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Sire, nous avons rempli un de nos premiers devoirs, en ayant l'honneur de mettre sous les yeux de votre Majesté quelques moyens de rendre à l'universalité des cloîtres une population nombreuse ́et florissante. La main auguste des rois vos prédécesseurs a élevé une partie de ces glorieux établissements; tous présentent des vestiges honorables de leur protection bienfaisante. Une opération plus éclatante encore est réservée à l'heureuse époque de votre règne. Il s'agit de raffermir sur ses premiers fondements l'édifice entier de l'institut religieux, et, plus durables mille fois que le marbre et l'airain, les annales de l'Église transmettront, jusque dans la postérité la plus reculée, le souvenir immortel de votre nom, également cher à la religion et à la patrie.

Signé D. cardinal DE LA ROCHEFOUCAULD, président.
L'abbé DE LA ROCHEFOUCAULD, ancien agent, secrétaire.

N° X.

ADRESSE A L'ASSEMBLÉE NATIONALE DE LA PART DE L'ABBESSE ET DES RELIGIEUSES BÉNÉDICTINES DE L'ABBAYE ROYALE DE SAINT-CYR.

NOSSEIGNEURS,

Les alarmes qui se répandent journellement dans tous les cloîtres nous autorisent à réclamer la protection de votre auguste assemblée pour la conservation de notre maison. Nous nous devons à nous-mêmes, à l'édification publique et à vous, nosseigneurs, de manisfester notre situation et nos véritables sentitiments. Nous ne saurions vous rendre la consternation et la douleur profonde dont nos cœurs ont été pénétrés à la seule idée de nous voir privées d'un état qui nous est plus cher que la vie.

Notre communauté est composée de trente-cinq religieuses; il n'en est pas une qui ne se félicite tous les jours de son bonheur, et qui ne préfère la sainteté de l'asile que la religion lui a a ouvert à tous les avantages qu'on pourrait lui offrir dans le monde.

L'antiquité de notre établissement semble nous donner des

droits plus marqués à notre conservation. Notre maison, fondée en 600, après avoir éprouvé bien des pertes, a été rétablie par Louis VII. La protection de tous nos rois s'est perpétuée successivement. Serait-il possible, nosseigneurs, qu'après avoir été soutenues et conservées pendant plusieurs siècles, nous cessions de l'être sous une auguste assemblée, dont les opérations n'ont d'autre fin que de procurer le bonheur et la liberté? L'état religieux serait-il donc la seule portion de citoyens qui ne soit pas entrée dans des vues aussi justes que bienfaisantes ?

Nous nous rendons utiles à la société par l'éducation de la jeunesse, par les ressources que trouvent parmi nous les personnes que des motifs respectables engagent à s'y retirer; par l'admission gratuite des jeunes personnes sans fortune, sans distinction de rang et d'état, et sans d'autre titre que celui des vertus et d'une vocation éprouvée; enfin par le travail que nous procurons, et les aumônes que nous répandons en faveur des pauvres de la paroisse.

Nous vous exposons, nosseigneurs, avec simplicité, nos titres, nos sentiments, nos espérances, et nous osons dire nos droits, pour la conservation d'un état et d'une maison dont la privation ferait notre martyre. Nous nous reposons entièrement sur votre humanité et votre justice.

Suivaient les signatures.

(Extrait du Journal histor. et littér., 1790, p. 386 et suiv.)

N• XI.

ADRESSE DES RELIGIEUX DE LA TRAPPE, AU ROI.

SIRE,

Notre réforme depuis son origine a toujours été honorée de la protection des monarques, vos prédécesseurs; vous nous avez donné un témoignage éclatant de la vôtre par le don précieux de votre portrait; madame la Dauphine, votre auguste mère, a donné à cette maison des preuves de sa confiance dans ses prières, en y fondant à perpétuité un anniversaire et une messe quotidienne pour le repos de monseigneur le Dauphin,

et nous nous flattions dans cette heureuse position d'une existence solide et perpétuelle dans un état et dans une règle que nous chérissons, et dans laquelle nous désirons vivre et mourir.

Elle nous prescrit le travail des mains, et nous désirerions conserver nos biens qui nous sont nécessaires pour l'entretenir, et pour subvenir, suivant notre institut, au soulagement des pauvres; des pensions, en nous éloignant du travail, ne peuvent qu'introduire le relâchement et le désordre; nous serions plus à charge à l'État ; les pauvres seraient moins secourus; la frugalité de notre vie, nos sueurs et nos travaux suppléent à la modicité de nos revenus, et nous mettent à portée de les verser dans le sein des pauvres, d'exercer l'hospitalité envers les étrangers, et de faire subsister un grand nombre d'ouvriers, que l'ingratitude de notre sol ne pourrait faire vivre.

Des pensions ne nous fourniront pas toutes les ressources multipliées que nous offrent nos fruits, nos denrées, nos grains et nos bois. Nous avons été assez heureux pour pouvoir offrir dans la disette affreuse de l'année dernière plus de deux cent cinquante boisseaux de blé aux villes voisines, et si nos biens nous sont enlevés, nous ne pouvons qu'envisager, comme très prochaine, la destruction de notre maison.

