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Pour Bucharest, comme on vient de le voir, il y a eu en 1897, dans 50 maisons, 484 femmes et 214 domiciliées seules, soit un nombre de 698.

Tandis qu'en 1898 il n'y a eu que 508 femmes inscrites en tout. Il est certain que beaucoup de celles qui étaient inscrites en 1897 sont devenues clandestines en 1898.

NOMBRE DE DÉCÈS PAR SYPHILIS.

On peut dire que la syphilis, tuant à petit feu, lentement, insidieusement, une statistique exacte des décès dus à cette maladie est très difficile à établir.

En effet, un grand nombre de décès d'origine syphilitique sont enregistrés avec le diagnostic de la maladie qui tue l'individu en dernier lieu.

Beaucoup d'affections cérébrales, médulaires, cardiaques, des gros vaisseaux, du foie, et des autres organes, quoique d'origine syphilitique, n'entrent pas dans la statistique des décès par " syphilis ".

De même, beaucoup d'avortements, de cas d'athrepsie, de scrofulo-tuberculose qui sont d'origine et provenance syphilitique ne sont pas enregistrés sous ce titre.

Aussi, en donnant ici la statistique du nombre de décès par syphilis enregistrés pendant les cinq dernières années, nous ne voulons pas dire que la syphilis chez nous est très peu meurtrière, mais que, dans ces cas aux décès des malades on a assisté à des manifestations syphilitiques évidentes.

C'est pourquoi, dans le rapport général en cours de publication de M. le professeur Félix, directeur général du service sanitaire du royaume de Roumanie, nous trouvons que le nombre de décès dus à la syphilis, dans tout le pays, pour les cinq dernières années, a été de 522, soit :

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Mais alors même que ce nombre serait réel, il ne faudrait pas oublier que, parmi les vivants, plus de la moitié des gens sinon davantage ont été atteints d'une quelconque des maladies vénériennes, entachés à cause de cela d'une viciation organique.

La syphilis et la gonocose sont incontestablement deux maladies qui contribuent pour une grande part à la dépopulation du monde entier ; c'est là une chose connue et nous trouvons inutile de donner des preuves.

JUSQU'A QUEL POINT NOTRE RÈGLEMENT POUR LA SURVEILLANCE DE LA PROSTITUTION EMPÊCHE-T-IL L'EXTENSION DES MALADIES SYPHILITIQUES OU VÉNÉRIENNES ?

Lors même que le règlement en question serait littéralement et consciencieusement appliqué, on aurait toujours des femmes qui, quoique inscrites et tenues d'être visitées régulièrement une ou deux fois par semaine, trouveraient les moyens de se soustraire aux visites des médecins surtout lorsqu'elles se sauraient malades.

D'habitude ce sont les tenancières de ces maisons de tolérance qui cachent au médecin les filles malades et les obligent ensuite à avoir des rapports avec les clients.

Ces infractions aux règlements sont, il faut le dire, plus fréquentes dans les autres villes du pays qu'à Bucharest.

Mais le règlement en question n'est malheureusement pas appliqué dans ses points principaux, aussi, les maladies vénériennes continuent-elles souvent à garder le sommet de la pyramide morbide.

La police, contrairement à l'article premier du dit règlement, ne s'en occupe nullement, n'aide pas le service sanitaire en ce qui concerne la surveillance sanitaire de la prostitution.

Aussi, la prostitution clandestine a-t-elle pris aujourd'hui chez nous, surtout à Bucharest, une très grande extension et, comme partout, c'est cette prostitution bien plus que celle qui est inscrite

qui est la grande source de la propagation des maladies syphilitiques et vénériennes.

Depuis deux ou trois années surtout, le nombre de caféschantants est devenu assez grand chez nous, toujours d'avantage à Bucharest.

Eh bien les soi-disant chanteuses qui, d'une voix rauque, vérolée, chantent le soir dans ces cafés, même pendant l'hiver, s'il vous plaît, infectent de la vérole ou de la gonocose les jeunes gens et lycéens quelquefois qui croient avoir à faire à des " Actrices comme il faut ".

Mais il y a des clandestines pires encore, qui s'en douterait?

Il y a des filles pour lesquelles la mère veuve et immorale fait semblant de ne rien voir, qui, menant une vie de prostitution, attirent chez elles des clients qui, ceux-là, croient aussi à leur tour avoir enfin découvert " une fille pauvre, mais honnéte chez ses parents". Ces filles donnent aussi la syphilis comme j'ai eu l'occasion de le constater chez quelques-uns de mes clients.

Ce sont là des prostituées clandestines qui pourraient parfaitement bien être surveillées par la police sanitaire si l'on voulait.

Nos agents sanitaires ne remplissent pas non plus les conditions exigées par le règlement, puisqu'ils sont mal payés et les fonctionnaires de mérite exigent d'être mieux rémunérés.

Par l'article 15 du règlement mentionné, il est interdit aux femmes prostituées d'habiter dans les hôtels, les restaurants, et pourtant, dans beaucoup de petits hôtels, il y a des femmes qui font de la prostitution clandestine.

