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Les conclusions de M. Louvet furent la demande d'un décret d'accusation contre le prince de Condé. M. Isnard appuya la pétition, et demanda qu'elle s'étendît aux frères du roi. M. Guadet fit renvoyer la délibération au premier janvier, afin, disait-il, que

1791.

né fut pas un système mystérieusement combiné, tout ce qu'on disait, tout ce qu'on fesait en France, dans le temps dont je décris les événemens, pouvait néanmoins, je ne dis pas seulement le faire supposer, mais encore le faire croire; il ne se rendait pas à l'assemblée un seul décret, il ne s'y prenait pas une seule mesure, qu'on pût rattacher au but principal, qu'elle ne lui fût, pour ainsi dire, commandée par une force étrangère; et cette force, bien qu'on parvint quelquefois à en détourner l'action, ne manquait jamais de produire un. effet d'autant plus sûr qu'on en avait modéré la violence. Cependant j'ai connu plusieurs de ceux qu'on devait regarder comme les principaux propagandistes, et peu m'ont paru des hommes à combinaisons profondes, et entr’antres M, Louvet, qui devait être considéré comme un des plus importans. C'était un personnage dont l'inconséquence formait le principal caractère, et qu'il était facile de faire agir, pour peu qu'on eût l'air de suivre avec activité la direction des rêves qu'il avait dans la tête, à la réalisation desquels il eût tout sacrifié, jusqu'à lui-même. Quoiqu'on ait à lui reprocher les actes les plus pervers, ce n'était cependant pas un méchant. Cette réflexion s'applique à beaucoup d'autres qui ont suivi le même système,

1792.

cette accusation fût une étrenne au peuple. Les choses s'arrangèrent comme il l'avait desiré; ce fut le premier janvier que cette question fut discutée. MM. Gentil, Mouricault et Hua, combattirent en vain pour la négative, en observant qu'une mesure qui ne pouvait être exécutée, était plus désavantageuse à l'autorité, par qui elle était employée qu'elle ne pouvait lui être utile. L'assemblée décréta qu'il y avait lieu à accusation contre

«<Louis-Stanislas Xavier, Charles-Philippe, «<et Louis-Joseph, ci-devant Condé, princes << français, les sieurs Calonne, ci-devant «< contrôleur général, Laqueuille l'aîné, ci« devant député à l'assemblée constituante, «et Riquetti cadet (1), comme prévenus d'at

(1) M. de Mirabeau le jeune. Il avait levé une légion sur les bords du Rhin, dont les soldats portaient un uniforme à peu près noir. Pour le distinguer de son frère, les révolutionnaires l'appelaient Mirabeau-Tonneau à cause de son embonpoint. Il mourut d'une fluxion de poitrine, à la suite d'une attaque contre les Français, où il s'était vivement échauffé. M. de Laqueuille, un gentilhomme de la province d'Auvergne, qui avait été député à l'assemblée constituante, était l'agent particulier des princes, et formait les bataillons qui devaient combattre en leur faveur. Quant à M. de Calonne, on a vu qu'il était leur conseil intime, et la

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<<< tentat et de conjuration contre la sûreté gé-
«nérale de l'état et la constitution. >>

Pendant qu'on prenait ces mesures, M. Bris-
sot attaquait les puissances de l'Europe à la
tribune et dans son journal. Toutes ne lui
présentaient que des obstacles faciles à dé-
truire, et il ne leur épargnait ni les injures, ni
les menaces. M. de Condorcet en disait autant
dans la Chronique de Paris, et M. Carra
parlait le même langage dans les Annales pa-
triotiques. Le seul Léopold les gênait : il avait
montré, par ses réponses aux réquisitions qui
lui furent faites, et par la dispersion des émi-
grés, qu'il voulait continuer de vivre en paix.
On ne pouvait donc exprimer contre lui que
des soupçons,
mais ils l'étaient toujours
avec amertume; pour les justifier, on répan-
dait dans les feuilles publiques, dans les clubs,
dans les cafés, dans les groupes de raison-
neurs, formés sur les places publiques, que
l'empereur fesait filer des armées dans les
Pays-bas, et garnissait les électorats de
troupes destinées à pénétrer en France au
premier signal. Toutes ces nouvelles, repro-
duites dans l'assemblée, y furent bientôt con-

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rédacteur de tous les factums qu'ils répandaient dans
l'Europe.

1792.

1792.

sidérées comme des faits certains, et devinrent le sujet d'un rapport du comité diplomatique. Le parti républicain saisit cette occasion avec empressement, et M. Brissot demanda que le roi fût invité à notifier à l'empereur, au nom de la nation française, qu'elle regardait le traité du premier mai 1756, comme anéanti, et parce que l'em-, pereur l'avait violé, et parce qu'il était incompatible avec la constitution nouvelle.

Il ajouta, au surplus, qu'il fallait en même temps déclarer à l'empereur que la nation française offrait de lui conserver la bonne intelligence, l'amitié, la fraternité (1) qu'elle avait jurées à tous les peuples, s'il consentait à lui donner satisfaction des griefs qu'elle avait à lui dénoncer. Ces griefs étaient son refus d'interposer son autorité pour faire cesser les rassemblemens d'émigrés dans les électorats, la protection; les secours accordés

(1) Dans tous ses discours, lorsqu'il s'agissait de rapports avec l'étranger, M. Brissot ne parlait jamais du roi, ni même du pouvoir exécutif qui, cependant, était chargé des négociations. C'est une chose assez singulière d'entendre un homme, qui sûrement avait des connaissances, parler de la fraternité de la nation française avec un empereur.

aux

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aux électeurs, et son accession à la coa- 1792:
lition formée entre diverses puissances contre
la nation française. Enfin, M. Brissot deman-
dait que, faute par l'empereur de faire droit à
toutes ces demandes avant le premier février,
on agît offensivement contre lui. Cette motion
fut faite le 17 janvier 1792. M. Dumas (1) la
combattit, et M. Vergniaux la défendit, en
demandant qu'il fût fait encore d'autres ré-
quisitions à l'empereur, celle par exemple,
de défendre qu'on portât la cocarde blanche
dans ses états.

M. l'abbé Fauchet trancha la question
d'une manière plus nette: après avoir exposé
que la presque-totalité de l'Europe était
gouvernée par des tyrans; que des traités
avec ces gouverneurs n'étaient que des moyens
d'esclavage pour les peuples; que les ambassa-
deurs auprès des puissances, étaient des agens
du despotisme; il demanda l'abolition de
tous les traités, et à leur place une alliance
avec les nations anglaise, anglo-améri-
caine, helvétique, polonaise et hollandaise,
tant qu'elles seraient libres. Nous n'avons rien
« à démêler avec l'empereur, disait-il, qu'il

(1) L'un des déportés par suite du 18 fructidor, et aujourd'hui conseiller d'état.

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