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mer des groupes, d'y circuler en réunion, d'aller et venir dans un espace trop resserré, et de se faire suivre ou accompagner par des hommes.

Les pourtours et abords des églises et temples, à distance de vingt mètres au moins, les passages couverts, les boulevards, de la rue Montmartre à la Madeleine, les Champs-Élysées. les jardins et abords du Palais-Royal, des Tuileries, du Luxembourg et le jardin des Plantes leur sont interdits. L'Esplanade des Invalides, les quais, les ponts et, généralement, les rues et lieux déserts et obscurs leur sont également interdits.

Il leur est également défendu de fréquenter les établissements publics ou maisons particulières où l'on favoriserait clandestinement la prostitution, et les tables d'hôte, de prendre domicile dans les maisons où existent des pensionnats ou externats, et d'exercer en dehors du quartier qu'elles habitent.

Il leur est expressément défendu de partager leur logement avec un concubinaire ou avec une autre fille, ou de loger en garni sans autorisation; il leur est expressément interdit de se prostituer dans le garni.

Les filles publiques s'abstiendront, lorsqu'elles seront dans leur domicile, de tout ce qui pourrait donner lieu à des plaintes des voisins ou des passants.

Celles qui contreviendront aux dispositions qui précèdent, celles qui résisteront aux agents de l'autorité, celles qui donneront de fausses indications de demeure ou de noms, encourront des peines proportionnées à la gravité des cas.

AVIS IMPORTANT.

Les filles inscrites peuvent obtenir d'être rayées des contrôles de la prostitution, sur leur demande, et s'il est établi, par une vérification faite d'ailleurs avec discrétion et réserve, qu'elles ont cessé de se livrer à la débauche.

On a écrit que cette réglementation était insuffisante et on lui a reproché d'être illusoire.

En ce qui concerne cette dernière assertion, on peut facilement la réduire à néant en lui opposant des faits; il suffit de reproduire les chiffres suivants: En 1897, sur 4,700 filles soumises visitées on a constaté 334 malades (maladies vénériennes), soit 7 p. c.; sur 2,968 insoumises arrêtées on en a consigné pour la même raison 873, soit 29 p. c. Ces chiffres ne parlent-ils pas en faveur de la réglementation ou, du moins, de la surveillance?

Mais est-ce à dire que les institutions réglementaires actuelles sauvegardent suffisamment les intérêts généraux, sans jamais porter atteinte à la liberté privée? Nullement; l'accusation est parfaitement fondée et, à ce point de vue, de très utiles modifications me paraissent nécessaires.

EXAMEN DES PROSTITUÉES PAR DES MÉDECINS NOMMÉS AU CONCOURS. DISPENSAIRE DE SALUBRITÉ DE LA PRÉFECTURE DE POLICE.

Après leur arrestation, les prostituées sont conduites au Dépôt où se trouvent classés les dossiers des filles qui se livrent à la prostitution.

C'est là qu'a lieu leur interrogatoire par un chef ou un sous-chef de bureau. De là, elles sont dirigées sur le Dispensaire de Salubrité, situé à côté du Dépôt, et soumises à l'inspection médicale, faite par des médecins nommés au concours (quatorze médecins titulaires et dix médecins adjoints). Diverses modifications heureuses concernant l'hygiène, l'antisepsie, etc., ont été apportées, en ces dernières années, dans le matériel des salles d'inspection. C'est également au Dispensaire que les filles isolées, en carte, doivent se rendre tous les quinze jours pour être visitées. Les femmes de maison sont examinées sur place le matin, une fois tous les huit jours, par des médecins nommés ad hoc.

"La visite, dit M. le Dr Commenge (1), médecin en chef du Dispensaire de Salubrité de la Préfecture de police, a presque toujours lieu de 1 à 3 heures; elle est faite d'une façon minutieuse. Après une investigation spéciale de la bouche, le médecin examine successivement l'anus, la vulve, l'urêtre, le vagin, le col utérin, les régions inguinales et abdominales. Souvent aussi, lorsqu'il y a certains doutes, on regarde la poitrine et les seins. L'examen terminé, le médecin, chargé des écritures, en consigne le résultat sur un livre ad hoc et sur les folios délivrés au Dépôt pour chaque insoumise. Il remplit, en outre, la feuille d'envoi à l'Infirmerie de Saint-Lazare, lorsque l'insoumise est

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"Cette feuille reviendra avec la malade, lorsqu'elle repassera,

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après guérison, au Dispensaire et portera le diagnostic du médecin traitant avec l'indication des complications qui ont pu survenir et la mention de la médication mise en pratique. "

Après la visite médicale du Dispensaire, les insoumises sont reconduites au Dépôt où elles séjournent jusqu'au moment de leur départ pour l'Infirmerie de Saint-Lazare, si elles sont malades, ou jusqu'à la décision que prendra l'Administration à leur égard, si elles sont saines.

HOSPITALISATION DES PROSTITUÉES. INFIRMERIE DE SAINT-Lazare.

L'hospitalisation des prostituées réglémentées a lieu à SaintLazare. C'est dans l'infirmerie de la 2me section de cet établissement (la 1re section, qui possède une infirmerie particulière, est occupée par les prévenues et les condamnées pour délits de droit commun) qu'elles reçoivent les soins nécessaires. Une 3me section est affectée aux mineures (détenues et prostituées séparées les unes des autres).

