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voit une « nouvelle intrigue de ces lâches conspirateurs qui depuis plusieurs mois s'efforcent d'égorger la liberté avec le poignard de la calomnie. »>

Séance du 9 juillet. - Le ministre de l'intérieur propose à la Convention de prendre occasion de l'enthousiasme avec lequel tous les départements acceptent la constitution, pour amnistier les administrateurs rebelles qui abjureraient leurs erreurs et se rallieraient à la majorité de la nation qui veut la république une et indivisible. Robespierre demande qu'il ne soit donné aucune suite à cette proposition: « Loin de nous des idées de faiblesse au moment où la liberté triomphe, et où la république commence à s'asseoir. >>

Séance du 13 juillet. - Robespierre donne lecture à la Convention de l'ouvrage posthume de Michel Lepelletier sur l'éducation, afin de prouver, dit-il, « que les implacables ennemis des rois que la tyrannie peint si farouches et si sanguinaires ne sont que les plus tendres amis de l'humanité. »

Séance du 24 juillet. - Le Comité de constitution propose le mode d'exécution du décret qui ordonne la déportation des prêtres réfractaires à la Guyane. A cette occasion Danton est d'avis qu'on pourrait ce contenter de les expulser du territoire, avec défense d'y rentrer sous peine de mort. Lacroix propose de les tenir jusqu'à la paix enfermés dans des chateaux forts. Robespierre repousse ces adoucissements: « La Convention nationale a rendu un décret sage pour éloigner du sol français la peste contagieuse des prêtres fanatiques; et c'est aujourd'hui qu'on lui propose de la rapprocher de nous ! »>

Séance du 2 août. Il prend la parole pour appuyer la mise en accusation de Carra. Le grand crime de Carra que développe Robespierre était d'avoir en 1792 conçu l'idée de placer sur le trône français un prince d'Angleterre. On lui reprochait aussi un article où il aurait fait l'éloge de

Brunswick. Carra interrompt Robespierre pour expliquer cet article qui est faussement interprété. « Ce n'est point aux conspirateurs, dit Robespierre, à interrompre le défenseur de la liberté. (Vifs applaudissements.) » Robespierre continue son accusation qu'il termine par l'apostrophe suivante: « Carra, vas devant ce tribunal redoutable aux assassins de leur pays (le tribunal révolutionnaire,) vas sophistiquer, vas commenter, vas mentir avec impudence; et nous, citoyens, il en est temps encore, sauvons la patrie (Vifs applaudissements.) Guyomard et Pons de Verdun demandent vainement que Carra soit entendu. -« Le décret d'accusation est assez justifié, » dit Robespierre; et la mise en accusation est décrétée par la Convention.

Séance du 8 août. La veuve Marat vient à la barre de la Convention, demander justice « des attentats nouveaux contre la mémoire du plus intrépide et du plus outragé des défenseurs du peuple; « elle dénonce en particulier la spéculation mercenaire de Jacques Roux et de Leclerc, qui trompent le peuple, en prétendant continuer la publication du journal de Marat. - Robespierre appuie cette pétition : « La mémoire de Marat doit être défendue par la Convention et par tous les patriotes. >>

Séance du 12 août. Robespierre réclame des mesures énergiques de salut public: « Nous avons trop facilement cru que le génie du peuple suffisait pour rompre les entraves de la trahison. Nous avons été trop indulgents envers les traîtres... Comment déjouer les conspirateurs, s'ils sont sûrs de l'impunité, et s'il faut des mois entiers pour prononcer leur condamnation? Que la tête de Custine tombant sous le glaive de la loi soit le garant de la victoire! Que le glaive de la loi planant avec une rapidité terrible sur la tête des conspirateurs, frappe de terreur leurs complices! Que le peuple lève enfin sa tête triomphante, et les tyrans ne seront plus! Il faut donc stimuler le zèle du tribunal révolutionnaire; il faut lui ordonner de juger les cou

pables qui lui sont dénoncés vingt-quatre heures après la remise des preuves; il faut plus, c'est de multiplier son action... Que ces grands exemples anéantissent les séditions par la terreur qu'ils inspireront à tous les ennemis de la patrie '. >>

