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fonderent de beaux établiffemens. La reconnoiffance en fit de fideles alliés des Romains qui s'en fervirent utilement pour réprimer l'indocilité naturelle des peuples d'Albion. C'eft auffi à cette époque qu'on peut fixer l'arrivée des Germains-Saxons dans le Beffin, puifque dès le cinquieme fiecle, avant l'invafion des Francs, le pays s'appelloit Littus Saxonicum.

GEX, (Pays de) Contrée du gouvernement de Bourgogne.

LE pays de Gex eft borné au nord par le pays de Vaux & les Suiffes;

au fud par le Rhône & la Savoie, à l'eft par le lac de Geneve, & à l'oueft par le Mont-Jura ou de Saint-Claude, & par la Franche-Comté. Il a 6 lieues de longueur prifes depuis le Fort-l'Eclufe jufqu'au village de Croffay; & 3 lieues & demie de largeur, depuis Gex jufqu'à Geneve. Le climat y eft fain & tempéré, & le Mont-Jura ou Grand-Credo, qui en occupe une partie, & qui paroît fi peu fertile, abonde, à fon fommet, en pâturages excellens où l'on nourrit une prodigieufe quantité de vaches. Les bergers qui habitent cette montagne en très-grand nombre, en defcendent tous les ans le rome de Mai. On leur confie jufqu'à 2000 vaches qu'ils menent pâturer dans le haut; & le rome Octobre fuivant ils les ramenent & les rendent aux propriétaires refpe&tifs, en fe faifant payer 10 livres pour l'engrais & les foins donnés à chaque vache, outre 10 autres livres qu'ils payent aux propriétaires de la montagne, & qu'on leur rend. Ces pâtres ou bergers ont à leur profit tout ce que les vaches rendent de lait pendant qu'elles paiffent fous leur direction. Dans le plat-pays on recueille du vin & du bled; mais la derniere de ces denrées eft fi peu abondante, que le peuple eft obligé de fe nourrir de chataignes, 4 mois de l'année. Le commerce de ce district eft peu confidérable: il fe fait principalement avec Geneve, & confifte en fromages & en beurre ; il s'y débite auffi quelque peu de vin & de charbon. Indépendamment du Rhône qui côtoye le pays dans toute fa longueur, fans cependant y être navigable nulle part, tant à caufe des rochers qui embarraffent fon lit, que parce qu'il fe perd fous terre, au-deffous du Fort- l'Eclufe, & n'en fort que fort loin il y a une autre riviere nommée la Verfoye, qui arrofe ce canton & fe jete dans le lac de Geneve, & deux torrens qui fe perdent dans le Rhône.

La baronnie de Gex relevoit autrefois du comté de Geneve, d'où elle paffa à la maison de Joinville qui la pofféda jufqu'en 1353, que le comte de Savoie s'en faifit, parce que le feigneur refufoit de lui rendre hommage; & elle demeura unie à fon domaine jusqu'en 1536, que la ville de

Berne s'en empara, & ne la rendit qu'en 1567. En 1591, elle tomba au pouvoir de la ville de Geneve qui la pofféda jufqu'en 1601, temps auquel le duc de Savoie la céda à la France avec la Breffe & le Bugey, par la paix de Lyon. Ce pays appartient aujourd'hui à la maison de Condé à qui il a été engagé depuis ; & il forme un bailliage principal dépendant de l'élection de Belley & compofé de 25 paroiffes, non compris celles d'Avulles, de Chancy & de Moins, que la république de Geneve prétend être dans fa fouveraineté.

CE

GL

GLARIS, Canton Suiffe, le huitieme dans l'ordre de

la ligue.

E petit pays, qui peut avoir environ huit lieues dans fa longueur du nord au midi, préfente à fon entrée l'ouverture d'un beau vallon, aboutiffant aux rives de la Limmat, qui fort du lac de Wallenflatt, & fe jete dans le lac de Zuric. Ce vallon en s'élevant & fe rétréciffant, eft prolongé vers le midi & partagé en deux branches, qui fe terminent enfin dans les hautes Alpes, au pied des glaciers couverts d'une neige éternelle. Deux torrens, la Lint & la Sernft, parcourent & ravagent fouvent les deux vallées, fe réuniffent enfuite & fe jetent dans la Limmat. Les Alpes qui bordent le pays de Glaris à l'eft, au fud & à l'oueft, marquent en mêmetemps les confins de ce petit Etat, du côté des ligues grifes & des cantons d'Uri & de Schweiz.

