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SUR

LA PHYSIQUE,

SUR L'HISTOIRE NATURELLE

ET SUR LES ARTS,

AVEC DES PLANCHES EN TAILLE-DOUCE;
DÉDIÉES

A M. CHARLES-PHILIPPE BOURBON;
PAR M. l'Abbé ROZIER, de plufieurs Académies; par
M. J. A. MONGEZ le jeune, Chanoine Régulier de Sainte
Geneviève, des Académies Royales des Sciences de Rouen
de Dijon, de Lyon, &c. & par JEAN-CLAUDE DELA-
MÉTHERIE, Dodeur en Médecine, de l'Académie des Sciences.
Arts & Belles-Lettres de Dijon, de l'Académie des Sciences
de Mayence, de la Société des Curieux de la Nature de Berlin
de la Société des Sciences Phyfiques de Laufanne, de la Société
Royale de Médecine d'Edimbourg, de la Société pour l'encou
ragement des Arts à Londres, &c.

JUILLET 1791.

TOME XXXIX.

A PARIS,

AU BUREAU du Journal de Physique, rue & hôtel Serpente.
Et fe trouve

A LONDRES, chez JOSEPH DE BOFFE, Libraire, Gerard-Street, N°. 7, foho.

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DU COMMANDEUR DÉODAT DE DOLOMIEU, A M. PICOT DE LA PEYROUSE,

Membre de plufieurs Académies & Président du Diftria de Toulouse: Sur un genre de Pierres calcaires très-peu effervescentes avec les Acides, & phosphorefcentes par la collifion..

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DEPUIS EPUIS long-tems, mon excellent ami, j'avois reconnu que l'effervefcence avec les acides n'étoit pas toujours un caractère effentiel des pierres calcaires, quoique cette propriété foit indiquée par tous les

naturalistes comme le figne le plus certain auquel on peut reconnoître ce genre de pierres. J'avois obfervé que plufieurs pierres de cette nature fe laifloient attaquer par les acides, fans produire ce grand dégagement d'air qui occafionne l'effervefcence. J'avois vu leur diflolution le faire paifiblement, & s'achever complettement, quoiqu'elle ne fût accompagnée que de quelques grotles bulles d'air qui s'élevoient lentement du fond du menftrue où je les avois plongés, pour venir éclater à leur furface. Souvent il m'étoit arrivé de répandre des acides fur la furface de quelques pierres, qui me paroiffoient calcaires par tous les autres caractères extérieurs, fans produire l'effervefcence à laquelle je m'attendois; & plufieurs minutes fe pafloient avant de voir paroître le très-petit mouvement d'ébullition qui m'annonçoit l'action de l'acide: j'aurois toujours douté que la pierre fut entièrement calcaire, j'aurois cru qu'une très-petite quantité de terre de cette nature s'étoit combinée avec d'autres terres, fans perdre l'acide aérien qui lui appartient, fi je n'avois pas employé d'autres épreuves pour mieux conftater fon genre. Il y a plus de cinq ans que j'ai placé de ces pierres calcaires peu effervefcentes dans le cabinet de Florence, pour les faire connoître aux naturalistes, qui vifitent cette fuperbe collection.

