Page images
PDF
EPUB

1668

CHAPITRE XII.

Charles Paris d'Orléans,

comte de St-Pol.

Charles-Paris

prince de Neu

Bénéficence du nouveau prince.

Charles-Paris d'Orléans, comte de St-Pol et depuis l'an 1669 duc châtel et Va- de Longueville, ayant été en cette manière mis en possession des langin. comtés de Neuchâtel et Valangin, donna des marques de sa bienveillance aux peuples dès le même jour, 13 mars 1668, où il fut reconnu prince souverain de Neuchâtel et Valangin. Il fit couler la fontaine de la rue de la Pommière pendant trois heures en bon vin rouge, dont il coula 2500 pots; il fit aussi jeter à la population Démonstrations 800 francs de monnaies et de pièces d'argent. Les peuples, à leur d'alligresse de tour, témoignèrent une joie extraordinaire par des cris de Vive le prince. On fit des promenades militaires le reste du jour; on alluma un Feu de joie, feu de joie sur le bord du lac, et lorsqu'il fut un peu avant dans la nuit, il se trouva dix-huit bateaux sur le lac, partagés en deux armées, qui représentèrent un combat naval. Enfin il y eut cent personnes, tant officiers de milice qu'autres, qui furent régalées à la maison de ville aux dépens du prince, pendant que les princiRepas splen- paux de l'Etat furent traités splendidement au château, le prince

la part des peuples.

combat naval.

dide au

château,

Fribourg pour

le prince.

De Berne.

étant de la fête.

Députation de Le 15 mars, jour des Rameaux, il arriva à Neuchâtel une dépucomplimenter tation de Fribourg qui vint complimenter S. A., de laquelle M. de Praroman était le chef; et comme il s'exprima en allemand, le conseiller David Merveilleux en fut l'interprête. Le lendemain il arriva une autre députation de Berne pour le même sujet; MM. le général d'Erlach et de Buren étaient à la tête, suivis d'une brillante noblesse. De Soleure. Le jour suivant arriva celle de Soleure; mais le canton de Lucerne, Lettre de Lu- quoique allié, se contenta d'écrire une lettre au prince, dans laquelle, après l'avoir félicité, il s'excusait sur ce que les principaux de cette ville étant à la Diète, il n'avait pas pu envoyer une députation.

cзrne.

Députation de
Bienne.

Ceux de Bienne vinrent aussi au nombre de neuf chevaux, dont De Genève. le chef était M. Wildermet. La ville de Genève, quoique éloignée et non alliée, envoya aussi des députés dont les chefs étaient MM. Roset et Fabry, qui arrivèrent à Neuchâtel le 20 mars, ce qui fit bien du plaisir au prince voyant que cette ville recherchait aussi son amitié.

Le prince est régalé par la

ville avec les députés de Genève.

Tous ces ambassadeurs furent régalés au château par S. A. Le samedi 21 mars, le prince fut régalé magnifiquement par les QuatreMinistraux sur la Boucherie, avec les députés de Genève.

Tout ce que le

prince fit darant son séjour au pays.

Pendant le peu de temps que ce prince passa dans le pays, il fit 1668 plusieurs promenades à Colombier, au Val-de-Ruz, à Cressier, où il alla faire sa devotion le dimanche de Pâques, et partout il fut reçu avec des acclamations de joie, la milice étant sous les armes. Le prince partit de Neuchâtel le 23 mars. Environ cinquante cavaliers des principaux de l'Etat l'accompagnèrent; mais étant arrivé à Rochefort, le prince les obligea à s'en retourner, à la réserve de MM. George de Montmollin et Jean-Jaques Sandoz, qui, par sa permission, l'accompagnèrent jusqu'à Môtiers.

Départ du prince.

Réglement pour les juges

du premier ordre aux

Pendant son séjour à Neuchâtel, le prince fit un réglement à l'égard des juges qui doivent composer l'Etat de la noblesse dans les Trois-Etats, parce qu'il y avait souvent des difficultés sur ce sujet parmi les nobles. Il ordonna, pour cet effet, qu'à l'avenir les Trois-Etats. quatre plus anciens conseillers d'Etat nobles y seraient les juges ordinaires et composeraient le premier Etat, mais au cas qu'ils fussent parents des parties, ou pour d'autres raisons importantes, le gouverneur pourrait nommer qui bon lui semblerait entre les nobles du pays, pour juger en leur place.