Dans la partie inférieure du vallon, les arbres fruitiers réuffiffent trèsbien. Il faut compter pour fort peu de chofe les productions en orges & autres grains. La principale reffource des habitans eft dans le produit des prairies & des pâturages, ou des troupeaux. Ces pâturages dans les hautes Alpes, font d'une qualité fupérieure; les fromages de Glaris ont, par la même raison, une grande réputation. Des plantes médicinales, rares même dans les autres parties de la Suiffe & abondantes dans celle-ci, les Glaronois compofent leur the de, Suiffe, leurs choix d'herbes vulnéraires, dont ils font un objet de commerce affez étendu. Quant au Schabzieger, espece de fromage compofé d'herbes & du céré du lait, le principal ingrédient, qui donne fur-tout le parfum à cette compofition, eft le trifolium odorafum, ou maliotum odoratum violaceæ, qu'on cultive dans les jardins, & qui, par conféquent, n'eft pas une production particuliere à ce pays. Les Alpes de Glaris offrent un vafte champ, non-feulement pour la botanique, mais pour l'hiftoire-naturelle en général; une prodigieufe variété de plantes peu communes, divers métaux & minéraux, des cryftaux, des fources minérales, des pétrifications & de grandes feuilles d'ardoife qui font un objet d'exportation. Cependant la principale richeffe de ces montagnes confifte dans les excellens pâturages qu'elles fourniffent pendant quatre ou cinq mois de l'année. On eftime que dix mille pieces de gros bétail, & quatre mille moutons peuvent être nourris pendant la faifon de l'été fur les Alpes dépendantes de ce canton. A tout prendre, ces productions diverfes des Alpes ne compenfent pas les inconvéniens réfultans des circonftances phyfiques d'un pays froid & montueux; la grande étendue de ter

rein occupée par des rochers, des précipices, des forêts inacceffibles, des bruyeres stériles & des glaces perpétuelles, perdue pour la jouiffance de l'homme, pour la culture & la population; les inondations fréquentes caufées par des fontes de neiges fubites, ou par les pluies toujours plus abondantes dans les montagnes, & dont les flots font auffi-tôt raffemblés dans des vallons refferrés entre des monts d'une élévation exceffive, & le plus fouvent coupés prefque verticalement; les évalanches ou éboulemens de terres & de rochers; les variations brufques dans la température de l'air, & les grêles que le voifinage des glaciers rend plus fréquentes.

Les documens hiftoriques du pays de Glaris ne remontent pas au-delà de l'époque, où fes habitans étoient fujets de l'abbaye des religieufes de Sekinguen en Suabe, & ils le furent dans le droit le plus étendu d'une fervitude perfonnelle & réelle; un petit nombre de familles excepté, qui, jouiffant d'une condition libre, étoient regardées comme la nobleffe du pays. La juftice civile étoit adminiftrée par des juges nommés par l'abbeffe; fon chatelain y préfidoit; elle avoit fes officiers pour l'économie & la recette. Le peuple ou la communauté avoit fes affemblées, fes chefs, fa bourfe publique, & le privilege, que les emplois dépendans de la feigneurie ne pouvoient être remplis que par des citoyens du pays. Le plus fouvent dans ces temps de vaffalité le fort des fujets étoit moins dur fous le gouvernement eccléfiaftique; ils obtenoient plus aifément des

immunités.

