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Plusieurs membres : La discussion fermée! (L'Assemblée ferme la discussion.)

Un membre: Avant de délibérer sur la motion principale, je demande à l'Assemblée de décréter qu'il sera fait un fonds de dégrèvement par un sol additionnel du capital de l'imposition.

Plusieurs membres : La question préalable!

(L'Assemblée décrète qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur cette proposition. Elle décrète, ensuite, que le maximum de la contribution foncière sera porté pour l'année 1792, du sixième au cinquième du revenu net.)

(La séance est levée à quatre heures et demie.)

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« L'Assemblée nationale, après avoir entendu son comité de l'extraordinaire des finances sur les considérations présentées par le commissaire du roi, administrateur de la caisse de l'extraordinaire, et après avoir rendu le décret d'urgence, considérant la nécessité de faire une exception en faveur du département de la Corse, relativement aux formalités auxquelles les lois des 28 juillet et 8 octobre 1791, ont subordonné le payement des frais d'estimation, de vente et d'administration des biens nationaux, à raison de la position de ce département;

« Décrète que, sur l'ordonnance du commissaire administrateur de la caisse de l'extraordinaire, le trésorier de ladite caisse adressera, sans délai et directement, aux receveurs des

(1) Bibliothèque nationale, Assemblée législative, Domaines nationaux, T.

(2) Voy. Archives parlementaires, 1 série, t. XLIV, séance du 22 mai 1792, au soir, p. 2, la lettre des administrateurs du departement de la Corse.

districts du département de la Corse, une somme de 18,000 livres, pour servir à acquitter, en tout ou en partie, les frais d'estimation, vente et administration des biens nationaux faits dans cette île: et néanmoins les directoires des districts de la Corse se conformeront dans le délai de deux mois à toutes les formalités prescrites par les lois des 28 juillet et 8 octobre 1791, pour la formation et l'envoi des états desdits frais. »

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(L'Assemblée adopte le décret d'urgence, puis le décret définitif.)

M. Lambert (de Lauterbourg), au nom du comité de l'ordinaire des finances, fait un rapport (1) et présente un projet de décret (1) sur la franchise et le contre-seing des lettres par la poste, et sur le mode de l'exécution du décret du 6 juin; il s'exprime ainsi :

Messieurs, vous avez sagement ordonné par le décret que vous avez rendu le 6 juin dernier (2), que le contre-seing et la franchise des lettres seraient supprimés à l'avenir, excepté pour l'Assemblée nationale, les administrations publiques et les fonctionnaires publics actuellement en activité, et qui en ont joui jusqu'à présent.

De tous les abus de l'ancien régime, celui du contre-seing et des franchises semblait avoir seul affronté le regard sévère du réformateur. Enhardi d'avoir résisté jusqu'à présent à toutes les réclamations et aux cris qui s'étaient élevés de toutes parts contre lui, if paraissait vouloir se perpétuer dans le nouvel ordre de choses, et y contraster par tous les moyens absurdes qui, dans l'ancien, rendaient son existence si scandaleuse.

En vain, depuis nombre d'années, les fermiers et régisseurs des postes se plaignaient des charges dont ils étaient grevés, des préjudices qu'ils éprouvaient par l'excessif abus qui se faisait du contre-seing et de la franchise; en vain la voix du public, les raisons d'économie, les principes d'ordre et de justice s'élevaient-ils de concert avec les plaintes et les réclamations des fermiers des postes, contre ces mêmes abus jamais il n'a été possible de les atteindre. Le service public ne permettait point l'abolition entière du droit de franchise et de contre-seing; et la foule de personnes intéressées à la conservation des abus dont il était mêlé, s'opposaient avec opiniâtreté à des suppressions partielles dont on pouvait se promettre un effet salutaire.

On avait bien inventé quelques moyens pour les réprimer; mais on n'est jamais venu à la racine du mal, et les abus ne faisaient que changer de forme, pour se reproduire avec les mêmes excès, avec le même scandale. Dans les bureaux des princes et des ministres, on avait diminué le nombre des cachets, et numéroté ceux dont on continuait à se servir. Dans différents services, il était ordonné que les paquets et lettres en franchise seraient sujets à une bande croisée, afin d'empêcher les incluses et les papiers étrangers au service. Les cachets numérotés portaient, à la vérité, un peu plus d'ordre dans l'usage du contre-seing, mais ne remédiaient que faiblement aux abus; l'exécution des bandes dont on avait ordonné une dimension qui devait empêcher et rendre impos

(1) Bibliothèque nationale: Assemblée législative, Contributions publiques, no 21.

