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1707

mieux goûté que si l'on proposait la maxime que les Peuples sont faits pour les Princes. Mais que la maxime contraire soit insinuée de la part des prétendants qui viennent de la Cour de France, c'est ce qui surprend, on l'avoue, et à quoi apparemment les peuples de ce Pays ne s'attendaient pas. S'il n'y a rien de suspect pour eux dans tout ce qu'on leur dit pour les prévenir contre S. M. P. et pour les faire pencher du côté de la domination française, c'est ce qu'on Le but S. M. P. leur laisse juger. Quoi qu'il en soit, comme le but de S. M., en faisant valoir est bien moins son droit à la Principauté de Neufchâtel est bien moins d'y chercher ses prode chercher son pres avantages que d'augmenter et affermir le bonheur des peuples de cette d'augmenter le Principauté, l'on craint si peu pour ce monarque que l'examen des raisons de bonheur des politique et d'intérêt de ces mêmes peuples, et l'on est si persuadé que le sucpeuples. cès de son droit convient en toute manière au bien de leur patrie, que loin d'empêcher ni les Corps de l'Etat ni les particuliers d'ouvrir les yeux sur ce qui est de leur intérêt dans cette conjoncture, on déclare que S. M. sera bien aise qu'ils y fassent de très sérieuses attentions et réflexions.

intérêt que

Comparaison

entre les pré

tendants et le roi de Prusse.

Les préten

ont un maître.

Pour les y aider, l'on va comparer ce qu'ils peuvent avoir à espérer ou à craindre de côté et d'autre. Mais auparavant il sera bon de poser la règle à laquelle on pourra mesurer le bien et le mal dont il s'agit.

Chacun conçoit sans peine que le bonheur des peuples de Neufchâtel et Valangin et leur plus grand intérêt consiste à jouir en paix et dans une pleine étendue de toutes leurs libertés spirituelles et temporelles, et à les transmettre à leur postérité: comme au contraire tout ce qui peut troubler et interrompre la jouissance de ces libertés doit être regardé comme un malheur qui ne peut qu'en entraîner une infinité d'autres.

Il n'y a donc qu'à voir sous quelle domination il y a le plus à espérer de ce bonheur, ou le plus à craindre de ce malheur; et comme cela dépend de ce que le prince qui dominera aura de vouloir et de pouvoir pour faire du bien ou du mal à ses sujets, c'est par rapport à ces deux qualités qu'il faut faire la comparaison que l'on a entreprise.

Pour commencer par la bienveillance, on ne se contentera pas d'assurer les peuples de Neufchâtel et Valangin de celle de S. M. le roi de Prusse, et de leur dire que ce grand prince est tout animé d'une affection tendre et paternelle en leur faveur; car, quoique cela soit très vrai, les autres prétendants pouvant leur en dire tout autant, on ne veut pas entreprendre de les surpasser dans la force des expressions. Mais voici ce qui relève la bienveillance du Roi de Prusse audessus de la leur et qui en fait sentir la différence: c'est que celle de S. M. est libre et indépendante; elle est à l'épreuve et soutenue d'une infinité d'exemples; elle est enfin généreuse et desintéressée. Ces trois caractères distinguent si avantageusement S. M. P. de ses concurrents qu'ils ne peuvent pas à tous ces égards entrer en parallèle avec elle.

En effet pour ce qui est de ceux qui sont sujets et dépendants d'un maître dants de France absolu, peut-on dire qu'il leur soit permis de vouloir et de faire autre chose que ce qui plait à leur souverain? Qu'est-ce de toutes les espérances, de toutes les promesses et même de toutes les assurances qu'ils peuvent donner, si elles n'agréent pas à leur Monarque? A quoi ont abouti celles que Monsieur le prince de Conti donnait aux peuples d'Orange, quand le Roi de France, son seigneur, a voulu les choses autrement?

