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peuple, & de fauver la monarchie; mais il s'eft longuement étendu fur la néceffité de fabriquer du billon, & de fondre les cloches;& il propofoit que le prix des biens domaniaux ne fût payé qu'en affignats; que l'on fabriquât pour trente millions de billon;que tout porteur d'affigoats de 200 livres fut autorifé, lorfqu'il devroit fix livres, à le propofer en payement, fauf à recevoir le furplus en billon des mains du créancier ; & que demain le comité des finances fût oblige de faite foa rapport fur la fonte du billon & la vente des cloches.

A la feule lecture du préliminaire qui précédoit le dif cours de M. le Brun, nous croyions déja appercevoir la monarchie diffoute, & fes membre épars, fi jamais on venoit à fabriquer de nouveaux affignats, Tout ce que la banqueroute la plus frauduleuse a de plus effrayant, la ceffion de biens de plus douloureux ; l'honorable membre nous l'a retracé dans une opération indigne d'une grande nation, & qu'on ne peut lui propofer fans outrage. Notre commerce, nos manufactures, notre conftitution, tour eft perdu; notre clergé va fortir de fes ruines, tout auffi radieux qu'il étoit autrefois; notre magiftrature, en faifant des facrifices, va conferver le droit de nous faire payer fort cher fes arrêts arbitraires; nos moines continueront à faire la cour à nos femmes, & feront des novices; en un mot, fi, l'on en croit M. le Brun, le jour où l'on prononcera le décret fur la nouvelle emiffion des affignats, fera un jour de deuil, de deftruction, de défelpoir & de contre-révolution. L'honorable membre a tant d'averfion pour cette fabrique, qu'il n'a pas fait difficulté de dire qu'un affignat de 24 livres feroit tout auffi incom mode qu'un lingot dor.

M. Chabroud, au contraire, a démontré que l'intérêt de l'Etat, celui des contribuables, ceux des créanciers du tréfor national, notre commerce, notre agriculture, tout exigeoit cette opération, nécessitée d'ailleurs par les circonstances; il a démontré, que, fans elle, le clergé pourroit fort bien croireencoreàuneréfurrection;qu'avec elle, on déchargera les peuples de cent millions d'im» pôr; que la concurrence des prêteurs étant plus active, puifque le numéraire, fictif ou réel, feroit plus abondant, les emprunteurs, c'est-à-dire, les commerçans & les chefs des manufactures trouveraient des reffources à un taux

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plus modéré; & que les créanciers de l'Etat feroient d'au tant plus fatisfaits de cet arrangement, qu'on leur diftria bueroit un papier territorial,à l'aide duquel ils pourroient réaliser leur fortune. M. Chabroud concluoit à l'admiffion du plan de M. de Mirabeau, auquel il ajoutoit l'ouverture d'un emprunt à 4 pour cent, en faveur de ceux qui ne feroient pas flattés de recevoir des affignats.

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En avouant que cette mesure lui paroiffcit perfonnellement dangereufe, M. Begouen se bornoit à propofer un ajournement à quinzaine, pour une difcuffion auffi importante, & dont dépend le fort de la monarchie. M. de Beaumetz étoit de cet avis; & il y ajoutoit que le premier ministre des finances fût invité à donner fon opinion fur ce qu'il croit utile à la liquidation de la dette nationale; & ily infiftoit d'autant plus, difoit-il, qu'il n'a pu faifir l'idée du miniftre dans ce qu'il a dir, d'une part, que les affignats formeroient un encombrement dans les affaires, & de l'autre, ils alloient fe froiffer comme des corps qui fe précipitent tout à la fois vers une iffue trop étroite pour les recevoir; que le premier miniftre a comparé la difette des grains à celle de l'argent ; qu'on pourrait porterplus loin cette fimilitude, & que dans les deux matieres, il fuffit de pronostiquer la difette pour

la créer.

Il n'a plus été alors queftion que de l'ajournement. M. d'Agier, en l'appuyant, vouloit qu'on ne s'occupât plus que du mode de liquidation des finances de magiftrature; mais MM. Barnave & Anfon vouloient que, les jours de finances, on continuât la difcuffion fur les affignats. M. de la Villeroux propofoit d'entendre MM.les députés extraordinaires du commerce ; & c'étoit l'avis de M. de Montlaufier, qui vouloit auffi qu'on prît l'avis des gens de la campagne. Tous les amendemens ont été écartés par la question préalable; & le décret fuivant: propofé par M. Beaumetz, a éré adopté. Po

"L'Affemblée nationale décrete que, jufqu'à la déci» fion de la queftion préfente de la liquidation de la » dette publique, laquelle décifion ne pourra avoir lieu » que le to du mois de feptembre prochain, les jours » destinés aux difcuffions fur les finances feront employés » à cette queftion: charge en outre fon comité des finan» ces de demander au premier miniftre des finances fon

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5 opinion fur les moyens les plus convenables de párve? »nir à la liquidation de la dette nationale.

M. Rewbell est alors revenu sur fa motion, relative à la fabrication du billon ; Mais M. de Virieux a observé qu'il n'y a pas de branches d'administration où il fe commit plus de friponneries, que dans la fabrication dés monnoies, & qu'avant tout, il falloit s'occuper à en régler les formes. L'Affemblée n'a pas fort goûté cette propofition; & elle a ordonné que demain le comité lui feroit fon rapport sur la fonte du billon & la vente deś cloches. Puis, fur la demande de M. de Virieux, elle a renvoyé au comité des finances l'examen du compre des tréforiers des dons patriotiques.