Les services de l'infirmerie spéciale de la 2me et de la 3me section sont dirigés par trois médecins titulaires et un médecin adjoint et par deux chirurgiens titulaires et un chirurgien adjoint; à chaque service est attaché un interne. Depuis l'année 1889 le recrutement des chefs et des internes se fait par le con

cours.

Tous les matins le chef du service fait une visite, à laquelle ne peuvent assister que les docteurs en médecine et les étudiants inscrits auprès de l'Administration. Les malades prostituées, qui sont absolument séparées des prisonnières, trouvent dans les salles bien aérées et assez confortables de Saint-Lazare les principaux soins hygiéniques et les soins médicaux qui sont indispensables. Ajoutons, toutefois, qu'un certain nombre de réformes seraient nécessaires.

Ces malades, au nombre de 1,200 environ chaque année, sans compter celles qui sont déjà venues les années précédentes ou revenues dans la même année, ne sortent de leur service qu'après guérison. Celle-ci constatée par le chef de service, elles sont conduites au Dispensaire, où une contre-visite a lieu et précède leur mise en liberté.

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La prostitution clandestine existe sous les formes les plus variées. On la constate dans toutes les couches sociales et, depuis qu'elle a pris une extension croissante d'année en année, elle est devenue l'un des facteurs les plus puissants de la propagation des maladies vénériennes. La prostitution clandestine est un danger social qui ne peut être nié que par ceux qui ne veulent pas voir. Ses causes en sont fort nombreuses.

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Dans un chapitre fort instructif, M. le Dr Commenge (1) en a fait une étude très complète, d'après l'analyse de nombreux dossiers de prostituées. Nous ne pouvons en faire, dans ce rapport, qu'une courte mention. Parmi les principales causes, citons les suivantes: Les bals publics - le vagabondage la réunion de jeunes filles et de femmes de tout âge, la promiscuité des sexes dans les usines, les ateliers, les grands magasins, - l'influence des commis, employés supérieurs, contremaîtres et patrons renouvelant le droit seigneurial d'autrefois sous la forme démocratique ",- l'abanles salaires insuffisants la misère don après grossesse l'appât du plaisir, le goût du luxe les livres pornographiques et les gravures obscènes, dont la multiplication, en ces cinquante dernières années, est un signe trop évident de la dégénérescence physique et morale des diverses couches de la société, l'absence de toute éducation morale, la promiscuité qui existe dans certains ménages, où père, mère, fils et filles ne sont, souvent par le fait de l'alcoolisme, que des animaux en rut confondant les sexes, le proxénétisme de la mère, du père, de la sœur, du mari forçant à la prostitution la malheureuse dont le salaire doit les faire vivre.

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Parmi les influences pernicieuses qui doivent encore être regardées comme une origine fréquente de la prostitution, nous rappellerons l'influence de certaines camaraderies, des mauvaises fréles brasseries, quentations - les bureaux de placements desservies par des femmes, qui ne sont que des lupanars déguisés et qui devraient être supprimées ou forcées de remplacer leur personnel féminin par des hommes certaines agences théâtrales

(1) COMMENGE, Ouv. cit., p. 6 et suiv.

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interlopes et ces 10,000 maisons hospitalières, dite maisons de passe, comprenant les magasins de ganterie, de parfumerie, de cravates, de confiserie, etc..., les établissements de marchands de vin avec garnis, les hôtels à l'heure, sans compter toute la gent immonde des proxénètes, des entremetteurs, des souteneurs et le personnel de toutes ces agences de rendez-vous (dites agences lyriques, littéraires, de massage, etc..), dont quelques journaux se font les divulgateurs intéressés.

Quelle influence pernicieuse ne possède pas encore certaine presse, dont les échos mondains relatent chaque jour la vie publique et en apparence si attrayante des horizontales de marque, et dont les articles ne sout qu'une apologie de la prostitution morale et physique !

MILIEUX DE RECRUTEMENT DES PROSTITUÉES. LEUR PAYS D'ORIGINE.

Dans cette énumération des sources variées qui alimentent la prostitution, d'une part la femme mariée, sans profession et appartenant aux diverses classes de la société, y tient une assez large place; d'autre part, il n'est pas de corps de profession qui ne lui fournisse son contingent.

En tête des professions se trouvent les domestiques dans l'énorme proportion de 39.18 p. c. (Commenge), puis les ouvrières de l'aiguille (couturières, lingères) et les blanchisseuses. Viennent après les fleuristes, les mécaniciennes, les passementières, les plumassières, etc...

D'où viennent ces prostituées? Quel est leur pays d'origine? Le plus grand nombre des insoumises est originaire du département de la Seine et les trois cinquièmes d'entre-elles au moins de Paris.

Les autres proviennent, par ordre de fréquence décroissante, des départements de Seine-et-Oise, de la Seine inférieure, de Seine et Marne, de l'Aisne, de la Nièvre, des Côtes du Nord, du Loiret, du Nord, etc... A Paris, les méridionales sont assez rares, car Bordeaux, Lyon, Marseille, Toulon les arrêtent au passage. Quant aux étrangères, la plupart originaires de la Belgique, de la Suisse, de l'Italie et de l'Espagne, elles y sont également peu nombreuses.

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