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de nous entendre jurer. Si les poumons ne tenaient pas si fort, nous les lancerions à plus de vingt toises. Il est un jeune curé qui a sa maison sur les bords de la route dont les oreilles sont mille fois le jour déchirées de nos sacrements. Il veut se mêler quelquefois de nous remonter et nous l'envoyons rudement chanter matines. Nous savons bien que c'est un gros péché; mais aussi peut-on se retenir dans un si mauvais pas ? Ce n'est pas tout, Monseigneur; il y a un an, un de nous y a passé aux oubliettes. Sa voiture s'est emportée; il n'a pu se sauver que sur un chemin si étroit qu'il n'a pas dix-sept pieds: il est tombé et a eu les deux cuisses coupées. A chaque voyage, nous courons le même risque, si ce n'est pas nous, ce sont nos chevaux, et l'on ferait une belle liste de tous ceux qui ont été estropiés.

« Et puisque M. l'intendant de Rouen a fait donner l'année dernière des indemnités pour les maisons de Saint-Gervais qui doivent entrer dans le plan de la route, qu'il ne s'agit que d'élargir et d'adoucir, ce qui ne coûterait pas beaucoup d'argent, nous vous supplions, Monseigneur, de déterminer cet ouvrage essentiel pour le commerce, pour la vie des hommes dont on vous sait l'ami et pour vous-même qui descendez souvent cette gorge dangereuse et ridicule, dans un chemin très ouvert partout ailleurs.

« MM. les postillons qui envient l'honneur de vous servir et les rouliers qui portent tout dans la capitale confiée à vos soins, ont dressé de leur mieux cette requête pour vous la présenter, Monseigneur, à votre premier passage; et ils croient bien tous qu'un mot de M. le baron de Breteuil, ministre d'Etat, leur procurera enfin plus de sûreté, moins de travail, épargnera à leurs pauvres chevaux de violents coups de fouet et purgera l'air d'exécrables apostrophes contre Dieu, le diable, les hommes, le chemin. »

Cette requête devait, comme tant d'autres, subir les lenteurs administratives; la Révolution qui avançait se proposait autre chose. On lui donna suite en 1840 en faisant une nouvelle route qui formait un grand arc, au moment où le chemin de fer, de Paris à Rouen, venait de supprimer le roulage et les diligences. Il est certain que ce passage de tant de voitures devait donner à notre village une animation qu'il ne connaît plus. Ce n'était toutefois pas un élément de commerce; Magny et Saint-Clair, lieux de relais, étaient trop voisins: il n'y avait de profit que pour deux cabarets, l'un au bas de la côte, l'autre au haut, et comme les voyageurs aimaient à la monter à pied on faisait une halte à ces cabarets où conducteurs et postillons trouvaient un verre toujours payé par quelqu'un des voyageurs.

Cette grande route divisait inégalement le terroir de la paroisse.

Elle mettait Estrées en communication directe avec Saint-Gervais. Archemont se rendait à Saint-Gervais par le chemin appelé de la messe ou plus tard des morts, il aboutissait à l'Eglise. Magnitot et Ducourt n'avaient que de mauvais chemins de plaine ; enfin Archemont communiquait avec ces deux derniers hameaux par le chemin de Magny à Montreuil; il reste comme un échantillon de ce que l'on appelait jadis une route.

IV

Le terroir était très divisé. Saint-Gervais, village situé dans le Vexin Français, ressortait de la Généralité de Rouen et de l'élection de Chaumont et Magny. On sait que le Vexin relevant du bailliage de Senlis en suivait les coutumes. Or comme la coutume de Senlis n'admettait pas le droit d'aînesse, mais l'égalité du partage, nous trouvons dans les plus anciens monuments, ceux du xve siècle la division de la terre, en un grand nombre de propriétaires. A côté de la grande propriété féodale qui s'acquiert à prix d'argent et qui s'arrondit par le même moyen, nous voyons la propriété plus restreinte, mais suffisante à créer la bourgeoisie; enfin les pièces de terres détachées auxquelles les familles les plus pauvres s'attachent comme au patrimoine des ancêtres. Le seigneur d'Hallaincourt loue ses fermes moyennant un prix et des redevances, il donne des terres sans location mais à charge de payer des droits seigneuriaux. Les officiers d'Hallincourt ou de Magny sont d'abord ses percepteurs; mais cette charge est remplie par le fermier principal de la terre qui est en même temps receveur : il tire un certain bénéfice de cet emploi : nous trouvons ainsi des receveurs des terres de Saint-Gervais, d'Etrez, de Ducourt.

La tradition a rapporté des traits de générosité des Villeroy envers les gens d'Archemont; tous reçurent deux perches de terre le long du ru de l'Aubette avec la jouissance d'un chemin commun pour le service de cette terre.

On reste stupéfait, après la lecture dans les aveux, des charges des propriétaires envers leur seigneur, tant elles sont minimes! Nous possédons les aveux de la terre de Saint-Gervais, en 1745. Plus de cent dix personnes ou établissements font aveu de ce qu'ils possèdent et sont tenus de payer. Ce sont les mêmes sommes qui se payaient à la fin du xvre siècle; nous les retrouvons telles dans l'Inventaire de Le Gendre. Assurément sous ce seigneur elles étaient plus importantes et représentaient une charge plus lourde qu'au milieu du XVIIe siècle. Du reste, à cette dernière époque le contrat de suzeraineté et de vassalité avait été bien des fois

