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Le cimetière entourait (1) l'église. (Les inhumations se font depuis 1878 dans un nouveau cimetière). Une croix en pierre de 375 de hauteur s'y trouve encore et porte à sa base cette inscription:

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En résumé, l'église du Bellay est l'œuvre de plusieurs siècles, plusieurs genres d'architecture y ont été appliqués de l'époque romane à la Renaissance, altérant le plan primitif. Les remarques archéologiques auxquelles donne lieu son examen sont motivées par le plan du chœur dont la forme carrée fut adoptée rarement au XVIe siècle dans l'Ile de France et par son clocher. Nous pensons que ces deux particularités suffiront à justifier la rédaction de cette monographie inédite.

(1) Bénédiction du nouveau cimetière à la requête du curé, des marguilliers et des habitants ayant représenté « qu'on oroit fait entourer l'église du dict lieu d'un mur de quatre pieds d'hauteur tant pour obvier aux prophanations qui se comettoient que pour servir de cimetière, l'ancien estant trop petit pour la paroisse et aussi pour oster aux fideles occasions de demander avec trop de cupidité et d'ardeur d'estre inhumés dans l'église ». (Arch. de Seine-et-Oise, série G 81).

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DU NOM DE SAINT-PRIX

Par M. AUGUSTE REY

E village de la vallée de Montmorency connu sous le nom de Saint-Prix portait auparavant celui de Tour. On trouve dans Lebeuf la raison de ce changement (1): des reliques de ce saint furent données à l'église de Tour, qui, originairement placée sous le patronage de saint Germain, passa sous celui de saint Prix, en reçut le vocable, et le transmit à la paroisse. On avait dit : « l'église Saint-Prix de Tour » (2); on dit désormais : « l'église de Saint-Prix ». Quel fut le donateur des reliques, et à quelle date la substitution d'un nom à l'autre s'opéra-t-elle ? A ces deux questions, négligées par Lebeuf, j'ai répondu ailleurs avec tous les détails nécessaires. Il suffira de rappeler ici que la donation, qui remonte à 1278, eut pour auteur Jean de Tour, trésorier du Temple de Paris, originaire de notre village; et que le changement de nom dont elle fut cause eut lieu au commencement du xvIe siècle (3).

(1) Histoire du diocèse de Paris, III, 421.

(2) Arch. nat., S 5136, no 82. Dans une charte du 25 avril 1345, il est question d'un champ a tenant aux terres de Saint Pry de Tour ».

(3) Bulletin de la Société de l'histoire de Paris et de l'Ile-de-France, Paris, Champion, 1902, in-8°, p. 42.

Quel était le nouveau patron de Saint-Prix? L'information est aisée il s'agit de l'évêque de Clermont, assassiné, en 674, par les parents d'un comte de Marseille qu'il avait fait condamner pour crime de rapt et calomnie (1). Il y avait sujet cependant de s'en expliquer, car un doute peut naître de ce qu'un autre saint a été souvent confondu avec celui-ci, portant le même nom, au moins dans la province où il est resté particulièrement honoré : saint Prix(2), qui fut décapité, dans le diocèse d'Auxerre, sous le règne d'Aurélien, vers 274. Les deux saints sont très distincts sous leurs vocables latins: l'évêque de Clermont s'appelle sanctus Præjectus; le martyr de Bourgogne, sanctus Priscus. Ces noms, d'après les règles ordinaires de la formation de la langue française, pouvaient aboutir à une homonymie qui s'est en effet produite, et a persisté dans l'Auxerrois: Præjectus ayant donné Pris ou Prit; Priscus, Prais ou Pris; et Pris ayant été écrit abusivement Prix, comme le nom commun « prix », dérivé de pretium (3).

L'usage de ces noms dans la langue topographique a singulièrement compliqué leurs destinées, et il est intéressant de classer les variantes nombreuses, parfois bizarres et inexplicables, qu'en donne la carte de France.