J'ai trouvé enfuite parmi les monumens de l'ancienne Rome un beau marbre blanc, d'un riffu écailleux, plus dur, plus pefant, un peu plus opaque que les autres marbres ftatuaires, & qui mieux qu'eux avoit réfifté aux différentes caufes de dégradation, qui nous ont privés des plus beaux monumens des arts. Ce marbre dont il exifte beaucoup de ftatues, fur-tour de ftatues coloffales (ce qui prouve que fes bancs avoient une très-grande épaiffeur), eft nommé par les artiftes, marmo græco duro ; cette dernière épithère lui étant donnée pour le diftinguer des autres marbres grecs, plus tendres que lui, mais qui ont la plupart la même contexture écailleufe, ou de gros grains d'une apparence faline. Je vis encore avec étonnement que cette pierre réfiftoit à l'action des acides les plus actifs; je n'y produifois aucune effervefcence dans les premiers momens de l'épreuve que je faifois, & j'attendois plusieurs minutes avant de voir paroître quelques légères indicarions de l'action du diffolvant. J'eus recours à la calcination pour conftater fa nature, & je te réduifis en chaux avec à-peu-près la même facilité que la pierre calcaire ordinaire. J'obtins auffi une diffolution complette dans les acides qui d'abord avoient paru avoir fi peu de prife fur lui, mais j'observai que le dégagement d'air étoit très-inférieur à celui que produir la diffolution des autres marbres, & fans être à portée d'y faire des expériences directes, que je renvoyai à un autre tems, je jugeai que la quantité d'air qui fe développoit, n'équivaloit pas au tiers de celui que donnent les autres pierres calcaires. Cette fingularité trouvant beaucoup d'incrédules, je répétai plusieurs fois ces mêmes effais, & je me fis un plaifir de fournir

des échantillons de ce beau marbre à beaucoup de naturalistes, à qui j'ai eu occafion d'en parler.

Enfin, il y a dix-huit mois, faifant des courfes minéralogiques dans les montagnes du Tyrol avec M. Fleuriau de Bellevue, qui unit à beaucoup de connoiffances un très-grand zèle pour l'Hiftoire-Naturelle, je trouvai une quantité immenfe de ces mêmes pierres calcaires, qui ne font point la fubite effervefcence dans l'effai avec les acides. Quoique cette particularité ne fût plus nouvelle pour moi, je craignis cependant que par quelques accidens, mes acides n'euffent perdu toute leur activité, lorfque j'en répandois fur des pierres qui toutes me paroiffoient calcaires, fans produire le mouvement d'ébullition auquel je m'attendois, quoique d'ailleurs les pierres différaffent entr'elles par le grain, la couleur & la finefle de la pâte. La pulvérifation de ces pierres leva tous mes doutes, parce qu'alors j'eus une petite effervefcence & une diffolution complette. Je reconnus enfuite que ces pierres étoient employées pour faire de très-bonne chaux, & qu'à cet égard, elles ne différoient en rien des autres pierres calcaires de cette même province. La chaux en eft aufli vive, auffi active, fe diffout également dans l'eau, & lorfqu'elle fe combine de nouveau avec l'air, elle fait la même effervefcence que les pierres calcaires ordinaires.

Lorfque je fis cette obfervation, j'étois au milieu des montagnes primitives & entouré de granits, de porphyres & autres roches compofées, ou en grandes maffes ou foffiles; je crus donc que ce genre de pierres calcaires appartenoit particulièrement aux montagnes de cette espèce, en voyant les bancs, qui en font formés, s'élever du centre de ces matières de l'ancien monde, s'entremêler avec elles, dans une pofition verticale, ou peu inclinée: mais en revenant en Italie, je trouvai que les pierres des montagnes calcaires, qui fuccèdent à celles de porphyre, entre Bolfano & Trente, avoient cette même particularité, quoiqu'elles foient en bancs horifontaux & que j'y rencontraffe quelques empreintes de coquillages. La feule différence que je reconnus pour lors entre ces` pierres d'une formation moderne, & celles d'une époque bien plus reculée, confiftoit dans le grain & le tiffu. Celles des hautes montagnes ont la pâte fine & la demi-transparence qui caractérisent les marbres: celles des montagnes fecondaires à couches horifontales, ne diffèrent point des pierres calcaires ordinaires, elles ont le grain fin & la caffure conchoïde, mais elles ne font point fufceptibles du luftre & de l'éclat qui diftinguent les marbres. Elles font blanchâtres, elles ont de nombreufes cavités garnies de criftallifations en petits rhombes, lefquels ont le luifant & la petite convexité des furfaces qui indiquent le fpath perlé, & comme lui fe diffolvent lentement & fans ébullition. En m'éloignant davantage des montagnes primitives, & en approchant de Trente, je vis reparoître les pierres calcaires avec leurs caractères ordinaires, & mes acides agiffant

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