(1) Voy. Archives parlementaires, 1r série, t. XLIV, séance du 6 juin 1792, page 662, le décret rendu ce sujet.

sibles les contre-bandes, ne fut pas suivie; et les bandes qu'on employait, et dont il était impossible de vérifier chaque fois la dimension prescrite dans les bureaux des postes, renfermaient tout aussi bien qu'une enveloppe, les incluses et les papiers qu'on voulait y mettre en fraude.

La première et la principale cause des abus introduits par le contre-seing et la franchise des lettres, était dans le nombre considérable des personnes auxquelles on avait accordé ce double droit, et dans la multiplicité des cachets que chacune des mêmes personnes s'était fait faire, et qui n'étaient pas toujours confiés à des mains bien sévères, bien difficiles sur leur emploi. Il en arrivait que le droit du contre-seing et de franchise était déjà trop grand, non seulement pour le nombre des personnes auxquelles le gouvernement l'avait accordé, mais encore par l'extension qu'elles y donnaient, en en faisant jouir leurs connaissances, leurs bureaux et leurs domestiques.

L'unique, le seul remède efficace contre tant d'abus, celui précisément que l'on n'avait osé tenter dans l'ancien régime, est la réduction au moindre nombre possible, des personnes qui jouissent ou du contre-seing, ou de la franchise, ou de l'un et de l'autre à la fois. Tout autre moyen est insuffisant et inutile, parce qu'il est impossible de séparer ces droits, des contraventions et des fraudes auxquelles ils donnent lieu.

Un moyen secondaire et non moins efficace est l'usage d'une griffe au lieu du contre-seing à la main, et que tant le contre-seing que la suscription ne puissent être désormais qu'au nom du service et non des personnes, au nom collectif des administrations, et jamais au nom individuel des membres qui les composent.

A l'aide de ces mesures, il reste à déterminer d'une manière précise, fixe et invariable, quelles seront les personnes ou les corps qui jouiront du droit de franchise et de contre-seing. Vous avez décrété, Messieurs, que ce ne seraient que les fonctionnaires publics et les administrations publiques actuellement en activité, qui en ont joui jusqu'à présent.

Pour porter plus de précision encore dans la désignation des personnes et administrations qui seront dans le cas de jouir du droit de contreseing et de franchise, votre comité a pensé qu'il fallait établir le principe d'après lequel il pourra, il devra être accordé.

Les relations journalières et multipliées auxquelles sont obligés les principaux agents du gouvernement pour diriger dans ses moindres divisions toutes les parties de l'administration publique, pour entretenir le mouvement des plus petits, ressorts de la grande machine politique, occasionnent nécessairement des frais que l'on ne peut ni calculer ni prévoir, qui ne peuvent être ni à la charge des principaux fonctionnaires, ni à celle de leurs employés ou sous-agents. La nation doit donc faciliter aux uns et aux autres tous les moyens de communication pour les intérêts de la chose publique. Elle doit leur tenir compte des frais de leur correspondance, soit en ordonnant le remboursement des ports de lettres qu'elle les aura obligés d'acquitter, soit en les exemptant d'en payer. Vous avez, Messieurs, décrété cette dernière proposition, et il n'est plus permis à votre comité d'en discuter d'autre. Si, dans la recherche d'un mode convenable d'exécution de votre décret du 6 juin dernier, il s'est arrêté á examiner les différentes manières

d'exempter le service public des frais de ses relations, c'est dans le dessein seulement de trouver parmi les principes qui leur ont servi de base, celui qui présenterait une règle certaine et fixe dans l'application du droit de contre-seing et de franchise, celui enfin qui, rigoureusement suivi, remplirait le but désiré à l'égard du service public, et écarterait les abus auxquels inclinent toujours les particuliers.

Une règle constante, invariable, et propre à tous les modes de franchise, qui ne peut jamais égarer dans l'application des cas particuliers, est que la nation ne veut, ne peut se faire payer les services qu'on lui rend, les dépenses que l'on supporte pour elle, et qu'il serait souverainement déraisonnable que le Trésor public prît en recette ce qu'aussitôt après il rendrait en dépense.

