Page images
PDF
EPUB

du reste, dans les petites agglomérations, donner leur efiet utile, car, dans les petites villes et les campagnes, les malades auraient une trop vive répugnance à signaler, dans un pays où ils sont connus, la nature de leur maladie.

Il en résulte que, si le vénérien des grandes villes a la possibilité de se faire convenablement soigner à l'hôpital, dans des services spéciaux, il n'en est pas de même pour celui des campagnes et des centres industriels. La difficulté s'accroît encore de ce fait que, s'ils veulent se rendre dans une grande ville, où existent des services spéciaux, pour se faire soigner, ils rencontrent, du côté des bureaux de bienfaisance, de vives résistances, ceux-ci n'accordant que très difficilement des secours pour le traitement d'une affection vénérienne. Si les circonstances font que le séjour à l'hôpital leur soit accordé, il est toujours écourté, soit en raison des instances des communes intéressées, soit du fait du malade lui-même qui désire retourner chez lui dès qu'il se croit guéri. Ceci est surtout vrai pour la syphilis. Il en résulte que le traitement des affections vénériennes ne rencontre, dans la grande majorité des cas, que des entraves.

Cette situation, vraie pour les indigents, l'est tout autant pour bien des employés, pour bien des ouvriers affiliés à des sociétés de secours mutuels. Beaucoup d'administrations, en effet, et des plus importantes, beaucoup d'organisations de secours mutuels n'accordent aucune allocation pour maladie, quand celle-ci est de nature vénérienne.

Enseignement de la vénéréologie. -Cet enseignement n'a pas, dans nos universités, l'importance qu'il devrait avoir. Dans toutes les villes universitaires (Bruxelles, Louvain, Gand, Liége) il existe des cliniques dermatosyphiligraphiques où l'enseignement est donné; mais la vénéréologie n'est pas matière à examen et il est exceptionnel qu'un élève soit, à son examen de sortie, interrogé sur une des questions qui nous occupent. Il en résulte qu'encombré par le programme déjà si chargé de ses examens, il néglige l'étude de la vénéréologie et ne la considère que comme un accessoire dans l'enseignement de la médecine, Les conséquences de ce système sont évidentes; le médecin entre dans la carrière, insuffisamment instruit sur ces matières, et les éléments habituels de sa clientèle ne lui permettent pas de refaire son instruction. Il en

résulte qu'il ne peut devenir un auxiliaire utile dans la lutte contre les maladies vénériennes. A Liége, il y a vingt-deux lits réservés aux vénériens; à Gand, le professeur de dermatologie dispose d'une douzaine de lits pour les besoins de son enseignement universitaire; à Louvain, la ville est trop petite pour fournir un matériel suffisant; à Bruxelles existe un service très vaste, ayant un matériel considérable. Le professeur de clinique dermatologique et syphiligraphique ne donne pas le cours théorique à l'université; la dermatologie y fait partie du cours de pathologie interne et la syphiligraphie est enseignée avec la chirurgie. Il faudrait bien peu de chose pour faire de l'enseignement de la vénéréologie une branche importante de l'enseignement général de la médecine : organiser des services spéciaux au même titre que ceux d'ophtalmologie et, pour stimuler le zèle des élèves, faire de l'étude des affections vénériennes une branche d'examen.

B.

QUESTIONS RELATIVES A LA PROSTITUTION.

En général, en Belgique, dans les grandes villes et dans un certain nombre de villes de moyenne importance, la prostitution est surveillée. Le type des règlements est celui de la ville de Bruxelles. Ils laissent entre les mains de l'autorité communale la surveillance de la prostitution. Il en résulte un manque absolu d'unité dans les mesures prises, et, les règlements fussent-ils les mêmes dans toutes les communes de l'agglomération bruxelloise, par exemple (ce qui est loin d'être le cas), la façon de les appliquer varierait nécessairement d'une commune à une autre.

En général, les règlements sont bien faits; ce qui malheureusement est évident, c'est que le nombre de prostituées inscrites est absolument dérisoire. Ainsi, à Bruxelles il y a actuellement 169 prostituées inscrites; dans les communes comme Saint-Gilles (50,000 hab.), il y en a deux; à Laeken (30,000 hab.), il y en a une ou deux en moyenne. A Hasselt (14,500 hab.), avec deux bataillons actifs et un bataillon de réserve, il n'y a plus eu de femmes inscrites depuis huit ans. A Bruxelles, ville de passage, il y a six maisons et 63 pensionnaires; à Liége, ville de garnison, ville universitaire pour 168,000 habitants, il y a 102 prostituées inscrites; à Gand (159,228 hab.) 39 femmes sont inscrites dont 11 en maisons et 28 éparses.