1. Ce discours de Robespierre, tel qu'il est reproduit au Moniteur, n'est qu'un écho affaibli des discours qu'il prononça aux Jacobins vers la même époque et notamment les 11 et 25 août. « Il faut, disait-il dans la séance du 11 août, il faut que le peuple, ranimant son énergie au souvenir de Lacédémone et d'Athènes, jure de s'ensevelir sous les ruines de la république, si elle courait le danger d'être anéantie. Si le peuple entier ne se ranime à l'aspect de nos malheurs; si un citoyen ne se lève pas parmi nous, ne sort pas des rangs pour se consacrer au salut de la patrie par la chute de ses oppresseurs, c'en est fait de la liberté, elle ne survivra pas à notre courage. Il faut aussi que les journalistes, qui sont évidemment les complices de Londres et de Berlin; ces hommes stipendiés par nos ennemis, qui cachent l'art d'épouvanter le peuple sous l'air de soigner ses intérèts avec plus de zèle; qui trouvent le moyen, par de prétendues vérités, de porter dans son sein, la défiance, la terreur et la consternation; il faut, dis-je, que ces hommes soient punis: il faut qu'on les enchaîne. Qu'ils le soient aussi, ces conspirateurs qui voient avec une horrible satisfaction arriver le moment où le peuple, obligé de se répandre sur une grande surface, leur permettra de se réunir et de conspirer ouvertement! Que pas un d'eux n'échappe, et si les patriotes doivent marcher tous, que les aristocrates soient tenus dans les chaînes. Il est une classe d'hommes d'autant plus dangereuse, qu'ils sollicitent la pitié. Il faut enfermer cette foule de gens qui parcourent les rues de la ville, offrant partout l'image de la famine, de l'indigence et de l'aristocratie; car ces hommes sont payés pour séduire le peuple et le rendre dupe de sa crédulité et de sa compassion. » Dans un discours du 25 août il dénonce particulièrement les lenteurs perfides et calculées du tribunal révolutionnaire, « les formes avocatoires dont il s'est entortillé. » « Il ne faut pas qu'un tribunal établi pour faire marcher la révolution la fasse rétrograder par sa lenteur criminelle; il faut qu'il soit actif autant que le crime; il faut qu'il soit toujours au niveau des délits. Il faut que ce tribunal soit composé de dix per

Séance du 13 août. Il appuie le plan de Lepelletier, qui joint à l'instruction, l'éducation républicaine, et qui charge la République non-seulement d'instruire mais à la fois de nourrir les enfants des citoyens pauvres.

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création d'une commission chargée de surveiller le pouvoir exécutif dans l'exécution des lois. - Robespierre repousse vivement cette proposition: « Citoyens, je dois le dire avec franchise, ce n'est pas d'aujourd'hui que je m'aperçois qu'il existe un système perfide de paralyser le Comité de salut public en paraissant l'aider dans ses travaux, et qu'on cherche à avilir le pouvoir exécutif, afin qu'on puisse dire qu'il n'y a plus en France d'autorité capable de manier les rênes du gouvernement. »>

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Séance du 17 septembre. Par un décret du 9 septembre la Convention avait décidé qu'il n'y aurait désormais dans les sections de Paris que deux séances par semaine et avait alloué aux citoyens indigents une indemnité de 40 sous par séance. Varlet, à la tête d'une députation des commissaires des sections de Paris, vint protester à la barre de la Convention contre ce décret. Il rappelait que la Convention elle-même, dans un autre temps, avait reconnu qu'on ne pouvait supprimer la permanence des sections, sans attenter aux droits du peuple souverain. Mais il protestait surtout contre l'indemnité de 40 sous, qui rétablit une ligne de

sonnes qui s'occupent seulement à rechercher le délit et à appliquer la peine; il est inutile d'accumuler des jurés et des juges, puisqu'il n'existe qu'une seule sorte de délit à ce tribunal, celui de haute trahison, et qu'il n'y a qu'une seule peine, qui est la mort; il est ridicule que des hommes soient occupés à chercher la peine qu'il faut appliquer à tel délit, puisqu'il n'en est qu'une, et qu'elle est applicable ipso facto.

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démarcation entre les citoyens. « Ah! vous avez bien peu connu cette classe estimable du peuple, elle rejette vos offres, elle veut rester dans ses sections citoyens volontaires... Ce décret déshonore le peuple de Paris, et le voue au mépris et à l'indignation de tous les peuples libres. » Robespierre s'élève avec beaucoup de vivacité contre les pétitionnaires; il dit que le peuple n'a pas dicté cette pétition, qu'il a accueilli avec reconnaissance au contraire le décret de l'Assemblée. « C'est pour anéantir les droits du peuple que quelques intrigants ont l'air de réclamer pour lui une étendue illimitée. » La permanence des sections n'a d'autre effet que de les livrer aux riches, aux intrigants, aux muscadins. Ce n'étaient pas les citoyens vivant du produit de leur travail, qui pouvaient sacrifier leur temps pour assister aux assemblées '. Quant à l'indemnité, l'assimilant à celle qui est accordée aux représentants du peuple, il prétend qu'elle est au contraire honorable, et que c'est l'aristocratie seule qui peut s'élever contre elle. Il demande l'ordre du jour sur la pétition « au nom de l'honorable indigence, de la vertu laborieuse, et des droits sacrés de l'homme. >>

Séance du 25 septembre. Il se plaint de l'opposition dont le Comité de salut public est l'objet dans le sein de la Convention: « Il n'y a que la plus extrême ignorance ou la plus profonde perversité qui puisse prétendre que, dans de pareilles circonstances, on ne soit pas un ennemi de la pa

1. Il faut observer que Robespierre en d'autres circonstances s'était prononcé d'une manière toute différente sur la permanence des sections, et avait défendu les mêmes arguments mis en avant par les pétitionnaires. Il s'était opposé à la dissolution des sections, réclamée par Barère au nom du Comité du salut public, après le 31 mai, et c'était à propos d'une opinion semblable, émise à l'Assemblée constituante, que Mirabeau lui avait reproché. de prendre l'exaltation des principes pour le sublime des principes.

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