de la verité & ses droites intentions di&ent à son cæur Royal, par raport aux soupçons que Sa Majesté Britannique témoigne sur la conduite de cette Cour. En premier lieu on allegue que l'on a falt des armemens de Mer & des équipemens dans les Ports d'Espagne, lorsqu'il est certain & notoire à tout le monde, que l'on n'en a point fait d'extraordinaires, ni d'assez confiderables, pour causer la moindre aprehension à l'Angleterre: Quoique les nombreuses Escadres, que l'on équipoit avec tant d'ardeur, d'aplication & de diligence, & que l'on faisoit sortir des Ports d'Angleterre , donnassent lieu & fussent des raisons suffisantes à Sa Majesté, pour faire les mêmes preparatifs & les mêmes difpofitions, sur tout lorsque, suivant les bruits qui s'en repandirent en même tems par toute l'Eurape, ces preparatifs menaçoient les Etats & les interêts de Sa Majesté, tant en Europe qu'aux Indes ; & lorsque ces bruits furent fortifier & confirmez par la route que prirent lesdites deux Escadres qui parurent devant les Ports des Indes Occidentales, & devant ceur de ce Royaume. On doit dire la même chose à l'égard des mouvemens d'un nombre considerable de Troupes vers les Côtes les plus voisines de la Grande Bretagne ; avec cette difference pourtant, que la plainte du Roi mon Maitre sur ce sujet est anterieure & folidement fondée, puisque c'est l'arrivée de l'Escadre Angloisé à la vuë de St. Andero , qui troubla enfin la tranquillité & la bonne foi dans laquelle nous vivions, comme il paroit manifestement par le peu de préparatifs qu'on avoit faits de ces côtez côtez-là, où l'on n'entretenoit que les Garnisons qui y étoient absolument nécessaires, & que l'on ne peut diminuer en tems de Paix, vû les exeroples précedens, pour garantir de furprise & de danger les chantiers faits dans les lieux voisins pour la construction des Vaisseaux. Pour ce qui regarde l'encouragement qu'on prétend avoir donné au Prétendrnt , il n'est pas possible d'accufer Sa Majesté, avec verité, d'avoir fait aucune démarche en fa faveur, ni écouté aucune proposition de la part , encore moins de lui avoir donné affittance, pour apoyer les desseins & ses prétensions à cette Couronne. Au contraire la conduite que l'on a observée à l'égard de ces mêmes Emislaires, dont il est parlé confulement dans le Memois re de Votre Excellence, est réeilement un témoignage le plus authentique de la bonne foi de Sa Majelté , & de son amitié religieuse envers Sa Majesté Britannique ; mais Sa Majesté ne sauroit répondre, ni se charger des bruits que les Adherens du Prétendant ont repandus sur ce sujet , pour s'encourager les uns les autres. On ne peut pas comprendre non plus, sur quoi font fondez les soupçons que l'on conçoit de mauvais desseins, ni comment on peut attribuer à des intelligences fufpectes l'admit fion dans les Ports d'Espagne, de trois Vaisseaux Marchands de Moscovie , qui, suivant la couture observée enyers toutes les Nations, ont eu entrée dans le Port de Cadix, & de là sont aller à St. Andero pour y trafiquer. Ainsi, il faut avoir en verité un grand pen penchant au foupçon & à la méfiance, pour ! en concevoir d'un procedé si innocent. A l'égard de la faufle confidence que le Duc de Ripperda fit l'Hiver passé à Votre Excellence, comme fi l'un avoit conclu une Alliance offensive, par laquelle l'Empereur fe seroit expressement engagé à recouvrer Gibraltar ; Sa Majesté Imperiale a déja luffi samment tâché de détromper Sa Majesté Britannique à cette occasion : Le dessein en tout cela n'a ét é que de faire ressouvenir Sa Majesté Britannique des promesses qu’Ệlle avoit faites sur c:e sujet, & auxquelles ni Sa Majesté, ni la Nation Espagnole ne peuveut ja- ! mais renoncer. It eft no toire que Sa Majesté Britannique a dépensé & employé depuis peu des sommes considerables en France, en Prufe, en Suede, en Hollanale & ailleurs, pour mieux parvenir à ses fins & accomplir les negociations. Cependant le Roi Catholique mon Maitre n'a jamais eri jusqu'à prefent la curiosité de s'informer des motifs de ces dépenses; & ce qui est d'auta nt plus étrange, c'est que Sa Majef- die té Britannique s'avise de demander les raisons que Sa Majesté a eues pour envoyer, ou non, des subfides à l'Empereur. La plainte qui a pour sujet la conduite des Gardes-Côtes, & qui interprète leurs procedez corrime des infractions du Commerce & des Traitez, eft à tous égards la plus injufte qu'on puisse faire ; parceque ces Vaisseaux n'ont rien fait autre chose que de s'acquiter de leur devoir , en empêchant seulement , autant qu'il étoit possible , le Commerce illicite & clan clandeftin de toutes les Nations aux Indes Occidentales , qui leur est fi folemnellement défendu en vertu de plusieurs Traitez réiterez, dont les Articles ont été enfreints jusqu'à present, au préjudice de Sa Majesté & de fes Droits, dont on a entrepris de la frustrer avec tant d'infolence dans ses propres Etats : & il ne paroit pas que du côté de Sa Majesté Britannique on ait employé le moindre remède contre la conduite de ses Sujets, & de ceux des autres Puillances dans ces Quartiers-là. Votre Excellence conclut en déclarant une nouvelle surprise de Sa Majesté Britannique, de ce que l'on n'a encore donné aucune fatisfaction sur l'enlevement du Duc de Ripper da de la Maison de Votre Excellence : mais comme la resolution que le Roi mon Maitre prit à cette occasion n'étoit pas moins bien pesée, que capable d'être pleinement juftifiée devant Dieu & devant les Hommes ; qu'elle eft fi conforme au Droit des Geus, que l'on n'en peut pas conclure qu'on ait aucunement violé le caractère de Votre Excellence, ni la prote&tion de la Maison diftinguée par les Armes de la Grande Grande Bretagne. Si l'on considere bien les raisons que Şa Majesté a cu la bonté d'exposer au Public dans la Lettre Circulaire qu'elle m'ordonna d'écrire à tous ses Ministres dans les Cours étrangeres : & particulierement à celle de Londres, afin que Şa Majesté Britannique pût être informée du fait, aufli-bien qu'à ceux des autres Puissances qui refidoient en cette Cour; Sa Majefté ne voit acucune raison qui l'oblige à parler de cette affaire , ni à y penser davantage., puisqu'il n'y a ni moyens, ni aucune necefli té 1 té d'entrer dans l'accommodement qu'on demande sur ce sujet. Pour mieux justifier par des effets la con duite de Sa Majesté, & afin que par ces effets on puisle former un jugeinent équitable des intentions de Sa Majesté Britannique, & de l'expedition de ses Escadres, le Roi m'a ordonné d'envoyer à Votre Excellence les Copies ci-jointes d'avis authentiques qu'Elle a reçus de la Havane , depuis que Votre Excellence a presenté fon Memoire; par où l'on verra li les cperations de l'Amiral Hofer & de fon Escadre à Porto-bello, font dignes d'un Prince qui donne de fi grandes assurances de l'existence de son amitié, comme fait Sa Majesté Britannique, qui fé plaint fi fort d'infra&tions de la part du Roi, sans être en état de prouver la moindre hostilité, le moindre mépris ou aucune action qui ne soit conforme à la plus parfaite correspondance. Dans la suposition de ce fait, que Sa Majesté ne peut s'empêcher de regarder comme une violation de la bonne correlpondance reciproque, & de la Paix, tant les hoftilitez qui ont déja été commises en Amerique, que celles que l'on y aura continuées depuis; Sa Majesté se verra obligée de prendre les mesures les plus convenables à l'honneur & à la Dignité de fa Couronne, auffi-bien qu'à la fureté de ses Etats & de ses Sujets, à moins que Sa Majesté Britannique , sans aucun délai, ne fe difpofe & n'ordonne de lui faire une prompte satisfaction & reparation. DON JEAN BAPTISTE DE ORANDAYN. . A St. Ildefonso le 30. Septembre 1726. |