Le droit de franchise et de contre-seing ne peut, ne doit être ni un privilège honorifique, ni un droit utile à tel ou tel autre individu, ni un émolument d'emploi, ni un bénéfice de personne, ni une jouissance de pur agrément. Dans tous les cas où il n'aurait point l'utilité publique pour objet, mais des considérations purement personnelles et privées, il doit être sévèrement refusé.

Tous ceux qui sont proposés en chef à faire exécuter les lois dans le royaume, à maintenir l'ordre public au dedans, à veiller à ce qu'on n'y porte aucune atteinte au dehors; tous ceux qui ont une partie principale de l'administration de la dette où du revenu public à diriger; tous ceux qui ont une correspondance étendue à entretenir, dont l'objet est l'utilité et l'intérêt public, doivent recevoir leurs lettres en franchise, et avoir la faculté de les expédier de même à leurs sous-agents et autres personnes avec lesquelles ils seraient en relation pour l'objet de leur service.

Votre comité, en examinant l'état des personnes qui jouissent du contre-seing et des franchises de lettres, qui vous a été envoyé par le ministre des contributions publiques, s'est dirigé d'après ces principes pour vous former un nouvel état de personnes et administrations publiques qui, en conformité du décret du 6 juin, doivent conserver le droit de recevoir et d'expédier leurs lettres en franchise. Il a soigneusement évité de donner une trop grande extension au droit de contre-seing et de franchise par toutes ces permissions et sous-permissions en usage jusqu'à présent; sources de cette multitude de fraudes, de contraventions et d'abus qui provoquent aujourd'hui votre sévérité.

Vous avez décrété que l'Assemblée nationale jouirait du droit de franchise et de contre-seing; et la manière dont elle doit en jouir a été réglée par la loi du 12 octobre 1790, rendue par l'Assemblée constituante. Mais sur les plaintes qui vous ont été portées dernièrement, sur la dénonciation qui vous a été faite de papiers contrerévolutionnaires ou d'écrits incendiaires et séditieux envoyés et propagés sous le contre-seing de l'Assemblée nationale et sous le cachet de ses comités, vous avez désiré des mesures d'ordre dans l'usage du contre-seing, plus propres à reprimer des abus si audacieux, et contraires à la fois à l'intérêt et à la tranquillité publics.

Plusieurs moyens vous ont été proposés dans la séance même où cette dénonciation vous est parvenue votre comité, auquel vous avez renvoyé le tout, les a recueillis et examinés avec la plus sérieuse attention. Les uns avaient proposé

que chaque député fùt tenu de contresigner de son nom et à la main les lettres qu'il remettrait au contreseing, et que la suscríption fut toujours écrite de sa main; d'autres, que les députés se serviraient d'un cachet sur lequel leurs noms seraient gravés en toutes lettres, pour les lettres qu'ils porteraient au bureau du contreseing. Ces mesures, qui avaient paru bien trouvées et bien plausibles aux uns, furent rejetées par les autres avec précipitation: ces derniers croyaient y voir un piège tendu à la foi publique; ils craignaient, en signant leur nom au bas d'une adresse, de se désigner à la curiosité malveillante, et de provoquer la violation du secret de leurs lettres.

Le comité, également éloigné des soupçons farouches qui demandent la proscription de cette mesure avec tant d'ardeur, et de la facile confiance qui l'accueille avec trop de légèreté, y a trouvé un remède insuffisant aux inconvénients que vous voulez éviter. En effet, le contreseing à la main du nom des députés, ne diminue en rien les abus qu'on en fait; vous en avez la preuve sous vos yeux dans cette manière de contresigner jusqu'ici, en usage chez les ministres et autres fonctionnaires publics, que le directoire des postes vous propose de supprimer, et de faire remplacer par une griffe. Je ne ferai pas ici l'énumération des abus auquel le contreseing à la main donne lieu; il me suffit d'observer que puisqu'on a trouvé nécessaire de le changer pour les fonctionnaires publics, il ne serait guère possible de le conserver pour les députés à l'Assemblée nationale. La malveillance, toujours prête à nous juger avec défaveur, on chercherait les motifs dans une ridicule vanité, plutôt que dans la volonté pure et sincère et dans le louable dessein de remédier à des inconvénients.

L'usage du cachet avec le nom des députés en toutes lettres doit être proscrit ou rejeté par les mêmes raisons.