Une mauvaise disposition est prévue à l'article 20 du dit règlement, rappelons-en la teneur :

"Les femmes inscrites d'une maison de prostitution, peuvent quitter la maison quand elles voudront, mais celles qui sont malades seront tout d'abord internées à l'hôpital pour y étre guéries. "

C'est probablement à la disposition de cet article qu'est dû le nombre plus restreint des femmes inscrites en 1898, comparativement à l'année 1897 (voir plus haut).

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Mais un côté autrement important, concernant cette question, est celui relatif aux visites médicales des prostituées.

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Dans la plupart de nos villes, ce sont les médecins au service de communes qui sont chargés de faire les visites des femmes inscrites comme prostituées.

Mais le plus souvent ces médecins n'ont pas le temps nécessaire pour ces visites, et le plus grand nombre ne sont pas spécialisés, ne possèdent pas les connaissances nécessaires pour de tels examens où la recherche du gonocoque et du bacille de Ducrey exige des connaissances de bactériologie.

Ces visites, dans le plus grand nombre de nos villes, se font aux domiciles des prostituées où souvent elles sont mal faites, illusoires : chambres petites, obscures, pas d'instruments pour l'examen au spéculum et pas de possibilité de pratiquer un examen bactériologique dans les cas douteux.

A Bucharest, une partie de ces femmes sont visitées à leur domicile, toujours dans les mêmes mauvaises conditions qu'en province, et une partie au dispensaire.

En dehors des autres inconvénients signalés ci-dessus, les visites au domicile des prostituées en ont encore un autre très grand. Les malades de gonocose, aussitôt que le médecin doit commencer sa visite, urinent et la blennhoragie urétrale passe ainsi inaperçue.

Pour faire cesser certains des inconvénients que je viens de signaler ci-dessus; j'ai, en 1898, en ma qualité de membre du Conseil communal de la ville de Bucharest, proposé la création de deux postes de médecins chargés spécialement du service sanitaire de la prostitution. M. Robesco, le maire, a bien voulu accueillir ma proposition et les deux postes ont été créés.

Mais, malheureusement, au lieu de donner au concours ces deux postes si importants comme on le fait pour toutes les fonctions médicales, chez nous, on les a confiés, dit-on, provisoirement, à des personnes qui sont loin de remplir les conditions exigées par les spécialistes qui ont écrit sur la prostitution.

Je dois donc déclarer à mon grand regret que ce service offrait plus de garantie avant la création de ces deux postes spéciaux, alors que les médecins de la commune, nommés à la suite d'un concours, faisaient ces visites.

Aussi, en ma qualité de membre du Conseil d'hygiène de la ville de Bucharest, ai-je fait part au dit Conseil, dans une des dernières séances, de l'extension prise par la prostitution et les maladies vénériennes à Bucharest et des moyens qu'on doit prendre pour les

combattre. J'ai aussi proposé la suppression des visites médicales au domicile des prostituées, leur examen au dispensaire ainsi que la création d'un médecin inspecteur pour le service de la prostitution, etc.

Un de nos distingués confrères, le Dr I. Butaresco (de Braïla) a beaucoup écrit sur la prostitution et l'extension de la syphilis à Braïla, où il a été médecin en chef de l'hôpital communal.

Dans deux grandes brochures il montre la négligence avec laquelle on visite et on surveille la prostitution dans la dite ville qui est un port sur le Danube et où, à ce titre, les maladies vénériennes sont très répandues.

Selon notre confrère, à Braïla, relativement, les affections vénériennes sont bien plus considérables que dans les autres villes de l'Europe, puisque, selon lui, il y a eu vingt malades pour mille par an de la population, tandis que la moyenne, dans le reste de l'Europe, serait de dix à onze pour mille par année.

De même, selon M. Butaresco, il y aurait, à Braïla, 74 p. c. de cas de maladies vénériennes contractées dans les maisons de tolérance, et cela parce que les visites médicales seraient mal faites et que les patronnes de ces maisons cacheraient les femmes malades. lorsqu'on y va pour la visite médicale.

Nous avons dit plus haut quel a été le nombre des femmes prostituées visitées par les médecins, pour un nombre de six années, et combien, parmi elles, ont été trouvées malades et internées dans les hôpitaux.

Mais nous n'avons aucune donnée sur ce point en ce qui concerne la prostitution clandestine qui est assez répandue dans nos grandes villes et est une source dangereuse pour la propagation des maladies vénériennes.

C'est pourquoi, en outre des autres dispositions qu'il faut prendre en vue de soumettre ces femmes au contrôle du service sanitaire, il faudra agir à leur endroit comme on le fait pour les autres maladies infectio-contagieuses, c'est-à-dire adresser une lettre-circulaire à tous les médecins du pays les priant de consigner, par des X, la provenance des maladies vénériennes qu'ils ont l'occasion de traiter. Est-ce une clandestine? Quel àge a-t-elle? Depuis combien de temps est-elle malade et quelle est sa maladie?

Pour les hommes atteints de telles maladies, on tâchera d'apprendre où ils ont contracté leur mal.

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