violation d'une loi; 4° celle d'un règlement d'administration publique. Malgré la nullité de plein droit, la délibération subsiste tant que cette nullité n'a pas été déclarée par le préfet en conseil de préfecture. A toute époque, elle peut être prononcée par le préfet et proposée ou opposée par les parties intéressées. Cette règle, qui est à la fois une garantie pour les parties intéressées et pour l'administration supérieure, ne doit être entendue quel sous la réserve des principes généraux du droit en matière de ratification; et aussi de la compétence de l'autorité judiciaire, pour statuer sur la validité des actes d'exécution ayant le caractère de contrats, intervenus avant la déclaration de nullité.

C'est parce que le législateur n'a pas voulu que ces délibérations, entachées d'un vice absolu, pussent à aucun moment être utilement opposées, soit à l'administration, soit aux tiers, que l'article 65 n'a pas fixé de délai dans lequel le préfet dût prononcer la déclaration de nullité. La circulaire du ministre de l'intérieur aux préfets, du 15 mai 1884, propose d'appliquer par analogie le délai de 30 jours écrit dans l'article 66 pour les causes d'annulabilité. Ce passage de la circulaire peut valoir à titre de recommandation d'examen rapide des affaires, que le ministre a le droit d'adresser à ses subordonnés. Mais la loi n'impose à cet égard aucune obligation. Des auteurs veulent l'exiger; nous ne pouvons l'admettre. Nous tenons au contraire pour certain qu'il résulte de l'esprit et de la lettre de la loi, que l'article 66 est absolument inapplicable aux délibérations nulles de droit. L'analogie peut inspirer une règle de conduite administrative dans les cas où elle est possible; mais elle ne peut servir de base à une règle de droit.

L'analogie, d'ailleurs, n'est qu'apparente. Le droit de proposer, opposer et prononcer à toute époque les nullités de droit, crée une antithèse absolue, sous ce rapport, comme sous les autres, entre l'annulabilité et la nullité de plein droit, c'est-à-dire, suivant le langage du droit civil, entre ces nullités absolues et les nullités relatives de la loi municipale. Ce droit de proposer, opposer et prononcer « à toute époque » les nullités de droit, assure à l'État et aux particuliers, aux intérêts publics et aux

DÉLIBÉRATIONS ANNULABLES

413

intérêts privés, le respect, par les conseils municipaux, des lois de leur institution.

[ocr errors]

Sont nulles de plein droit: 1° Les délibérations d'un conseil municipal portant sur un objet étranger à ses attributions ou prises hors de sa réunion légale; 20 les délibérations prises en violation d'une loi ou d'un règlement d'administration publique (L. 5 avril 1884, art. 63). La nullité de droit est déclarée par le préfet en conseil de préfecture. Elle peut être prononcée par le préfet, et proposée ou opposée par les parties intéressées, à toute époque (art. 65).

350. L'unique cause d'annulabilité, admise par l'article 64 de la nouvelle loi municipale, est la présence de membres ayant intérêt à la délibération. A ce point de vue, ce texte ne fait que confirmer l'interprétation donnée par le conseil d'État (4 mars 1865, Fabregeat; 11 janvier 1866, Barrioz) à la règle écrite dans l'article 21 de la loi du 5 mai 1855. En limitant à ce cas unique le pouvoir d'annulation du préfet, l'article 64 lui enlève le droit, écrit dans l'article 18 de la loi du 18 juillet 1837, d'annuler les délibérations réglementaires à lui déférées par des parties intéressées pour cause d'inopportunité ou fausse appréciation des faits [n° 331 in fine]. A ce point de vue, l'antithèse accentuée par les articles 63 et 64 entre les nullités de droit et l'annulabilité constitue une sérieuse mesure de décentralisation.

Aux termes de l'article 66, l'annulation doit être prononcée par le préfet en conseil de préfecture, non plus à toute époque, mais dans un délai d'un mois, dont le point de départ varie suivant les cas indiqués au texte. Dans ce délai le préfet peut seulement se livrer à l'appréciation des circonstances et statuer.

L'obligation de s'abstenir imposée aux conseillers municipaux, sous cette sanction de l'annulation possible de la délibération, peut réduire le conseil à moins du tiers de ses membres, et fait de l'article 130 un corollaire nécessaire de l'article 64.

Sont annulables les délibérations auxquelles auraient pris/ part des membres du conseil intéressés, soit en leur nom personnel, soit comme mandataires, à l'affaire qui en a fait l'objet (L. 5 avril 1884, art. 64). L'annulation est prononcée par le préfet en conseil de préfecture. Elle peut être provoquée d'office par le préfet dans un délai de trente jours à partir du dépôt du procès-verbal de la délibération à la sous-préfecture ou à la pré

« PreviousContinue »