amoindri par la Royauté toujours grandissante. Elle ne laissait plus qu'une ombre de pouvoir aux seigneurs qui, n'offrant plus à leurs vassaux la protection des temps plus anciens, ne pouvaient augmenter l'impôt féodal. Messire Louis-Antoine de La Fontaine, écuyer, seigneur de Lesseville et autres lieux, prêtre et ancien curé de Saint-Martin-la-Garenne, demeurant à Magny, paie pour une maison de fond en comble, cuisine, salles, chambres et greniers dessus, cour, colombier, granges, étables, écuries et jardin, à SaintGervais, proche l'église, 27 sols, 2 deniers maille, 7 boisseaux et demi d'avoine, 2 chapons et une oublie; pour huit arpents de terre où étaient autrefois une grange et une masure au même lieu, 5 sols, 2 deniers, 2 chapons, 1/16 de chapon, un boisseau 1/2 d'avoine, 7 œufs 1/2, 3/8 d'oublie. Enfin l'on fait la récapitulation de ses charges pour toutes ses terres qui sont multipliées sur la paroisse, et en y comprenant les précédentes redevances l'on arrive à la somme totale de 3 livres 8 sols maille, 9 boisseaux d'avoine 4 chapons, 1/16 de chapon, 14 œufs 1/2, une oublie et 3/8 d'oublie, champart à l'onzième gerbe.

La division de la propriété est poussée à l'extrême. Nous lisons dans les aveux que François Dagneaux, laboureur à La Chapelle, paie pour 4/7 d'une chambre et grenier dessus le bassier, appartenant à Jean Magnen et les 3/7 et grenier appartenant à Alexandre Havard, pour un jardin et un certain nombre de pièces de terre. Louise Bellay, veuve d'Alexandre Havard, demeurant à St-Gervais, paie pour bassier de maison appartenant à Jean Dagneaux avec une écurie y joignant et une partie de la chambre qui est au-dessus, droit de cour commune avec petit jardin et enclos derrière lesdits lieux, un sol, un denier, un boisseau, sept godets d'avoine, une demi poule, 5/16 de chapon, 5/24 d'oublie.

Enfin personne n'est exempt de payer: églises, chapelles, prêtres paient pour la terre et les bâtiments concédés par le seigneur. Les églises de Saint-Gervais de Parmes, de Nucourt paient comme Me Jean-François de Saint-Quentin, écuyer, chevalier de l'ordre royal et militaire de Saint-Louis, demeurant au Hâvre, et la dame Marie-Thérèse Le Febvre de Vaumont, demeurant à Magny, et ils se rencontrent avec les manouvriers et les laboureurs, dont les noms sont encore portés jusqu'à ce jour.

Dans cette Notice, je me suis aidé beaucoup des travaux de MM. Potiquet et Feuilloley, sur Magny ; je dois remercier MM. de Magnitot et Béranger des documents qu'ils ont bien voulu me communiquer.

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Vernon. Bassin de Neptune dans le parc du château de Bizy. Eau-forte par Henri Valois (no 4,300).

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Ruines de Château - Gaillard. Peinture par

Gassicourt. Église de Gassicourt. Peinture par R.-Fr. Picquefeu (no 1,005).

Vernon.

Vieux pont de Vernon. Peinture par Eugène Clary

(n 3oi).

1898

I. Exposition de la Société des Artistes français Méry-sur-Oise. L'église de Méry-sur-Oise. Aquarelle par Henri Linguet (no 2.687).

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Le clocher de Montmorency. Peinture par

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Pont-Saint-Pierre. Étude du château de Pont-Saint-Pierre. Deux aquarelles par Léon de Vesly (no 4,466). [Vues N.-O. et S.-O. de ce château, construit probablement dans la seconde moitié du xve siècle, mais très remanié.]

II.

Exposition de la Société nationale des Beaux-Arts

Mantes. Rosace de la face ouest de Notre-Dame de Mantes, par Ch.-Aug. Leprévost (no 497).

1899

I. — Exposition de la Société des Artistes français

Les Andelys. Le Château-Gaillard. Croquis de voyage, par Tony Garnier (no 4,216).

Auvers-sur-Oise.

Escalier de l'église d'Auvers-sur-Oise. Eau

forte, par Mile Léonide Bourges (n° 4,449).

Belloy. - Église Saint-Georges de Belloy, par Daniel Renard (n° 4,333).

Goussainville.- Croquis archéologiques, par Ath.-Alex. Grellet (n° 4,221). Dessins au crayon, parmi lesquels: Église de Goussainville (ensemble S.-E.).

Poissy. La nef et le choeur de l'église de Poissy. Aquarelle, par Lucien Hubaine (no 4,246). [Vue intérieure, prise de la nef.] Rolleboise. La Seine à Rolleboise; printemps. Peinture, par Aston-Louis Knight (no 1,072). [On voit l'église.]

Triel. L'église de Triel; relevé et essai de restauration. Dessins par Georges Balleyguier (n° 4,129). [État actuel : plan; élévation O. ; élévation S.; élévation N. ; coupe N.-S. au transept ; coupe sur la nef; coupe longitudinale de l'église. Restauration : élévation O.; élévation S.; coupe sur le chœur; vue perspective intérieure, dans la nef, et coupe de la nef; plan de la crypte.] — On sait que l'église de Triel a été décrite par M. Eugène LefèvrePontalis, dans le « Bulletin de la Commission des Antiquités et des Arts de Seine-et-Oise », année 1887.

II.

Exposition de la Société nationale des Beaux-Arts Les Andelys. — Château-Gaillard au soleil couchant. Peinture, par René Billotte (no 159). [Vue N.-O., prise des îles.] Le PetitAndely et les ruines du Château-Gaillard: nov. 1898. Peinture, par Mario Carl-Rosa (no 299). Le Château-Gaillard. Peinture, par Eugène Clary (n° 351). [Vue N.-O., prise des prairies de la rive gauche.]

L. R.

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