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en bon état, ou, en cas de vente, le prix et légitime valeur, laquelle sera constatée par experts en la forme de droit, ensemble les 9,000 piastres fortes qui lui restaient dues pour le payement du fret dudit navire, et dont le versement a été ordonné dans la caisse publique de la colonie, par le jugement du tribunal de Cayenne du 11 prairial an VII.

TRIBUNAL DE CASSATION. -4 pluviôse an VII.

Lorsque la cargaison d'un navire ennemi est composée mi-partie de marchandises ennemies, mi-partie de marchandises neutres, les premières doivent être confisquées et les secondes relâchées.

LE NORDEL-FALK contre LA REVANCHE.

Le TRIBUNAL (après délibération en la Chambre du conseil),—Attendu qu'il résulte de l'acte d'affrétement du navire dont il s'agit, du 8 janvier 1797, que Polleri est négociant de Lisbonne, ce qui a dû le faire considérer comme ennemi ; d'où il suit que les marchandises chargées par son ordre et pour son compte ont dû être confisquées, et qu'à son égard, les juges dont le jugement est attaqué ne sont point contrevenus aux règlements ni aux lois de la matière, REJETTE la demande en cassation de Polleri;

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Mais, en ce qui touche les autres parties de la cargaison, vu l'article 2 du règlement du 26 juillet 1778; Attendu qu'il conste des différents connaissements joints au procès que lesdites parties de la cargaison étaient expédiées pour compte de négociants suisses et génevois, et qu'elles formaient conséquemment une propriété neutre qui ne devait point être enveloppée dans la confiscation générale de la cargaison du navire le Nordel-Falk; D'où il suit que le jugement attaqué est contrevenu, sous ce rapport, à l'article du règlement précité; Par ces motifs, faisant droit sur le pourvoi des autres intéressés à la cargaison du navire dont s'agit, CASSE et annule le jugement du tribunal civil du département des Bouches-du-Rhône, du 8 floréal an VI.

JURISPRUDENCE ÉTRANGÈRE.

COUR D'AMIRAUTÉ D'ANGLETERRE. · 15 août 1854.

Les neutres intéressés dans un armement ennemi ne peuvent réclamer leurs parts de propriété dans le navire ennemi capturé.

L'INDUSTRIE et LE JOHN.

Le navire sous pavillon russe l'Industrie a été pris par les croiseurs britanniques de la Baltique.

Une réclamation s'est produite au nom de MM. Schroger et Ce, de Riga, pour les trois quarts du navire et de la marchandise; elle a été rejetée. Une autre réclamation, pour le dernier quart, a été faite au nom du capitaine, sujet danois, qui invoquait sa qualité de neutre.

L'avocat de la reine combat cette réclamation en disant que, puisque le navire voyageait sous pavillon russe, il devait être considéré comme prise russe, et que la réclamation du capitaine, comme celle des autres copropriétaires, ne saurait être admise.

Le docteur Adams soutient la revendication du capitaine, qui ne saurait, dit-il, tomber sous l'application des règles générales. Il comprend qu'on les invoque quand la confiscation doit être prononcée, mais il n'en saurait être de même quand il y a lieu à restitution. Ici, il s'agit d'un neutre propriétaire d'un quart de navire, et propriétaire de bonne foi antérieurement à la déclaration de guerre, qui n'a pas volontairement pris le pavillon russe, mais qui n'a pu s'opposer à ce qu'on l'arborât, comme l'ont voulu ses trois copropriétaires. Ordonner la confiscation du quart de propriété réclamé parce qu'il était placé sous pavillon russe, ce serait une application du summum jus en dehors des idées de notre âge.