à Paris, le prince remet la

Quoique le prince fût en état de régner par lui-même, cependant Dès qu'll arrive dès qu'il fut arrivé à Paris, comme il se vouait entièrement aux armes, il donna à Madame de Longueville, sa mère, toute autorité régence à sa et pouvoir de régir l'Etat, par des lettres patentes datées du 24 mai 1668; tellement que pendant les quatre ans qu'il vécut encore, il n'a jamais gouverné lui-même les comtés.

mère.

ticularités sur

le prince.

Plaisir qu'il éprouve à voir

les milices neu

Le comte de St-Pol, qui ne respirait que la guerre, avait pris Différentes parbeaucoup de plaisir à voir les milices de cet Etat et tant d'hommes armés; car il y en avait eu 6000 à son arrivée. Il fut même tout étonné que dans peu d'heures de temps on eut fait tant de diligence, savoir, depuis le dimanche matin jusqu'à trois heures après-midi. Le lundi 9 mars, il avait vu les troupes du comté de Valangin, et il avait témoigné beaucoup de satisfaction en apprenant que les armes dont la milice des Montagnes était pourvue étaient fabriquées dans

châteloises.

sur le lac.

le pays. Après dîner du dit jour 9 mars, il alla sur le lac pour voir de sa promenade là d'autant mieux l'assiette de la ville. Pendant qu'il y était, la jeunesse avait pris les armes et vint sur le bord du lac. Le prince sa réception étant descendu du bateau, monta sur la Plateforme de la maison de par la jeunesse M. Guillaume Tribolet pour voir d'autant mieux faire l'exercice à du bateau. cette jeunesse qui était commandée par le lieutenant Baillods, et il témoigna d'en être bien content.

Le mardi 10, le prince était allé se promener sur le lac avec MM. Greder, Mollondin et le baron de Gorgier. Pendant qu'il y était, M. Girard, pasteur de l'église de Neuchâtel, s'entretenait au château avec le duc de Longueville sur des matières de religion.

à la descente

Autre promeEntretien du sur la religion

nade sur le lac.

ministre Girard

avec le duc de Longueville.

1668

Le comte de St-Pol à Cressier.

la Neuveville,

Le 11 mars, le comte de St-Pol prit plaisir à voir la compagnie du capitaine David Favarger, receveur des deniers casuels, auquel M. Mouillet, ambassadeur de S. M. T. C., avait peu de temps auparavant donné un brevet de capitaine; cette compagnie avait été levée en peu de jours, et elle partit le 21/31 mars pour se rendre en Flandre.

Le samedi 14 mars, le comte de St-Pol alla à Cressier en bateau pour y faire le lendemain sa dévotion. Les habitants de la baronnie Salves de ceux du Landeron prirent les armes et lui firent la salve. Ceux de Stde St-Blaise de Blaise tirèrent depuis la tour du temple à mesure que le prince passait, et ceux de la Neuveville leur répondaient depuis le château de Schlossberg. S. A. logea cette nuit dans la maison de M. de Il va au Lan- Mollondin à Cressier. Le lendemain, ayant fait sa dévotion au Landeron, il retourna en bateau à Neuchâtel; à mesure qu'il passa au Salves de ceux pont de Thielle, ceux de Cornaux s'y trouvèrent avec leurs armes de Cornaux à et lui firent la salve, tellement que partout où il allait, il trouvait

deron.

son retour.

Landtag aux
Verrières au

sujet d'un
meurtre.

J.-J. de Roll pour le fief de Kriegstetten.

Le comte de
St-Pol va en

des hommes sous les armes.

Le gouverneur de Stavay-Lully ordonna, par un mandement du 31 mars 1668, au maire des Verrières, de faire tenir un Landtag aux dites Verrières, au sujet d'un meurtre qui y avait été commis un homme ayant tué son frère. Il veut que la justice des Verrières tant seulement, quoiqu'elle ne soit pas cour criminelle, en rende la sentence, et pour remplacer ceux des Verrières, il ordonne qu'on prenne en renfort des justiciers du Val-de-Travers, afin de rendre complet le nombre de douze; que si le maire des Verrières n'y peut pas assister pour quelque indisposition, le lieutenant des dites Verrières doit prendre sa place sans conséquence.