Mais les députés doivent être sévèrement tenus d'écrire de leurs mains la suscription de leurs lettres; et afin que cette suscription de la main propre de chaque député ne devienne point vaine et illusoire par l'impossibilité de connaitre les écritures de 745 personnes, les députés pourraient être obligés de cacheter les lettres qu'ils veulent faire recevoir au bureau du contreseing avec un cachet portant le nom ou simplement Je numéro de leur département respectif. Cette mesure, bien qu'insuffisante pour remédier aux abus dont on se plaint, offre quelques inconvénients de moins que toutes les autres que l'on vous a proposées? Elle doit rassurer la méfiance des uns, elle ne peut point être interprétée à vanité par les autres. Elle diminuera surtout la facilité qu'ont des personnes étrangères à l'Assemblée nationale, de faire passer leurs lettres sous son contre-seing.

Quant aux lettres expédiées par les comités, un seul commis doit être autorisé à écrire les suscriptions de celles portées au contreseing, afin que l'on sache trouver, lorsqu'il se commet un abus au nom d'un comité, la personne sur laquelle on pourra exercer une utile responsabilité.

Les administrateurs des postes se plaignent plus particulièrement des abus de la franchise dont jouit l'Assemblée nationale, et ils croient avoir observé que depuis que vous avez ôté la franchise à cette foule de personnes qui s'étaient trouvées sur l'état qu'ils vous ont dénoncé, les

lettres, sous le couvert de l'Assemblée nationale, ont considérablement augmenté.

C'est en vain qu'on se tourmenterait à rechercher un moyen de parer à ces inconvénients: il n'en est de bien efficace que dans une résolution ferme et inflexible de la part de tous les députés de ne pas se prêter par une coupable complaisance à des abus qui, quelque légers qu'ils puissent paraître, sont toujours grands et très préjudiciables à l'intérêt de la chose publique, lorsqu'ils se commettent au nom de ceux qui doivent donner l'exemple de l'observance la plus sévère des lois qu'ils ont dictées; abus qui d'ailleurs pourraient se répéter autant de fois qu'il y a de députés à l'Assemblée nationale, et se multiplier à l'infini.

On avait proposé de supprimer la franchise des lettres adressées aux députations en noms collectifs, et de ne la laisser subsister que pour les lettres envoyées sous le couvert du président; mais en considérant la nombreuse correspondance des députés à l'Assemblée nationale avec leurs départements respectifs, que l'on ne saurait gêner ou restreindre sans le plus grand préjudice pour les affaires publiques, avant que le nouvel ordre de choses ait reçu son complément; en examinant ensuite les entraves et la confusion auxquelles seraient assujetties les lettres des députations lorsqu'elles devraient parvenir sous le seul couvert du président; instruit d'ailleurs que la plupart des abus dont on se plaint, se commettent précisément par les volumineux paquets renfermant des objets étrangers de diverses natures, que l'on fait passer sous l'enveloppe du président; votre comité n'a pas cru pouvoir adopter cette mesure, et il s'en est tenu à ce qui a été statué à cet égard par l'Assemblée constituante.

Il n'est en effet d'autre bonne et efficace mesure contre les abus, soit du contreseing, soit de la franchise, qui peuvent se commettre à l'Assemblée nationale, que celle décrétée par l'Assemblée constituante. Si elle n'a pas eu tout son effet, c'est parce qu'elle a été mal exécutée; et c'est en vain qu'on voudrait proposer des lois nouvelles, tant que les anciennes faites à ce sujet ne seront point exactement suivies. De leur scrupuleuse observation de la part des députés, de leur pleine et entière exécution de la part des commis des comités, d'une plus grande surveillance de la part des préposés au bureau des contreseings et des renvois, dépend seul le succès des mesures qu'on aura prises. Je le dis, Messieurs, avec confiance (et c'est une vérité qui doit être profondément sentie par le législateur) lorsque nous ordonnons avec une rigoureuse justice des réformes dont l'exécution impose des privations, nous ne devons pas être plus indulgents envers nous-mêmes qu'envers les autres. Si les premiers nous enseignons la manière d'éluder les lois que nous aurons faites, et que nous souffrions qu'elles soient transgressées dans nos bureaux même, comment exiger qu'elles soient observées et respectées au dehors, et par les autres citoyens? Il faut avec courage sortir du cercle des abus; et parvenus à nous en affranchir, il ne nous est pas permis de faire revivre en notre faveur les iniques avantages dont nous aurons dépouillé les autres.

