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Qu'ils fournirent encore des fonds à la Dubarry postérieurement à la loi contre les émigrés, et qu'ils la rangeait dans cette classe, puisque, par leur lettre du mois de novembre mil sept cent quatre vingt douze, ils lui conseillèrent de rentrer en France, parceque, est-il dit dans cette lettre, les décrets de la Convention nationale sont fulminans contre les sujets absents qu'on qualifie tous d'émigrés;

Que ce qui prouve encore d'une manière irrésistible que les Vandenyver ont toujours été les ennemis de la France, à laquelle ils ne tenaient que par intérêt, c'est qu'ils étoient complices du complot abominable qui exista en 1782, entre le dernier de nos tyrans et celui d'Espagne, pour opérer une banqueroute chez les deux nations et engloutir la fortune publique, que par suitte de cet agiotage infernal Vandenyver, Pierre La Laune, Girardot, Haller, Le Coulteux et Antoine Pacot, mort en 1786, sont devenus propriétaires d'un mandat. au porteur ou cédule d'un million de piastres fortes tiré par le roi d'Espagne sur son trésor de la Havanne (dans lequel il n'y avoit pas un sol) laditte cédule à l'ordre des banquiers Cabarrus et Laloune, négotians à Madrid, le sept décembre 1782, et que par un revirement de finance, que l'on peut qualifier de brigandage effréné, dans lequel ils firent un profit connu d'eux seuls, on voit l'exécrable Calonne devenir à son tour propriétaire de cette inscription fantastique, qu'il noya dans l'emprunt des rentes viagères créées en 1783;

Qu'enfin, pour combler tant de forfaits ténébreux, les Vandenyver père et fils sont prévenus de s'être trouvés au nombre des chevaliers du poignard, dans la journée du 10 aout, et d'avoir tiré sur le peuple.

D'après l'exposé ci-dessus, l'accusateur public a dressé le présent acte d'accusation contre Jeanne Vaubernier, femme Dubarry, Jean Baptiste Vandenyver, Edme Jean Baptiste Vandenyver, et Antoine Augustin Vandenyver,

pour avoir méchamment et à dessein, savoir, Jeanne Vaubernier femme Dubarry, conspiré contre la République française et favorisé le succès des armes de ses ennemis sur son territoire, en leur procurant des sommes exhorbitantes dans les différents voyages qu'elle a faits en Angleterre, où elle a émigré elle-même et dont elle n'est de retour que depuis le mois de mars dernier; avoir entretenu des correspondances et des liaisons intimes avec les émigrés et autres ennemis de la liberté et de l'Egalité; avoir porté, à Londre, le deuil du tiran et y avoir vécu familièrement avec le parti ministériel, et particulièrement avec Pitt, dont elle a rapportée et conservé précieusement l'effigie empreinte sur une médaille d'argent; avoir completté une collection d'ouvrages et estampes contre-révolutionnaires; avoir fait enterrer les lettres de noblesse d'un émigré, ainsi que les bustes de la cidevant cour; et enfin, avoir dilapidé les trésors de l'Etat par ses dépenses effrénées.

Et Jean Baptiste Vandenyver, Edme Jean Baptiste Vandenyver et Antoine Augustin Vandenyver père et fils, pour avoir également méchamment et à dessein conspiré contre la République française et favorisé les armes des ennemis sur son territoire en leur fournissant des sommes prodigieuses par le ministère de la Dubarry, lors des voyages de cette dernière en Angletterre; avoir aussi favorisé les projets des ennemis de l'intérieur, en donnant deux cents mille livres à Rohan-Chabot, et deux cents autres mille livres à La Rochefoucault, cidevant évêque de Rouen; avoir été les instrumens et complice d'un plan de banqueroute générale, qui aurait perpétué l'esclavage des Français et sauvé la tête du tyran; et avoir enfin coopéré au massacre du peuple, dans la journée mémorable du 10 août, étant au nombre des chevaliers du poignard, dans le cidevant chateau des Thuilleries.

