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Les inspecteurs ne perdront jamais de vue que l'objet des perquisitions et visites, faites en vertu de mandats, est la recherche des femmes ou filles qui se livrent à la prostitution publique, et non de celles qui n'ont à se reprocher qu'un fait de débauche privée, lequel, pour être répréhensible, ne doit cependant pas exposer celle qui s'en rend coupable aux conséquences qui ne doivent atteindre que les vraies prostituées.

Ainsi, de ce qu'une femme est trouvée dans une maison garnie ou dans un lieu public, en état flagrant de débauche, il ne résulte pas contre cette femme imputation suffisante de prostitution, si elle est en relations habituelles avec l'homme qu'elle accompagne, et s'il n'est articulé aucun fait de provocation à la débauche moyennant argent. Il est expressément recommandé, lorsque des femmes sout trouvées couchées seules, mêmes dans les maisons mal famées, de ne point procéder à leur arrestation, à moins que les circonstances ne donnent au commissaire de police la conviction que ces filles viennent de se livrer à un acte de prostitution. Les commissaires de police devront examiner, avec soin et dans le plus bref délai, les circonstances qui ont donné lieu à l'arrestation des filles insoumises; ils décideront, après avoir entendu la personne arrêtée, si l'arrestation doit être maintenue. Dans le cas où ils jugeraient utile de procéder d'urgence à certaines vérifica tions, ils pourront y pourvoir en faisant adresser un télégramme au chef de la police municipale par le poste de l'officier de paix de l'arrondissement.

Ils dresseront procès-verbal de l'interrogatoire auquel ils auront soumis les personnes arrêtées.

Il leur est expressément interdit de se servir, pour cette interrogatoire, de formules imprimées.

II.

PROSTITUTION TOLÉRÉE.

1. Maisons de tolérance.

Les inspecteurs doivent exercer une surveillance journalière sur les maisons de tolérance, à l'effet de s'assurer qu'il ne s'y passe rien de contraire à la tranquillité publique et au bon ordre, et que les maîtresses de maison se conforment rigoureusement aux conditions particulières qui leur sont imposées, ainsi qu'aux obligations, d'ordre général, notamment en ce qui concerne la mise et le nombre des filles qui peuvent circuler, et les heures de sortie. et de rentrée.

Quant aux entrées et aux sorties qui ont lieu furtivement, après

l'heure de fermeture, elles ne constitueraient une contravention punissable qu'autant qu'il en résulterait un bruit de nature à trou bler le repos public.

Les inspecteurs rendront compte, sans retard, par un rapport spécial, de tout fait grave ou extraordinaire qui se passerait dans les maisons et rappelleront sans cesse aux maîtresses qu'elles doivent en donner immédiatement avis au commissaire de police de leur quartier, quand elles ne pourront en informer en temps opportun le bureau administratif ou l'officier de paix de l'attribution des mœurs.

Ils veilleront à la rigoureuse observation de la défense faite aux maîtresses de maisons de recevoir des élèves des lycées, des écoles civiles, des militaires en uniforme, ou des jeunes gens au-dessous de l'âge de dix-huit ans, et signaleront les infractions commises.

2. Filles inscrites.

Les inspecteurs veilleront constamment à l'exécution de toutes les dispositions de l'arrêté du 1er septembre 1842.

Ils exigeront des filles isolées, soit dans les visites des garnis et autres lieux, soit dans le cours de leur surveillance sur la voie publique, la représentation de leur carte afin de s'assurer de leur exactitude à la visite, et de rechercher les retardataires qui leur auraient été signalées par les bulletins semi-mensuels délivrés par le bureau administratif.

Ils accompagneront au besoin à leur domicile celles dont ils auront des raisons de suspecter la véracité au sujet de l'absence de leur carte.

Les inspecteurs qui, chargés d'amener une fille en carte au bureau administratif, ne l'auront pas trouvée à son domicile, se borneront à rendre compte de cette circonstance, sans laisser trace de leur mission, afin de ne pas donner à la fille recherchée l'idée de disparaître.

3. Filles disparues.

La recherche des filles disparues doit être faite avec la plus grande circonspection.

Les inspecteurs devront se borner à l'égard des filles disparues qui seront restées dans leurs familles, qui se livreraient à un travail honnête ou qui ne paraîtraient plus tirer leurs moyens d'existence de la prostitution publique, à faire connaître, par un rapport particulier, la situation actuelle de ces femmes.

Ils n'amèneront au bureau administratif que les filles disparues qui seront trouvées dans des maisons de tolérance, chez des filles

publiques ou dans des lieux publics ouverts à la prostitution, et celles qui, rencontrées sur la voie publique, dans une maison garnie ou particulière, ne seraient dans aucun des cas d'exceptions sus-énoncés.

4.

Translation à la préfecture des filles arrétées.

Les filles publiques que des inspecteurs arrêteront dans Paris. ou dans la banlieue et qu'ils ne pourront amener immédiatement à la préfecture de police seront déposées dans les postes, d'où elles seront transférées au Dépôt.