On ne veut pas presser cet article de la dépendance, sur lequel il y aurait bien des choses à dire, surtout à l'égard des démarches de la Cour de France pendant les derniers troubles de Neufchâtel: on se contentera de faire ces deux observations; l'une que pas un des prétendants français n'aurait seulement osé se dire prétendant, ni se donner à ce sujet le moindre mouvement, si cela eût désagréé, pour peu que ce fût, à S. M. T. C., témoin les soumissions qu'ils

s'empressèrent de lui faire, en lui demandant la permission d'aller à Neufchâtel, et ce que lui dit particulièrement l'un d'eux lorsque, pour renchérir sur le sacrifice des autres, il s'offrit de commander les troupes qu'il plairait à S. M. de lui confier, si elle voulait soumettre l'Etat de Neufchâtel.

L'autre observation concerne la contrainte dont ce monarque a usé envers Madame de Nemours en diverses occasions. Tout le monde a vu que non seulement il l'a gênée jusqu'à n'oser pas relever les atteintes données à l'autorité qu'elle exerçait, mais qu'il l'a voulu obliger à faire rétablir un ministre qu'elle n'avait pas destitué et dont le rétablissement ne dépendait pas d'elle. Qu'outre cela il l'a forcée à se priver d'un gouverneur fidèle, dont le service lui était très agréable, et qu'après tout en ayant nommé un autre, il voulait encore qu'elle le destituât.

1707

Reproche de

contraintes

faites à Mad. de

Nemours.

Il est vrai que lorsqu'elle vit qu'on voulait pousser sa soumission à cette extrêmité, elle osa se roidir contre la volonté de son souverain et s'exposer à sa disgrâce, qu'il lui fit sentir par un long exil; mais c'est là un exemple sans exemple qui ne sera jamais imité, et l'on ne croit pas même que personne entre tous les prétendants français voulût se dire capable d'en avoir seulement la pensée. En un mot on peut compter, après tout ce qui s'est passé, qu'un sujet de France ne sera jamais souverain de Neuchâtel comme on l'a dit dans le Traité sommaire) qu'autant et en la manière qu'il plaira au roi son maître. Mais supposé qu'un prétendant, qui est dans la sujétion d'autrui, pût avoir Persécutions une bonne volonté indépendante, pourrait-on dire qu'elle est à l'épreuve comme à cause de la religion. celle du Roi de Prusse et soutenue d'un si grand nombre d'exemples? Non sans doute, puisque ce monarque est dans une élévation qui lui a donné lieu à marquer sa bénéficence royale d'une manière si universelle et si éclatante, que non seulement plus de cinquante mille Français persécutés, qui ont trouvé un asile et des établissements très favorables dans ses Etats, sont autant de témoins irréprochables de son inclination bienfaisante, mais qu'en général tous les peuples que Dieu lui a soumis peuvent en parler par leur propre expé

rience.

roi de rendre les peuples heu

reux.

Et ce qui relève encore cette inclination, c'est la générosité et le désintéres- Promesse du sement de ce bon Prince, qui ne se propose (comme l'on a déjà insinué) que de rendre les peuples de cette Principauté aussi heureux qu'il est possible, et non de se rendre lui-même ni plus grand ni plus riche. Mais pourrait-on également attribuer ces vues à ceux qui n'ont encore point goûté de la souveraineté, et qui pour en soutenir l'éclat trouveraient que les revenus de celle de Neufchâtel seraient fort à leur bienséance?

culte.

A ces trois caractères on peut en ajouter un quatrième, c'est celui qui se Uniformité de tire de l'uniformité de religion. Il n'est pas besoin de dire de quelle force doit être cette considération, et quelle conviction elle doit opérer dans l'esprit des peuples de Neufchâtel et Valangin, qui professent une même religion avec S. M. P. Chacun peut se persuader de l'efficace d'un pareil motif, beaucoup mieux par ce qu'il en sent lui-même que par tout ce qu'on pourrait lui représenter; ainsi on ne s'étendra pas à montrer combien un nom si sacré est capable de fortifier et d'affermir dans le cœur d'un souverain l'affection et la bienveillance qu'il a pour ses sujets, il suffit de remarquer que dans tout ce qui dépend du cœur, on ne peut s'assurer par rien de plus fort que les motifs de la conscience et de la religion.

Mais comme ce n'est pas assez de vouloir du bien à quelqu'un, si on n'a pas le pouvoir de lui en faire, il faut maintenant examiner si à ce dernier égard l'avantage n'est pas encore tout visiblement du côté de S. M. P.

