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HAEB

JOURNAL

DES

ÉCONOMISTES

L'EXPULSION DES MORISQUES D'ESPAGNE

(1)

Après leur foudroyante conquête de l'Espagne, les Musulmans vainqueurs laissèrent vivre en paix les populations chrétiennes, qui se soumirent à l'obligation de payer le tribut. Tel est le principe posé par Mahomet; l'idolatrie doit être extirpée, mais les peuples du Livre, c'est-à-dire de la Bible, qui connaissent et adorent le Dieu seul et unique, ont droit, moyennant paiement de la capitation, à la protection de leurs biens et de leurs personnes. En vertu de ce principe, les colonies des Mozarabes, c'est-à-dire des chrétiens vivant dans l'Espagne musulmane, pu

(1) The Moriscos of Spain, their conversion and expulsion, by HENRY CHARLES LEA, 1 vol. Philadelphie et Londres 1901. Los Moriscos Españoles y su Expulsion. Estudio historico-critico, aprobado por la autoridad eclesiastica (2 vol. 4to Valence 1901), par DON PASCUAL BORONAT. Ces deux ouvrages se recommandent par des mérites différents. L'auteur américain écrit avec clarté et méthode; il est acquis aux idées modernes. Bien qu'il avoue les fautes commises, M. Boronat est avant tout prêtre catholique et ardent patriote espagnol; il publie une foule de documents intéressants, s'appliquant en particulier aux Morisques du royaume de Valence.

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rent pratiquer le culte catholique et conservèrent leurs lois et jusqu'aux juges chargés de les appliquer.

Vers le milieu du XIIe siècle, la reconquête chrétienne, partie au huitième des montagnes du Nord, avait arraché aux Maures toute la péninsule, sauf le royaume de Grenade. Soit largeur d'idées, soit plutôt crainte de représailles, les princes chrétiens victorieux usèrent de tolérance et des capitulations en règle assurèrent aux Mudejars ou musulmans vivant en pays chrétien le respect de leur religion, de leur statut personnel et de leurs biens. Les mêmes garanties furent accordées aux Maures de Grenade quand, en 1491, les Rois catholiques s'emparèrent de la dernière citadelle de l'Islam; les vaincus obtinrent en substance les mêmes conditions que celles que M. de Bourmont devait, en 1830, accorder aux habitants d'Alger.

Dans les premiers temps, Ferdinand et Isabelle restèrent fidèles à leurs engagements; le premier évêque de Grenade, le pieux et doux Talavera, confesseur de la reine, s'y fit bientôt aimer, même de son troupeau mécréant. Tout se gâta à l'arrivée de Ximenez, archevêque de Tolède et primat d'Espagne.

En droit, l'Inquisition ne possédait aucune juridiction sur quiconque n'avait pas été baptisé ; par contre, les apostats étaient justiciables de son tribunal. S'étant fait investir de pouvoirs spéciaux par l'Inquisiteur général Deza, Ximenez commença par inquiéter les Elches ou renégats grenadins qui, se croyant couverts par la capitulation, résistèrent aux soldats qui venaient les emprisonner. Des troubles éclatèrent agissant en futur Inquisiteur bien plus qu'en homme d'Etat, Ximenez déclara que par leur rébellion, les Maures avaient rompu le traité qui les protégeait; des troupes furent envoyées à leur poursuite dans les montagnes et plusieurs milliers d'entre eux furent massacrés, vendus comme esclaves ou réduits à opter entre la mort et l'abjuration sur l'heure. Il est vrai qu'un décret royal vint assurer aux Cristianos Nuevos tous les droits dont jouissaient les chrétiens d'ancienne date, mais cette assimilation même leur interdisait l'émigration et les faisait tomber sous la juridiction de l'Inquisition. Du reste, l'hostilité entre les deux races et les deux religions était telle au XVe siècle que la population avait plus d'une fois envahi les Morerias, où les Maures étaient parqués comme les Juifs dans les Juiveries, afin de les saccager et de massacrer leurs habitants. Malgré les capitulations, les lois ne traitaient pas non plus sur le même pied les chrétiens et les mahométans. Dans le royaume de Valence, par exemple, le témoignage

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