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Ces circonftances font-elles fauffes; ou veritables?

Si elles font inventées, foit pour rendre l'Empereur odieux en Suede, ou bien pour fauver l'Angleterre de la honte d'avoir manqué à fes engagemens, & pour cacher la nôtre de nous y être trop legerement fiez, cela doit nous corriger de notre facilité à faire fonds fur les offres, & nous retenir de nous expofer à la raillerie de tout l'Univers; en nous laiffant furprendre ne feconde fois.

Si au contraire ces circonstances font fondées fur la verité, & qu'il n'ait pas été poffible de rien entreprendre de l'aveu de l'Angleterre, fans le concours de l'Empereur, comment pouvons-nous efperer à prefent, ce qui alors n'étoit pas faifable?

On n'y a pas pu reuffir dans le tems que l'Empereur vouloit refter neutre, & que l'Angleterre n'étoit point mal avec lui, & on fe Hate d'en venir à bout aujourd'hui que l'Empereur & le Roi de Pruffe font les plus intimes Alliez de la Ruffie, & qu'elle à une Paix folide avec la Porte.

Ces Alliances, qui entrainent en quelque façon avec elles celle de l'Espagne & de la plûpart des Princes de l'Empire, affoibliffentelles la Puiffance Ruffienne? ou bien l'Angleterre eft-elle plus puiffante & en état de faire de plus grand efforts à prefent, quand elle est fur le point d'avoir la guerre elle-même avec l'Empereur & l'Espagne, qu'elle n'étoit dans les années 1719. & 1720. lorsqu'elle les avoit pour Alliez & jouiffoit d'une Paix parfaite.

Ce font des Thefes, qu'on ne peur suposer,

& encore moins foutenir, fans avoir trouvé le fecret de rendre à la fois veritables deux chofes tout-à-fait contraires.

Je m'imagine, que s'il eft vrai, qu'en 1719. & 1720. on n'a point pû, fans l'aide de l'Empereur, forcer la Ruffie à nous relâcher une partie de fes Conquêtes, qu'il l'eft encore davantage en 1727.

Les nouvelles Alliances que la Ruffie a faites, & celles que l'Angleterre a perdues, augmentent d'autant plus la difficulté de ces entreprises, que l'Angleterre a beaucoup épuifé fes propres forces, par l'équipement des Efcadres avec lefquelles elle a cru intimider & effrayer le Nord & le Sud; & que d'ailleurs la France ne donne plus, comme du tems des precedens Miniftres, tête baiffée, dans toutes fes vûes & dans toutes les propofitions. Il leur fera difficile d'impofer aux lumieres immenfes, & à la prudence profonde de Son Eminence Mr. le Cardinal de Fleury. Ils en font eux-mêmes perfuadez, & remarquent avec affez d'inquietude, que le Roi de France, aidé de fes Confeils, n'entre dans leur Projet que par regle & par compas.

Quand les Partifans de l'Acceffion voudront fe donner la peine d'aprofondir & d'examiner toutes ces circonftancus, peut-être changeront-ils de fentimens, fur-tout quand ils voudront faire attention que nous courrions nous-mêmes quelques rifques, fi par notre occafion nous engagions la Ruffie à une neceffité abfolue de s'accommoder avec l'Angleterre.

Nous avons vû par ce qui a été dit, qu'elle ne veut nous exciter contre l'Imperatrice que

pour

pour lui donner quelque occupation, qui puifle la detourner du deffein qu'elle a de forcer le Dannemarck à rendre le Duché de Schleswick.

Nous n'ignorons point non plus, quele Roi de Dannemarck de concert avec l'Angleterre, a offert à Son Alteffe Royale fon affiftance pour l'élever un jour fur le Trône de Suede, s'il vouloit fe defifter de fes Droits fur ledit Duché, qui eft le principal objet de toutes les Négociations & des intrigues Anglaifes dans le Nord.

