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COURIER FRANÇAIS,

DU JEUDI 5 AOUT 1790.

ASSEMBLÉE NATIONALE du 41

Déclaration du Roi d'Espagne fur la paix, accepté par l'Angleterre. Articles additionnels fur le clergé. Decret fur Carcaffonne. Organifation de nos tribunaux.

A

VANT d'entamer les deux féances, que nous avons parcourir, nous devons faire connoître deux piéces que nous avons promifes, la déclaration de l'Espagne & la contre-déclaration de l'Angleterre, au fujet de l'af faire de Nootka. La premiere s'exprime ainfi:

« Sa majesté britannique s'étant plainte de la capture de certains vaiffeaux appartenans à fes fujers, faite dans la baie de Nootka, fituée fur la côte du Nord-Ouest de l'Amérique, par un officier au fervice du Roi, le fouffigné, confeiller & premier fecrétaire d'Etat de fa majefté, étant à ce duement autorifé, déclare au nom & par ordre de fadite majeflé qu'elle eft difpofée à donner fatisfaction à fa majesté britannique pour l'injure dont elle s'eft plainte, bien affurée que la majesté briarnnique en uferoit de même à l'égard du Roi dans de pareilles circonftances, & fa majefté s'engage en outre de faire reftitution entiere de tous les vaiffeaux britanniques qui furent capturés à Nootka, & d'indemnifer les parties intéreffées dans ces vaiffeaux des pertes qu'elles auront effuyées, auffitôt que le montant aura pu en être eftimé

"Bien entendu que cette déclaration ne pourra point exclure ni préjudicier à la difcuffion ultérieure des droits

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que S. Majefté pourra prétendre à la formation d'un éta bliffement exclufif au port de Nootka ».

«En foi de quoi j'ai ligné cette déclaration, & y ai appofé le cacher de mes armes. A Madrid, ce 24 juiller 1790. Signé le comte de Florida Blanca.

La contre-déclaration eft ainfi conçue:

«Sa majefté catholique ayant déclaré qu'elle étoit difpofée à donner fatisfaction pour l'injure faite au Roi par la capture de certains vaiffeaux appartenans à fes su. jers à la baie de Nootka, & M. le comte de Florida Blanca ayant figné, au nom & par ordre de fa majesté catholique, une déclaration à cet effet, & par laquelle, fadite majesté s'engage pareillement à faire reftitution entiere des vaiffeaux ainfi capturés, & d'indemnifer les parties intéreffées dans ces vaiffeaux, des pertes qu'elles auront effuyées, le fouffigné ambaffadeur extraordinaire & plénipotentiaire de fa majefté près le Roi catholique, étant à ce duement & expreffément autorifé, accepte ladite déclaration au nom du Roi, & déclare que fa majesté regardera cette déclaration, avec l'accompliffement des engagemens qu'elle renferme, comme une fatis faction pleine & entiere de l'injure dont fa majefté s'eft plainte».

» Le fouffigné déclare en même temps qu'il doit être entendu que ni ladite déclaration fignée par M. le comte de Florida Blanca, ni l'acceptation que le fouffigné vient d'en faire au nom du Roi, ne doit exclure ni préjudicier en rien aux droits que fa majesté pourra prétendre à tout établiffement que fes fujets pourroient avoir formé, ou voudroient former à l'avenir à ladite baie de Nootka ».

«En foi de quoi j'ai figné cette déclaration, & fait appofer le cacher de mes armes. A Madrid, ce 24 juillet 1790. Signé. Filtz-Herbert ».

La féance d'hier foir a commencé par la lecture de quelques adreffes, & particuliérement d'une lettre de la municipalité de Befançon adreffée à M. Lapoule, dans la➡ quelle elle dénonce à l'Affemblée une prétendue lettre de M. Alexandre de Lameth, dont le but est de soulever l'armée. Sur la motion de cet honorable membre, le libelle a été renvoyé au comité des recherches. Puis, M. Voidel, membre du même comité, a fait rapport de l'é meure arrivée à Carcaffonne, fur laquelle il a été rendu le décret fuivant

"L'Aflemblée nationale, après avoir entendu fort comité des recherches, décrete que le préfidial de » Carcaffonne fuivra, fur les derniers erremens la > pro»cédure inftruite per le prévôt de ladite ville, contre les

auteurs, fauteurs & complices de l'émeute arrivée au » village de Pennautier le 16 juillet dernier, contre la libre » circulation des grains, & fera le jugement rendu en » dernier reffort par le préfidial.

L'Affemblée charge fon président de témoigner fa fatis» faction à la municipalité de Carcaffonne »..

Enfin, la féance a été close par les articles additionnels fuivans, qu'ils ont été décrétés fur le rapport de M. Chaffey, membre du comité eccléfiaftique.

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» L'Affemblée nationale expliquant différens articles de » fon décret du 24 juillet dernier, fur le traitement du » clergé actuel, décrete ce qui fuit:

Art. I. » Le traitement des vicaires des villes, pour » la préfente année, fera, outre leur cafuel, de la même » fomme qu'ils font en ufage de recevoir ; & dans le cas

où cette fomme, réunie à leur cafuel, ne leur produi»roit pas celle de 700 l., ce qui s'en manquera leur fera. » payé dans les fix premiers mois de l'année 1791.