Jean-Joseph de Roll, fils de Jean de Roll, ayant demandé l'an 1668 l'investiture de son demi-tiers du fief de Kriegstetten qu'il possédait, S. A. ordonna qu'il produirait son titre d'inféodation de l'an 1495 avant que d'être reçu à foi et hommage.

Le comte de St-Pol, qui ne souhaitait rien avec plus d'ardeur que Candie au se- de se signaler à la guerre, partit de France le 1" septembre pour

cours des Veni- se rendre en Candie au secours des Venitiens contre le Turc. M. de

tiens. Feuillade l'accompagna avec six cents. gentilshommes français. On Députation de envoya des députés de Neuchâtel à Lyon qui, au passage de ce passage à Lyon, prince en cette ville, le complimentèrent et lui souhaitèrent un heureux voyage.

Neuchâtel à son

Exploits du

prince en Candie.

Il arriva dans l'île de Candie le 2 octobre, et quoiqu'il n'y fut que trois mois, il ne laissa pas de s'acquérir beaucoup de gloire par des actions glorieuses; en la première sortie qu'il fit, il y eut plus de cinq mille Turcs tués et un grand nombre faits prisonniers. Quant au duc de Longueville, après avoir fait son testament, rappart pour Rome. porté en partie ci-devant, il partit de Lyon, où il avait séjourné quel

Le duc de Lon

gueville après son testament

ques jours, et s'étant rendu de là à Chambéry, où ses gens l'atten- 1668 daient, il partit pour Rome.

sur la tour du

La foudre étant tombée, par un dimanche 16 août, pendant le Foudre tombée prêche du soir, sur la tour du temple de Môtiers au Val-de-Travers, temple de Moet ayant tué un homme et blessé plusieurs autres, la tour, qui avait tiers. été abattue, fut rebâtie la même année.

trée du vin de
Bourgogne.

prohibant l'en

nautés de Va

Le conseil d'Etat ayant fait publier le 30 septembre un mande- Mandement ment par lequel l'entrée du vin de Bourgogne était défendue, sous peine de confiscation du vin, des chevaux et charriots, dont le tiers appartiendrait au prince, le tiers à l'officier et l'autre tiers au délateur, les communautés des Montagnes firent là dessus des remontrances Les commuà la seigneurie. On leur déclara que c'était sans préjudice de leurs langin demanfranchises, par un acte qui leur en fut donné le 20 octobre 1668. Les mêmes communautés ayant de nouveau insisté à ce que ce mandement fût retiré, et ayant en outre demandé qu'à l'égard des péage sur les péages des denrées que les étrangers amènent et vendent dans le pays, il plût au conseil de lever ce péage comme leur étant préjudiciable, il fut dit par un arrêt du 24 novembre 1668:

dent qu'il so it

aboli, de même
que le petit

denrées.

vins.

Que par rapport au vin, après avoir considéré que la Cour du Parlement de Arrêt du conseil Dôle ne permet pas aux Bourguignons de venir acheter du vin dans ce pays, à l'égard des lorsqu'ils en ont dans la Franche-Comté; que le canton de Berne fait défense depuis peu d'en aller acheter hors de la Suisse; que leurs sujets s'y sont conformés pour le bien de l'Etat, encore qu'ils eussent de grands et amples privilèges; que S. A. et ses sujets n'ont pas moins d'intérêt qu'eux à empêcher que l'argent ne sorte du pays par l'achat des vins étrangers pendant qu'il y en a suffisamment à vendre dans l'Etat et à un prix modéré; pour ces raisons et autres, le susdit mandement est confirmé, comme n'étant point contraire à leurs franchises.

A l'égard du péage il fut arrêté :

A l'égard du
péage sur les

denrées.

Que l'intention de la seigneurie n'étant pas que les péagers outrepassent ce que le tarif porte, on leur ordonne de s'y conformer, à peine d'être châtiés selon l'exigence du cas s'ils excédaient. Le conseil de ville donna cette année 1668 les points de coutume Points de cousuivants :

Le 7 mai:

tume donnés par le conseil de ville.

Les témoins requis pour la confection d'un testament ne doivent point être Témoins d'un parents du notaire instrumentant, ni au testateur, ni à l'héritier institué.