Le président, M. Lushington, déclare qu'il est d'avis que, bien que la cargaison soit divisible, et que la part qui appartient à des neutres doive être restituée, tandis que la part qui appartient à des neutres doive être confisquée, cependant, d'après l'opinion de lord Stowels et d'autres, le même principe ne saurait être appliqué au navire lui-même. Qu'arriverait-il des droits des belligérants, si l'on portait atteinte à leur faculté de rechercher les navires sous pavillon ennemi, et si, sous prétexte de neutralité, on pouvait les revendiquer? Le commerce tout entier de l'ennemi se ferait ainsi avec une complète impunité, et les forces navales réunies de la France et de l'Angleterre ne pourraient jamais exercer les droits qui leur sont reconnus par l'assentiment de toutes les nations. La confiscation totale du navire est ordonnée. Même décision pour le navire le John.

CHAPITRE II.

DES PROPRIÉTÉS NEUTRES.

SECTION IT..

De la liberté de naviguer et de commercer des neutres.

Arrêté du 2 prairial. ART. 53. Les navires et les marchandises neutres peuvent être de bonne prise.

Règlement du 26 juillet 1778. — ART. 1er. Les neutres peuvent fréquenter les ports ennemis. Les navires neutres peuvent transporter les marchanLe pavillon couvre la cargaison.

dises ennemies.

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Arrêté du 2 prairial.

ART. 53. Seront encore de bonne prise, soit les bâtiments, soit leurs chargements en tout ou partie, dont la neutralité ne serait pas justifiée conformément aux règlements ou traités.

Le règlement relatif aux neutres, qui est encore en vigueur, est celui du 26 juillet 1778. C'est à lui que se réfère principalement l'article 53 de notre arrêté de prairial. Nous allons en étudier les divers articles, et nous y verrons les cas où les propriétés neutres peuvent être déclarées de bonne prise.

T. 1.

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Règlement du 26 juillet 1778. ART. 1er. Fait défenses Sa Majesté à tous armateurs d'arrêter et de conduire dans les ports du royaume les navires des puissances neutres, quand même ils sortiraient des ports ennemis, ou qu'ils y seraient destinés...... Se réservant, au surplus, Sa Majesté, de révoquer la liberté portée au présent article, si les puissances ennemies n'accordent pas le réciproque dans le délai de six mois, à compter du jour de la publication du présent règlement 1.

La guerre n'a jamais lieu entre toutes les puissances. A côté des puissances belligérantes, il y a les nations qui n'ont aucun intérêt dans la lutte engagée. En droit, ces nations neutres ne devraient jamais souffrir de la guerre dans laquelle elles ne sont pas parties; malheureusement, en fait, il arrive qu'elles en souffrent souvent. Et on comprend que, lors même que les belligérants ne commettent à l'égard des neutres ni abus ni excès, il n'est pas possible qu'une guerre existe dans le monde sans que les intérêts de toutes les nations n'en soient plus ou moins lésés. Les nations neutres doivent souffrir le moins possible de l'état de guerre; aussi une des obligations les plus importantes imposées par le droit des gens aux États belligérants, c'est de nuire le moins que faire se peut aux intérêts des neutres. Les circonstances exceptionnelles dans lesquelles se trouvent les belligérants ont pour résultat de mettre souvent leurs droits et leurs intérêts en opposition avec ceux des neutres. Dans ce choc et dans cette opposition de droits différents, il faut que les uns cèdent aux autres; il faut que certaines restrictions soient apportées aux droits absolus dont les belligérants et les neutres pourraient se prévaloir chacun de leur côté. Mais quelles sont ces restrictions? Quel est le point sur lequel le

1 Cet article est très-long; il traite trois questions différentes: 1° celle de la navigation neutre; 2o celle du blocus; 3° celle de la contrebande de guerre. Pour mettre de l'ordre et de la clarté dans notre travail, nous avons cru devoir le diviser en trois parties, et en faire le sujet de trois sections. On trouvera ci-après les portions relatives au blocus et à la contrebande de guerre.

droit des belligérants doit céder à celui des neutres, et réciproquement? Quelles sont les limites qu'il faut donner à ces concessions? Toutes ces questions renferment des difficultés infinies, qui jusqu'ici n'avaient jamais été résolues à la satisfaction des puissances belligérantes et des puissances

neutres.

