1791. <«< examiner, comme représentant du peuple, « et pour son intérêt, les lois présentées à ma << sanction; chargé de les faire exécuter, je « dois encore vous proposer les objets que je <«< crois devoir être pris en considération pen« dant votre session. « « Vous penserez d'abord, messieurs, qu'il << convient de fixer votre attention sur la situa«<tion des finances, pour en saisir l'ensemble « et en connaître les détails et les rapports; << vous sentirez l'importance d'établir un équi<< libre constant entre les recettes et les dé«penses; d'accélérer la répartition et le recou« vrement des contributions; d'établir un « ordre invariable dans toutes les parties de «< cette vaste administration, et de préparer << ainsi la libération de l'état et le soulagement «du peuple. Les lois civiles paraissent aussi «< devoir vous occuper essentiellement; vous « aurez à les mettre d'accord avec les principes « de la constitution; vous aurez à simplifier « la procédure, et à rendre ainsi plus faciles « et plus prompts les moyens d'obtenir jus<< tice; vous reconnaîtrez la nécessité de don« ner, par une éducation nationale, des bases «< solides à l'esprit public; vous encourage<< rez le commerce et l'industrie, dont les grès ont tant d'influence sur l'agriculture et " pro << sur les richesses du royaume'; vous vous 1791. 1791. « Messieurs, pour que vos importans tra<< vaux, pour que votre zèle produisent le << bien qu'on doit en attendre, il faut qu'entre « le corps législatif et le roi, il règne une «< constante harmonie, une confiance inalté« rable. Les ennemis de notre repos ne cher<< chent que trop à nous désunir; mais que « l'amour de la patrie nous rallie, et que l'in« térêt public nous rende inséparables. Ainsi « la puissance publique se déploiera sans obstacles; l'administration ne sera pas tour« mentée par de vaines terreurs; les propriétés « et la croyance de chacun seront également protégées, et il ne restera plus à personne << de prétexte pour vivre éloigné d'un pays où « les lois seront en vigueur, et où tous les « droits seront respectés : c'est à ce grand «< intérêt de l'ordre que tient la stabilité de << la constitution, le succès de vos travaux, la << sûreté de l'empire, le retour de tous les « genres de prospérité. « C'est à ce but, messieurs, que doivent, << en ce moment, se rapporter toutes nos pen«sées; c'est l'objet que je recommande le plus fortement à votre zèle et à votre amour « pour la patrie. » Ce discours fut couvert d'applaudissemens, tant par les députés que par les personnes pas répandues dans les tribunes publiques, surtout lorsque le roi dit, qu'il espérait que la paix et la bonne harmonie avec les puissances étrangères ne seraient troublées. Le public et l'assemblée n'accueillirent pas avec moins de satisfaction, le passage où le monarque déclare que c'est de la bonne intelligence entre le corps législatif et lui que doit résulter la félicité publique. Enfin, lorsque Louis XVI se retira, il fut accompagné par les mêmes applaudissemens, et les cris de vive le roi se firent entendre sur tout son passage. On voit que, fesant usage, suivant la constitution, de la faculté d'exposer au corps législatif, au commencement de chaque session, les objets qu'il estime devoir être pris en considération, le roi fait passer sous les yeux de celui-ci toutes les parties de législalation et d'administration dont un état peut se composer; c'était lui dire que tout étant dissous ou désorganisé, il fallait tout faire, ou tout réparer. Jamais objet plus vaste, plus fait pour satisfaire une ambition généreuse, ne pouvait être soumis à la décision de la sagesse, à la sollicitude que fait naître le véritable amour de la patrie. J'observais attentivement la physionomie de l'assemblée pendant que le roi prononçait ce discours, et je 1791. croyais y découvrir l'expression des sentimens que j'eusse éprouvés moi-même dans une pareille situation, expression manifestée par les signes d'approbation qui se répétaient à chaque instant. Je fus grossièrement trompé, ou l'assemblée s'abusa étrangement ellemême. A peine le roi se fut-il retiré, que les ministres, qui s'étaient présentés pour rendre un compte sommaire de la situation de leurs départemens, furent tracassés d'une manière, que je dois dire indécente : chaque membre croyant avoir le droit de les interpeller, et tous le voulant à la fois, je ne sais par quel motif d'ambition, ou desir de vaine gloire, il résulta, de toutes ces prétentions, un vacarme épouvantable, au milieu duquel le ministre, pour peu qu'il eût la tête mal disposée, ne pouvait plus se reconnaître, ni se faire entendre. M. de Montmorin, ministre des affaires étrangères eut, le premier, un tel assaut à soutenir. Ce fut M. Delacroix (1), (1) M. Delacroix a joué un assez grand rôle dans l'assemblée législative et dans la convention; il était fils d'un homme de loi des environs de Chartres, et avait servi dans la gendarmerie : après une jeunesse extrêmement dissipée, il se jeta dans la politique qui le favorisa et le perdit. |