Le 3 novembre:

testament non
parents.

Quand une personne a obtenu une traite à la troisième instance après la dite Sur la restrictraite adjugée, elle est obligée de donner par écrit tous les témoins et papiers dont tion en preuves. elle prétend se servir, auxquels elle doit faire restriction.

Le 7 décembre :

Quand il survient quelque conteste sur l'investiture des biens d'un défunt, et Interruption de il arrive quelque interruption de procédure, la partie qui veut par après suivre procédure. en cause et appréhender la dite investiture, n'est obligée que de citer une seule fois la partie adverse.

[ocr errors]

CHARLES PARIS D'ORLÉANS, 1668 Lorsqu'une personne a juridiquement obtenu l'investiture des biens d'un déL'investiture ne funt, et il arrive quelque interruption de procédure, ayant duement fait citer peut se révo- sa partie adverse sans qu'elle ait fait proteste ni appel, elle ne peut par après nullement révoquer cette investiture.

quer.

Comment on doit suivre à

Le 9 décembre :

Tout homme qui forme demande à un autre, est obligé de la suivre dans l'an une demande. et jours, jusqu'à ce qu'il amène sa partie à répondre dans le temps; mais laisInjure irrécherchable si dans sant écouler ce temps sans l'avoir amené à réponse, telle demande demeure l'an et jours le nulle, et partant le rée est irrecherchable pour fait d'injures, mais pour fait de fonds, l'acteur peut former une nouvelle demande.

rée n'a pas répondu. Nouvelle demande doit être

formée.

Peste à Zurich.

Vente du vin et abri.

1669 Retour du

comte de St-Pol en France.

Quand l'acteur n'a amené le rée à réponse dans l'an et jours, et il veut suivre par après contre le rée pour fait de fonds, il est obligé de former une nouvelle demande au dit rée, qui n'est pas obligé de répondre jusqu'à la troisième citation.

Il y eut cette année une peste dans le canton de Zurich, mais qui ne fut pas bien violente.

On eut peu de vin. La vente se fit 102 livres le muid, et l'abri du froment à 8 batz l'émine, l'orge 14 gros, l'avoine 9 gros.

Le 4 janvier 1669, le comte de St-Pol partit de Candie pour revenir en France; il ne ramena avec lui que deux-cents gentilshommes des six-cents qui l'avaient accompagné; la peste et la guerre les avaient enlevés et réduits au tiers. Il arriva à Lyon le Feux de joie 1 mai et à Paris le 15 du même mois. Le 8 juin on fit des feux joie dans les comtés à l'occasion de son heureux retour.

dans les comtés.

Le duc de Lon

gueville se fait prêtre.

de duc de Lon

son frère.

de

Le duc de Longueville prit l'an 1669 l'ordre de la prêtrise, tellement que dès lors il a fort souvent dit la messe. Ce fut aussi pour П céde le titre lors qu'il quitta le titre de duc de Longueville, qu'il céda à son gueville au frère pour prendre celui d'abbé d'Orléans qu'il porta toujours juscomte de St-Pol qu'à sa mort. C'est là le titre qui lui sera donné dans la suite, et l'on continuera celui de comte de St-Pol au prince, quoiqu'il prit dès lors le titre de duc de Longueville, et cela afin de ne pas embarrasser le lecteur. Le prince de Longueville voulut prendre les ordres pour montrer qu'il renonçait aux grandeurs du monde; il avait porté pendant la vie de son père le titre de comte de Dunois et dès lors jusques à cette année celui de duc de Longueville; et après ce temps, dès qu'il eut été prêtre, il se contenta de celui d'abbé d'Orléans.

La défense des

gogne est levée.

Les communautés des Montagnes de la seigneurie de Valangin vins de Bour- étant revenues à la charge en conseil d'Etat au sujet des vins de Bourgogne, il fut arrêté, le 19 janvier 1669, qu'on levait la défense d'acheter de ces vins à l'égard des particuliers qui en pourraient acheter pour leur usage tant seulement, mais qu'à l'égard des hôtes cette défense subsisterait jusqu'à ultérieur ordre, sans qu'ils en pussent acheter, sinon de celui du pays, à peine d'être châtiés suivant l'exigence du cas.

« PreviousContinue »