Pour bien apprécier les droits des neutres, il faut d'abord se rendre bien compte de ce que c'est que la neutralité. Toutes les définitions de la neutralité qui ont été données jusqu'à présent ont été plus ou moins critiquées. Nous n'en essayerons pas une nouvelle; nous nous contenterons de rapporter deux des plus récentes, celle de Galliani et celle d'Azuni, en faisant remarquer que la dernière nous paraît la plus exacte. Galliani dit : « La neutralité est l'état d'un prince qui, se trouvant en situation de repos, d'amitié ou d'alliance avec d'autres princes qui étaient en paix entre eux, continue à rester dans le même état à leur égard, quoiqu'ils soient en rupture, ou que la guerre soit allumée entre eux. » La définition d'Azuni est ainsi conçue : « La neutralité est la continuation exacte de l'état pacifique d'une puissance qui, lorsqu'il s'allume une guerre entre deux ou plusieurs nations, s'abstient absolument de prendre aucune part à leurs contestations. » (Azuni, t. II, chap. 1, art. 2.)

Pour que le bénéfice de la neutralité soit acquis aux puissances souveraines qui ne veulent point prendre part à la guerre, est-il nécessaire que ces puissances déclarent et notifient officiellement leur neutralité? Non. Il suffit qu'elles restent dans l'état pacifique, car il n'est pas besoin de notifier sa persistance dans un état existant, on ne notifie que les changements. Cependant il est quelquefois prudent pour une nation de déclarer qu'elle entend rester neutre ; ce peut être un moyen d'éviter des difficultés ultérieures. Dans la guerre actuelle, nous avons vu la Suède et le Danemark déclarer qu'elles entendaient rester neutres entre les puissances occidentales et la Russie, et faire notifier, par la voie diplomatique, cette déclaration à toutes les puissances de l'Europe et de l'Amérique. Le droit des gens et les précé

dents historiques n'obligeaient pas les puissances scandinaves à agir ainsi; mais elles ont voulu que leurs intentions ne pussent pas être douteuses, et que leur position fût nettement déterminée.

Les nations qui veulent rester neutres doivent garder l'impartialité la plus complète entre les belligérants. Si, par des traités conclus pendant la paix, une nation a accordé à l'un des belligérants certains avantages, il faut qu'au moment où la guerre éclate, elle étende les mêmes avantages à l'autre belligérant, ou bien qu'elle les retire à celui qui les a obtenus. Galliani a pensé qu'il y avait deux sortes de neutralité : l'une, qui consiste à faire aux deux belligérants les mêmes concessions, et l'autre, à leur refuser les mêmes choses. Il a appelé la première la neutralité d'impartiale concession; et la seconde, neutralité d'impartial refus.

Quand les neutres sont liés à l'un des belligérants par des traités de commerce, ils embrassent presque toujours le système de l'impartiale concession. En effet, le système de l'impartial refus est très-dangereux pour les neutres, puisqu'il les oblige à rompre leurs relations commerciales par la dénonciation des traités qu'ils ont avec l'un des belligérants. Et puis, si une nation neutre adoptait le système de l'impartial refus, il pourrait arriver que d'autres embrassassent celui de l'impartiale concession, et attirassent ainsi à elles tout le commerce, au détriment de la première. C'est pour cela que les États neutres, au lieu de dénoncer les traités de commerce qu'ils ont conclus avec l'un des belligérants, aiment mieux les étendre à l'autre belligérant.

Le commerce des neutres avec les belligérants peut se faire de deux manières : par navires neutres, ou par navires belligérants. (Nous avons parlé de ce dernier cas dans le chapitre précédent.) Si les neutres transportent des marchandises neutres sur des navires neutres, les nations en guerre doivent respecter leur liberté. Mais il peut se faire que les navires neutres soient chargés de marchandises appartenant à l'ennemi des croiseurs qui les rencontrent. Comment alors doit-on traiter ces navires neutres? Sur cette

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