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II. La diminution des revenus attachés aux bénéfices, » qui proviendra de l'augmentation rappeflée dans l'ar»ticle XXIV dudit décret des portions congrues faites en » faveur des curés, jufqu'à concurrence de 500 livres » & en faveur des vicaires, jufqu'à concurrence de 350 » livres, ainfi que la diminution qui réfultera des droits » fupprimés fans indemnité, feront l'un & l'autre fuppor»tés tant par les penfionnaires d'un bénéfice non tombé » aux économats, que par le titulaire proportionnellement » à la quotité de ce que chacun retiroit dudit bénéfice.

III. » La réduction qui fera faite par le retranchement » des droits fupprimés fans indemnité, ne pourra, de » même que celle réfultante de l'augmentation ci-deffus » des portions congrues, opérer la diminution des trai» temens des titulaires actuels, ni des penfions au-deffous. » du maximum fixé pour chaque espère de bénéfice.

IV. » Les évêques & les curés qui auroient été pour-. vus, à compter du premier janvier 1790 jufqu'au jour » de la publication du décret du 12 juillet dernier, fur

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l'organifation nouvelle du clergé, n'auront d'autre trai»tement que celui attribué à chaque efpèce d'office par » le même décret.

V. » A l'égard des titulaires des autres efpèces de » bénéfices de collation laïcale qui auroient été pour»vus dans le même intervalle de temps autrement que

par voie de permutation de benéfice qu'ils poffèdoient avant le premier janvier 1790, ils n'auront d'autre » traitement que celui accordé par l'article 10 dudit dé»cret, du 24 juillet dernier, fans que le maximum puiffe » s'élever au delà de 2000 livres.

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Quant à ceux qui auroient été pourvus pendant ledit » temps par voie de permutation des bénéfices du genre » ci-deffus, qu'ils poffèdoient avant le premier janvier

1790, le maximum de leur traitement pourra s'élever, » fuivant l'article 10 dudit décret, à la fomme de 6000 livres.

au

VI. » Les bénéficiers dont les revenus anciens auroient » pu augmenter en conféquence d'unions légitimes & confommées, mais dont l'effet eft fufpendu en tout » ou en partie par la jouiffance viagere des titulaires dont » les bénéfices ont été fupprimés & unis, recevront, » décès defdits titulaires, une augmentation de traitement » proportionnel à ladite jouiffance, fans que cette augmen»tation puiffe porter le maximum au-delà du taux déterminé pour chaque espèce de bénéfice ».

Ce matin, après la lecture du procès-verbal d'hier, M. Bouche a fait un petit rapport, au nom du comité de vérification; &, après fon opinion, l'Affemblée, n'a pas agréé M. Lafite, qui fe préfentoit pour remplacer un député de Tartas, quoiqu'il ne fût que fuppléant de l'ancien bailliage de Dax, fous prétexte que ces deux bailliages font actuellement confondus dans le même département. Puis, M. Vernier a obtenu, d'une part, un décret qui autorife la ville de Montmedy à emprunter 12000 livres; & de l'autre, un second décret, qui ordonne que les octrois continuront à êtrre perçus dans la ville de Laon, & fait défenfes aux bouchers, cabaretiers & autres d'en troubler la perception, fous peine d'êre pourfuivis comme réfractaires aux décrets de l'Affemblée nationale.

M. Nourriffart, provoqué par les députés d'Alface, fe propofoit de faire ici fon rapport fur la nouvelle fabriq

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cation du billon, lorfque M. Martineau a obfervé qu'il eft bien étonnant qu'on ne fe fût pas encore occupé de l'établiffement des tréforiers des diftricts; mais M. Dubois des Guyas, en obfervant que l'organisation de l'ordre judiciaire étoit ce qui preffoit le plus, ajoutoit que la fabrication du billon n'avoit rien de bien urgent, & que, dans les circonstances actuelles, il feroit dangereux de faire ceffer les fonctions des receveurs particuliers, pour les confier à de nouveaux adminiftrateurs. C'étoit auffi l'avis de M. le Chapellier, qui remarquoit que le moyen le plus affuré de fufpendre entierement la perception des deniers publics, feroit d'en changer précipitamment l'adminiftration.

Sur ces différentes obfervations, l'Affemblée a décrété qu'on pafferoit à l'ordre du jour, puis, que cet ordre du jour feroit l'ordre judiciaire. M. Thouret eft alors monté dans la tribune ; &, après avoir développé les bases du comité, avec cette profondeur, cette précision & cette fagacité qu'on lui connoît, il a propofé les articles fuivans, qui, après de très-légers débats, ont été décrétés

en ces termes :

Art. I. « Aucun appel des jugemens contradictoires ne » pourra être fignifié ni avant le délai de huitaine, à » dater du jour du jugement, ni après l'expiration de trois » mois, à dater du jour de la fignification du jugement » à perfonne ou domicile. Ces deux termes font de rigueur, » & leur inobfervation emportera la déchéance de l'appel; » en conféquence, l'exécution des jugemens qui ne font » pas exécutoires par provifion, demeurera fufpendue » pendant le délai de huitaine.

II. » La rédaction des jugemens, tant fur l'appel qu'en premiere inftance, contiendra quatre parties » diftinctes.

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» Dans la premiere, les noms & les qualités des par»ties feront énoncées.

» Dans la feconde, les queftions de fait & de droit qui conftituent le procès, feront pofées avec précision.

» Dans la troisieme, le rélultat des faits reconnus ou » conftatés par l'inftruction & les motifs qui auront dé» terminé le juge, feront exprimés.

» La quatrieme enfin contiendra le dispositif du juge

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