Pour qui connaît les nécessités inhérentes à de grandes agglomérations, surtout quand celles-ci contiennent en grand nombre des jeunes gens (étudiants, soldats, employés, etc.), il saute aux yeux qu'il y a une disproportion manifeste entre le nombre de prostituées inscrites et la prostitution réelle. L'écart est comblé par la prostitution clandestine, dont la prépondérance est colossale. Cette extension de la prostitution clandestine est de notoriété publique et constitue un fait signalé partout en Europe. Les chiffres fournis par le service des mœurs sont significatifs à Bruxelles, tandis qu'en l'espace de temps de huit ans (1890-1898), il a été procédé à l'inscription de 562 prostituées, soit en moyenne 70 par an, dans le même laps de temps, 3,806 femmes ont été signalées pour faits de prostitution soit en moyenne 475 par an. Ce dernier chiffre, on peut l'affirmer, est de beaucoup en-dessous de la réalité, étant donnée l'extrême réserve qui s'impose aux autorités avant d'en arriver à une pareille imputation. Cette prostitution clandestine s'exerce surtout par des serveuses, par des servantes sans place, incitées à mal faire par des proxénètes, par des filles errantes poussées par la misère ou la paresse. Tous les rapports signalent surtout les serveuses comme l'élément essentiel dans lequel se recrute la prostitution clandestine.

Les prostituées se recrutent dans la classe ouvrière surtout; on les trouve aussi chez les servantes sans place tombées au nombre des proxénètes; quant aux serveuses de cafés mal famés, ce sont déjà de véritables prostituées.

L'examen des prostituées se fait par des médecins nommés par l'administration communale. Il se pratique, suivant les villes, soit à l'hôpital communal, soit dans un local spécialement affecté à ce sujet, soit au domicile de la prostituée. Il se fait en général deux fois par semaine.

L'examen systématique des sécrétions au point de vue du gonocoque ne se fait nulle part.

BELGIQUE

État de la législation belge concernant
la prostitution.

NOTICE PRÉSENTÉE PAR M. EMILE BECO

Chargé de l'administration du service de santé et d'hygiène au Ministère de l'Agriculture.

Cette notice est un simple exposé, accompagné des commentaires de la doctrine et de la jurisprudence, de la législation belge relative à la prostitution.

Elle comprend tous les textes législatifs qui, directement ou indirectement, intéressent ce que l'on a appelé la police des

mœurs.

Lorsque l'on envisage le danger social de la syphilis et de la blennorrhagie et que l'on établit la part qui revient, dans la propagation de ces maladies, à la prostitution et aux autres agents de leur dissémination, une première question se présente à l'esprit :

Que font, pour lutter contre ce fléau, ceux qui ont en mains les pouvoirs publics?

Quel est le devoir du législateur?
Peut-il intervenir?

Dans quelles limites le peut-il?

Quelle est, en un mot, la meilleure loi à faire pour préserver la société des ravages de la contagion syphilitique et vénérienne?

Cette question se décompose, pour nous, en trois parties :

10 Quel est l'état actuel de la législation belge?

2° Quelles réformes a-t-on tenté d'y introduire dans le passé? 3° Quels changements proposons-nous d'y apporter aujourd'hui ?

Nous allons répondre au primo et au secundo de la question. La Conférence fournira les éléments de solution du tertio par les réponses qui seront admises sur les points suivants de son programme:

1re QUESTION. Les systèmes de réglementation actuellement en vigueur ont-ils une influence sur la fréquence et la dissémination de la syphilis et des maladies vénériennes?

[merged small][ocr errors][merged small]

cière de la prostitution est-elle susceptible d'améliorations?

5e QUESTION.

[ocr errors]

Par quelles mesures légales pourrait-on arriver à diminuer le nombre des femmes qui cherchent dans la prostitution leurs moyens d'existence?

6e QUESTION. Abstraction faite de tout ce qui touche à la prostitution, quelles mesures générales y aurait-il lieu de prendre pour lutter efficacement contre la propagation de la syphilis et des maladies vénériennes?

La législation belge comprend d'une part : les mesures préventives, c'ost à-dire les mesures légales et administratives de prophylaxie; d'autre part: les mesures répressives, c'est-à-dire les peines qui punissent un certain nombre de faits touchant à la prostitution et érigés en crimes ou en délits.

A cette énumération des dispositions légales de police préventive et de police répressive, j'ai cru devoir ajouter les textes du Code pénal, du Code civil et des lois diverses qui, de près ou de loin, appartiennent à l'ordre d'idées dont il faut s'inspirer pour élaborer, dans des vues d'ensemble, une loi visant la prostitution.

Je citerai, par exemple, les dispositions constitutionnelles qui garantissent la liberté individuelle et l'inviolabilité du domicile, les dispositions pénales relatives à la violation du domicile, à

« PreviousContinue »