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elle provient de ce que celles-ci, qui se recrutent particulièrement dans le département de l'Aveyron, arrivent à Montpellier pour chercher une place et, se trouvant au dépourvu, acceptent la première place qui leur est proposée, souvent dans un milieu interlope. D'autre part, la rencontre du pays, sous forme d'ouvrier ou de soldat, fait souvent chanceler leur vertu, quand celle-ci n'est pas bien assise.

La prostitution clandestine est encore favorisée par l'existence d'un certain nombre de maisons de rendez-vous, cependant moins nombreuses qu'autrefois, grâce à une guerre acharnée que leur a faite la police des mœurs.

C'est généralement à l'âge de l'adolescence, vers dix-sept ou dix-huit ans, qu'après une première faute, la plupart des femmes commencent à se prostituer. Les mineures constituent une partie importante de la prostitution clandestine.

Parmi les inscrites, l'âge moyen varie de vingt-quatre ans pour les filles de maison, à trente ans pour les filles isolées.

Il existe un établissement religieux (Nazareth) pour les filles repenties. Le même établissement et un autre établissement religieux reçoivent aussi les jeunes filles mineures présentant de mauvais penchants et qui y sont placées par leurs parents.

STATISTIQUES :

Il n'existe pas de statistique générale sur la fréquence des maladies vénériennes par rapport à la population totale.

Mais il existe des statistiques spéciales portant sur certains groupes; par exemple sur la garnison; d'autre part, il est fait dans les hôpitaux une statistique soigneuse des malades entrés pour affections vénériennes.

J'ai pensé qu'il pouvait y avoir quelque intérêt à mettre en parallèle, d'une part, le nombre de femmes arrêtées par le service des mœurs pour maladies vénériennes, d'autre part, le nombre d'hommes entrés à l'hôpital pour les mêmes maladies, ainsi que le nombre des vénériens observés dans la garnison. J'ai fait ce relevé, pour six ans, divisé en deux périodes: la première comprenant les années 1892 et 1893 (avant la réorganisation du service. des mœurs), la seconde comprenant les années 1894, 1895, 1896 et 1897 (période pendant laquelle le service des mœurs a été, à partir du 1er juin 1894, rattaché à la clinique des maladies vénériennes,

en même temps qu'une surveillance plus active était exercée sur les prostituées par la police des mœurs). On peut résumer ce relevé dans le tableau suivant :

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De ce tableau résulte qu'à mesure que le nombre de prostituées malades devient plus grand à l'hôpital; inversement, le nombre des vénériens diminue d'une façon très sensible parmi la population masculine indigente (clientèle habituelle de l'hôpital) et encore plus parmi les militaires de la garnison.

Sans vouloir attribuer à une statistique aussi restreinte plus de valeur qu'elle n'en pourrait avoir, on ne saurait nier qu'elle ne milite en faveur de la surveillance de la prostitution, à condition que cette surveillance soit sérieusement appliquée.

Dans la propagation des maladies vénériennes, une grande place doit être faite à l'heure actuelle à la prostitution clandestine. Mais la prostitution réglementée, par suite de son organisation (maisons de tolérance), qui la met en contact avec un grand nombre de clients, est souvent encore l'origine de multiples contagions, pour peu que quelque prostituée malade ait échappé au premier examen du médecin inspecteur ou qu'elle soit devenue contagieuse dans l'intervalle des visites sanitaires.

Elle joue un grand rôle dans la dissémination des maladies

vénériennes et, par ricochet, retentit sur la prostitution clandestine.

En dehors de la transmission des maladies vénériennes par la prostitution et les rapports sexuels, les autres modes de contamination sont rares dans notre région ; on n'observe guère que quelques faits de contagion par l'allaitement.

A l'heure actuelle, il semble y avoir une légère recrudescence des maladies vénériennes, et en particulier un retour des affections chancrelleuses lesquelles, après avoir donné lieu à une sorte d'épidémie, en 1893, semblaient depuis lors être presque éteintes.

Enfin, il faut signaler l'extension de plus en plus grande des affections vénériennes et, particuliènement, de la syphilis dans les campagnes où elles étaient jadis très rares; cette extension semble devoir être attribuée au service militaire obligatoire pour tous, et aussi aux périodes d'instructions des réservistes et des territoriaux, d'où certains reviennent avec la blennorrhagie ou la syphilis, qu'ils sont exposés à semer ainsi dans leur famille.

HOSPITALISATION :

Les vénériennes libres sont reçues à l'hôpital dans les mêmes conditions que les malades ordinaires, c'est-à-dire en exigeant d'elles un certificat de résidence dans la ville ou le département (lacune regrettable au point de vue de l'hygiène publique).