En conséquence, l'accusateur public requiert qu'il lui soit donné acte par le tribunal assemblé de l'accusation

qu'il porte contre Jeanne Vaubernier, femme Dubarry, actuellement détenue dans la maison d'arrêt dite SaintePélagie, et contre Jean Baptiste Vandenyver, Edme Jean Baptiste Vandenyver, et Antoine Augustin Vandenyver actuellement détenus dans la maison d'arrêt dite la Force; qu'il soit dit et ordonné qu'à sa diligence, et par un huissier du tribunal porteur de l'ordonnance à intervenir, la ditte Vaubernier, femme Dubarry, et les Vandenyver, père, et ses deux fils, seront retirés, sous bonne et sûr (sic) garde, des maison d'arrêt de Sainte-Pélagie et de la Force, pour être transférés dans la maison d'arrêt, dite la Conciergerie, sur les registres de laqu'elle ils seront écroués, pour y rester comme en maison de justice; comme aussi que l'ordonnance à intervenir sera notiffiée à la municipalité.

Fait au cabinet de l'accusateur public le treizième jour de frimaire, l'an deuxième de la République française une et indivisible.

A. Q. FOUQUIER.

(Musée des Archives nationales.)

X

PROCÈS DES HÉBERTISTES

Au moment où la Commune anarchique et autonome, ayant à sa tête et comme principaux moteurs insurrectionnels Pache, Chaumette et Hébert, devenait un danger pour les Comités, elle fut frappée d'un coup si brusque que rien ne la put sauver. Renvoyée devant le Tribunal révolutionnaire, elle se vit accusée de complicité avec l'étranger, ce qui était pour le moins exagéré. Sa révolte contre le gouvernement jacobin suffisait, a-t-on dit. « Si ses projets avaient réussi, nous aurions eu une nouvelle Saint-Barthélemy! L'on se serait égorgé les uns les autres sans savoir pourquoi . » Cela, c'est un propos qu'un policier note, parmi les groupes, sur la route des charrettes, le 4 germinal. Et ce propos, c'est presque le jugement de l'Histoire sur les hébertistes et leur politique.

Antoine-Quentin Fouquier, Accusateur public du Tribunal révolutionnaire, etc.

Expose que par décret de la Convention du seize ventôse, l'accusateur public est chargé d'informer sans délai contre les auteurs et distributeurs de pamphlets, manus

1. Rapport de l'inspecteur de police Pourvoyeur, 5 germinal. Archives nationales, série W, carton 174, pièce 65.

crits, répandus dans les halles et marchés, et qui sont attentatoires à la liberté du peuple françois et à la représentation nationale, et de rechercher en même temps les auteurs et agents des conjurations formées contre la sureté du peuple, et les auteurs de la méfiance inspirée à ceux qui apportent des denrées et des subsistances à Paris, qu'en exécution de ce décret, il a été procédé à des informations et auditions de témoins qu'en cɔnséquence du résultat de ces dépositions et des pièces remises, l'accusateur public a décerné mandats d'arrest et traduit au tribunal révolutionnaire

1° Charles Philippe Ronzin, âgé de quarante-deux ans, né à Soissons, département de l'Aisne, demeurant à Paris, boulevard Montmartre, commandant de l'armée révolutionnaire.

2o Jacques René Hébert, âgé de trente-cinq ans, natif d'Alençon, département de l'Orne, agent national près la commune de Paris.

3 François Nicolas Vincent, âgé de vingt-sept ans, secrétaire général du département de la guerre, natif de Paris, y demeurant, rue des citoyennes, section de Mutius Scevola.

4° Antoine François Momoro, âgé de trente-huit ans, né à Besançon, département du Doubs, demeurant à Paris, rue de la Harpe, n° 171, imprimeur libraire et administrateur du département de Paris.

5° Frédéric Pierre Ducroquet, âgé de trente et un ans, né à Amiens, cydevant perruquier coeffeur et commissaire aux accapare mens de la section de Marat, rue du Paon, n° 2.

6o Jean Conrard Kock, àgé de trente-huit ans, né à Husden, en Hollande, banquier, demeurant à Passy.

7 Michel Laumur, àgé de soixante-trois ans, né à Paris, cydevant colonel d'infanterie, maintenant gouverneur de Pondichéri, demeurant rue Croix des PetitsChamps.

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