Le roi et ses ministres doivent nécessairement jouir du droit de franchise et de contre-seing; chargés d'une exécution importante et étendue: ils sont le point central auquel aboutissent toutes les relations civiles et militaires du royaume:

et il ne serait ni raisonnable ni juste de soumettre à une taxe les dépêches nombreuses qu'ils reçoivent et expédient.

Le roi n'est point personnellement dans l'usage de contresigner les lettres qu'il est dans le cas d'envoyer, mais il reçoit en franchise, celles qui lui sont adressées. En restreignant, conformément au principe que vous avez décrété, à la personne seule du monarque le droit de franchise, il doit subsister peu des abus nombreux qui se commettaient à la cour, et dont le roi lui-même avait, par de sages réformes, considérablement diminué le nombre.

Les ministres, chacun dans son département, exercent le droit de contreseing et de franchise. Leurs premiers commis jouissaient également du droit de franchise; et tous les employés de leurs bureaux contresignaient indistinctement. Pour remédier aux abus sans nombre qui ont été la suite de cette facilité de passer et de recevoir en franchise les lettres dans les bureaux des ministres, vous jugerez sans doute qu'il est nécessaire que les premiers commis ne jouissent plus de la franchise, et que le contreseing se fasse au moyen d'une griffe, confiée à une seule personne responsable de l'usage qu'elle en fera. Dans l'ancien régime, les ministres et secrétaires d'Etat retirés, continuaient à contresigner pendant plusieurs mois après leur retraite, et ils conservaient pour toujours la franchise de leurs lettres. Cet usage était purement de faveur, et il ne saurait trouver place dans le nouvel ordre de choses; les ministres doivent cesser de contresigner du jour de leur retraite, et ils ne doivent jouir que pendant un mois ou six semaines au plus après leur retraite, de la franchise de leurs lettres. Vous avez été étonnés, Messieurs, de la longue liste des personnes retirées du service, jouissant encore de la franchise, quelqu'unes même du contreseing: vous en trouvez la cause dans ces concessions abusives. Le moyen d'empêcher le retour de semblables abus, c'est de limiter la faculté de recevoir les lettres en franchise au temps seulement, qu'un fonctionnaire public retiré peut être présumé recevoir encore des lettres relatives à son service, sous des rapports qui lui sont particuliers au delà de ce terme, il ne doit y avoir ni privilège ni faveur pour la correspondance qui lui est personnelle.

:

Les administrations publiques, dirigées par des commissaires du roi. et qui sont dans des relations immédiates, fréquentes et journalières, avec les administrations de département, ou avec les grands établissements publics et nationaux qui sont sous leurs ordres ou sous leur surveillance, tels que les commissaires du roi à la trésorerie nationale, à la comptabilité, à la caisse de l'extraordinaire, à la liquidation et aux monnaies, jouissent du droit de franchise et de contreseing il est indispensable pour l'utilité du service dont sont chargées ces différentes administrations, que cette faculté leur soit conservée; mais celles qui sont composées de plusieurs membres, ne doivent en jouir que collectivement.

La nouvelle commission des assignats réclame les mêmes avantages: vous connaissez, Messieurs, la nature de son service; et vous jugerez ce que vous devez lui accorder.

Le directoire des postes doit être rangé dans cette même catégorie : chargé de la direction générale et du service de la poste aux lettres, et de celui des relais, sa correspondance ne peut

être, en aucune manière, gênée par l'assujettissement de la taxe.

Les administrateurs et employés de la ferme générale des messageries jouissaient jusqu'à présent de la franchise du port des lettres qu'ils recevaient par la poste. Cet avantage leur avait été accordé en compensation du transport gratuit dans les voitures de cette ferme, des employés des postes, des ballots de feuilles d'avis et autres objets relatifs au service des postes.