Le service spécial ne disposant que d'un nombre très restreint de lits pour les cutanées et les vénériennes libres, celles-ci doivent être en partie admises dans la même salle que les filles soumises malades.

Les vénériens sont reçus dans des conditions analogues. Ils sont hospitalisés dans les mêmes salles avec les cutanés.

Le service des vénériens est rattaché à la clinique dermatologique de l'université; il comprend : 30 lits, le plus souvent occupés seulement à moitié, pour les femmes soumises; 5 lits pour les femmes libres (notoirement insuffisants); 30 lits pour les hommes, 14 pour les militaires.

En outre, il existe à l'hôpital général une polyclinique gratuite avec distribution de médicaments, fonctionnant deux fois par semaine, pour les malades cutanés et vénériens indigents. Les vénériennes libres y viennent relativement peu, les vénériennes soumises pas du tout.

L'enseignement de la vénéréologie, confié à un agrégé chargé de cours de la Faculté de médecine, est surtout un enseignement clinique; néanmoins, si l'étude de la prophylaxie n'y occupe pas un rôle prépondérant, elle n'y est pourtant pas négligée.

La plupart des sociétés de secours mutuels de la région n'admettent pas les maladies vénériennes au nombre des maladies donnant droit aux secours.

En résumé, la prostitution, à Montpellier, n'est réglementée que dans une proportion insuffisante; la réglementation devrait s'étendre à un nombre au moins double de femmes.

Cependant, l'exécution rigoureuse des règlements existants, la pratique soigneuse des visites par un personnel médical éclairé semblent pouvoir influencer la diffusion des maladies vénériennes.

A ce point de vue, il serait à souhaiter que les fonctions de médecin du dispensaire ne soient données qu'après un concours spécial ou sinon ne soient attribuées qu'à des médecins ayant fait, soit comme interne, soit comme externe, un stage d'au mois six mois dans un service de vénéréologie.

Enfin, dans l'intérêt de l'hygiène publique, les hôpitaux (surtout ceux des grandes villes et des centres universitaires) devraient être largemeat ouverts à tous les vénériens et vénériennes, d'où qu'ils viennent.

VILLE DE TOULOUSE.

Rapport sur l'état sanitaire de la ville au point de vue de la syphilis et des maladies vénériennes.

Note de M. LE Docteur AUDRY,

Directeur de la clinique de dermato-syphiligraphie à l'Université.

TOULOUSE 150,000 HABITANTS.

Garnison 2 régiments d'infanterie (sauf un bataillon); 2 régiments d'artillerie;

Intendance, manutention, etc.

Université: (Les quatre facultés.)

Industrie Peu développée. Une grande usine de lithographie (3,400 ouvriers), etc. Ateliers nombreux et petits.

Ville surtout agricole; retraités, rentiers, etc. Pas de richesse.

Les documents ci-joints, dus à l'obligeance de la mairie, répondent aux questions 1, 2, etc.

Voici quelques autres reuseignements:

Question 4. L'examen des prostituées est fait comme l'indiquent les documents adjoints. Il est fait par les médecins de l'état-civil". Ces messieurs sont nommés au choix, sans concours aucun. Ils sont chargés en outre de la vérification des décès, de l'inspection des écoles. L'examen des prostituées est fait une fois par semaine (en deux séances) par un seul d'entre eux, à tour de rôle; le tour changeant chaque semaine. Il n'existe même pas de microscope.

Le roulement forcé, etc., empêchent qu'ils y apportent l'intérêt nécessaire; le roulement est exigé par eux, car ils ne veulent pas se compromettre au point de vue de la clientèle générale. De ce chef, le service d'examen n'est pas fait avec la rigueur et la compétence nécessaires. Exemple: il y a deux ans, pendant une épidémie de chancres simples, je vis se présenter à la consultation gratuite de ma clinique vingt-deux individus en trois semaines, tous infectés dans la même maison de tolérance; mon chef de clinique finit par prévenir le médecin dont le tour allait venir; ce dernier trouva trois femmes atteintes et du coup tout fut révélé.

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Question 5. Les prostituées sont hospitalisées dans un hôpital (de la Grave) où il y a pour elles un service de vingt-deux lits. Ce service est très mal installé, complètement dépourvu d'instrumentation, et n'a pas même un microscope. Il est confié aux chirurgiens-adjoints des hospices, considéré par eux comme une corvée et un exil; le plus souvent le chef de service y va deux fois par semaine; l'interne et l'externe sont d'ordinaire des provisoires et l'on peut dire que le service n'est pas fait comme il conviendrait, faute de spécialisation.

Le nombre annuel des admissions s'élevait environ à 230 ou 250 environ; il a brusquement et considérablement diminué, sans qu'on en connaisse la cause.

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