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<< rope aient tardé à frapper de mort la féodalité << et l'aristocratie, en reconnaissant la libre ac<< ceptation de l'acte constitutionnel par le chef « de la maison de Bourbon! Faut-il s'étonner

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qu'elles aient tacitement résisté à reconnaître << pour alliance conclue avec le peuple français «< celle qui fut conclue avec le roi! Il faut vain«< cre, il faut dissoudre ces obstacles ou périr glo<< rieusement; mais soyons de bonne foi: c'é<<< tait le moindre succès qu'on pût présumer << des intrigues de tout genre dont les Français émigrés ont assiégé tous les cabinets de l'Eu

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«< rope..

« Je conclus donc, par les considérations que j'ai fait valoir, que, religieux observateurs des << articles constitutionnels qui réservent au roi le « droit d'arrêter et de signer, avec toutes les puis« sances, tous les traités de paix, d'alliance et de «< commerce, et autres conventions qu'il jugera né«< cessaires au bien de l'État, sauf la ratification « du corps législatif, nous ne devons délibérer « sur ces objets que lorsqu'ils seront proposés << par le roi, pour accorder ou refuser cette ratifi

<<< cation. >>

Vergniaud, qui me succéda à la tribune, exposa d'abord, avec une éloquence emphatique, les causes de l'agitation des esprits, et les imputant aux manœuvres des émigrés, « La clémence

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<«< nationale, disait-il, par une amnistie imprudente, par une caligineuse diplomatie, par des principes contre-révolutionnaires, laissa grossir « au dehors un orage qui enfin a menacé d'em<< braser notre horizon. » Reproduisant l'argumentation de Brissot, et mettant comme lui les suppositions à la place des faits, l'orateur établit que l'empereur Léopold était en état d'hostilité flagrante contre la France. « La guerre traîne sans « doute après elle de grandes calamités; elle peut «< même conduire à des défaites désastreuses; << mais enfin, pour un peuple qui ne veut pas de <«< l'existence sans la liberté, elle peut aussi con«< duire à la victoire, et par elle lui assurer une «< paix solide et durable. Au contraire, l'état dans lequel vous êtes maintenant, celui dans lequel << on voudrait vous faire rester, est un véritable « état de destruction, qui ne peut vous conduire qu'à l'opprobre et à la mort. Aux armes donc, << aux armes! c'est le salut de la patrie et de «< l'honneur qui le commande; aux armes donc, << aux armes! ou bien, victimes d'une indolente « sécurité, d'une confiance déplorable, vous re<< tomberez insensiblement et par lassitude sous « le joug de vos tyrans; vous périrez sans gloire; «< vous ensevelirez avec votre liberté l'espoir de « la liberté du monde. >>

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Répondant ensuite à mes observations sur les

obligations réciproques du traité de 1756, et les avantages qu'on en pouvait tirer dans la négociation, Vergniaud les rejeta comme dilatoires et pusillanimes, et considéra le traité comme rompu par l'empereur. Il se réunit à l'opinion de Brissot, contre l'avis du comité, et déciara que les intentions de Léopold s'étant manifestées par des faits, ce n'était pas une explication sur ses intentions qu'il fallait demander, mais une satisfaction sur les faits. Il proposait que l'on requît l'empereur, non-seulement de disperser les rassemblements d'émigrés qui pourraient avoir lieu dans ses États, mais encore d'expulser de son territoire ceux des émigrés qui étaient sous la main vengeresse de la loi, et que l'on exigeât une explication de Léopold sur son adhésion au conclusum de la diète de Ratisbonne. Après avoir tracé ce cercle de Popilius, citant l'exemple de Rome, qui déclara qu'elle traiterait en ennemis tous les rois qui donneraient retraite à Annibal, et rappelé la fameuse philippique de Démosthène, Vergniaud terminait ainsi la sienne :

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« Et moi aussi, s'il était possible que vous vous « livrassiez à une dangereuse sécurité, parce qu'on vous annonce que les émigrés s'éloignent << de l'électorat de Trèves, si vous vous laissiez << séduire par des nouvelles insidieuses ou des « faits qui ne prouvent rien, ou des promesses

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insignifiantes, je vous dirais : Vous apprend-on qu'il se rassemble des émigrés à Worms et à Coblentz, vous envoyez une armée sur les <«< bords du Rhin; vous dit-on qu'ils se rassemblent dans les Pays-Bas, vous envoyez une «< armée en Flandre; vous dit-on qu'ils s'enfon«< cent dans le sein de l'Allemagne, vous posez << les armes.

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<< Publie-t-on des lettres, des offices dans lesquels << on vous insulte, alors votre indignation s'excite, « et vous voulez combattre. Vous adoucit-on par << des paroles flatteuses, vous flatte-t-on de fausses espérances, alors vous songez à la paix. Ainsi, << Messieurs, ce sont les émigrés et Léopold qui sont << vos chefs; ce sont eux qui disposent de vos ar«< mées; ce sonteux qui en règlent les mouvements; « ce sont eux qui disposent de vos citoyens, de vos «< trésors; ils sont les arbitres de votre destinée. » Ramond, membre du comité diplomatique, l'un des plus sincères amis et des plus éloquents défenseurs de la liberté constitutionnelle, obtint la parole après Vergniaud. Pour opposer une digue au torrent des déclamations de ceux qui voulaient péremptoirement établir l'état de guerre, Ramond prit la question de plus haut. « Il est évident, dit-il, que les peuples ne se con<«< naissent et ne peuvent se connaître dans leurs <<< transactions politiques, autrement que par

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l'action de leurs gouvernements respectifs. << Tant que le gouvernement français est demeuré << dans un état douteux, tant que la présentation << de la constitution au roi, tant que l'acceptation << faite par le roi de la royauté constitutionnelle << n'ont point fixé pour les nations voisines l'exis<< tence de notre gouvernement, alors, pour elles « et pour leurs gouvernements, il n'y a pas eu de << rebelles à une constitution que nous ne les << sommions point encore de reconnaître. Il est « donc très-important de discerner l'instant de l'acceptation et de la notification de cette cons<< titution. Il faut soigneusement distinguer l'épo« que qui précède et celle qui suit ces actes importants; et il importe de ne point confondre, « dans la conduite de l'empereur et de ses alliés, << ce qui les a précédés et ce qui les a suivis. Or, << que voyons-nous dans les actions postérieures? « Nous y voyons que notre gouvernement est << absolument reconnu par Léopold, mais nous «< y voyons également que la souveraineté du peuple français y est totalement méconnue. Il . «< faut donc légitimer, à l'égard des puissances << voisines, non pas notre gouvernement qui est légitimé, mais notre souveraineté qui n'y est point reconnue. » L'orateur ne pensait pas que les explications que le comité proposait d'exiger de Léopold sur la circulaire de Padoue et

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