Ces fermiers demandent la continuation de cette franchise outre les raisons tirées de la corrélation de ces deux services, ils se fondent sur la loi qui a déterminé le bail des messageries; ils prétendent que cette loi ayant ratifié toutes les clauses auxquelles elle ne dérogeait pas, que d'ailleurs l'avantage des fermiers étant calculé dans le prix du bail, et en faisant une condition implicite, les nouveaux fermiers doivent continuer de jouir de la franchise de leurs lettres par la poste. La correspondance des fermiers des messageries ayant un objet d'utilité publique, puisqu'elle roule sur des réclamations relativement au service des messageries, ces fermiers, sans être de la classe des fonctionnaires publics, lesquels votre loi du 6 juin excepte de la suppression du droit de franchise et de contreseing, doivent continuer à jouir de la franchise, ainsi qu'ils en ont joui jusqu'à présent. Il n'en est pas de même à l'égard de la franchise accordée aux fermiers de la navigation de la haute et basse Seine, comme sous-fermiers de la ferme des messageries. Ce droit, n'étant fondé ni sur une loi ni sur l'utilité publique, doit être supprimé.

Les préposés et employés des postes reçoivent, franc de port, les lettres simples qui leur sont adressées. Ces employés sont dans le cas de recevoir souvent des réclamations ou des avis concernant leur service, dont il ne serait pas juste de leur faire supporter le port. Si d'ailleurs cette franchise pouvait être considérée comme un émolument, ce serait encore le cas de l'accorder, sans qu'il en résultât de grands inconvénients; car les gages des préposés des postes, qui consistaient presque tous en privilèges, se réduisent aujourd'hui à rien, ou sont, pour la plupart, on ne peut plus modiques. Et comment leur ôter un si léger avantage, dont il serait si difficile d'empêcher qu'ils ne jouissent?

Le président et le vice-président de la chambre de commerce, le président de l'administration des eaux et forêts, l'ingénieur et vice-président de l'administration des ponts et chaussées jouissent du droit de franchise; mais, comme ces diverses fonctions ne sont que des sections ou des conseils des administrations des ministres de l'intérieur et des contributions publiques, il est inutile de leur accorder une franchise directe et particulière: ils peuvent recevoir les lettres qui leur sont adressées, sous l'enveloppe du ministre dont ils sont les coopérateurs.

La correspondance du bibliothécaire national et celle de l'archiviste doivent aussi jouir de la franchise. Vous le savez, Messieurs, les fonctions du premier ne sont pas seulement de mettre en ordre un grand nombre de volumes; son devoir est encore d'enrichir par ses recherches le dépôt des sciences et des arts, qui lui est confié. Les représentants d'un peuple qui doit sa liberté à ses lumières, regarderont sans doute comme une obligation sacrée celle d'en favoriser le développement par tous les moyens qui seront en leur pouvoir.

L'archiviste de la nation remplit aussi une mission importante et publique. Le fruit de ses travaux appartient à tous. Gardien des premiers monuments de notre liberté, il ne doit rencontrer aucun obstacle dans son administration.

Votre comité vous proposera de donner au bibliothécaire le couvert du ministre de l'intérieur, et à l'archiviste, celui de votre président. Les administrations de département contresignent dans l'étendue de leur ressort les lettres et paquets qu'elles adressent aux administrations de district et aux puissances chargées, sous leurs ordres, des fonctions publiques, M. Necker, premier ministre des finances, avait introduit ce mode de correspondance par une lettre écrite au directoire des postes le 19 juillet 1790. Ce règlement assujettit à une double bande contresignée du procureur général syndic, ou du secrétaire général, les lettres et paquets que les administrations voudront faire passer en franchise dans l'étendue de leur département. Ces dispositions provisoires ont paru très sages à votre comité, et il vous propose de les adopter en définitif; mais il ajoute la mesure de la griffe, qui ne devra être confiée qu'à un seul homme responsable de l'emploi qu'il en fera. Quant à la franchise des lettres et paquets adressés à ces mêmes administrations en nom collectif, ils doivent continuer à passer en franchise dans les bureaux des postes de leur arrondissement, toutes les fois qu'ils seront sous bande, ainsi qu'il est prescrit dans le règlement du 16 juillet 1790.

Le service des payeurs généraux des déparments parait exiger que ces fonctionnaires reçoivent franc de port les lettres qui leur seront adressées, et que celles qu'ils adressent aux autres jouissent également de la franchise. Votre comité vous propose de les faire jouir de l'une et de l'autre de ces facultés, sous le contreseing et le couvert des administrations de département. Mais une autre question vous est soumise les payeurs généraux de département pourront-ils, sous contre-seing des directoires, envoyer des sommes en assignats, en remplissant toutefois les formes prescrites pour le chargement des lettres?