Quicherat (4), après avoir remarqué, en termes un peu trop absolus, qu'il n'y a pas deux logiques dans la tête des peuples, et que l'instinct qui a déterminé la déformation du latin dans les bouches gallo-romaines a été le même pour les noms de lieu que pour les mots de la langue usuelle, est obligé de concéder une grave et large exception, au moins en ce qui concerne les noms de saint. Il parle d'altérations provenant d'accidents connus ou inconnus, de défigurations telles qu'on ne devinerait pas les lieux auxquels les vocables s'appliquent sans le secours des pouillés ou d'autres anciens répertoires topographiques. Nous allons demander à Cocheris d'abord, pour le cas qui nous occupe, le dévelop

(1) Bollandistes, II, 628, 25 janvier.

Mabillon, Acta Sanct. S. B., II, 651.

(2) Bollandistes, VI, 365, 26 mai; VII, 851.

(3) Cf. le traité placé en tête du Dictionnaire général de la langue française de Hatzfeld, Darmesteter et Thomas; Paris, Delagrave, s. d., 2 vol. in-8°, §§ 306, 386, 388 et 291. Sans m'étendre sur ce sujet, je ferai observer que Projectus appelle la comparaison avec pectus et lectum; et Priscus, avec discus et viscum.

Lectum a donné lieit et lit; pectus pieiz et pis. Discus a donné deis, dois, dais; viscum, guis (abusivement gui). Saint-Pris pouvait donc sortir des deux dérivations, et par suite Saint-Prix.

Une forme savante, saint Prisque, a généralement prévalu pour sanctus Priscus, dans les hagiographies modernes.

(4) De la Formation française des noms de lieu. Paris, A. Franck, 1867, in-12, p. 65.

pement de cette observation. Cet auteur présente les tableaux

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A première vue, Saint-Pregts, d'où l'on dirait que les voyelles de Sanctus Projectus ont été éliminées à plaisir; Saint-Bris, qui présente un changement extraordinaire de sa consonne initiale, peuvent être classés parmi « les noms de saint complètement défigurés dont parle Quicherat. Saint-Pregts est le nom d'un faubourg et d'une paroisse de Sens (2). Saint-Priect, à ce que m'a assuré M. l'Archiviste du département, n'existe pas dans les BassesAlpes. Mais les tableaux précédents méritent surtout d'être critiqués à cause de leurs lacunes, dont la plus étonnante n'a pu manquer de frapper le lecteur : Saint-Prix n'y figure pas !

Le Dictionnaire des Postes, qu'il faut évidemment consulter avec quelque préparation, et les dictionnaires topographiques départementaux, là où ils existent, nous aideront à compléter l'enquête. C'est ainsi qu'on peut signaler, en France, comme portant le nom de sanctus Projectus, francisé de façon ou d'autre, 50 communes, villages ou hameaux sans compter les paroisses, écarts, chapelles ou ruines soit 26 Saint-Priest, 10 SaintProjet, 3 Saint-Préjet; et voici les noms oubliés par Cocheris : 10 Saint-Prix, 1 Saint-Preuil.

Saint-Preuil est le nom tout à fait méconnaissable d'un village de la Charente (3); Saint-Projet et Saint-Préjet, deux noms de formation savante. Voici, au surplus, comment tous ces dérivés de sanctus Præjectus se classent par départements:

(1) Origine et formation des noms de lieu. S. d., Bibliothèque de l'Écho de la Sorbonne, Paris, 7, rue Guénégaud, in-12, p. 147.

(2) On verra plus loin que cette forme a paru dans l'Ardèche, et s'est effacée devant Saint-Priest.

(3) C'est un seigneur de ce lieu, le maréchal François de Saint-Preuil, qui fit prisonnier à Castelnaudary, le 1er septembre 1632, Henri II de Montmorency.

M. le curé de Saint-Preuil m'a écrit, sans m'en donner aucune preuve, que sanctus Projectus était le patron de son église, martyr de Casal, en Italie, dont l'Église célèbre la fête le même jour que celle de sanctus Projectus, le 25 janvier. Ce serait le seul cas en France.

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