C'est une vérité qui ne reçoit point de doute, puisqu'on ne saurait discon- Le pouvoir de venir que le pouvoir de S. M. ne surpasse de beaucoup celui de ses concurrents, S. M. surpasse

1707 et qu'elle n'ait sans comparaison beaucoup plus d'occasions, de facilités et de celui de ses con- moyens qu'ils n'en ont pour procurer aux peuples de Neufchâtel et Valangin les avantages, tant généraux que particuliers, qu'ils peuvent souhaiter, soit dans les choses spirituelles soit dans les temporelles.

currents.

La persécution

Souhaitent-ils pour les premiers l'affermissement de la religion? Les réforest contraire més pourront sans contredit l'attendre beaucoup mieux et plus sûrement sous aux principes une puissance protestante que sous une domination catholique; la chose parle d'elle-même.

des reformés.

Et pour ce qui concerne ceux de la Châtellenie du Landeron, on répond que la persécution est contraire aux principes des réformés. On cite l'exemple des catholiques qui sont dans les Etats de S. M. etc. etc.

Que s'il y a d'autres choses que les peuples de l'Etat de Neufchâtel souhaitent encore concernant le spirituel, comme d'augmenter le nombre des églises, des paroisses et des pasteurs, de leur assigner des revenus et de les augmenter où il n'y en a pas assez, de pourvoir à la subsistance des pauvres et de Académie, éco- leur fournir les moyens de s'occuper utilement, d'établir une Académie dans la ville capitale et de nouvelles écoles dans les autres lieux du pays où il sera Biens d'église. nécessaire; en un mot, si l'on désire que les revenus qui étaient autrefois à l'Eglise soient employés en des œuvres pies, y a-t-il personne entre tous les prétendants qui soit en état et en pouvoir comme l'est S. M. P. de sacrifier autant qu'il le faudra de ces revenus à toutes sortes d'usages pieux?

les.

Fonds pour entretenir dans

La destination qu'elle en fera selon les occurrences et les besoins aura même ceci d'avantageux, c'est qu'à mesure que les gens du pays en profiteront, l'argent demeurera dans le lieu, et que des sommes considérables provenantes des revenus ecclésiastiques ne seront pas, comme ci-devant, dispersées tous les ans dans Rome et dans Paris.

Ce n'est pas tout: S. M. veut faire une autre destination qui la distinguera les universités toujours plus de ses compétiteurs, c'est celle d'un fonds de ses propres deniers prussiennes un pour entretenir dans ses universités un certain nombre d'étudiants de cette nombre d'étuPrincipauté, qui seront dévoués au service de l'Eglise et qui n'auront pas de quoi soutenir la dépense de leur éducation.

diants de la principauté.

Les privilèges augmentés plu

Pour ce qui est dn temporel, il n'est pas moins certain que S. M. P. peut tôt que dimi- beaucoup mieux remplir le désir des peuples que quel que ce soit de ses con

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En effet les peuples de cet Etat souhaitent-ils d'avoir la confirmation de leurs franchises et libertés, et de toutes les concessions qui leur ont été faites en divers temps, en sorte que chaque corps et communauté, même chaque particulier, soit maintenu dans tous ses droits et dans toutes les immunités dont il jouit? C'est ce que S. M. fera d'autant plus certainement qu'Elle a tenu et tiendra toujours pour une maxime inviolable que tous les souverains doivent, s'ils veulent régner heureusement, observer leur parole et les lois fondamentales de leurs Etats, conserver leurs sujets dans tous leurs privilèges, et les leur augmenter plutôt que de les diminuer.

Augmentation Souhaitent-ils de plus, ces mêmes peuples, que les gens du Pays capables des gages et des d'exercer les dignités et les charges publiques y soient avancés préférablement appointements. à d'autres; que l'on en crée de nouvelles, autant qu'il y aura lieu à le faire;

que l'on augmente les gages ou appointements, et que l'on en constitue de nouveaux, afin que chacun puisse trouver à subsister dans son emploi; enfin, souhaitent-ils que l'on fasse fleurir de plus en plus par de nouveaux établissements, les sciences, les arts, le commerce, les métiers et tout ce qui peut procurer

l'abondance dans le pays? Ils peuvent attendre tout cela de S. M., et c'est à quoi elle pourra beaucoup mieux destiner les dépenses nécessaires que les autres prétendants.