:

Le directoire des postes a été d'avis que les payeurs généraux pourraient donner cours par la poste aux assignats destinés pour le service, en remettant au directeur des postes de leur résidence un certificat à l'effet de justifier du contenu de ces paquets, revêtus d'un cachet sur chaque pli de l'enveloppe, portant sur la suscription ces mots service du payeur général du département..... Cependant le directoire prétend que le chargement de ces paquets, en cas de perte, ne doit point entrainer la responsabilité et l'indemnité accordée par la loi pour les chargements opérés avec l'acquittement du double port. Mais par cette raison seule, les paquets chargés d'assignats portés aux bureaux des postes par les payeurs généraux, ne doivent y être reçus en franchise qu'autant que ces payeurs voudraient courir les risques de la perte en leur propre et privé nom; ce qu'on ne peut ni présumer ni exiger.

Les ingénieurs et employés des ponts et chaussées, sont dans l'usage de correspondre entre eux pour les objets relatifs à leur service, par la voie des administrations de département, en se servant de leur couvert et contre-seing. Cet usage, qui s'est introduit sous le régime des intendants de province, est, à quelques égards, légitimé par l'utilité publique; maís, en multi

pliant trop ces sortes de franchises indirectes, il pourrait en naître d'autres abus tout aussi préjudiciables pour l'intérêt de la nation, que ceux qui se commettent par la franchise directe. Le comité a balancé le degré d'utilité dont la correspondance des ingénieurs des ponts et chaussées est pour la chose publique, avec les préjudices qu'elle peut lui porter par l'abus des franchises sous l'enveloppe des administrations. Il est convaincu que la franchise accordée à cette correspondance était inutile et abusive, et il n'a trouvé aucune difficulté à ce que vous le fissiez cesser dès-à-présent, hors les cas où les administrateurs jugeraient nécessaire de faire passer par la poste et sous leur contre-seing, les objets relatifs au service des ponts et chaussées, qui auraient été le résultat de leurs délibérations, et qui exigeront une exécution prompte et essentielle au service public.

La question a été faite par les administrateurs des postes, si les accusateurs publics près des tribunaux de district jouiraient de la franchise des lettres qui leur seront adressées. Le comité, en examinant cette question, a penché pour la négative: et voici quels ont été ses motifs: les commissaires du roi près les tribunaux de district, ne peuvent avoir de correspondance officielle qu'avec le ministre de la justice et les juges de paix du ressort du tribunal de district. Dans le premier cas, leurs lettres leur parviennent franches de port au moyen du contre-seing du ministre; dans le second, leurs fonctions sont circonscrites à un arrondissement peu étendu. Les objets relatifs à leur service peuvent se traiter ou de vive voix, ou par des occasions toujours fréquentes, lorsqu'ils sont dans le cas d'écrire. Les lettres qui leur sont adressées par des particuliers, doivent être affranchies, ou ils pourront les refuser, ainsi qu'il a été en tout temps d'usage chez les curés, les majors des régiments et autres personnes publiques, qui étaient dans le cas de recevoir des lettres renfermant des objets étrangers à l'intérêt public, et à leur correspondance personnelle et privée. Les accusateurs publics portent en compte les ports des lettres qui leur sont adressées dans les procédures criminelles, et s'en font rembourser, après le jugement, soit par les caisses de district, soit par la partie, si elle est solvable.

Il ne reste donc aucun doute sur cette question, et il est assez prouvé que la franchise des lettres par la poste ne peut avoir lieu, ni pour les commissaires du roi près les tribunaux de district, ni pour les accusateurs publics près les tribunaux criminels.

Les généraux commandant en chef les armées de France, les généraux commandant en chef les divisions militaires, jouissent du droit de contre-seing et de franchise; les premiers dans toute l'étendue du royaume, les autres dans l'étendue de leur commandement. Cette faculté leur doit être conservée; elle leur a été accordée en tous les temps, et paraît être fondée sur la nécessité où sont les généraux d'entretenir des communications habituelles et fréquentes avec les commandants des troupes, et des places de leur division, et des ordres qu'ils ont à expédier pour le service militaire aux divers agents qui en sont chargés. L'approvisionnement des armées, d'autres fonctions attribuées aux commissaires généraux de l'armée, dont les détails variés et multipliés à l'infini les obligent à entretenir une correspondance très étendue, exigent qu'on ac

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