Daignez, Sire, jeter les yeux de votre clémence sur nous; notre vie austère et frugale est un sûr garant de la pureté des vues qui dirigent le désir de conserver nos revenus. Nous attendons de votre amour pour la religion et de votre piété cette nouvelle marque de bienveillance. La reconnaissance d'un bienfait si précieux pour les pauvres et pour nous nous fera redoubler nos vœux et nos prières pour le bonheur et la tranquillité de vos peuples, si chers à votre cœur, pour la conservation des jours de Votre Majesté, et de toute votre auguste famille.

ADRESSE DES MÊMES RELIGIEUX A L'ASSEMBLÉE NATIONALE.

NOSSEIGNEURS,

Les solitaires de la Trappe ne rompent le silence auquel ils sont voués que pour donner à votre auguste assemblée des témoignages de leur profond respect, et lui adresser leurs représentations sur le maintien de leur monastère et de leurs biens.

Leur vie active, frugale et austère est assez connue pour que l'on ne prête pas à cette démarche des vues mondaines et

méprisables; elles sont dictées par leur amour pour la religion et la charité chrétienne; ils réclament pour eux et pour ceux qui, comme eux, voudront se consacrer à Dieu et au service de l'humanité souffrante, la liberté de s'y dévouer et de vivre dans un état qui leur est cher. Ah! quel usage plus agréable à l'Être suprême et plus glorieux à la société l'homme peut-il faire de cette liberté que l'assemblée vient de consacrer! et peut-on reprocher aux solitaires de la Trappe d'en avoir abusé ?

Depuis la réforme de M. de Rancé, c'est à dire depuis plus de cent années, sévèrement attachés à l'austérité de leur règle sainte, ils ont subsisté du travail de leurs mains, et versé dans le sein des pauvres une grande partie de leurs revenus ; ils les ont strictement, suivant leur institut, employés à les nourrir, vêtir et se couvrir tant sains que malades, à donner enfin l'hospitalité à plus de cinq à six mille étrangers qui viennent annuellement s'édifier et se reposer à leur monastère; hospitalité dont la règle seule de S. Benoît et l'humanité on fait jusqu'ici une loi à la Trappe. C'est par le travail et par la culture d'une terre stérile, arrosée de leurs sueurs, qu'ils trouvent les moyens de subvenir à ces œuvres saintes.

Qu'on les prive de leurs biens, on leur enlève à la fois les moyens de se livrer à ce travail essentiel au maintien de leur règle; on les prive du bonheur d'en verser les fruits dans le sein des malheureux, de celui d'entretenir un grand nombre d'ouvriers que le sol ingrat du pays ne pourrait alimenter; enfin de celui de donner à Dieu et à la société des témoignages de leur amour pour leurs frères.

En les maintenant dans leur solitude et en leur conservant leurs biens, l'assemblée ne fera que confirmer les décrets qu'elle a portés sur les établissements de charité et d'hospice; leur maison porte ce caractère; il est tracé par leur règle.

Oh! si jamais ils s'en écartaient, alors ils n'auraient pas à se plaindre d'être enveloppés dans la peine dont on punirait les infracteurs; mais tant qu'ils y seront fidèles, la nation est intéressée à les protéger.

Les pensionner c'est les détruire: alors plus de travail, plus de règle; le relâchement s'introduira, le désordre suivra, les ressources de leur travail, de leurs denrées, de leurs productions seront perdues pour les malheureux.

Quel bénéfice d'ailleurs la nation y ferait-elle ? trente-cinq mille livres de rente environ forment leur revenu; il perdrait

beaucoup de sa valeur en passant par des mains moins actives, moins laborieuses; son capital serait beaucoup plus qu'absorbé par les pensions de près de cent religieux, et la nation se trouverait surchargée d'un nombre immense de pauvres qui continueront d'être secouruş si cette maison et ses biens-fonds sont conservés.

Ces vues de bienfaisance sont dignes de la nation chrétienne et généreuse que vous représentez; daignez les prendre en considération puissent nos prières être agréables au Seigneur ! Nous ne cesserons d'élever nos mains au ciel pour qu'il répande sur elle et sur vous, nosseigneurs, ses bénédictions.

N° XII.

BREF DE PIE VI AU CARDINAL DE LA ROCHEFOUCAULD.

Dilecto filio nostro, Dominico S. R. E. presbytero cardinali Rupefucaldio, archiepiscopo Rothomagensi.

PIUS PAPA VI.

Dilecte fili noster, salutem et apostolicam benedictionem. Etsi maximo quotidie dolore afflictemur ob vestras vestræque nationis res quæ ad nos continuo per nuncios afferuntur, tamen tuis perlectis litteris, dilecte fili noster, die nona hujus mensis ad nos datis, majorem adhuc in modum angetur paterni nostri animi ægritudo, ac tantis tamque repetitis ecclesiæ gallicanæ detrimentis a te commemoratis, una tecum ingemiscimus et pene obruimur tua hac ipsa luctuosissima deploratione. Vestrum enim mororem non ita percipimus tanquam a nobis alienum, sed nostrum reputamus, propriaque hujus S. Sedis esse vulnera quæ in vos infliguntur. Quale igitur in tantis malis, quod a nobis postulas, solamen afferre vobis possumus, cum eodem nos ipsi non minus indigeamus? Sed quod in humanis rebus remedium non reperimus, non ideo tamen despondere debemus animum, sed spes nostras omnes in eum projicere, qui pacis et consolationis Deus est, atque idcirco conjungere obsecrationes ad ipsum nostras, quo efficaciores sint ad tantas avertendas calamitates; quas certe preces non intermisimus, ex quo primum labores et

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