Mais S. M. n'en demeurera pas là (et voici ce qui la distingue encore éminemment): elle sait que la Principauté de Neufchâtel est si étroite et si peuplée qu'il y a toujours un grand nombre de personnes qui ne peuvent pas trouver à s'y occuper; elle sait que pour la plupart ils vont chercher ailleurs, souvent peu utilement, à faire valoir leur industrie; elle voit que rien ne serait plus important pour eux que de leur donner des ouvertures et des moyens pour cultiver leurs talents et pousser leur fortune. Là dessus, attentive à tout ce qui peut faire leur commun bonheur, S. M. n'a pas hésité à se déterminer de leur ouvrir les ressources qu'Elle a jugé leur pouvoir être les plus nécessaires et les plus avantageuses. Voici ce qu'elle s'est proposé de faire:

Premièrement, pour favoriser l'éducation des enfants de bonne famille, principalement de celles qui ont besoin d'être soulagées dans la dépense, S. M. en aura toujours un certain nombre élevés à sa cour en qualité de ses pages.

De plus S. M. ayant aussi fort à cœur l'éducation des gens de lettres, déclare qu'Elle veut en user de même tant à l'égard de ceux qui étudieront en droit et en medecine qu'à l'égard de ceux qui étudieront en théologie, et qu'Elle en entretiendra toujours un certain nombre dans chaque faculté.

D'ailleurs S. M. remarquant que les peuples de Neufchâtel et Valangin ont l'humeur martiale, aimant naturellement les armes, et que c'est aussi à quoi se vouent le plus souvent ceux qui sortent du pays, nonobstant les difficultés qu'ils trouvent à s'avancer, S. M., qui veut seconder l'inclination de ces peuples belliqueux, a résolu d'élever et d'entretenir toujours sur pied à une bonne solde un ou deux régiments, qui seront entièrement composés d'hommes de ce payslà, sans que d'autres y puissent entrer, afin que les braves gens, autant qu'il y en aura dans la Principauté, qui voudront suivre les armes et s'y pousser, en ayent les occasions et les moyens favorables.

Enfin, s'il y a des gens qui ne puissent ou qui ne veuillent pas se prévaloir de toutes ces ressources fixes, en voici de générales, dont il ne tiendra qu'à eux de profiter: c'est qu'ils pourront se procurer tous les autres établissements qui leur conviendront le mieux, en tels endroits qu'ils jugeront à propos, dans les Villes, Terres et Pays qui relèvent de S. M. pour y faire valoir leurs talents, chacun dans la science, l'art, le métier, le négoce, la profession qu'il exercera; en un mot, ils pourront compter que tous les pays de S. M. leur tiendront lieu d'une seconde patrie, puisque, par la faveur et protection dont ce grand prince voudra bien les honorer, ils n'y goûteront pas moins de douceur et de liberté que dans leur pays natal, et qu'ils y trouveront même de plus grands avantages. Peut-on s'en promettre autant du côté des autres prétendants?

On n'insistera pas plus longtemps à faire voir qu'il n'y a personne qui puisse contester à S. M. le Roi de Prusse la préférence touchant l'inclination, la puissance et les moyens de rendre heureux les peuples de ce Pays. Mais comme on pourrait dire qu'on ne leur a montré jusqu'ici les objets que du beau côté, et qu'après leur avoir étalé le bonheur qu'ils auront à espérer sous le règne de ce monarque, s'ils l'ont pour souverain, on doit examiner d'un autre côté si ce bonheur serait solide et s'ils n'auraient rien à craindre de contraire: c'est ce qu'on va examiner présentement, en réfutant les illusions de ceux qui tâchent de prévenir les peuples de cet Etat par de fausses craintes contre S. M. le Roi de Prusse.

Il y a deux préjugés dont on s'efforce principalement d'obséder les esprits. Le premier roule sur les ressentiments qu'on aura (dit-on) à craindre de la part de la France, principalement dans les cas de rupture entre Elle et l'Empire, si 32

ANNALES DE BOYVE. TOME IV.

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Neuchâtel

Suisse.