Les offices dépendans de l'abbeffe de Sekinguen étant devenus des efpeces de fiefs, les comtes de Habfbourg & les princes d'Autriche, les empereurs Rodolphe I & Albert I, les acquirent fucceffivement, les réunirent avec la garde-noble & avec la jurifdiction criminelle, qui ne devoit relever que de l'empire directement. Toutes ces aliénations, contraires même aux droitures du pays, tenoient au grand projet de former dans l'Helvétie un patrimoine à un des ducs, fils d'Albert. L'exemple & les fuccès des pre'miers cantons Suiffes, ligués pour défendre leurs privileges contre cette ufurpation ambitieufe, ne fervit qu'à rendre les ducs plus attentifs à affermir leur autorité fur les nouveaux fujets, qui n'avoient pas la force de réfifter féparément. Le peuple de Glaris eut la mortification de voir fes ufages, fes immunités & les formes de fa police intérieure fucceffivement changées ou abolies. Ses maîtres jugeant de fes difpofitions en oppreffeurs, mettoient en temps de guerre des troupes en quartier dans le pays, pour en impofer aux habitans. Bientôt les confédérés, triomphans de leurs agreffeurs, furent en état de brifer les fers de leurs voifins. Le peuple de Schweiz entra en 1351 à main armée dans le pays de Glaris, y rétablit l'ancienne forme de l'adminiftration publique & les droits du peuple, & fe fit de ces voifins affranchis des alliés reconnoiffans & utiles. Cette premiere alliance des Glaronois avec les cantons renfermoit des conditions inégales; ils ne pouvoient ni s'allier, ni entrer en guerre, fans l'aveu des

confédérés. Par les fervices rendus à la ligue, ils mériterent qu'en 1450, cette inégalité fût enlevée; pour en effacer même la trace & pour donner à la prérogative nouvelle une force rétroactive, le fecond traité fut mis fous la date du premier.

Le peuple de Glaris commençoit à jouir de fa liberté fous la protection de fes alliés, lorfqu'en 1388, la nobleffe du parti Autrichien, alors en guerre avec les cantons, fit une irruption dans le pays, avec des forces qui devoient paroître fuffifantes pour l'opprimer fans retour. Les ennemis après avoir, avec l'aide des habitans de Wefen, furpris cette petite ville, fituée à l'extrémité inférieure du lac de Wallenftat, & maffacré la garnifon, forcerent les lignes qui défendoient l'entrée du pays, & fe répandirent comme un torrent dans tout le vallon, pour en faire le pillage. Cependant 350 hommes de Glaris, & une trentaine de leurs voifins de Schwitz, foutinrent dans un pofte avantageux, plufieurs attaques réitérées; après un combat de cinq heures, ils mirent les affaillans en déroute & en firent un grand carnage dans la pourfuite. L'anniverfaire de cette victoire fe célébre encore aujourd'hui le 8 du mois d'Avril; il paroît affez dur qu'au bout de quatre fiecles on oblige des députés de Wefen d'être préfens à cette folemnité, pour entendre répéter le reproche public de la trahison, dont leurs ancêtres s'étoient rendus coupables.

Depuis cette époque le canton de Glaris s'eft racheté des diverfes fujétions & redevances envers l'abbaye de Sekinguen. Glaris eft le dernier en rang des huit anciens cantons Suiffes, qui pendant environ cent trente ans formoient feuls le corps Helvétique. La part qu'il eut aux expéditions militaires, & aux conquêtes de fes confédérés, lui a valu le même droit dans la régence des petits gouvernemens fujets ou des bailliages communs. Voyez l'article SUISSE. Avec cela cette république a d'autres fujets pour fon propre compte; elle poffede feule le comté de Werdenberg, & en commun avec le canton de Schwitz, le petit pays d'Uznach & Gaster; tous ces bailliages font fitués à l'orient & au midi du Tokenbourg.

Dès l'année 1523 la religion réformée s'introduifit dans le pays de Glaris. La guerre de religion entre les cantons Suiffes en 1531, dont l'iffue fut fatale au parti des réformés, empêcha, peut-être, que la réformation ne devînt générale dans ce pays. On fixa par divers traités fubféquens, les droits des deux églifes & l'ordre de chaque culte. Les deux partis ne fe féparerent & ne fe cantonnerent pas comme dans le pays d'Apenzell; mais la part de chaque parti dans le gouvernement, & les offices publics a été déterminée.

Ce gouvernement eft démocratique ou populaire. Tout citoyen d'une des quinze communes ou divifions du pays, ayant atteint l'âge de 16 ans, a droit d'affifter à l'affemblée du peuple, qui hors les cas extraordinaires ne fe tient qu'une fois l'année au mois de Mai, dans le chef lieu de Glaris; fur une place ouverte. C'est à cette convocation générale, appellée

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