Or fi l'Imperatrice de Ruffie fe trouvoit dans un extrême embarras, & offroit à l'Angleterre d'engager Son Alteffe Royale à renoncer a fon Duché aux Conditions proposées, mais qu'il a rejettées jusqu'à present avec beaucoup de magnanimité, qui nous peut repondre qu'ils n'accepteroient pas un offre, qu'ils ont été les premiers à faire? En ce cas que deviendroient notre liberté & le Droit de notre Election?

Comme fidele Sujet du Roi de Suede, cette feule aprehenfion me donne une nouvelle repu gnance pour Acceffion & pour une rupture Ouverte, qui en feroit prefque une fuite immancoble.

Nous acheverions de nous perdre, fi la fortune fe declaroit contre nous, & fi elle nous favorifoit, il feroit auffi naturel que l'Imperatrice pour fa confervation, celle de fa Famille & de fon Empire, fit toute chofe au monde pour faire agréer cette offre à fon Gendre, qu'il eft aparent que le Roi d'An gleterre, qui pour la feule affaire de Schlef wick, & les fuites avantageufes qu'elle pour Q 4

roit

roit avoir pour nous, a renoncé à l'Alliance Ruffienne, dans un tems où il en auroit eu grand befoin; & qu'il a fait des depenfes infinies, tant pour l'équipement de fon Escadre, que dans le courant des Négociations en Suede, ne tarderoit gueres à y donner les mains, & de finir tout d'un coup, & aux depens d'autrui, un different qui lui a couté tant de peines, tant d'inquietudes & tant de depenfes.

* Enfin de quel côté que nous tournions nos reflexions, nous voyons que la jonction injuste des armes de l'Electeur d'Hanovre à celles de nos autres Ennemis, a été le comble de nos malheurs du tems du feu Roi: Qu'après fa mort la foi indifcrete que nous ajoutames à fes promeffes, nous a fait meconnoitre les vrayes mesures que nous avions à prendre, & nous a caufé de grandes pertes & dommages, & qu'à prefent il ne veut nous engager d'acceder au Traité d'Hanovre, que pour fe rendre l'Arbitre de notre fort, & de l'accommodement des troubles,dans lefquels il veut nous jetter, pour nous faire garants nous-mêmes de la privation éternelle de nos Etats perdus, & pour mettre un obftacle par nous-mêmes à notre élevation.

Pourrons-nous après cela balancer de preferer les Avantages de la Neutralité, à une Acceffion dangereuse?

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Si ce fentiment n'a point l'honneur d'être. generalement gouté en Suede, du moins. nous, qui en fommes, avons la confolation de ne pouvoir être confondus avec ceux qu'on fupofe d'avoir des vues particulieres; voulant refter neutres, nous n'ambitionons

car

pas

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pas de complaire à aucun des Partis, & par con→ fequent, nous ne pouvons être foupçonnez d'avoir eu la lacheté de vendre nos fuffra ges.

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دو

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"L'Efcadre Angloife, dont il eft parlé dans le Memoire de Mr. Pointz, & dans les Remarques fur le Memoire, n'entra dans la Mer Baltique qu'à cause de l'ombrage que prit la Grande-Bretagne & le Dannemarck d'un Armement confiderable » que l'Imperatrice Catherine faifoit dans fes Ports d'Ingrie & de Livonie. La Cour de Dannemarck prit le parti d'envoyer ordre à fon Miniftre Mr. Weftphalen, de demander à » l'Imperatrice le motif d'un fi puiffant arme» ment, c'est ce dont il s'acquita dans le Mé>> moire ci-joint.

"

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LES grands Armemens que la Ruffie a faits depuis quelques années dans la Mer Baltique, & particulierement ceux qui ont été faits du tems de la Guerre de Suede, font d'une telle nature dans toutes leurs circonstances, que toutes les Puiffances voifines ont lieu de s'en inquieter, & exiger à cet égard des affurances qui puiffent les calmer entie

rement.

L'Alliance perpetuelle conclue en 1709. entre le Roi mon Maitre & le feu Czar Pierre I. pour procurer le bien & l'avantage des Royaumes & Païs reciproques, eft d'une telle nature, que le Roi mon Maitre se fondant fur les principes de l'Equité & du veritable interêt de la Ruffie, n'a rien à craindre de toutes les machinations des mal-intention

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