1707 l'on reconnaît dans l'Etat de Neufchâtel le Roi de Prusse pour souverain. Mais ce prétexte de crainte s'évanouit de soi-même, dès que l'on considère que cet a toujours été Etat est notoirement reconnu pour être une partie de la Suisse, tant par sa sireconnu pour tuation que par ses alliances avec quatre Cantons qui le mettent au rang de être partie intéco-alliés de la Suisse; que ces alliances en particulier font la sûreté de ce pays, grante de la puisque l'on ne pourrait pas l'envahir sans se brouiller avec ces quatre Cantons, qui sont des principaux de la Suisse, et qui ne pourraient ni ne voudraient point le souffrir; que les autres Cantons non alliés de l'Etat de Neufchâtel l'ont toujours avoué et reconnu pour membre du Corps Helvétique en diverses occasions; témoin la lettre au duc de Guise, gouverneur du Duché de Bourgogne, touchant les péages et les droits d'entrée en France; témoin l'Acte de la reddition faite à Madame Jeanne de Hochberg de l'Etat de Neufchâtel; témoin aussi la sentence rendue à la Diète de Baden touchant Valangin; témoin encore l'inclusion de Neufchâtel dans tous les traités d'alliance que les Suisses ont faits en divers temps avec les Puissances étrangères, et particulièrement avec la France; témoin enfin la communion où les Eglises de Neufchâtel ont toujours été et sont encore avec les Eglises protestantes de la Suisse, et en particulier l'intérêt que la Diète évangélique d'Arau prit à l'affaire du ministre Girard l'an 1699. A quoi l'on peut ajouter que Neufchâtel a toujours été reconnu au dehors pour membre du Corps Helvétique par son inclusion en cette qualité dans divers Traités de paix, nommément en celui de Ryswick, et parce que les gens de Neufchâtel ont toujours servi comme Suisses, tant en France qu'ailleurs.

L'Evêque de Bâle est Prince de l'Empire, la plus grande partie de ses terres est hors des limites de la Suisse et par conséquent exposée à l'invasion de la France; d'ailleurs elles sont incontestablement fief de l'Empire, et c'est pour cela que ce Prince contribue aux charges de l'Empire, même pour la guerre présente contre la France. Cependant il vit en paix et en sûreté avec ses sujets, à l'abri de l'alliance qu'il a avec les Cantons oatholiques. C'est encore ainsi que la Franche-Comté s'est conservée si longtemps dans la neutralité, nonobstant qu'il y eût guerre entre la France et l'Espagne, parce que les Suisses étaient garants de cette neutralité. Et qui ne sait que cette Province ne serait pas aujourd'hui à la France, si les Espagnols avaient voulu faire en Suisse les démarches nécessaires pour conserver cette neutralité? Aussi l'Etat de Neufchâtel a toujours été tranquille pendant que l'Espagne a possédé la FrancheComté, même dans le temps que cette couronne était la plus puissante et la plus redoutable, et qu'elle faisait trembler l'Europe; ses armées ont passé et repassé plusieurs fois le long des frontières de Neufchâtel sans y faire aucun mal, quoiqu'elle fût en guerre avec la France et que les ducs de Longueville commandassent ou servissent dans les armées françaises, même dans la FrancheComté, sans que cela ait en rien altéré la paix qui régnait entre cette Province et l'Etat de Neufchâtel. Bien plus dans ce temps là on a vu les Franc-Comtois, fuyant aux approches de l'armée de France, se réfugier dans l'Etat de Neufchâtel au vu et au su du duc de Longueville, qui ordonna même à son gouverneur et au conseil d'Etat de les recevoir favorablement, tant il est vrai qu'il y avait de la différence à faire entre un Duc de Longueville et un Prince de Neufchâtel, entre un général français et un membre du Corps Helvétique; les Français et les Espagnols étant également persuadés que l'Etat de Neufchâtel devait toujours suivre le mouvement et le branle du Corps Helvétique, puisqu'il en fait partie de sorte que le Roi de Prusse devenant Prince de Neufchâtel n'aura qu'à confirmer et renouveler les alliances que cet Etat a déjà fait avec quatre Cantons pour le mettre dans une entière sûreté. Or c'est à quoi S. M. est tout à fait disposée, et même à étendre ces alliances, à les amplifier, et en faire de nouvelles, s'il est à propos, soit avec les Treize Cantons, soit, en tous

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