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La féance a fini par la lecture d'une lettre de M. de la Tour-du-Pins, qui en accompagnoit une de M. de Gou vernet, dans laquelle il rendoit compte des mauvais traitemens dont M. de Malfeigne a été menacé par les fole dats du régiment de Châteauvieux, à Nancy, & qui, graces aux foins du régiment du Roi, n'ont eu aucune fuite.

Pendant le cours de cette difcuffion, l'Assemblée ■ readu un décret fort fage, & en même temps très-vigou❤ reux contre la municipalité de Mouton en Angoumois, la◄ quelle, contre la teneur des décrets & les obfervations du comité, a ofé enlever la récolte d'un bien eccléfiafti que, affermé à un particulier avant le 2 novembre.

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Le prix de l'Abonnement de ce journal, qui paroft tous les jours eft de 3 liv. 10 fols par par mois, on en vend à 3 föls la feuille pour ceux qui n'ont pas foulgrism

COURIER FRANÇAIS,

DU LUNDI 30 AOUT 1790.

ASSEMBLÉE NATIONALE du 29)

Décret fur M. de Mirabeau le limoufin. Autre fur les penfions Difcuffion fur la vente des cloches. Approche des Autrichiens dans nos frontieres. Inveftiffement de Nancy par les troupes de M. de Bouillé. Lettre du Roi à l'Affemblée nationale.

PLufieurs adreffes ont été lues hier foir, à l'ouvera

ture de la féances On a particuliérement remarqué une lettre de Marseille, par laquelle on annonçoit l'envoi de diverfes marchandifes, fait par les négocians français établis en Syrie, & dont le prix doit être verfé dans le tréfor public. L'Affemblée nationale a décrété qu'il feroit fait une mention honorable de cet acte de patriotifme dans fon procès-verbal ; & que fon président écrim roit une lettre de fatisfaction à ces négocians.

Puis, M. Regnier a fait le raport de la difcuffion qui s'eft élevée entre M. de Mirabeau le limousia, & le régiment de Tourraine dont il eft colonel.

Après avoir rendu compte des faits qui ont précédé l'enlevement des drapeaux de ce corps militaire, le rap porteur a réduit la question au deux points fuivans: y a-t-il lieu à accufation contre M. Riquetti le jeune ? s'il y a lieu à accufation, devant quel tribunal doit-elle être portée ?

Mais ces deux questions ont été précédées de celle de favoir fi M. de Mirabeau le jeune, ayant déclaré fe démettre de fa place de député, devoit malgré cela, refter encore soumis à la jurisdiction de l'Affemblée nationale.

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Les comités militaire & des raports fe font déterminés pour l'affirmative, & ils ont fondé leur décifion fur ce qu'un membre dont l'Affemblée nationale n'a pas accepté la démiffion, eft toujours cenfé lui appartenir.

Le rapporteur a examiné enfuite la queftion, s'il y a lieu, ou son, à accufation. Quand les bas-officiers & foldats dir régiment-de Tourraine, a-t-il dit; feroient coupables de tous les délits que leur a imputé M. de Mirabeau, celui-ci ne seroit pas excufable pour cela de s'être permis l'enlevement des drapeaux de ce régiment & d'avoir préféré l'exercice d'une voie de fait auffi con. damnable, à la juftice que n'auroit pas manqué de lui rendre le tribunal auquel il auroit dénoncé le tort de fes fubordonnés. » M. Regnier en a conclu qu'il y avoir lieu à accufation contre M. de Mirabeau, & que cette accufation devoit être renvoyée devant un confeil de guerre.

Au moment où l'on fe préparoit à aller aux voix, M. de Mirabeau l'aîné s'eft présenté à la tribune. « Je fuis bien éloigné, a-t il dit, de m'oppofer au renvoi devant un confeil de guerre : mon frere a lui même follicité ce jugement. Mais fi l'Affemblée veut rendre un édécifion auffi févere que celle par laquelle on lui propofe de déclarer qu'il y a lieu à accufation, je la fupplie dajourner l'affaire, afin de me donner le temps au moins de parler en faveur d'un accufé qui n'a que moi ici pour défenfeur. On vous entretient depuis un heure de la déchiru re des drapeaux ; mais j'aurai l'honneur de vous obferver que le régiment de Tourraine connu par des fervi. ces très-diftingués, fur-tout en Amérique, en eft revenu avec des drapeaux fi déchirés qu'il étoit impoffible de les déchirer encore..,, Cette faillie a excité un rire d'approbation, & l'affaire a été ajournée à jeudi foir.

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On s'est enfuite occupé du projet de décret relatif au commerce de l'Inde: on a décrété deux articles que l'abondance des matieres nous oblige à remettre à demain.

A l'ouverture de la féance de ce matin, il a été fait lecture d'une lettre de M de la Tour-du-Pin, qui annonçoit à l'Affemblée que la municipalité de Bar s'eft permis d'arrêter du numéraire que le gouvernement envoyoir à Strafbourg, pour la folde des troupes. La diete augufte, fur la propofition de M. d'Ailly, a ordonné que fon préfident écriroit au directoire du département de Bar, pour faire relâcher cet argent. Puis, M. lepréfidentafait lectured'une

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