5.

Dispositions particulières.

OUTRAGE PUBLIC A LA PUDEUR. (SODOMIE.)

La surveillance des inspecteurs du service actif des mœurs s'étendra sur tous les délits d'outrage public à la pudeur et principalement sur les actes de sodomie.

Mais ils s'abstiendront expressément de tout moyen qui paraîtrait avoir le caractère de la provocation et s'attacheront surtout à constater la flagrant délit.

Le fait de sodomie tenté ou consommé dans un lieu ouvert au public constitue le délit d'outrage public à la pudeur.

6.

Service administratif.

Préalablement à toute opération, le commissaire inspecteur, chef du bureau des mœurs, devra procéder à l'examen des pièces relatives à l'arrestation des filles insoumises afin de rechercher les cas où il y aurait lieu de surseoir à la visite corporelle.

L'interrogatoire des filles insoumises est fait par le commissaire. interrogateur en personne ; il donne lecture à la fille des déclarations par elle faites et lui fait signer le procès-verbal dressé à cette occasion. Il entend au besoin les agents.

Lorsqu'il s'agira de procéder à l'inscription d'une fille insoumise majeure qui refuse de se soumettre aux obligations sanitaires. d'administration, ou d'une fille insoumise mineure, au lieu de se borner, comme on l'a fait jusqu'ici, à un exposé écrit des faits, la décision sera réservée à une Commission composée du préfet, ou de son délégué, du chef de la 1re division et du commissaire interro

gateur. Cette Commission entendra la femme arrêtée et les agents. Il importe de rappeler que les filles publiques, au moment de leur inscription, reçoivent un avis imprimé portant qu'elles peuvent obtenir leur radiation des contrôles de la prostitution sur leur demande, s'il est établi par une vérification faite d'ailleurs avec discrétion et réserve qu'elles ont cessé de se livrer à la débauche.

En ce qui touche les punitions disciplinaires à infliger aux filles inscrites, on continuera de procéder comme aujourd'hui, c'est-àdire que les punitions seront infligées par le préfet sur les propo sitions du commissaire interrogateur, visées par le chef de la 1re division. Toutefois, dans le cas où une fille inscrite réclamerait contre la punition qui lui est infligée, sa réclamation sera portée sans délai devant une Commission composée du préfet de police ou de son délégué, assisté de deux commissaires de police de la ville de Paris appelés à tour de rôle.

Cette Commission statuera, après avoir entendu la personne arrêtée, ainsi que les agents s'il y a lieu.

Lorsque la Commission ne sera pas présidée par le préfet personnellement, sa décision devra être ratifiée par lui.

Afin d'assurer la permanence des services, le sous-chef de la 3e section du 2e bureau sera nommé commissaire interrogateur suppléant, mais il n'interviendra qu'en cas d'empêchement du commissaire interrogateur titulaire.

Service médical.

Bien qu'il ne se soit produit aucun cas où la visite corporelle ait été faite de force, il sera recommandé au service médical de s'abstenir d'y procéder dans le cas où il rencontrerait une résistance. L'incident sera, dans ce cas, porté immédiatement à la connaissance du préfet.

La base du règlement est l'inscription sur un registre à la préfecture de police. En regard de cette formalité qui accorde la tolérance, la prostituée reçoit une carte dont voici le décalque et est soumise aux obligations suivantes :

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Les visites auront lieu le 1er et le 16 de chaque mois.

Lorsque la visite tombera un DIMANCHE ou un JOUR FÉRIE, elle sera remise au lendemain.

Les jours fériés sont le 1er Janvier, le Mardi Gras, le Vendredi-Saint, le Lundi de Pâques, l'Ascension, le Lundi de la Pentecôte, le 14 Juillet, le 15 Août, la Toussaint et la Noël.

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Les filles publiques en carte sont tenues de se présenter, une fois au moins tous les quinze jours, au dispensaire de salubrité, pour être visitées.

Il leur est enjoint d'exhiber leur carte à toute réquisition des officiers et agents de police.

Il leur est défendu de provoquer à la débauche pendant le jour; elles ne pourront entrer en circulation sur la voie publique qu'une demi-heure après l'heure fixée pour le commencement de l'allumage des réverbères et, en aucune saison, avant sept heures du soir, et y rester après onze heures.

Elles doivent avoir une mise simple et décente qui ne puisse attirer les regards soit par la richesse ou les couleurs éclatantes des étoffes, soit par les inodes exagérées.

La coiffure en cheveux leur est interdite.

Défense expresse leur est faite de parler à des hommes accompagnés de femmes ou d'enfants et d'adresser à qui que ce soit des provocations à haute voix ou avec insistance.

Elles ne peuvent, à quelque heure que ce soit, se montrer à leurs fenêtres, qui doivent être tenues constamment fermées et garnies de rideaux.

Il leur est défendu de stationner sur la voie publique, d'y for

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